25 October 2023
Cour d'appel de Grenoble
RG n° 23/00132

Service des Référés

Texte de la décision

N° RG 23/00132 - N° Portalis DBVM-V-B7H-L7WL



N° Minute :































































































Copies délivrées le







Copie exécutoire

délivrée le



à

















AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



C O U R D ' A P P E L D E G R E N O B L E



JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT



ORDONNANCE DE REFERE DU 25 OCTOBRE 2023







ENTRE :



DEMANDERESSE suivant assignations des 12 et 13 octobre 2023



S.E.L.A.R.L. PHARMACIE DE L'HOTEL DE VILLE immatriculée au RCS de Romans sous le numéro 798 210 043, représentée par son dirigeant en exercice

[Adresse 8]

[Localité 9]



représentée par Me Jean-Pascal CHAZAL de la SELARL CADRA, avocat au barreau de VALENCE





ET :



DEFENDERESSES



S.E.L.A.R.L. ILIOZER immatriculée au RCS de Romans sous le numéro 522 053 206, représentée par son gérant en exercice

[Adresse 6]

[Localité 9]



non représentée



S.E.L.A.R.L. AJ PARTENAIRES immatriculée au RCS de Lyon sous le numéro 479 375 743, prise en son établissement situé [Adresse 2], représentée par son gérant Maître [K] [D], ès qualités d'administrateur judiciaire de la SELARL Pharmacie de l'Hôtel de Ville

[Adresse 1]

[Localité 7]



représentée par Me Michel DE GAUDEMARIS de la SELARL RIONDET, avocat au barreau de GRENOBLE



S.E.L.A.R.L. SBCMJ immatriculée au RCS de Cherbourg sous le numéro 504 384 504, prise en son établissement situé [Adresse 3], représentée par son gérant Maître [O] [W], ès qualités de mandataire judiciaire de la SELARL Pharmacie de l'Hôtel de Ville

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5]



représentée par Me Michel DE GAUDEMARIS de la SELARL RIONDET, avocat au barreau de GRENOBLE









DEBATS : A l'audience publique du 18 octobre 2023 tenue par Olivier CALLEC, conseiller délégué par le premier président de la cour d'appel de Grenoble par ordonnance du 13 juillet 2023, assisté de Marie-Ange BARTHALAY, greffier, en présence de Sophie CAPITAINE, greffier stagiaire





ORDONNANCE : réputée contradictoire



prononcée publiquement le 25 OCTOBRE 2023 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile



signée par Olivier CALLEC, conseiller délégué par le premier président, et par Marie-Ange BARTHALAY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






La société Pharmacie de l'hôtel de ville exploite un fonds de commerce de pharmacie dans le centre ville de [Localité 9].



En mai 2005, M. [E] a acquis cette officine au prix de 1,16 M€.



En février 2010, M. [E] a été placé en redressement judiciaire et un plan de redressement homologué par le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère en janvier 2011.



En septembre 2013, ce plan a été modifié par apport du fonds et du passif à la société Pharmacie de l'hôtel de ville, créée le 30/10/2013.



Suite à un rachat des parts de son associé, M. [F], le 13/11/2019, M. [E] est devenu l'associé unique de la société.



Le 04/10/2022, la société Pharmacie de l'hôtel de ville a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère, la Selarl AJPartenaires étant désignée en qualité d'administrateur, la Selarl SBCMJ en qualité de mandataire judiciaire.



Le 31/01/2023, le tribunal a maintenu la période d'observation et l'a renouvelée le 04/04/2023 jusqu'au 04/10/2023.



La débitrice a présenté un plan de redressement par voie d'apurement du passif prévoyant principalement le règlement sans délai des frais de justice et créances inférieures à 500 euros ainsi que de la créance superprivilégiée, sauf échéancier accordé par l'AGS et le remboursement des créances admises échues et à échoir, dont emprunts bancaires, à 100 % sur 10 ans selon les modalités suivantes, la première échéance intervenant un an après l'arrêté du plan :

- N+1 : 2 %

- N+2 : 3 %

- N+3 à N+5 : 5 %

- N + 6 : 10 %

- N+ 7 à N + 10 : 17,5 %.



Suite à l'audience du 27/09/2023, le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère a, par jugement du 03/10/2023 :

- rejeté le plan de redressement proposé

- constaté l'irrecevabilité de l'offre de cession présentée par la Selarl Iliozer

- renvoyé l'affaire au 25/10/2023, l'administrateur devant faire signifier dans les huit jours à la société débitrice sa requête en conversion de liquidation judiciaire pour examen à l'audience du 25/10/2023.





Par déclaration du 11/10/2023, la société Pharmacie de l'hôtel de ville a relevé appel de cette décision.



