9 March 2023
Cour d'appel de Paris
RG n° 22/20471

Pôle 6 - Chambre 2

Texte de la décision

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 09 MARS 2023



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/20471 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGZWG



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Novembre 2022 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Paris - RG n° 22/06702





APPELANTE



Fédération NATIONALE DES SYNDICATS DES SALARIES DES MINES ET DE L'ENERGIE CGT (FNME-CGT) Agissant en la personne de son Secrétaire Général en exercice, Monsieur [J] [G], dûment mandaté à cet effet et domicilié audit siège en cette qualité

[Adresse 1]

[Localité 8]



Représentée par Me Audrey SCHWAB, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056





INTIMÉES



S.A. ENEDIS

[Adresse 2]

[Localité 7]



Représentée par Me Nicolas CZERNICHOW, avocat au barreau de PARIS, toque : L0305



Fédération CFE-CGC ENERGIES

[Adresse 4]

[Localité 7]



Non représentée



Fédération CHIMIE ENERGIE CFDT (FCE-CFDT)

[Adresse 3]

[Localité 7]



Non représentée



Fédération NATIONALE DE L'ENERGIE ET DES MINES FORCE OUVRIERE (FNME-FO)

[Adresse 6]

[Localité 7]



Non représentée



S.A. GRDF

[Adresse 5]

[Localité 7]



Représentée par Me Nicolas CZERNICHOW, avocat au barreau de PARIS, toque : L0305



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 917 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Paule ALZEARI, présidente, chargée du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Paule ALZEARI, présidente

Olivier FOURMY, Premier Président de chambre

Christine LAGARDE, conseillère



Greffière lors des débats : Mme Alicia CAILLIAU



ARRÊT :

- par défaut



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile



- signé par Marie-Paule ALZEARI, présidente et par Alicia CAILLIAU, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***

EXPOSÉ DU LITIGE :



Les sociétés GRDF et ENEDIS (anciennement ERDF) ont été créées le 1er janvier 2008 pour se conformer à l'exigence posée par l'article 23 de la loi du 9 août 2004 de séparer les activités de distribution d'énergie des activités de production transport et commercialisation tant du gaz que de l'électricité.



La société ENEDIS est une filiale à 100% de la société EDF. Elle exploite et gère le système de distribution d'électricité français et permet aux consommateurs l'accès au réseau des fournisseurs. Elle compte plus de 38.500 salariés et dispose pour la représentation de son personnel d'un comité social et économique central (CSE-C) et de 27 comités sociaux et économiques d'établissements (CSE-E).



La société GRDF est une filiale à 100% de la société ENGIE. Elle assure l'acheminement du gaz naturel vers 11 millions de clients répartis dans plus de 9.500 communes. Elle compte plus de 11.000 salariés et dispose pour la représentation de son personnel d'un comité social et économique central (CSE-C), de sept comités sociaux et économiques d'établissement (CSE-E), soit six CSE-E régionaux pour les directions réseaux (DR) et les directions Client Territoire (DCT) et un CSE-E pour le siège et les fonctions centrales.



A l'exception des salariés des établissements des fonctions centrales d'ENEDIS (2.181) et des fonctions centrales de GRDF (1.000),le personnel de ces deux sociétés appartient au Service Commun, institué par la loi précitée du 9 août 2004, codifié à l'article L.111-71 du code de l'énergie : 'La création d'un service commun, non doté de la personnalité morale, entre les sociétés issues de la séparation juridique des activités exercées par Electricité de France et GDF-Suez en application de l'article L. 111-57 est obligatoire, dans le secteur de la distribution, pour la construction des ouvrages, la maîtrise d'oeuvre de travaux, l'exploitation et la maintenance des réseaux, les opérations de comptage ainsi que d'autres missions afférentes à ces activités. Ces services communs peuvent réaliser des prestations pour le compte des entreprises locales de distribution et des distributeurs et autorités organisatrices mentionnées respectivement aux III et IV de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales.'.



