27 November 2023
Cour d'appel de Montpellier
RG n° 18/00645

3e chambre sociale

Texte de la décision

Grosse + copie

délivrée le

à



COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre sociale



ARRET DU 27 NOVEMBRE 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/00645 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NQXN



ARRET n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 JANVIER 2018

TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE D'AUDE

N° RG21500909



APPELANTE :



CPAM DE L'AUDE

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentant : Me TROUILLARD avocat pour Me Jean daniel CAUVIN de la SCP CAUVIN, LEYGUE, avocat au barreau de MONTPELLIER



INTIME :



Monsieur [U] [G]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : SCP GOUIRY-MARY- CALVET-BENET avocats au barreau de NARBONNE







En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.

































COMPOSITION DE LA COUR :





En application des dispositions des articles 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 OCTOBRE 2023,en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Magali VENET, Conseiller, chargé du rapport.



Ces magistrats a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller, faisant fonction de Président

Madame Magali VENET, Conseiller

M. Patrick HIDALGO, Conseiller



Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL







ARRET :



- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour ;



- signé par Monsieur Pascal MATHIS, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.






*

* *



EXPOSE DU LITIGE



M. [U] [G], salarié en qualité de rugbyman professionnel auprès du [5], a été victime d'un accident le 08 mai 2015.



Le certificat médical initial établi le 11 mai 2015 fait état d'une 'Lomboscialtalgie L5-S1 droite (en cours d'exploration)'.



L'incident a fait l'objet d'une déclaration d'accident du travail en date du 11 mai 2015 mentionnant: ' sur son lieu de travail habituel , lors d'un regroupement, le joueur avait ressenti une énorme douleur dans le dos .'.



Par courrier du 22 juillet 2015, la CPAM de l'Aude a informé M. [G] de son refus de prise en charge l'accident au titre de la législation professionnelle.





Par une lettre adressée le 03 août 2015, M. [G] a formé un recours administratif préalable à l'encontre de la décision de refus.



Par un courrier en date du 23 octobre 2015, la commission de recours amiable a confirmé la décision de la CPAM de l'Aude.



Par courrier réceptionné le 23 décembre 2015, M. [U] [G] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une contestation à l'encontre de la décision de rejet.



Par un jugement notifié le 16 janvier 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Aude a infirmé la décision de la CPAM et a ordonné la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle.



Par lettre reçue au greffe de la cour d'appel le 06 février 2018, la CPAM de l'Aude a interjeté appel de la décision.



La CPAM de l'Aude demande à la cour de reconnaître que le caractère professionnel de l'accident n'est pas établi et ce faisant, d'infirmer le jugement rendu en première instance.



M. [G] demande à la cour de constater la péremption de l'instance.



A titre subsidiaire, il demande à la cour de confirmer le jugement de première instance rendu le 16 janvier 2018.



Dans tous les cas, il demande à la cour de :



- Dire que l'accident dont a été victime M. [G] le 08 mai 2015 doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle par la CPAM de l'Aude.

- Condamner la CPAM de l'Aude à payer à M. [G] 3 000 € de dommages- intérêts pour résistance abusive.

- Condamner la CPAM de l'Aude à verser 2 500 € d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.






MOTIFS DE LA DÉCISION



Sur la péremption de l'instance:



La péremption d'instance, qui résulte de l'application des dispositions de l'article 386 du code de procédure civile au contentieux de la sécurité sociale seulement à hauteur d'appel, doit être écartée en l'espèce afin d'assurer l'effectivité du droit d'accès au juge, étant relevé qu'aucune diligence n'avait été mise à la charge des parties avant l'ordonnance d'injonction du 31 juillet 2023,





Sur le caractère professionnel de l'accident:



La CPAM fait valoir que la preuve du lien de causalité entre l'accident et les lésions présentées par M. [G] n'est pas rapportée en raison du délai tardif de trois jours qui s'est écoulé entre le fait accidentel et le certificat médical initial, et de l'information tardive donné à l'employeur quant à cet accident , intervenue également trois jours après les faits allégués.



M. [G] objecte que les nombreux témoignages et éléments qu'il produit établissent que les lésions présentées sont consécutives à l'accident survenu au temps et au lieu du travail.



L'article L.411-1 du code de la sécurité sociale pose en principe que tout accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail, qu'elle qu'en soit la cause, est considéré comme accident du travail, il s'agit d'une présomption d'imputabilité.



Pour être qualifié d'accident du travail, un accident doit résulter d'un événement ayant une origine soudaine et fortuite avec une date certaine, survenu dans le cadre de l'activité professionnelle (au temps et lieu du travail) et entraînant des dommages corporels ou psychiques(lésions) .



En l'espèce, M. [G] fait valoir qu'il a été victime d'un accident du travail le 8 mai 2015 lors d'un entraînement. Il précise s'être blessé et avoir ressenti une vive douleur dans le dos lors de la répétition des mêlées. Il ajoute que le vendredi 8 mai était un jour férié et que son médecin, contacté le jour même, n'a pu lui donner un rendez-vous que le lundi 11 mai, date à laquelle il a établi un certificat médical d'accident du travail et à laquelle son employeur a déclaré l'accident du travail à l'issue du week-end férié.



