9 May 2023
Cour d'appel de Chambéry
RG n° 21/00448

1ère Chambre

Texte de la décision

HP/SL





COUR D'APPEL de CHAMBÉRY





Chambre civile - Première section



Arrêt du Mardi 09 Mai 2023





N° RG 21/00448 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GUNV



Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ANNECY en date du 09 Février 2021





Appelante



S.A.R.L. NOVIL, dont le siège social est situé [Adresse 3]



Représentée par Me Michel FILLARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY Représentée par l'ASSOCIATION LEBRAY & Associés, avocats plaidants au barreau de PARIS











Intimée



S.A.S. SPF2 AMIRAL, dont le siège social est situé [Adresse 1]



Représentée par Me Clarisse DORMEVAL, avocat postulant au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SELARL RACINE, avocats plaidants au barreau de PARIS







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Date de l'ordonnance de clôture : 23 Janvier 2023



Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 février 2023



Date de mise à disposition : 09 mai 2023





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Composition de la cour :



- Mme Hélène PIRAT, Présidente,



- Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseillère,



- Mme Myriam REAIDY, Conseillère,



avec l'assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,





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Faits et Procédure



Par acte en date du 30 novembre 2007, la société SPF2 Amiral, venant aux droits de la société IGC Promotion, a donné à bail commercial à la société Novil un local commercial n°2a dépendant d'un immeuble situé [Adresse 4], pour une durée de neuf années, avec effet au 25 septembre 2007, afin d'exercer une activité de « Jeannerie, sportswear et accessoires » sous l'enseigne « Destack Jeans ». Le loyer annuel était de 56 126, 93 euros hors taxes et hors charges, payable trimestriellement et d'avance, et il était prévu une clause d'indexation annuelle du loyer en fonction de la variation de l'indice national du coût de la construction publié par l'INSEE.



A compter du 25 septembre 2016, le bail s'est poursuivi entre les parties par tacite reconduction.



Par acte en date du 15 décembre 2016, la société Novil a fait délivrer au bailleur une demande de renouvellement du bail pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 2017 tout en invitant ce dernier à faire connaître ses intentions.



Par acte en date des 19 et 20 décembre 2016, la société SPF2 Amiral a signifié à la société Novil un congé avec offre de renouvellement à effet au 30 juin 2017 pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 2017, moyennant un loyer annuel de 83 500 euros HT, les autres clauses du bail restant inchangées.



Le cabinet [Z], expert amiable diligenté par la société Novil, a évalué la valeur locative des lieux à hauteur de 66 600 euros HT par an et hors charges et le 23 octobre 2017, la société Novil a proposé au bailleur le renouvellement du bail moyennant un loyer fixé à hauteur de 62 033 euros HT par an. Aucun accord n'est intervenu entre les parties.



Par acte du 10 mars 2019, la société Novil a fait assigner la société SPF2 Amiral devant le tribunal de grande instance d'Annecy en remboursement des sommes trop-perçues et en fixation du loyer et renouvellement.

Par jugement rendu le 9 février 2021 le tribunal judiciaire d'Annecy a :



- déclaré non écrite la stipulation figurant à l'article IV 4) du bail liant les parties en date du 30 novembre 2007 écrite comme suit : « La variation de l'indice choisi sera prise en considération aussi bien dans le cas de hausse que dans le cas de baisse de l'indice, mais l'application de la présente clause d'indexation ne pourra en aucun cas entraîner un montant de loyer inférieur au loyer de base initial précisé aux conditions particulières. » ;



- débouté la SARL Novil de sa demande de restitution d'un trop-perçu de loyers à hauteur de 34 867, 40 euros et d'un trop-perçu de sommes détenues au titre d'un dépôt de garantie à hauteur de 3 181, 19 euros formée à l'encontre de la SAS SPF2 Amiral ;



- sursis à statuer sur la demande de fixation du loyer des locaux à usage commercial, appartenant à la SAS SPF2 Amiral donnés à bail à la SARL Novil, sis [Adresse 4] ;



- ordonné avant dire droit une expertise judiciaire immobilière ;



- désigné en qualité d'expert M. [X] [K] demeurant [Adresse 2], avec la mission de :

- procéder contradictoirement à la visite des locaux loués, entendre les parties et se faire remettre par elles tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission ainsi qu'à la solution du litige ;