Ce service commun qui couvre tout le territoire national est constitué de :


25 Directions Régionales (DR) d'ENEDIS chargées du réseau de distribution électrique, chacune étant dotée d'un CSE-E,

6 Directions Réseaux (DR) et Directions Clients Territoires (DCT) de GRDF chargées du réseau de distribution gaz, chacune étant dotée d'un CSE-E,

4 Unités Opérationnelles Nationale (UON) ENEDIS-GRDF chargées du domaine logistique et des fonctions transversales du service commun (entités mixtes).




ENEDIS et GRDF sont chacune dotées d'un CSE-C.



Compte tenu de la spécificité tenant à l'existence d'un service commun, l'accord d'entreprise du 14 novembre 2019 relatif à la mise en place des nouvelles institutions représentatives du personnel des UON a prévu la Délégation Spéciale, émanation des deux CSE-C composée des membres titulaires des CSE centraux appartenant aux services, et des RS CSE-C, non dotée de la personnalité morale.



Les 4 UON précitées sont les suivantes :

- Unité Opérationnelle Nationale Serval (578 salariés),

- Unité comptable Nationale (382 salariés),

- Unité Informatique et Telecom (435 salariés),

- Unité Opérationnelle RH et médico sociale (UONRH-MS) regroupant 1.169 agents. Cette unité assure la mission d'opérateur RH, médical et social dans les domaines suivants : gestion du contrat de travail, études RH, logement, alternance, interfaces CAS/CCAS, gestion des avantages en nature énergie (ANE) des inactifs de la branche des IEG, médecine conseil et médecine du travail, service social. Les équipes de l'opération RH comportent 476 salariés. Les 686 agents restant appartiennent au Service Médial et Service Social : Médecine conseil, Médecine du travail, Service Social.



Les 4 UON partagent un CSE commun , le CSE des UON.



Les sociétés ENEDIS et GRDF ont opté pour la mise en place d'un service de prévention et de santé au travail autonome inter-établissement, en application de l'article D.4622-1 du code du travail, administré par l'employeur et placé sous la surveillance du comité social et économique.



Du fait de l'existence de leur Service Commun, ENEDIS et GRDF administrent conjointement les services de prévention et de santé au travail autonomes inter-établissements dans le périmètre de leur Service Commun.



En 2008, ENEDIS et GRDF ont créé huit services de santé au travail (SST) autonomes inter-établissements, au niveau de chacune des huits unités de services régionaux (USR).



A compter du 1er janvier 2019, une réorganisation du Service Commun a cependant fait disparaître les anciennes USR et a concentré la gestion des questions médico-sociales au sein d'une seule entité mixte : l'UONRH-MS.



Les huit services de santé au travail afférents aux salariés des services communs, qui ont conservé leur périmètre de compétence régionale, sont désormais rattachés à l'unité UONRH-MS, qui assure le pilotage de toutes les activités relevant du domaine médico-social au sein du Service Commun et à laquelle sont rattachés tous les contrats de travail des médecins du travail du Service Commun.



Le 26 juillet 2019, la direction régionale des entreprises de la concurrence et de la consommation du travail et de l'emploi de la région Ile-de-France (DIRECCTE IDF) a accordé pour une période de 18 mois un agrément au service de santé au travail inter-établissements ENEDIS-GRDF. Au visa des articles D.4622-10 et D.4622-11 du code du travail, la DIRECCTE a invité les sociétés à régler la question du double niveau de contrôle social avec les partenaires collectifs.

C'est ainsi que, compte tenu des spécificités de l'organisation des services communs aux sociétés GRDF et ENEDIS, deux accords collectifs d'entreprise 'relatif(s) aux modalités de la surveillance et du contrôle social du service santé au travail du service commun d'ENEDIS et de GRDF' identiques ont été signés au sein des sociétés GRDF et d'ENEDIS respectivement les 6 et 12 avril 2022 par les organisations syndicales représentatives CFDT, CFE-CGC et FO, mais pas par la CGT.



