21 September 2023
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 20/04007

Chambre 1-5

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊTAVANT DIRE DROIT

(Expertise)

DU 21 SEPTEMBRE 2023

ap

N° 2023/ 311













Rôle N° RG 20/04007 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFYIQ







S.C.I. CBC





C/



[O] [T] épouse [Z]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Mélissa CLINE





SCP DAYDE - PLANTARD - ROCHAS & VIRY







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 13 Avril 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 11-17-0007.





APPELANTE



S.C.I. CBC dont le siège social est [Adresse 12], pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège



représentée par Me Mélissa CLINE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant





INTIMEE



Madame [O] [T] épouse [Z]

demeurant [Adresse 14]



représentée par Me Maxime PLANTARD de la SCP DAYDE - PLANTARD - ROCHAS & VIRY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE











*-*-*-*-*





COMPOSITION DE LA COUR



L'affaire a été débattue le 20 Juin 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Aude PONCET, Vice Président placé , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :



Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Aude PONCET, Vice Président placé



qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Septembre 2023.





ARRÊT



Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Septembre 2023,



Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


***





































































Par acte de vente en date du 14 décembre 2011, la SCI CBC a acquis une parcelle cadastrée section D [Cadastre 3], [Cadastre 5], [Cadastre 15] [Adresse 18] à [Localité 17].



Mme [O] [T] épouse [Z] est propriétaire de parcelles mitoyennes de celles de la SCI CBC cadastrées section D [Cadastre 4], [Cadastre 9] et [Cadastre 6].



Par ordonnance de référé en date du 9 juillet 2013, le président du tribunal de grande instance d'Aix en Provence a ordonné une expertise judiciaire afin de rechercher si la parcelle D [Cadastre 4] dispose d'une issue sur la voie publique, constater en cas d'enclave de la parcelle D [Cadastre 4] l'ensemble des parcelles qui pourraient être concernées par l'assiette d'une servitude à créer, pour déterminer l'assiette du passage, de chiffrer le coût de l'établissement d'un accès à la voie publique sur les parcelles de Mme [Z], de dresser un plan des lieux sur lesquels figureront les limites de propriété avec les diverses solutions de passage.



L'expert a déposé son rapport le 30 mai 2015.



Par acte d'huissier en date du 12 juin 2017, la SCI CBC a assigné Mme [O] [T] épouse [Z] devant le tribunal d'instance d'Aix en Provence aux fins de bornage des propriétés appartenant à la SCI CBC (parcelles D[Cadastre 3], [Cadastre 5], [Cadastre 15]) et la propriété de Mme [Z] (D [Cadastre 4], [Cadastre 9] et [Cadastre 11]), de dire que la terrasse litigieuse appartient à la parcelle D [Cadastre 3] et qu'elle est la propriété de la SCI CBC et de condamnation de Mme [O] [T] épouse [Z] à lui payer la somme de 1500€ pour frais irrépétibles et sa condamnation aux dépens.



Par jugement en date du 13 avril 2018, le tribunal d'instance d'Aix en Provence a notamment:

- dit que la limite séparatrice de la parcelle D [Cadastre 3] appartenant à la SCI CBC avec la parcelle D [Cadastre 11] appartenant à Mme [O] [T] épouse [Z] est située sur la base de leurs titres de propriétés respectifs repris dans le plan P1 de l'expert judiciaire dans son rapport du 30 avril 2015,

- ordonné l'implantation des bornes par M. [W] [V], expert judiciaire entre les parcelles D [Cadastre 3] appartenant à la SCI CBC et D[Cadastre 11] appartenant à Mme [O] [T] épouse [Z] suivant le plan P1 de l'expert judiciaire M. [W] [V] dans son rapport du 30 avril 2015,

- débouté la SCI CBC de sa demande visant à dire que la terrasse litigieuse appartient à la parcelle D[Cadastre 3],

- reçu la demande reconventionnelle de Mme [O] [T] épouse [Z] en établissement d'une servitude à la charge de la SCI CBC mais l'a débouté comme étant non fondée.



Le premier juge a considéré que la SCI CBC ne justifiait pas d'une possession continue et de bonne foi qui lui aurait permis de bénéficier de la prescription acquisitive de 10 ans. Il a estimé que la parcelle D115 de Mme [O] [T] épouse [Z] était bien enclavée mais que rien ne permettait de dire que la servitude de passage devait nécessairement passer sur la parcelle D[Cadastre 3] alors que d'autres parcelles auraient permis la création d'une telle servitude.



Par déclaration en date du 16 mars 2020, la SCI CBC a interjeté appel de ce jugement devant la cour d'appel d'aix en provence.