- procéder à la description des locaux, des termes de la convention locative et de l'activité mise en 'uvre par le preneur dans les locaux ;

- dire s'il s'est produit une modification notable des éléments mentionnés à l'article L 145-33 du code de commerce de nature à écarter l'application du plafonnement du loyer ;

- déterminer si pour le commerce exploité par la SARL Novil dans les lieux loués, il peut être invoqué une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle même une variation de plus de 10 % de la valeur locative au sens de l'article L 145-38 du code de commerce ;

- déterminer la valeur locative des biens loués telle que définie à l'article L 145-33 et R 145-2 à R 145-6 du code de commerce ;

- évaluer le montant du loyer renouvelé à compter du 1er janvier 2017, en fonction de la valeur locative et du principe de plafonnement et de ses exceptions légales en application de l'article L 145-34 du code de commerce ;



- dit que pendant la durée de l'instance la locataire devra conformément aux dispositions de l'article L 145-57 du code de commerce continuer à payer les loyers échus au prix ancien, lequel sera indexé sur l'indice du coût de la construction conformément à la clause IV quatrièmement dudit bail, sauf compte à faire entre le bailleur et le preneur après fixation définitive du prix du loyer ;



- dit n'y avoir lieu à ce stade de la procédure à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;



- réservé les dépens ;



- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.



Le tribunal a retenu notamment que :



' la clause prévoyant un plancher mentionnée dans l'article IV quatrièmement du bail litigieux est réputée non écrite puisque :

- si la clause litigieuse prévoit expressément la réciprocité de la hausse comme de la baisse, l'indication d'un loyer plancher fait échec au caractère automatique de l'indexation en ce qu'il induit un risque de décrochage de la variation du loyer par rapport à la variation de l'indice. Par conséquent, la clause d'indexation stipulée dans le bail contrevient aux dispositions de l'article L 112-1 du code monétaire et financier, peu important que, dans la pratique, la diminution de loyer en deçà de son montant d'origine ne soit pas concrétisée dès lors que la clause organise la distorsion prohibée ;



' pour le surplus, la clause doit recevoir application puisque :

- les parties ont consenti à la mise en 'uvre d'une indexation pour le loyer commercial suivant un indice précis de sorte que retirer totalement toute indexation du loyer reviendrait à porter atteinte à la sécurité juridique du contrat ainsi qu'à la force obligatoire de celui-ci ;

- les clauses d'indexation sont des clauses de style figurant dans la grande majorité des baux commerciaux et seule la clause prévoyant un plancher contrevient aux dispositions de l'article L 112-1 du code monétaire et financier, laquelle ne forme pas un tout indivisible et indissociable avec le reste des mentions stipulées par la clause d'indexation ;

- il n'est pas contesté que la baisse de l'indice n'a jamais conduit à un loyer inférieur au loyer de base initial de sorte que la société Novil n'a en réalité subi aucun préjudice ;



' la société Novil ne peut demander la restitution des loyers antérieurs à la date du 19 mars 2014, son assignation interruptive de prescription ayant été délivrée le 19 mars 2019 ;



' aucune somme n'est due par la société SPF2 Amiral au titre d'un trop-perçu en application de la clause susvisée ni même une restitution de sommes au titre du dépôt de garantie dans la mesure où :

- la baisse de l'indice n'a jamais conduit à un loyer inférieur au loyer de base initial stipulé par le bail commercial et la clause d'indexation n'a pas été réputée non écrite dans son entier de sorte que le loyer commercial continue à faire l'objet d'une indexation selon l'indice du coût de la construction ;

- le dépôt de garantie a suivi la variation de l'indice et n'est pas resté figé à hauteur de 14 031, 73 euros HT et HC ;



' si la société SPF2 Amiral argue d'une modification notable des facteurs locaux de commercialité, elle n'en rapporte aucunement la preuve. Toutefois, les éléments issus du rapport d'expertise du cabinet [Z] sont de nature à penser que le loyer commercial pourrait être fixé à la hausse et ce d'autant que ce dernier retient un loyer à hauteur de 66 600 euros HT et HC par année, soit supérieur au loyer de base initial ;



' la seule expertise amiable produite par la société Novil est insuffisante pour permettre au tribunal de fixer le loyer du bail renouvelé dès lors le recours à l'expertise n'apparaît pas comme un simple palliatif à la carence des parties mais comme la seule solution pour permettre d'obtenir des éléments objectifs au règlement du différend entre les parties.

