8 March 2023
Cour d'appel de Riom
RG n° 22/02038

Chambre Commerciale

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale





Surendettement







ARRET N°



DU : 08 Mars 2023



N° RG 22/02038 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F4YU

VTD

Arrêt rendu le huit Mars deux mille vingt trois



Sur APPEL d'une décision rendue le 03 octobre 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire du PUY EN VELAY (RG n° 11-22-0107)



COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

Madame Virginie DUFAYET, Conseiller



En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors des débats et de la mise à disposition



ENTRE :



M. [B] [U]

[Adresse 12]

[Localité 8]



Non comparant, non représenté - AR signé



Mme [C] [P] épouse [U]

[Adresse 12]

[Localité 8]



Non comparante, non représentée - AR signé



APPELANTS



ET :



Société [33]

Cabinet d'avocats

[Adresse 15]

[Localité 7]



Non comparante, non représentée - AR signé



S.A. [19]

Service Contentieux Case courrier 8M

[Localité 16]



Non comparante, non représentée - AR signé

Société [30]

[Adresse 6]

[Localité 9]



Non comparante, non représentée - AR signé



Société [32]

Chez [31]

[Adresse 5]

[Localité 17]



Non comparante, non représentée - AR signé



S.A. [20]

AG Siège social

[Adresse 14]

[Localité 18]



Non comparante, non représentée - AR signé



Société SIP [Localité 7]

[Adresse 1]

[Adresse 21]

[Localité 7]



Non comparante, non représentée - AR signé



S.A.S. [28]

[Adresse 2]

[Adresse 26]

[Localité 10]

Société SGC [Localité 29]

[Adresse 3]

[Adresse 22]

[Localité 7]



Non comparante, non représentée - AR signé



[23]

Chez [24]

[Adresse 27]

[Localité 11]



Non comparante, non représentée - AR signé



Société EDF SERVICE CLIENT

Chez [28]

[Adresse 2]

[Localité 10]



Non comparante, non représentée - AR signé



Organisme POLE EMPLOI AUVERGNE RHONE ALPES

[Adresse 4]

[Adresse 25]

[Localité 13]



Non comparant, non représenté - AR signé



INTIMÉS





DÉBATS :

Après avoir entendu les parties en application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, à l'audience publique du 12 Janvier 2023, sans opposition de leur part, Madame THEUIL-DIF, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.



ARRET :

Prononcé publiquement le 08 Mars 2023 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




Exposé du litige :



M. [B] [U] et Mme [C] [P] épouse [U] ont saisi la commission de surendettement des particuliers de la Haute-Loire le 12 août 2021 d'une demande tendant au traitement de leur situation de surendettement.



Le 17 septembre 2021, la commission a déclaré leur demande recevable.



Le 11 mars 2022, elle a élaboré des mesures imposées sous la forme d'un rééchelonnement des dettes sur une période de 144 mois afin de préserver leur résidence principale, au taux maximum de 2,25 % pour le prêt immobilier (reprise des conditions contractuelles) et un taux inférieur au taux légal pour tout ou partie des mesures. Elle a retenu une capacité de remboursement maximale de 674 euros, et un premier palier de huit mois pour régulariser les dettes pénales et réparations pécuniaires auprès du SIP [Localité 7].



La SELARL [33] a contesté ces mesures faisant valoir qu'elle ne pouvait attendre 137 mois pour être remboursée, alors même que l'ensemble des créanciers auraient perçu l'intégralité de leurs créances au même moment.



Par jugement réputé contradictoire du 3 octobre 2022, le juge des contentieux de la protection (JCP) du tribunal judiciaire du [Localité 7] a :

- dit que M. et Mme [U] ne satisfaisaient pas aux conditions posées par l'article L.711-1 du code de la consommation ;

- dit que M. et Mme [U] étaient déchus du bénéfice de la procédure de surendettement ;

- dit n'y avoir lieu à statuer sur le recours formé par la SELARL [33] ;

- laissé les dépens à la charge de l'Etat.