Aux termes du préambule, les accords rappellent d'abord :

1° l'organisation spécifique des 8 SST autonomes inter-entreprises énoncée supra et le souhait de la direction de remplacer les 8 SST autonomes inter-établissements actuels par un SST autonome inter-établissement unique compétent pour l'ensemble du service commun.



2° les dispositions réglementaires applicable au SST inter établissement selon lesquelles 'en tout état de cause, il doit être administé par l'employeur, sous la surveillance et le contrôle du CSEC et des CSEE intéressés, selon les articles D.4622-6, D.4622-10 et D.4622-11 du code du travail'.



3° les IRP du personnel du service commun au périmètre du service commun ENEDIS et GRDF':

- la délégation spéciale

- le CSE des UON

- les CSE des établissements du service commun dans lesquels sont répartis les salariés dont le suivi médical est assuré par les médecins du travail des SST.



Le préambule précise ensuite que :'L'organisation atypique des IRP du Service Commun d'ENEDIS et de GRDF ne permet pas d'y appliquer strictement les dispositions du code du travail qui fixent les règles de répartition des attributions liées à la surveillance et au contrôle social du SST inter-établissements entre les CSE du niveau 'central' (CSE central) et les CSE du niveau 'local' (CSE d'établissement)'.



Le préambule indique enfin que : 'Soucieux d'assurer un fonctionnement efficace et de garantir la surveillance et le contrôle social du SST autonome inter-établissements du service commun, les OSR et les directions d'ENEDIS et de GRDF ont décidé d'organiser, par voie d'accord collectif d'entreprise, sur le fondement de l'article D 4622-8 du code du travail, les conditions particulières dans lesquelles s'exerceront la surveillance et le contrôle social et les prérogatives des instances représentatives du personnel sur les questions relatives à l'organisation et au fonctionnement du service de santé au travail autonome inter-établissement du service commun d'ENEDIS et de GRDF'.



L'article 3 de ces accords détaille les modalités de la surveillance et du contrôle social du SST par thématique. L'annexe 1 présente un tableau récapitulatif.



Selon les articles 3.1 et 3.2, la demande d'agrément du SST présentée à l'inspection du travail et le rapport annuel administratif et financier ainsi que les rapports annuels d'activité des médecins relèvent du pouvoir de consultation de la délégation spéciale, tandis que les CSEE disposent d'une information a posteriori et de la possibilité de formuler des observations.



Selon les articles 3.3 à 3.6, seul le CSE des UON est consulté pour avis sur :

- la nomination et l'affectation initiale des médecins du travail (article 3.3)

- les changements d'affectation ou de périmètre d'activité des médecins du travail (article 3.4)

- le licenciement ou la rupture conventionnelle des contrats des médecins du travail (article 3.5)

- la rupture ou non-renouvellement de CDD (article 3.6)

tandis que les CSEE concernés sont seulement informés préalablement aux changements d'affectation ou de périmètre d'activité des médecins avec la possibilité d'exprimer des observations écrites sur les changements (3.4).

Les sujets mentionnés aux articles 3.3,3.5 et 3.6 ne donnent pas lieu à information des CSEE.



Selon l'article 3.7, les autres thématiques relatives à l'organisation et au fonctionnement du SST, qui ne sont pas spécifiquement traitées dans l'accord donnent lieu à :


consultation du CSE des UON pour avis sur les sujets qui concernent le SST dans son ensemble et n'imposent pas de mesures d'adaptations spécifiques à un ou plusieurs établissement et sur les questions d'implantation des structures si les mesures d'adaptation concernent plusieurs établissements,

consultation des CSEE concernés sur les questions d'implantation des structures si des mesures d'adaptation spécifiques à un établissement sont envisagées.




Dans ces conditions, la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie, considérant que les accords qu'elle n'a pas signés suppriment le contrôle social impératif de double niveau (CSE/CSEE) sur le service autonome de santé au travail inter établissement institué par les dispositions réglementaires du code du travail (articles D.4622-5 à D.4622-13), a engagé une procédure selon assignation à jour fixe.