 



Par déclaration au greffe en date du 3 mars 2021, la société Novil a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a refusé de déclarer non écrite en son entier la clause d'indexation du bail liant les parties et l'a débouté de sa demande de restitution d'un trop-perçu de loyers et des sommes détenues au titre d'un dépôt de garantie.

 



Prétentions et moyens des parties



Par dernières écritures en date du 12 novembre 2021 , régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Novil sollicite l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de :



- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a refusé de réputer non écrite en son entier la clause d'indexation du bail du 30 novembre 2007, tel que renouvelé dans son principe à effet du 1er janvier 2017, et statuant à nouveau, de dire et juger que ladite clause est indivisible en ce qu'elle induit une distorsion récurrente et prohibée au sens de l'article L 112-1 du code monétaire et financier, dès lors qu'elle paralyse le jeu de l'indexation en dessous du loyer de base d'origine, de sorte qu'elle doit être réputée non écrite dans son ensemble ;



- surabondamment, de dire et juger que la clause d'indexation insérée au sein du bail du 30 novembre 2017, dès lors qu'elle a pour objet et pour effet de paralyser toute indexation du loyer qui conduirait à un loyer indexé inférieur au loyer de base, contrevient aux dispositions de l'article L 145-39 du code de commerce, de sorte qu'elle doit être réputée non écrite ;



- en conséquence, réformer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté la SARL Novil de sa demande de restitution de trop-perçu et statuant à nouveau, de condamner la société SPF2 Amiral à restituer à la société Novil la somme consolidée de 38 048, 59 euros TTC, se décomposant comme suit :

- trop-perçu de loyers ayant été induit par l'indexation illicite du loyer au titre des années non prescrites allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, soit la somme de 29 056, 17 euros HT, TVA en sus, soit la somme consolidée de 34 867,40 euros TTC sauf à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir ;

- trop-perçu des sommes détenues au titre de dépôt de garantie, soit la somme de 3 181, 19 euros, sauf à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir ;



En tout état de cause,



- débouter le bailleur de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;



- condamner le bailleur au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

 

Au soutien de ses prétentions, la société Novil expose essentiellement que :



' l'indication d'un loyer plancher fait échec au caractère automatique de l'indexation exigé par les dispositions de l'article L 112-1 du code monétaire et financier en ce qu'il induit un risque de décrochage de la variation du loyer par rapport à la variation de l'indice ;



' le fait qu'en pratique l'indice n'ait varié qu'à la hausse est sans effet sur le caractère réputé non écrit de la clause d'indexation ;



' le mécanisme conventionnel de l'indexation étant indissociable de celui qui en paralyse le jeu à moins que le contrat ne prévoie expressément le contraire, la clause d'indexation doit donc être réputée non écrite en son entier puisque la distorsion résultant de la mise en 'uvre de la clause ne présente pas un caractère purement ponctuel mais potentiellement récurrent, c'est à dire qu'elle peut non seulement intervenir la première année du bail mais également les années suivantes ;



' le constat selon lequel les parties ont entendu assujettir le loyer à une clause d'indexation, le fait que de telles clauses soient fréquemment introduites dans les baux commerciaux et les considérations de sécurité juridique ou de force obligatoire ne peuvent exercer une influence sur la caractérisation de la divisibilité ou de l'indivisibilité de la clause ;



' réputer non écrit le seul deuxième paragraphe de l'article 4.4 du bail dénaturerait la volonté des parties puisque seul subsisterait le principe de l'indexation sans les conditions et modalités prévues par les parties. Dès lors, le premier et le second paragraphe sont interdépendants ;



' il y a un manque de cohérence à considérer que le droit commande de réputer non écrite les clauses d'indexation assorties d'un plancher quelles que soient les modalités selon lesquelles elles ont été mises en 'uvre, ainsi que de considérer que l'absence de préjudice et un principe de proportionnalité commanderaient de réputer la clause litigieuse divisible ;



' la clause stipule que l'indexation ne peut conduire à un loyer indexé inférieur au loyer de base originel, dès lors elle contrevient aux dispositions de l'article L 145-39 du code monétaire et financier et doit être réputée non écrite ;



' faute de clause d'indexation licite, le loyer n'aurait jamais dû varier depuis le 25 septembre 2007, date de prise d'effet du bail originel et le montant du dépôt de garantie aurait dû rester figé. Dès lors, la société Novil est redevable du trop-perçu de loyers et des sommes détenues au titre du dépôt de garantie induit par l'application de cette clause.

