11 May 2023
Cour d'appel de Paris
RG n° 20/04679

Pôle 5 - Chambre 5

Texte de la décision

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 11 MAI 2023



(n° 90 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 20/04679 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBT3M



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Décembre 2019 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2018019864





APPELANTE



S.A.R.L. LEGATI ALPES agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Immatriculée au RCS de ANNECY sous le numéro 753 668 862

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Maître Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : W09





INTIMEE



S.A.R.L. CAP FACE NORD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

Immatriculée au RCS de LYON sous le numéro 434 851 093

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Maître Anne FITOUSSI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0958

Assistée par Maître Maxime PLANTARD, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE, toque 132





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 mars, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvie CASTERMANS, magistrat honoraire, exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.



Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



Madame Nathalie RENARD, présidente de chambre

Madame Christine SOUDRY, conseillère

Madame Sylvie CASTERMANS, magistrat honoraire, exerçant des fonctions juridictionnelles





Greffier, lors des débats : Madame Karine ABELKALON





ARRÊT :




Contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Nathalie RENARD, présidente de chambre et par Monsieur MARTINEZ, Greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.





FAITS ET PROCÉDURE :



La société Cap Face Nord est un cabinet de recrutement spécialisé dans la recherche de collaborateurs pour les cabinets d'expertise comptable.



Par un contrat en date du 29 juin 2017, la société Cap Face Nord a proposé à la société Legati Alpes ses services afin de recruter un collaborateur comptable.



La société Cap Face Nord a réclamé le paiement de sa prestation, ce que la société Legati Alpes a contesté. Une ordonnance d'injonction de payer a été délivrée à l'encontre de la société Légati Alpes le 26 décembre 2017. Elle a formé opposition.



Par jugement du 18 décembre 2019 le tribunal de commerce de Paris a :



Dit recevable mais mal fondée l'opposition formée par la société Legati Alpes ;

Dit recevable mais mal fondé l'exception d'incompétence soulevé par la société Legati Alpes,

Condamné la société Legati Alpes à payer à la société Cap Face Nord la somme de 7 176,00 euros TTC augmentée des intérêts calculés au taux légal à compter de la mise en demeure du 11 octobre 2017,

Condamné la société Legati Alpes à payer à la société Cap Face Nord la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile la déboutant du surplus de sa demande,

Condamné la société Société Legati Alpes aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 77,84 euros dont 12,76 euros de TVA.



Par déclaration du 4 mars 2020, la société Legati Alpes a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a dit recevable mais mal fondé l'exception d'incompétence soulevé par la société Legati Alpes.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 2 février 2023, la société Legati Alpes demande à la cour, au visa des articles 48 du code de procédure civile, 1217 du code civil, de l'article L442-6 du code de commerce, de, :

Déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la société Legati Alpes,

En conséquence et statuant de nouveau :

A titre principal :


Constater la résolution unilatérale du contrat conclu entre la société Cap Face Nord et la société Legati Alpes en date du 29 juin 2017, pour non-exécution de ses obligations par la société Cap Face Nord.

Débouter la société Cap Face Nord de l'ensemble de ses demandes ;






A titre subsidiaire :


Donner acte à la société Legati Alpes qu'elle consent à régler la facture N°17 06 055 d'un montant de 1 819,00 € correspondant aux honoraires de recherche et de recrutements de la société Cap Face Nord.

Constater une disproportion manifeste entre la rémunération sollicitée par la société Cap Face Nord et le service rendu.

Débouter la société Cap Face Nord de sa demande en paiement de la facture N°17 08 073 pour la somme de 5 356,80 €.


En tout état de cause :


Débouter la société Cap Face Nord de sa demande formulée au titre d'une prétendue procédure abusive

Condamner la société Cap Face Nord à payer à la société Legati Alpes la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner la même aux entiers dépens de l'instance


Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 27 janvier 2023, la société Cap Face Nord demande à la cour, au visa des articles 1104 et 2274 du code civil, de :


Confirmer le jugement rendu le 18 décembre 2019 par le Tribunal de Commerce de Paris,


En conséquence,


Débouter la société Legati Alpes de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Juger qu'il n'y a point lieu de prononcer la résolution unilatérale du contrat signé le 29 juin 2017 et ce, en raison du respect des engagements contractuels par la société Cap Face Nord;

- Condamner la société Legati Alpes 'avec adjonction' aux intérêts à taux légal à compter de la mise en demeure du 11 octobre 2017 à payer à la société Cap Face Nord la somme de 7.176,00 euros TTC ;

Condamner la société Legati Alpes à verser à la société Cap Face Nord la somme de 2.000 euros pour procédure abusive ;

Condamner la société Legati Alpes à verser à la société Cap Face Nord la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.