Par assignation des 12 et 13/10/2023, elle a assigné en référé devant le premier président de la cour d'appel de Grenoble l'administrateur judiciaire, le mandataire judiciaire et la Selarl Iliozer aux fins de voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement déféré et de voir prolonger la période d'observation jusqu'à l'arrêt à intervenir, faisant valoir en substance que :

- le plan proposé a été rejeté sans que le tribunal se prononce sur la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire alors que ces deux questions sont liées ;

- la période d'observation a été prolongée illégalement au-delà du 04/10/2023 ;

- le juge commissaire, entendu en dernier, a fait valoir des éléments nouveaux, sans qu'il ait été possible d'y répondre, ce qui constitue une violation du principe du contradictoire ;

- la quasi-totalité des créanciers a donné un avis favorable au plan ;

- elle justifie ainsi de moyens sérieux de réformation du jugement justifiant l'arrêt de l'exécution provisoire ;

- il y a lieu de faire application de l'article L. 661-9 § 2 du code de commerce, prolongeant dans ce cas la période d'observation jusqu'à arrêt de la cour.



Pour s'opposer à la demande, l'administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire répliquent pour l'essentiel que :

- le premier juge a caractérisé dans les motifs de son jugement l'impossibilité manifeste d'un redressement ;

- le renvoi à une audience ultérieure de l'examen de la conversion en liquidation judiciaire relève d'une bonne administration de la justice ;

- la loi ne prévoit aucune sanction du dépassement du délai de la période d'observation ;

- le juge commissaire n'est pas partie à l'instance et donne un simple avis, mais n'élevant aucune prétention, aucune violation du contradictoire ne peut résulter du fait qu'il prenne la parole sans que le débiteur puisse y répondre ;

- compte tenu de la très forte progressivité du montant des échéances du plan, sa non-adoption n'est pas de nature à nuire aux intérêts des créanciers.



La Selarl Iliozer n'a pas comparu.






MOTIFS DE LA DECISION



Aux termes de l'article R. 661-1 du code de commerce 'les jugements et ordonnances rendus en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire sont exécutoires de plein droit à titre provisoire. (..) Les dispositions des articles 514-1 et 514-2 du code de procédure civile ne sont pas applicables. Par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire des décisions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux. L'exécution provisoire des décisions prises sur le fondement de l'article L. 663-1-1 peut être arrêtée, en outre, lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives'.



En l'espèce :

- le premier juge a caractérisé de façon précise l'impossibilité de redressement, par un résultat déficitaire de la période d'observation, des prévisionnels peu fiables et très optimistes, des déficits anciens et pérennes, un montant du passif élevé (1 457 387 euros) ;

- le fait de procéder en deux temps (examen du plan, puis examen de la liquidation judiciaire) n'est pas interdit par la loi et n'est pas contraire aux intérêts du débiteur, les droits de la défense étant préservés, la société Pharmacie de l'hôtel de ville se voyant allouer un temps supplémentaire pour répondre à la requête en conversion ;

- aucune sanction n'est attachée au non-respect de la période d'observation, d'autant que cette prolongation n'est pas contraire aux intérêts de la débitrice.



Ces moyens ne sont donc pas suffisamment sérieux pour pouvoir entraîner la réformation de la décision attaquée.



En revanche, concernant l'audition du juge commissaire intervenant après celle des parties, il sera relevé que :

- le juge commissaire est un organe de la procédure et à ce titre, le tribunal ne peut statuer, en vertu de l'article R. 662-12 du code de commerce, sans son rapport, écrit ou oral ;

- avant le 01/07/2014, le juge commissaire ne pouvait prendre position dans son rapport, se devant d'être impartial, et il siégeait dans la formation du tribunal ; mais depuis l'ordonnance du 12/03/2014, il lui est interdit désormais de le faire, ce qui lui ouvre la possibilité de donner un véritable avis sur l'issue de la procédure ;

- ce rapport peut être oral, et donc connu seulement à l'audience et le juge commissaire, de par sa connaissance du déroulement de la procédure, peut désormais, au lieu de se contenter d'un pur rapport factuel, donner sa vision de la solution à rechercher ;

- son avis est ainsi susceptible d'être pris en considération par la formation de jugement, et d'avoir une influence sur la décision ;

- en conséquence, pour respecter le principe de la contradiction, le juge commissaire doit nécessairement être entendu avant les parties ou en tout état de cause, celles-ci doivent être mises en mesure d'y répondre, soit oralement à l'audience, soit par l'autorisation d'une note en délibéré.



En l'occurrence, il est constant que les parties n'ont pu reprendre la parole après le rapport oral du juge commissaire et que la débitrice n'a pas été autorisée à produire une note en délibéré en réponse à l'avis du juge commissaire.



Le jugement est ainsi susceptible d'être annulé.



En conséquence, la requérante justifie d'un moyen sérieux à l'appui de son appel, qui conduit à faire droit à sa demande d'arrêt d'exécution provisoire du jugement critiqué.



PAR CES MOTIFS :



Nous, Olivier Callec, conseiller délégué par le premier président, statuant en référé, publiquement, par ordonnance réputée contradictoire, mise à disposition au greffe :



Arrêtons l'exécution provisoire attachée au jugement du 03/10/2023 du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère ;



Disons en conséquence que la période d'observation est prolongée jusqu'à l'arrêt de la cour d'appel statuant au fond ;



Disons que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.





Le greffier Le conseiller délégué







M.A. BARTHALAY O. CALLEC

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