Par jugement du 22 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :


rejeté l'exception de nullité des assignations respectivement délivrées à l'encontre des sociétés ENEDIS et GRDF les 2 et 3 juin 2022 ;

débouté la FNME-CGT de l'intégralité de ses demandes ;

condamné la FNME-CGT aux dépens de l'instance ;

condamné la FNME-CGT à verser à la société ENEDIS et à la société GRDF la somme de 3.000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure ;

débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

rappelé que l'exécution provisoire est de droit.




Selon déclaration du 14 décembre 2022, la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie a interjeté appel de cette décision.



Par ordonnance en date du 16 décembre 2022, elle a été autorisée à assigner à jour fixe les parties intimées au visa de l'article 917 du code de procédure civile.



PRÉTENTIONS DES PARTIES :



Par dernières conclusions transmises par RPVA le 6 février 2023, la FNME-CGT demande à la cour de:



' Vu les articles D. 4622-9 et suivants du Code du travail

Vu l'article L. 2132-3 du Code du travail ;

Vu l'article L. 2262-14 du Code du travail ;



INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de PARIS le 22 novembre 2022 en ce qu'il a :



o DEBOUTE la FNME-CGT de l'intégralité de ses demandes ;



o CONDAMNE la FNME-CGT aux dépens de l'instance ;



o CONDAMNE la FNME-CGT à verser à la société ENEDIS et à la société GRDF la somme de 3.000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



ET STATUANT A NOUVEAU :



JUGER que les stipulations des accords collectifs relatif aux modalités de la surveillance et du contrôle social du service santé au travail du service commun d'ENEDIS et de GRDF des 6 et 12 avril 2022 contreviennent aux dispositions légales et réglementaires obligatoires en matière de contrôle social des Services de santé au travail inter-établissement



EN CONSÉQUENCE,



ANNULER en toutes leurs dispositions l'accord collectif d'entreprise relatif aux modalités de la surveillance et du contrôle social du service santé au travail du service commun d'ENEDIS et de GRDF du 6 avril 2022 conclu au sein de la société GRDF et l'accord collectif d'entreprise relatif aux modalités de la surveillance et du contrôle social du service santé au travail du service commun d'ENEDIS et de GRDF du 12 avril 2022 conclu au sein de la société ENEDIS,



A TITRE SUBSIDIAIRE,



ANNULER les dispositions suivantes de l'accord collectif d'entreprise relatif aux modalités de la surveillance et du contrôle social du service santé au travail du service commun d'ENEDIS et de GRDF du 6 avril 2022 conclu au sein de la société GRDF et l'accord collectif d'entreprise relatif aux modalités de la surveillance et du contrôle social du service santé au travail du service commun d'ENEDIS et de GRDF du 12 avril 2022 conclu au sein de la société ENEDIS':



- Article 3.1 al.2

- Article 3.2

- Article 3.3

- Article 3.4

- Article 3.5

- Article 3.6

- Article 3.7



EN TOUT ETAT DE CAUSE,



CONDAMNER les sociétés ENEDIS et GRDF à verser chacune à la FNME-CGT la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession qu'elle défend ;



CONDAMNER les sociétés ENEDIS et GRDF à devoir verser chacune à la FNME-CGT la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,



CONDAMNER les sociétés ENEDIS et GRDF pour moitié chacune aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction, pour ceux la concernant, au profit de la SELARL 2H AVOCATS prise en la personne de Maître Audrey SCHWAB et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.'