Dans ses dernières écritures déposées et notifiées par RPVA le 19 avril 2022, la SCI CBC demande à la cour de, au visa des articles 682, 683, 684, 692, 705, 2261 et 2272 du code civil:



- réformer le jugement rendu le 23 avril 2018 par le tribunal d'instance en ce qu'il a :

* dit que la limite séparatrice de la parcelle D [Cadastre 3] appartenant à la SCI CBC avec la parcelle D[Cadastre 7] appartenant à Mme [T] [Z] est située sur la base de leurs titres de propriété repsectifs repris dans le plan P1 de l'expert judiciaire dans son rapport du 30 avril 2015,













* ordonné l'implantation des bornes par M. [W] [V], expert judiciaire, entre les parcelles D[Cadastre 3] appartenant à la SCI CBC et D [Cadastre 11] appartenant à Mme [O] [T] [Z] suivant le plan P1 de l'expert dans son rapport du 30 avril 2015 et débouté l'appelante de sa demande de bornage de la totalité de la limite commune,

* débouté la SCI CBC de sa demande d'expertise et de prise de connaissance de tous documents utiles à son information, à charge d'en indiquer les sources, d'entendre tout sachant, de décrire avec précision la consistance, le lieu d'implantation de la terrasse au bénéfice de la SCI CBC,

* débouté la SCI CBC de sa demande visant à dire que la terrasse litigieuse appartient à la parcelle D [Cadastre 3],



En conséquence,

- dire et juger que la terrasse litigieuse est rattachée à la parcelle D [Cadastre 3], propriété de la SCI CBC,

- ordonner une expertise et désigner M. [V] expert judiciaire pour étudier et analyser les documents et l'évolution cadastrale et délimiter les limites de propriété de la terrasse litigieuse,

- ordonner l'implantation des bornes par M. [W] [V] expert judiciaire entre les parcelles D [Cadastre 3] appartenant à la SCI CBC et D [Cadastre 11] appartenant à Mme [O] [T] épouse [Z] en fonction du nouveau rapport qu'il aura établi,

- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté Mme [T] de sa demande de servitude,

- débouter Mme [T] [Z] de sa demande de servitude légale et conventionnelle sur la parcelle D [Cadastre 3] appartenant à la SCI CBC,

- débouter Mme [T] [Z] de sa demande de dépose des deux portails ainsi que de l'ensemble des dispositifs obstruant le passage de la parcelle D [Cadastre 11] à la parcelle D [Cadastre 4] par la parcelle D [Cadastre 3] sous astreinte de 800€ par jour de retard à compter de la signification du jugement,

- condamner Mme [T] [Z] à payer à la SCI CBC la somme de 5000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Me Mélissa CLINE.



Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :

- sur le plan des opérations de rénovation du plan cadastral de la commune de [Localité 17] élaboré dans les années 30, la terrasse litigieuse était sans équivoque rattachée à la parcelle D [Cadastre 3], ce qui n'apparait plus comme tel dans le plan cadastral mis à jour en 1985 et ce sans explication juridique puisqu'aucune cession n'est intervenue, cette erreur ayant été finalement rectifiée sur les plans cadastraux du 15 juin 2021 qui permettent de nouveau de constater que la terrasse est sur la parcelle D [Cadastre 3], ses propriétaires l'ayant d'ailleurs toujours utilisé,

- il appartient à Mme [O] [T] épouse [Z] de faire la preuve du contraire,

- la bonne foi du possesseur n'est pas une condition requise au titre de la prescription acquisitive trentenaire,



Dans ses dernières écritures déposées et notifiées par RPVA le 24 avril 2020, Mme [O] [T] épouse [Z] demande à la cour, au visa des articles 682, 683, 684 et 692 du code civil de :



- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté la SCI CBC de sa demande visant à dire que la terrasse litigieuse appartient à la parcelle D [Cadastre 3],

- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a ordonné l'implantation de bornes par M. [W] [V], suivant le plan P1 de l'expert judiciaire,

- réformer le jugement querellé en ce qu'il a débouté Mme [T] épouse [Z] en établissement de sa servitude,

- réformer le jugement querellé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et ordonné le partage des dépens par moitié.



En conséquence,

- débouter la SCI CBC de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- juger que Mme [T] épouse [Z] dispose d'une servitude de passage légale sur la parcelle n°[Cadastre 3], et ce sous astreinte de 800 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,







- condamner la SCI CBC à payer à Mme [T] la somme de 5000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.



À l'appui de ses demandes, elle fait valoir que :

- l'acte de vente de la parcelle D [Cadastre 3] prévoit expressément que la terrasse litigieuse ne fait pas partie de la vente, même si sa jouissance n'a jamais été contestée, ce qu'a confirmé l'expert judiciaire dans son rapport,

- la prescription acquisitive ne saurait produire d'effet dans la mesure où la SCI CBC n'utilise pas la terrasse litigieuse, et que, lorsqu'elle a tenté de se l'accaparer, Mme [O] [T] épouse [Z] a défendu son droit de propriété, la SCI CBC ayant été condamné en raison de cette occupation illégale,

- la SCI CBC a formé appel du bornage qu'elle a pourtant sollicité,

- la partie haute du fond de Mme [Z] est enclavée de sorte que cette dernière bénéficie donc d'une servitude de passage légale,

- le trajet revendiqué par Mme [Z], s'il n'est pas le plus court, est le moins dommageable, les autres trajets proposés nécessitant la réalisation de travaux conséquents ou n'étant légalement pas envisageables,

- elle dispose en tout état de cause d'une servitude conventionnelle puisque la servitude revendiquée est utilisée depuis 1870 et que lorsque la propriété a été divisé en deux parcelles n°[Cadastre 3] et [Cadastre 2] (devenue [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 11]), l'acte de donation prévoyait des servitudes communes de passage.



