25 May 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-23.015

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:C300346

Titres et sommaires

BAIL RURAL - Bail à ferme - Améliorations - Indemnité au preneur sortant - Action en indemnisation - Adjudication - Saisie immobilière - Cahier des charges - Mention - Nature, coût et date des améliorations - Omission - Absence d'influence

Il résulte de l'article L. 411-69, alinéas 1 et 4, du code rural et de la pêche maritime et de l'article R. 322-11, alinéa 1, du code des procédures civiles d'exécution que, si le preneur et le bailleur doivent, à la demande du rédacteur du cahier des conditions de vente, et sous leur responsabilité, lui fournir les indications relatives à la nature, au coût et à la date des améliorations apportées par le preneur, l'omission de ces mentions dans le cahier des conditions de vente ne peut avoir pour effet de priver le preneur de son droit de demander à l'adjudicataire, bailleur à l'expiration du bail, le paiement d'une indemnité au titre de ces améliorations

SAISIE IMMOBILIERE - Adjudication - Cahier des charges - Mentions - Nature, coût et date des améliorations - Omission - Effets - Bail rural - Bail à ferme - Améliorations - Indemnité au preneur sortant - Action en indemnisation

Texte de la décision

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 mai 2023




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 346 FS-B

Pourvoi n° A 21-23.015




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 MAI 2023

La société Centre Pierre investissement, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 21-23.015 contre l'arrêt rendu le 24 juin 2021 par la cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société [P] associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [I] [P], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société du Domaine de la Veyssière, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Davoine, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Centre Pierre investissement, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société [P] associés, ès qualités, et l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mars 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Davoine, conseiller référendaire rapporteur, Mme Andrich, faisant fonction de conseiller doyen, MM. Echappé, David, Jobert, Mmes Grandjean, Grall, M. Bosse-Platière, conseillers, M. Jariel, Mmes Schmitt, Aldigé, M. Baraké, Mme Gallet, M. Pons, conseillers référendaires, M. Sturlèse, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 24 juin 2021), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 6 juin 2019, pourvoi n° 17-23.777), le 17 juin 2005, M. et Mme [W] ont donné à bail rural un ensemble immobilier à la société civile d'exploitation agricole du Domaine de la Veyssière (la SCEA), dont ils étaient les seuls associés.

2. Le 26 mai 2009, au terme d'une procédure de saisie immobilière, la société Centre Pierre investissement (l'adjudicataire) a été déclarée adjudicataire de l'immeuble donné à bail.

3. Le 13 novembre 2013, la SCEA a été placée en liquidation judiciaire. La résiliation du bail rural a été constatée par le juge-commissaire le 14 avril 2014.

4. Le 29 juillet 2014, la société [P] associés (le liquidateur), agissant en qualité de liquidateur de la SCEA, a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en condamnation de l'adjudicataire à lui payer l'indemnité due au preneur sortant au titre des améliorations apportées antérieurement à l'adjudication.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches


5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

6. L'adjudicataire fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au liquidateur une certaine somme au titre de l'indemnité due au preneur sortant, alors « que, dans le cas où les biens donnés à bail rural ont été vendus par adjudication et où le cahier des conditions de la vente de l'immeuble donné à bail rural ne fait pas mention de la nature, du coût et de la date des améliorations apportées par le preneur dans les conditions prévues aux articles L. 411-71 et L. 411-73 du code rural et de la pêche maritime, le droit à indemnisation du preneur à bail rural prévu par les dispositions de l'article L. 411-69 du code rural et de la pêche maritime est inopposable à l'adjudicataire ; qu'en énonçant, par conséquent, pour condamner la société Centre Pierre investissement à payer à M. [I] [P], ès qualités, la somme de 413 933,47 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de son arrêt, avec capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil, en application des dispositions de l'article L. 411-69 du code rural et de la pêche maritime, que la circonstance que le cahier des charges de l'adjudication, établi sous la seule responsabilité de son rédacteur, ne portait aucune mention relative à la nature, au coût et à la date des améliorations apportées par le preneur dans les conditions prévues aux articles L. 411-71 et L. 411-73 du code rural et de la pêche maritime devait demeurer sans incidence sur les droits du preneur à indemnité, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 411-69, L. 411-71 et L. 411-73 du code rural et de la pêche maritime. »

Réponse de la Cour

7. Aux termes de l'article L. 411-69, alinéas 1er et 4, du code rural et de la pêche maritime, le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail. Si la vente a eu lieu par adjudication, le cahier des charges doit mentionner la nature, le coût et la date des améliorations apportées par le preneur dans les conditions prévues aux articles L. 411-71 et L. 411-73 de ce code. Cette mention est établie par l'officier public ou ministériel chargé de la vente d'après les indications fournies par le bailleur et par le preneur ; en cas de désaccord entre les parties, elle fait état des éléments contestés.

8. Aux termes de l'article R. 322-11, alinéa 1er, du code des procédures civiles d'exécution, relatif à la saisie immobilière, le cahier des conditions de vente est élaboré sous la responsabilité du créancier poursuivant.

9. S'il résulte de ces textes que le preneur et le bailleur doivent, à la demande du rédacteur du cahier des conditions de vente, et sous leur responsabilité, fournir les indications précitées, leur défaut de mention ne peut avoir pour effet de priver le preneur de son droit de demander à l'adjudicataire, bailleur à l'expiration du bail, le paiement d'une indemnité au titre de ces améliorations.

10. La cour d'appel a donc, à bon droit, énoncé que la circonstance que le cahier des charges de l'adjudication ne porte aucune mention relative à la nature, au coût et à la date des améliorations apportées par le preneur dans les conditions prévues aux articles L. 411-71 et L. 411-73 du code rural et de la pêche maritime doit demeurer sans incidence sur les droits du preneur à indemnité.

11. Elle en a exactement déduit que le liquidateur de la SCEA était fondé à demander à l'adjudicataire le paiement d'une indemnité au titre des travaux d'amélioration prévus par une clause du bail.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Centre Pierre investissement aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Centre Pierre investissement et la condamne à payer à la société [P] associés, en qualité de liquidateur judiciaire de la société civile d'exploitation agricole du Domaine de la Veyssière, la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille vingt-trois.

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