Par dernières conclusions transmises par RPVA le 8 février 2023, les intimés demandent à la cour de :



'Vu l'article 117 du Code de procédure civile

Vu les articles L. 2131-3 et R. 2131-1 du Code du travail

Vu les articles L. 4622-1, D. 4622-6, D. 4622-7, D. 4622-8, D. 4622-10 et D. 4622-11 du Code du travail

Vu les articles L. 2316-1 et L. 2316-20 du Code du travail

Vu l'article L. 2262-15 du Code du travail



IN LIMINE LITIS



CONSTATER l'absence de pouvoir régulier du Secrétaire Général de la FNME-CGT pour interjeter appel du jugement du 22 novembre 2022 et représenter la FNME-CGT devant la Cour d'appel de Paris ;



En conséquence,



DECLARER irrecevable la déclaration d'appel du 14 décembre 2022



DECLARER nulles les assignations à jour fixe respectivement signifiées aux sociétés GRDF et ENEDIS les 26 et 28 décembre 2022.



Surabondamment,



INFIRMER jugement du Tribunal Judiciaire de Paris du 22 novembre 2022 en ce qu'il a :

REJETE l'exception de nullité des assignations introductives d'instance respectivement signifiées aux sociétés ENEDIS et GRDF les 02 et 03 juin 2022,



Et, statuant à nouveau sur ce point



CONSTATER l'absence de pouvoir régulier du Secrétaire Général de la FNME-CGT pour agir en justice et représenter la fédération syndicale dans le cadre de la première instance ;

En conséquence,



DECLARER nulles les assignations respectivement délivrées aux sociétés ENEDIS et GRDF les 2 et 3 juin 2022 ;



DEBOUTER la FNME-CGT de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions.



A TITRE PRINCIPAL



CONFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire de Paris du 22 novembre 2022 en ce qu'il a':



DEBOUTE la FNME-CGT de l'intégralité de ses demandes ;



CONDAMNE la FNME-CGT aux dépens de l'instance ;



CONDAMNE la FNME-CGT à verser à la société ENEDIS et à la société GRDF la somme de 3.000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



A TITRE SUBSIDIAIRE, si par extraordinaire la Cour de céans devait infirmer le jugement de première instance et annuler les accords collectifs des 6 et 12 avril 2022 :

MODULER les effets de sa décision en réservant ces effets à l'avenir exclusivement et en les différant de 6 mois au minimum à compter du prononcé de sa décision.



EN TOUT ETAT DE CAUSE



CONDAMNER la Fédération FNME-CGT à payer aux sociétés ENEDIS et GRDF, la somme complémentaire de 1.500 € à chacune (soit 3.000 € au total) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,



CONDAMNER la FNME-CGT aux entiers dépens de l'instance en appel que les sociétés intimées se chargeront de répartir équitablement entre elles.'



Il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées et visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits de la cause conformément aux dispositions de l'article 455 du code procédure civile.





EXPOSÉ DES MOTIFS :




A titre liminaire, sur la recevabilité de l'action de la FNME-CGT




Les sociétés ENEDIS et GRDF font valoir que, pour être régulièrement habilité à agir en justice au nom de la Fédération Nationale des syndicats des salariés des Mines et de l'Energie CGT, son secrétaire général doit pouvoir s'appuyer sur une décision collective du Secrétariat fédéral prise à l'occasion d'une réunion de cette instance, laquelle doit en principe avoir été actée dans le compte rendu de cette réunion adressée aux membres du Comité exécutif fédéral.

Elle explique que dans le cadre de l'appel, l'appelante ne produit aucun mandat de représentation habilitant le Secrétaire général pour agir en appel à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire.

Elles soutiennent que tant la déclaration d'appel du 14 décembre 2022 que les assignations à jour fixe signifiées respectivement les 26 et 28 décembres 2022 sont affectées d'une irrégularité de fond qui doit conduire à l'irrecevabilité de l'appel.

Surabondamment, elles ajoutent qu'une irrégularité de fond affecte la validité de la citation en justice initiale ce qui induit la nullité des assignations introductives d'instance.



En premier lieu, la FNME-CGT soutient qu'elle n'avait aucune obligation de donner un nouveau pouvoir à son Secrétaire Général pour l'exercice d'une voie de recours, et ce pas plus pour le présent appel, que pour un éventuel pourvoi en cassation.