La procédure a fait l'objet d'une clôture par ordonnance en date du 6 juin 2023.






MOTIFS





Sur la demande de bornage



L'article 646 du Code civil dispose que tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës. Le bornage se fait à frais communs.



Aux termes de l'article 232 du code de procédure civile, le juge peut commettre toute personne de son choix pour l'éclairer par des constatations, par une consultation ou par une expertise sur une question de fait qui requiert les lumières d'un technicien.



En l'espèce, il apparait que M. [W] [V], expert désigné a été désigné par ordonnance de référé du 9 juillet 2013 afin de rechercher si la parcelle D [Cadastre 4] disposait d'une issue sur la voie publique, constater en cas d'enclave de la parcelle D [Cadastre 4] l'ensemble des parcelles qui pourraient être concernées par l'assiette d'une servitude à créer, pour déterminer l'assiette du passage, de chiffrer le coût de l'établissement d'un accès à la voie publique sur les parcelles de Mme [Z], de dresser un plan des lieux sur lesquels figureront les limites de propriété avec les diverses solutions de passage.



Or, l'action engagée le 12 juin 2017 par Mme [O] [T] est notamment une action en bornage de ses propriétés (D [Cadastre 4], [Cadastre 9] et [Cadastre 11]) et de celles appartenant à la SCI CBC (parcelles D[Cadastre 3], [Cadastre 5], [Cadastre 15]), les parties se disputant par ailleurs la propriété d'une terrasse, la SCI CBC considérant qu'elle est localisée sur la parcelle D [Cadastre 3] et Mme [O] [T] épouse [Z] considérant qu'elle est située sur la parcelle D [Cadastre 11].



Il apparait que l'expert [V] était investi d'une mission aux fins de déterminer si la parcelle D [Cadastre 4] était enclavée et le cas échéant de proposer une solution de désenclavement. Il ne s'est donc pas prononcé sur le problème des limites séparatives des fonds des parties qui est l'objet de l'action en bornage mais sur une demande de désenclavement.



Il convient donc avant dire droit d'ordonner une mesure d'expertise aux fins de bornage.



M. [K] [E], géomètre-expert à [Localité 16] sera désignée pour y procéder.





Dans l'attente du dépôt du rapport, il sera sursis à statuer sur l'ensemble des demandes.



Les dépens ainsi que les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront réservés.





PAR CES MOTIFS





La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,



Avant dire droit,



Ordonne une expertise judiciaire visant à effectuer le bornage judiciaire des fonds contigus cadastrés, section D [Cadastre 3] au [Adresse 18] à [Localité 17] pour celui appartenant à la SCI CBC et section D [Cadastre 9] au [Adresse 18] à [Localité 17] pour celui appartenant à Mme [O] [T] épouse [Z],



Commet pour y procéder:



M. [K] [E],

[Adresse 13]

[XXXXXXXX01]

Mèl : [Courriel 19]



Dit qu'il aura pour mission de:



(I) Se rendre sur les lieux, les décrire dans leur état actuel et en dresser plan, en tenant compte, le cas échéant, des bornes existantes,



(II) Consulter les titres des parties et notamment les plus anciens,



(III) En décrire le contenu, en précisant les limites et les contenances y figurant ;



(IV) Rechercher tous les indices permettant d'établir les caractères et la durée des possessions éventuellement invoquées,



(V) Rechercher tous autres indices notamment ceux résultant de la configuration des lieux et du cadastre,



(VI) Proposer la délimitation des parcelles et l'emplacement des bornes à planter,



Dit que l'expert accomplira sa mission conformément aux articles 232 à 248 et 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu'il déposera un rapport de ses opérations au greffe avant le 31 juillet 2023,



Dit que l'expertise aura lieu aux frais partagés à parts égales entre les parties qui consigneront au greffe, avant le 14 octobre 2023, la somme de 3.500 € à titre de provision à valoir sur les frais et honoraires de l'expert,



Rappelle qu'à défaut de consignation dans le délai et selon les modalités imparties, la désignation de l'expert sera caduque à moins que le juge, à la demande d'une des parties se prévalant d'un motif légitime, ne décide d'une prorogation ou d'un relevé de caducité,



















Désigne le président de la chambre 1-5 et en cas d'empêchement un magistrat de la chambre à l'effet de contrôler la mesure d'instruction,



Réserve les dépens et les demandes relatives aux frais irrépétibles.



Le greffier Pour le président empêché

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.