21 June 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-18.226

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:CO00446

Texte de la décision

COMM.

SMSG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 juin 2023




Cassation partielle


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 446 F-D

Pourvoi n° V 21-18.226




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 21 JUIN 2023

1°/ Mme [R] [X], épouse [W], domiciliée [Adresse 2],

2°/ Mme [J] [G]-[B], domiciliée [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° V 21-18.226 contre l'arrêt rendu le 11 mai 2021 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige les opposant à la direction générale des finances publiques, agissant sous poursuites et diligences du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, domicilié [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.


Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de Mme [X] et de Mme [G]-[B], de la SCP Foussard et Froger, avocat de la direction générale des finances publiques, agissant poursuites et diligences du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, et après débats en l'audience publique du 10 mai 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 11 mai 2021), [O] [B] est décédée le [Date décès 1] 2012, en laissant pour lui succéder ses deux filles, Mme [W] et Mme [G]-[B]. La succession de [O] [B] comprenait trois biens immobiliers, dont un chalet situé à [Localité 4] (38).

2. Remettant en cause l'activité de loueur en meublé exercée sous forme d'entreprise individuelle par [O] [B], l'administration fiscale a refusé à Mmes [W] et [G]-[B] le bénéfice de l'exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit prévu à l'article 787 C du code général des impôts. Celles-ci ont saisi le tribunal de grande instance afin d'être déchargée du rappel d'imposition en résultant.

Examen des moyens

Sur le premier moyen


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Mmes [W] et [G]-[B] font grief à l'arrêt de dire qu'elles ne sont pas éligibles au bénéfice des dispositions de l'article 787 C du code général des impôts, alors « que les droits de succession des biens affectés à une entreprise individuelle bénéficient d'un abattement de 75 % ; qu'en jugeant qu'il est constant qu'à compter de 2011, [O] [B] avait confié la gestion de son activité de loueur professionnel de meublé à la société Manaau, de sorte que la condition d'exercice d'une activité individuelle n'était pas satisfaite, sans rechercher si, ainsi qu'il était soutenu par les héritières, leur auteur, qui, jusqu'en 2010, avait loué les biens immobiliers meublés directement aux vacanciers, puis, à partir de 2011, les avait loués, exactement de la même manière, toujours en meublé, mais à la société Manaau qui s'occupait ensuite de la sous-location meublée aux vacanciers, de sorte que la défunte avait poursuivi une activité individuelle de location meublée (éligible au dispositif) en donnant à bail les immeubles dont elle était propriétaire ainsi que les meubles meublants à la société Manaau, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 787 C du code général des impôts. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 787 C du code général des impôts :

5. Selon ce texte, sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur, la totalité ou une quote-part indivise de l'ensemble des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels affectés à l'exploitation d'une entreprise individuelle ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmis par décès ou entre vifs, à condition que l'entreprise individuelle mentionnée ci-dessus ait été détenue depuis plus de deux ans par le défunt ou le donateur lorsqu'elle a été acquise à titre onéreux, que chacun des héritiers, donataires ou légataires prenne l'engagement, dans la déclaration de succession ou l'acte de donation, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, de conserver l'ensemble des biens affectés à l'exploitation de l'entreprise pendant une durée de quatre ans à compter de la date de la transmission et que l'un de ces héritiers, donataires ou légataires poursuive effectivement pendant les trois années qui suivent la date de la transmission l'exploitation de l'entreprise.

6. Pour rejeter les demandes de Mmes [W] et [G]-[B], l'arrêt, après avoir énoncé que, pour bénéficier du régime d'exonération partielle des droits d'enregistrement, l'entreprise individuelle doit être détenue et exploitée par le défunt et les biens en cause doivent être affectés à cette entreprise, retient qu'à compter de 2011, [O] [B] a confié la gestion de son activité de loueur professionnel de meublés à la société Manaau, de sorte qu'à la date de son décès, elle n'exerçait pas une entreprise individuelle à laquelle étaient transmis les biens par succession.


7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si [O] [B] n'avait pas, à compter de l'année 2011, poursuivi son activité individuelle de loueur en meublé en louant ses biens à la société Manaau, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement, il dit que Mme [X], épouse [W], et Mme [G]-[B] ne sont pas éligibles au bénéfice des dispositions de l'article 787 C du code général des impôts et confirme la décision de rejet de la direction générale des finances publiques à ce titre, l'arrêt rendu le 11 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la direction générale des finances publiques, agissant poursuites et diligences du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la direction générale des finances publiques, agissant poursuites et diligences du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, et la condamne à payer à Mme [X], épouse [W], et Mme [G]-[B] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille vingt-trois.

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