En deuxième lieu, la FNME-CGT soutient que le secrétaire général dispose d'un pouvoir spécial pour représenter la Fédération. A cet égard, elle rappelle que les statuts de la FNME-CGT adoptés le 16 mars 2022 au 7ème Congrès Fédéral, régulièrement déposés avec notamment la confirmation du renouvellement du mandat de Monsieur [J] [G] en tant que Secrétaire Général, prévoient que les actions judiciaires sont décidées par le Secrétariat fédéral mandatant en principe le Secrétaire Général ou, à défaut, un autre membre du Secrétariat Fédéral.



La FNME-CGT précise que le Secrétaire Général dispose aux termes des statuts de la FNME-CGT d'un mandat général et permanent pour représenter en justice la Fédération.



Enfin, la FNME-CGT soutient que la cour ne pourra que confirmer le jugement déféré sur ce point dans la mesure où il n'existe aucun doute sur l'adoption par le Secrétariat fédéral de la délibération car :




Celle-ci ayant été inscrite à l'ordre du jour et transmise en version projet aux membres du Secrétariat Fédéral à cette occasion,

Présentée par la responsable du DLAJ et décidée par le Secrétariat fédéral comme en atteste le membre signataire de la délibération actant cette décision du Secrétariat, ainsi que le Secrétaire Général confirmant le mandat reçu lors de cette réunion,





De manière exceptionnelle, et compte tenu de la décision rendue dans l'autre contentieux par le tribunal judiciaire, le Secrétariat fédéral avait même rappelé expressément que Monsieur [E] [Z] était lui-même mandaté pour signer la délibération actant la décision du Secrétariat fédéral.

La mention de la décision ainsi prise au compte-rendu du Secrétariat fédéral, celui-ci ayant été diffusé aux membres du Comité Exécutif Fédéral et de la Commission Financière et de Contrôle.




Ainsi, la présente action en justice a été décidée par le Secrétariat fédéral en parfaite conformité avec les règles statutaires de la Fédération.



L'article 11.2 relatif au fonctionnement du Secrétariat Fédéral dispose que :

« Le Secrétariat Fédéral se réunit régulièrement à la fréquence décidée par le Comité Exécutif Fédéral et autant qu'il le juge nécessaire.

Chaque réunion fait l'objet d'un compte rendu qui est adressé aux membres du Comité Exécutif Fédéral.

Il soumet ses propositions d'organisation et de répartition des tâches au Comité Exécutif Fédéral.

Il prend les décisions relatives à l'administration et à la gestion de la Fédération.

Le Secrétaire Général, ou un membre du Secrétariat Fédéral dûment mandaté, représentent la Fédération dans tous les actes administratifs et civils. Toute action en justice peut être décidée par le Secrétariat Fédéral. Le Secrétaire Général représente la Fédération en justice, et chaque membre du Secrétariat Fédéral peut être habilité à représenter la Fédération en justice sur mandat de celui-ci. »



S'agissant de l'appel, force est de constater que l'appelante produit un écrit du Secrétariat Fédéral établi lors de la réunion du 24 mai 2022 qui indique que le Secrétariat Fédéral 'décide ce jour de saisir le tribunal judiciaire compétent afin que ces accords contrevenant aux dispositions légales et réglementaires soient annulés et que Les sociétés ENEDIS et GRDF soient condamnées à indemniser le préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession.'



Il en résulte que le mandat a été donné aux fins d'intenter une action spécifique, mandat qui nécessairement habilite à exercer toutes les voies de recours dans le prolongement donné pour agir en justice.



Sur la validité des assignations introductives d'instance, l'appelante justifie de la convocation du 19 mai 2022 pour la réunion du Secrétariat Fédéral prévu le 24 mai suivant, convocation qui comporte l'ordre du jour détaillé mais également les annexes ainsi que le point 7 de l'ordre du jour relatif au Service de Santé au Travail.

Est également joint à la convocation le projet de délibération à adopter.



La Fédération joint également le relevé de décisions du Secrétariat Fédéral mardi 24 mai 2022 ainsi que le courriel de sa diffusion aux membres du Comité Exécutif Fédéral.

