5 July 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 23-70.007

Autre - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:AV15010

Titres et sommaires

INDIVISION - Chose indivise - Amélioration ou conservation - Impenses nécessaires - Définition - Echéances des emprunts immobiliers

Le remboursement anticipé d'un emprunt ayant permis l'acquisition d'un bien indivis, lorsqu'il est effectué par un indivisaire au moyen de ses deniers personnels au cours de l'indivision, constitue une dépense nécessaire à la conservation de ce bien au sens de l'article 815-13, alinéa 1, du code civil

INDIVISION - Chose indivise - Amélioration ou conservation - Impenses nécessaires - Définition - Emprunt contracté pour l'acquisition de l'immeuble indivis - Règlement par un indivisaire - Créance sur l'indivision - Applications diverses

INDIVISION - Chose indivise - Amélioration ou conservation - Frais engagés par un indivisaire - Créance sur l'indivision - Cas - Règlement des échéances d'emprunt afférent à un immeuble indivis

Texte de la décision

VL12




Demande d'avis
n° V 23-70.007



Juridiction : le tribunal judiciaire de Mulhouse







Avis du 5 Juillet 2023

n° 15010 FS-P+B









R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________



Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile :

La première chambre civile de la Cour de cassation a rendu le présent avis sur le rapport de Mme Daniel, conseiller référendaire, les observations écrites et orales de M. Sassoust, avocat général ;


Énoncé de la demande d'avis

1. La Cour de cassation a reçu, le 16 mai 2023, une demande d'avis formée le 27 avril 2023 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Mulhouse, en application des articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile, dans une instance opposant Mme [K] à M. [J].

2. La demande est ainsi formulée :

« En matière de liquidation des intérêts patrimoniaux d'un couple ayant été uni par un pacte civil de solidarité et ayant acquis un immeuble en indivision au cours de cette union, dans la mesure où l'apport personnel aux fins d'acquisition du bien indivis constitue une dépense d'acquisition pour laquelle l'application de l'article 815-13 du code civil est exclue, et dans la mesure où le remboursement, par l'un des partenaires, des échéances du prêt souscrit pour le financement de ce bien constitue une dépense de conservation au sens de l'article 815-13 alinéa 1er du code civil, le remboursement anticipé de l'emprunt finançant l'acquisition du bien indivis constitue-t-il une dépense de conservation au sens de l'article 815-13 alinéa 1er du code civil, ou une dépense d'acquisition pour laquelle l'application de cette disposition est exclue ? »

Examen de la demande d'avis

3. Aux termes de l'article L. 441-1 du code de l'organisation judiciaire, avant de statuer sur une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, les juridictions de l'ordre judiciaire peuvent solliciter l'avis de la Cour de cassation.

4. Le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Mulhouse est saisi de difficultés nées lors des opérations de partage des intérêts patrimoniaux de Mme [K] et de M. [J] après la dissolution de leur pacte civil de solidarité.

5. La question de droit est nouvelle, présente une difficulté sérieuse et est susceptible de se poser dans de nombreux litiges.

6. Aux termes de l'article 815-13, alinéa 1er, du code civil, lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

7. La Cour de cassation juge que le règlement d'échéances d'emprunts ayant permis l'acquisition d'un immeuble indivis, lorsqu'il est effectué par un indivisaire au moyen de ses deniers personnels au cours de l'indivision, constitue une dépense nécessaire à la conservation de ce bien et donne lieu à indemnité sur le fondement du texte précité (1re Civ., 7 juin 2006, pourvoi n° 04-11.524, Bull. 2006, I, n° 284 ; 1re Civ., 15 mai 2018, pourvoi n° 17-16.166).

8. En effet, un tel règlement permet de préserver l'indivision d'un risque de défaillance de nature à entraîner la perte du bien indivis et, ainsi, de le conserver dans l'indivision.

9. La Cour de cassation a étendu cette solution à l'hypothèse du règlement d'un crédit relais (1re Civ., 26 janvier 2022, pourvoi n° 20-17.898, publié).

10. Il n'y a pas lieu de distinguer selon que le remboursement de l'emprunt s'effectue par le paiement des échéances ou par un ou des règlements anticipés.

11. Dès lors, le remboursement anticipé d'un emprunt ayant permis l'acquisition d'un bien indivis, lorsqu'il est effectué par un indivisaire au moyen de ses deniers personnels au cours de l'indivision, constitue une dépense nécessaire à la conservation de ce bien au sens de l'article 815-13, alinéa 1er, du code civil.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

EST D'AVIS QUE le remboursement anticipé d'un emprunt ayant permis l'acquisition d'un bien indivis, lorsqu'il est effectué par un indivisaire au moyen de ses deniers personnels au cours de l'indivision, constitue une dépense nécessaire à la conservation de ce bien au sens de l'article 815-13, alinéa 1er, du code civil.


Fait à Paris et mis à disposition au greffe de la Cour le 5 Juillet 2023, après examen de la demande d'avis lors de la séance du 27 Juin 2023 où étaient présents, conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire : M. Chauvin, président, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Daniel, conseiller référendaire rapporteur, MMes Antoine, Poinseaux, Dard, conseillers, M. Fulchiron, conseiller, Mme Agostini, conseiller, M. Duval, Mme Azar, M. Buat-Ménard, conseillers référendaires, M. Sassoust, avocat général et Mme Layemar, greffier de chambre ;

Le présent avis est signé par le conseiller référendaire rapporteur, le président et le greffier de chambre.

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