L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 février 2023.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.




SUR CE, LA COUR

Sur la résolution unilatérale

La société Legati Alpes prétend à la résolution unilatérale du contrat au motif que la société Cap Nord n'a pas exécuté de bonne foi le contrat qui liait les parties. Elle soutient que la candidature anonymisée envoyée afin de convaincre la société de conclure n'était qu'un leurre. Cette candidate était déjà salariée en entreprise. Elle ajoute que la société Cap Face Nord n'a pas respecté le délai contractuellement prévu.

La société Cap Face Nord réplique que La société Legati Alpes est mal fondée à soutenir que la candidature présentée était un leurre. Des échanges de mails de la société Legati Alpes démontre que ses salariés connaissaient le parcours de la candidate et de ses attentes.

Concernant le non-respect du délai contractuellement prévu, la société Legati Alpes ne démontre pas avoir relancé la société Cap Face Nord pour obtenir des propositions de candidatures durant la période estivale.

Ceci étant exposé,

L'objet de la mission confiée à la société Cap Face Nord était de sélectionner des candidats qualifiés pour le poste proposé.

L'article 3de la convention précisait que la société Cap Face Nord s'était engagée à commencer à présenter à la société Legati Alpes, des candidats sélectionnés, sous un délai de 3 semaines à compter de la signature du contrat, soit le 29 juin 2017.

En l'espèce, la société Legati Alpes fait grief à la société Cap Face Nord d'avoir présenté un leurre, car la première candidate était déjà en poste et n'avait nullement l'intention de démissionner.

S'il est avéré que la première candidate présentée était en poste, il ressort des échanges de courriers que la société Legati en était préalablement informée et que ladite candidate s'est présentée à l'entretien en vue d'envisager l'offre d'emploi proposée par la société Legati Alpes et échanger sur le profil de poste. Le fait que la candidate n'a pas donné suite à l'issue de l'entretien, n'apporte pas la démonstration de la mauvaise foi de la société Cap Face Nord . (Pièce 4)

Une seconde candidate, madame [C] a été présentée, le 24 août 2017 au retour des congés payés de la société Cap Face Nord, le 23 août 217. Si le délai de trois semaines n'a pas été respecté, la présentation est intervenue dans le délai de quatre mois et il n'est pas démontré que la société Legati Alpes ait sollicité une présentation de candidats durant la période de congés annuels.

Par ailleurs, la société Legati Alpes s'estimait satisfaite à l'issue de l'entretien puisque Mme [C] était engagée le 7 septembre 2017. La candidate n'a pas souhaité poursuivre sa période d'essai, cette démission, intervenue postérieurement à la décision d'engagement, ne peut être reprochée à la société Cap Face Nord.

Au regard de ces éléments, la société Legati Alpes ne justifie pas d'une inexécution des obligations de la société Cap Face Nord permettant la résolution unilatérale du contrat. Il y a lieu de confirmer la décision déférée sur ce point.



Sur l'avantage disproportionné

La société Legati Alpes invoque une disproportion manifeste entre la rémunération sollicitée par la société Cap Face Nord et le service rendu sur le fondement de l'article L442-6 du code de commerce.

La société Cap Face Nord conteste l'application du texte au cas d'espèce.

Ceci étant exposé,

L'article L442-6 1, 1°du code de commerce, dans sa version applicable à l'espèce, dispose :

Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :

D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu.

Le texte sanctionne le fait de consentir dans le cadre de relations contractuelles de partenariat un avantage sans contrepartie ou avec une contrepartie manifestement disproportionnée au service rendu.

En l'espèce, s'est instaurée entre les parties une relation commerciale, aux termes de laquelle elles se sont mises d'accord sur l'objet et sur le prix de la mission de recrutement d'un colaborateur.

La rémunération contestée est le prix de la prestation convenu entre les parties et ne porte pas sur un avantage consenti au sens de la disposition précitée.

Au surplus, il résulte des développements précédents que l'objet de la prestation ne présente pas un caractère fictif et il est indéniable que la démission de Mme [C] n'entrait pas dans le champ des obligations souscrites par la société Cap Face Nord.

La demande, qui n'est pas fondée, sera rejetée.



Sur la résistance abusive

La société Cap Face Nord ne démontrant pas que la résistance opposée par la société Legati Alpes revêt un caractère abusif, sa demande de dommages et intérêts sera rejetée.

Le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

La société Legati Alpes, partie perdante, au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamnée aux entiers dépens.

Il paraît équitable d'allouer à la société Cap Face Nord la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés.



PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

REJETTE la demande de la société Cap Face Nord en dommages et intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE la société Legati Alpes à verser à la société Cap Face Nord la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Legati Alpes aux entiers dépens.



LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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