 



Par dernières écritures en date du 13 janvier 2023 régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société SPF2 Amiral sollicite de la cour de :



- recevoir la société SPF2 Amiral en ses demandes, fins et conclusions et la dire bien fondée ;



Y faisant droit,



- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré sauf en ce qu'il a déclaré non écrite la stipulation figurant à l'article IV 4) du bail liant les parties en date du 30 novembre 2007 écrite comme suite : « La variation de l'indice choisi sera prise en considération aussi bien dans le cas de hausse que dans le cas de baisse de l'indice, mais l'application de la présente clause d'indexation ne pourra en aucun cas entraîner un montant de loyer inférieur au loyer de base initial précisé aux conditions particulières. » ;



Par voie de conséquence,

A titre principal,



- juger que la clause d'indexation du bail commercial en date du 30 novembre 2007 est valable ;



- débouter la société Novil de l'ensemble de ses demandes ;



A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour de céans devait considérer que l'existence d'un plancher à l'indexation devait être réputée non écrite,



- juger que seul l'alinéa de la clause d'indexation stipulant que « La variation de l'indice choisi sera prise en considération aussi bien dans le cas de hausse que dans le cas de baisse de l'indice, mais l'application de la présente clause d'indexation ne pourra en aucun cas entraîner un montant de loyer inférieur au loyer de base initial précisé aux conditions particulières. » doit être réputé non écrit ;



- juger que la clause d'indexation du bail commercial en date du 30 novembre 2007 doit s'appliquer pour le surplus comme ce qu'à considéré le tribunal judiciaire d'Annecy ;



- juger que le jeu de l'indexation n'a jamais conduit, depuis la prise d'effet du bail commercial en date du 30 novembre 2007, à la fixation du loyer à un montant inférieur au loyer de base initial ;



- débouter la société Novil de l'ensemble de ses demandes ;



A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour de céans devait considérer que la clause d'indexation du bail commercial en date du 30 novembre 2007 devait être réputée non écrite dans son ensemble,



- juger que la restitution des loyers trop-perçus est soumise à la prescription quinquennale ;



- juger que la TVA n'a pas à être restituée ;



- débouter la société Novil de l'ensemble de ses demandes ;



En y ajoutant,



- condamner la société Novil à payer à la société SPF2 Amiral la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de maître Clarisse Dormeval, avocat au barreau de Chambéry, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



Au soutien de ses prétentions, la société SPF2 Amiral fait valoir essentiellement que :



' le jeu de l'indexation n'a jamais été faussé puisque l'indexation était réciproque et la stipulation prévoyant que l'application de la clause ne pourra en aucun cas entraîner un montant de loyer inférieur au loyer de base initial n'a jamais trouvé lieu à s'appliquer en pratique ;



' la clause d'indexation ne contrevient pas aux dispositions de l'article L 112-1 du code monétaire et financier qui prévoit que la période d'indexation doit correspondre à la période de variation des indices ;



' le bail prévoit expressément que la variation de l'indice choisi sera pris en considération aussi bien dans le cas de hausse que dans le cas de baisse de l'indice, dès lors, la clause d'indexation n'écarte pas toute réciprocité ;



' seule la stipulation prévoyant un loyer plancher doit être réputée non écrite dans la mesure où la stipulation litigieuse est divisible et dissociable des autres stipulations . En outre,les parties avaient la volonté d'indexer annuellement les loyers du bail commercial, et écarter les variations de l'indexation ne saurait donc remettre en cause cette commune intention ;

' le jeu de l'indexation n'ayant jamais conduit à une fixation du loyer à un montant inférieur à celui du loyer de base initial, aucune somme ne doit être remboursée à la société Novil, et dans le cas contraire, la prescription quinquennale doit s'appliquer à la restitution du trop-perçu des loyers.





Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.




Une ordonnance en date du 23 janvier 2023 clôture l'instruction de la procédure. 


 





MOTIFS ET DECISION





L'appel étant limité aux deux premiers chefs du jugement entrepris, il y a lieu d'observer que la désignation d'un expert judiciaire aux fins de donner un avis sur le montant du loyer commercial en tenant compte notamment de l'évolution des facteurs locaux de commercialité n'est pas remise en cause. La demande d'infirmation porte les dispositions du jugement, ayant déclaré non écrite une partie de la clause d'indexation, et sur le rejet de la demande de restitution des loyers et du surplus de dépôt de garantie perçus en application de la clause litigieuse.