Il résulte de ce document que le Secrétariat Fédéral valide la démarche et la signature de la délibération associée par [E] [Z] : 'Suite démarche juridique déjà validée en SF (recours LPFSS) ' Délibération du SF pour la suite de la procédure juridique.'



Est enfin produit un document signé par Monsieur [E] [Z] tel que mentionné précédemment par lequel le Secrétariat Fédéral mandate Monsieur [J] [G] pour mettre en 'uvre cette délibération et représenter la Fédération en justice dans le cadre de cette action judiciaire visant à obtenir l'annulation des accords collectifs conclus les 6 et 12 avril 2022.



Cependant, il doit être considéré que l'e-mail produit en date du 27 mai 2022, en l'absence de plus amples précisions, n'établit nullement l'effectivité d'une diffusion auprès de l'ensemble des membres du Comité Exécutif Fédéral ainsi que cela est prévu par l'article 11.2 des statuts précité.



En effet, les parties appelantes incidents font utilement valoir que le courriel daté du 27 mai 2022 a été adressé à partir de l'adresse « coordination@fnme-cgt » à cette même adresse.



Surtout, le relevé de décisions produit ne fait nullement mention des conditions d'adoption des décisions dont il est fait état.

Les intimées font justement valoir que ce document n'est pas signé et ne comporte pas la qualité de son rédacteur.



À cet égard, les seules attestations de Messieurs [E] [Z] et [J] [G], à défaut du témoignage des autres personnes mentionnées comme présentes, sont insuffisantes à apporter la démonstration des conditions dans lesquelles ont été adoptées les décisions figurant sur le relevé produit.



Il est enfin à noter que le document produit relatif à la délibération ne mentionne nullement qu'il s'agit d'une résolution pas plus qu'il ne relate les conditions du vote.



À cet égard, ce document, qualifié de 'délibération associée', exclusivement signé par Monsieur [E] [Z], membre du Secrétariat Fédéral, qui n'est pas mentionné dans la liste déposée en mairie quant aux personnes chargées de l'administration , de la direction du syndicat et dont il n'est justifié de la qualité que par la production d'un trombinoscope interne non daté, est insuffisamment probant du caractère collectif et régulier de la décision.



Il en résulte que la Fédération ne rapporte pas la preuve d'un pouvoir régulier habilitant son Secrétaire Général à diligenter une action en justice aux fins d'annulation des accords litigieux.

Cette absence de pouvoir régulier constitue nécessairement une irrégularité de fond qui affecte la validité des actes introductifs d'instance.

Il convient donc de déclarer nulles et de nul effet les assignations introductives d'instance signifiées aux sociétés ENEDIS et GRDF les 2 et 3 juin 2022 en application des dispositions de l'article 117 code de procédure civile.

Le jugement est donc infirmé sur ce point.



Les demandes de la Fédération Nationale des syndicats des salariés des Mines et de l'Energie CGT n'ont donc pas à être examinées.



Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile



La Fédération Nationale des syndicats des salariés des Mines et de l'Energie CGT, qui succombe, doit être condamnée aux dépens et déboutée en sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera fait application de cet article au profit des sociétés ENEDIS et GRDF.



PAR CES MOTIFS :



Statuant publiquement par décision rendue par défaut, en dernier ressort



Infirme le jugement sauf en ses dispositions ayant condamné la FNME-CGT aux dépens et à verser aux sociétés ENEDIS et GRDF la somme de 3000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Statuant à nouveau et y ajoutant,



Déclare nulles et de nul effet les assignations introductives d'instance signifiées respectivement aux sociétés ENEDIS et GRDF les 2 et 3 juin 2022,



Condamne la Fédération Nationale des syndicats des salariés des Mines et de l'Energie CGT aux dépens d'appel,



Condamne la Fédération Nationale des syndicats des salariés des Mines et de l'Energie CGT à payer aux sociétés ENEDIS et GRDF chacune la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



La Greffière, La Présidente,

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