A l'appui de ses allégations, il verse aux débats:



- la déclaration conjointe co-signée par lui même et M. [R] [Z], entraîneur au Racing Club Méditerranée en date du 03 août 2015 ainsi rédigée:



'.... Le 8 mai 2015, dans l'après-midi, lors d'un entraînement des mêlées (phase de jeu où je suis directement impliqué au vu de mon poste de pilier gauche) j'ai ressenti une douleur vive au dos m'obligeant d'arrêter immédiatement mon travail.

L'entraîneur du RCNM, [R] [Z], qui dirige ce temps de travail était évidemment présent et a constaté l'impossibilité de continuer mon travail.

Nous avons téléphoné au médecin référent du club, Docteur [W] [I], qui ne pouvait me recevoir ce jour (le 8 mai jour férié et il ne travaillait pas), il m'a fixé donc un rdv le lundi 11 mai 2015 au matin, jour de sa reprise.

Ceci explique le fait que mon arrêt a été fait le 11 mai 2015, mais débute à la date du 8 mai 2015, jour de l'accident.

En sortant de l'hôpital, j'ai immédiatement apporté l'arrêt au bureau du RCNM. C'est pour cette raison que sur le questionnaire employeur, elle a rempli que le joueur a informé l'accident avec son AT dans la journée du 11 mai 2015. Mais, le club et l'entraîneur, témoins présents le jour de mon accident( le 8 mai) ont bien sûr constaté celui-ci le 8 mai, jour de l'accident ; d'ailleurs ils n'ont pu me mettre dans l'effectif du match se déroulera le dimanche '(alors que j'étais jusqu'à ce jour titulaire.)...'



- L' attestation de de M. [R] [Z], entraîneur au racing Club Méditerranée ainsi que celles de M. [T] [E] et [U] [K], joueurs au Club, qui témoignent que M. [G] s'est blessé lors de l'entraînement du 8 mai 2015 , pendant la répétition des mêlées et qu'il n'a pas pu continuer à s'entraîner.



- l'attestation du Docteur [W], médecin du sport, docteur du club qui certifie que:



' M. [U] [G] a bien été victime d'un accident de travail dans sa profession de rugbyman professionnel le 8 mai 2015 dans l'après-midi. Malheureusement je ne travaillais pas ce jour-là (jour férié) ni bien entendu le samedi 9 et le dimanche 10 mai. Mon premier créneau disponible pour le voir en consultation et diagnostiquer sa pathologie ne fut que le 11 mai 2015. J'ai à ce moment-là rédigé le certificat médical initial, faisant état d'une lombo sciatalgie L5S1 droite. Néanmoins, j'ai bien soin de noter que la date de l'accident était le 8 mai 2015 sur ce certificat médical initial.



- L'attestation de [M] [F], responsable comptable et finances du club qui témoigne ainsi: 'Monsieur [G] m'a apporté son AT le 11 mai 2015 par le vendredi 8 mai 2015 était férié, les bureaux de la [6] (Société Anonyme [6]) étaient fermés ainsi que tout le week-end. Je m'occupe au sein du club des AT et je n'ai donc pu faire la déclaration comme mon retour au bureau le lundi après le week-end et le jour férié.'



Ces différents éléments établissent que M. [G] a bien été victime, en présence de témoins, d'un accident du travail survenu le 8 mai 2015, jour férié, lors d'un entraînement. Ils prouvent également que l'entraîneur représentant l'employeur était présent lors des faits , mais que les services administratifs étaient fermés et que l'employeur n'a pu déclarer l'accident que le 11 mai lors de la réouverture des services administratifs après le week-end férié. M. [G] rapporte également la preuve que le médecin du Club qui était en congé les 8, 9 et 10 mai a bien établi et délivré le certificat médical initial dès la réouverture de son cabinet le 11 mai 2015.



Il apparaît ainsi que l'accident est survenu un vendredi férié, et qu'en raison de la fermeture tant des services administratifs du club que du cabinet de son médecin, sa constatation médicale ainsi que sa déclaration par l'employeur, toutes deux intervenus trois jours plus tard, soit le premier jour ouvrable suivant le week-end férié, ne peuvent être considérées comme trop tardives.



Dès lors, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que la survenance de la lésion au lieu et temps du travail est établie par M. [G] , que la présomption d'imputabilité doit s'appliquer, et que l'accident survenu le 8 mai 2015 dont a été victime M. [G] doit être pris en charge par la CPAM de l'Aude au titre de la législation professionnelle , la décision sera confirmée.



Il convient de condamner la CPAM de l'Aude, qui succombe en ses demandes, à verser à M. [U] [G] la somme de 2000 euros a titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de la procédure.



PAR CES MOTIFS



La cour,



- Rejette la demande tendant à constater la péremption de l'instance



- Confirme le jugement rendu par le tribunal des affaires de la sécurité sociale de l'Aude le 16 janvier 2018 en toutes ses dispositions.



- Y ajoutant:



- Condamne la CPAM de l'Aude à verser à M. [U] [G] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile



- Condamne la CPAM de l'Aude aux dépens de la procédure.



LE GREFFIER LE PRESIDENT

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