I ' Sur la validité de la clause d'indexation





Les clauses dites d'échelle mobile, c'est-à-dire permettant d'indexer le montant du loyer commercial en fonction d'un indice convenu entre les parties sont licites, sous réserve que la réciprocité de la variation, à la hausse comme à la baisse, soit prévue (3ème civ.14 janvier 2016, n°14-24-681, 3ème civ. 30 juin 2021, n°19-23.038).



L'article IV du contrat de bail liant les parties stipule : « le loyer sera automatiquement indexé le 1er janvier de chaque année en fonction de l'indice national du coût de la construction publié par l'INSEE et pour la première fois à la date stipulée à l'article 8 des conditions générales.

La variation de l'indice choisi sera prise en considération aussi bien dans le cas de hausse que dans le cas de baisse de l'indice, mais l'application de la présente clause d'indexation ne pourra en aucun cas entraîner un montant de loyer inférieur au loyer de base initial précisé aux conditions particulières. »



C'est par une exacte appréciation des circonstances de la cause que le premier juge a considéré que l'instauration d'un plancher à la baisse faussait le jeu normal de la variation et contrevenait aux dispositions de l'article L112-1 alinéa 2 du code monétaire et financier, lequel prévoit : « est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision ». La fixation de planchers ou de plafonds fait également échec au mécanisme de révision légale prévu par l'article L145-39 du code de commerce.



Toutefois, seule la stipulation créant la distorsion prohibée doit être réputée non écrite, sauf à ce qu'il y ait indivisibilité, laquelle ne doit pas s'entendre comme étant la condition essentielle de conclusion du contrat pour l'une des parties. Force est de constater en l'espèce, que la clause peut recevoir application si la seconde phrase : « la variation de l'indice choisi sera prise en considération aussi bien dans le cas de hausse que dans le cas de baisse de l'indice, mais l'application de la présente clause d'indexation ne pourra en aucun cas entraîner un montant de loyer inférieur au loyer de base initial précisé aux conditions particulières » est réputée non écrite, l'indexation prévue par les parties pouvant parfaitement être conservée. A ce titre, plusieurs décisions de la Cour de cassation ont énoncé ce principe, et rappelé qu'il n'y avait pas lieu à éradication de l'intégralité de la clause et à l'anéantissement du principe de l'indexation des loyers, si la neutralisation de la stipulation illégale suffisait à faire respecter l'interdiction de l'article L112-1 du code monétaire et financier (3ème civ. 29 novembre 2018, n°17-23.058, 3ème civ. 30 juin 2021, n°20-11.685).



Dans ces conditions, le jugement de première instance sera confirmé sur ce premier chef.







II ' Sur la demande de restitution des loyers et d'une partie du dépôt de garantie





L'annulation partielle de la clause d'indexation des loyers conduit au rejet de la demande de restitution des loyers et dépôt de garantie. La décision de première instance doit être confirmée sur ce second chef, reposant sur une exacte appréciation des circonstances de la cause par le premier juge, qui a retenu que le plancher prévu illégalement par la clause d'indexation n'a pas trouvé application pendant l'exécution du bail, de sorte qu'il n'y avait pas lieu à retenir l'existence d'un trop-perçu.







III - Sur les demandes accessoires





L'équité commande d'accorder la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à la société SPF2, et de rejeter les demandes de la société Novil. Cette dernière sera également condamnée à prendre en charge les dépens de la procédure d'appel, avec distraction au profit de Mme Clarisse Dormeval, avocate au barreau de Chambéry.













PAR CES MOTIFS





La Cour, statuant publiquement, par décision contradictoire,



Confirme le jugement entrepris en ses dispositions dont appel,



Y ajoutant,



Condamne la société Novil aux dépens de l'instance d'appel, avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Mme Clarisse Dormeval, avocate au barreau de Chambéry,



Condamne la société Novil à payer à la société SP2F la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.











Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,



et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.





Le Greffier, La Présidente,



























































Copie délivrée le 09 mai 2023

à

Me Michel FILLARD

Me Clarisse DORMEVAL







Copie exécutoire délivrée le 09 mai 2023

à

Me Clarisse DORMEVAL

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