Le JCP a relevé que M. et Mme [U] ne s'étaient pas présentés aux audiences alors qu'ils avaient été régulièrement convoqués ; qu'ils n'avaient pas fait parvenir leur budget actualisé ; que ces absences inexpliquées et injustifiées aux audiences traduisaient un désintérêt blâmable de ces derniers à l'égard de la procédure en cours ; qu'il résultait de cette absence que le JCP n'était pas en mesure d'exercer son contrôle sur la situation financière des époux [U].



Suite à la notification du jugement en date du 6 octobre 2022, M. et Mme [U] en ont interjeté appel par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) du 18 octobre 2022.



M. et Mme [U] et leurs créanciers ont été convoqués par les soins du greffe à l'audience du 12 janvier 2023, date à laquelle l'affaire a été évoquée.



A l'audience, M. [B] [U] et Mme [C] [P] épouse [U] demandent d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'ils ne satisfaisaient pas aux conditions posées par l'article L.711-1 du code de la consommation et qu'ils étaient déchus du bénéfice de la procédure de surendettement.

Ils demandent à être déclarés recevables à la procédure de surendettement et à bénéficier d'un plan de remboursement.



Ils expliquent n'avoir pas eu conscience des conséquences de leur absence dans la mesure où ils avaient communiqué l'ensemble des pièces justificatives à la commission de surendettement.



Ils exposent que M. [U] a obtenu un CDI en février 2022, que son salaire a été de 1 563,61 euros en octobre et de 1 437,16 euros en novembre 2022. M. [U] a subi une saisie sur rémunération en octobre 2022 émanant des impôts sans en connaître la raison. Mme [U] a suivi une formation en 2021 (diplôme d'Etat accompagnant éducatif d'action sociale) et est employée par le CCAS du [Localité 7] en qualité de contractuelle. Ses salaires varient, elle travaille à temps partiel et remplace actuellement une personne en arrêt longue maladie. Ils perçoivent des prestations familiales à hauteur de 710,75 euros, leurs trois enfants sont encore scolarisés et leur cadet est pensionnaire.



Ils précisent avoir poursuivi le règlement du prêt immobilier.



La SELARL [33] demande à ce que sa créance soit réglée en début de plan si les époux [U] devaient bénéficier de la procédure de surendettement, et conteste devoir attendre 137 mois pour obtenir un premier paiement comme l'avait prévu la commission de surendettement.



Les autres créanciers n'ont pas comparu, ni formalisé de demandes par écrit dans les formes prévues aux articles 16 et 946 du code de procédure civile.






MOTIFS DE LA DÉCISION :



L'article L.711-1 du code de la consommation prévoit que le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi.



En l'espèce, la seule absence aux audiences des débiteurs ne peut suffire à caractériser leur mauvaise foi. Si elle témoigne d'une certaine négligence en l'absence notamment de réponse écrite au JCP, elle ne peut suffire à les exclure de la procédure de surendettement, alors même que ces derniers démarraient tous les deux une nouvelle activité professionnelle au moment des convocations. La mauvaise foi ne sera pas retenue dans ces circonstances, et le jugement sera infirmé sur ce point.



Selon l'article L.733-13 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation prévue à l'article L.733-10, prend tout ou partie des mesures définies aux articles L.733-1, L.733-4 et L.733-7. Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est déterminée dans les conditions prévues à l'article L.731-2.



L'article L.733-1 du code de la consommation dispose que la commission peut rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance .

En outre, l'article L.733-3 du code de la consommation précise que les mesures peuvent cependant excéder cette durée lorsqu'elles concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur dont elles permettent d'éviter la cession ou lorsqu'elles permettent au débiteur de rembourser la totalité de ses dettes tout en évitant la cession du bien immobilier constituant sa résidence principale.



En l'espèce, M. et Mme [U], nés respectivement en 1976 et 1977, sont mariés et ont trois enfants à charge qui auront 19, 17 et 15 ans au cours de l'année 2023. Tous sont scolarisés, le cadet est actuellement en pension, ce qui représente un coût de 217 euros par mois.



M. [U] est installateur de réseau télécom : il était en CDD au moment du dépôt du dossier de surendettement, il est en CDI depuis février 2022.

Mme [U] a suivi une formation en 2021 (DEAES). Elle percevait des indemnités chômage au moment du dépôt du dossier de surendettement, elle est désormais contractuelle auprès du CCAS du [Localité 7].



La commission avait évalué les ressources totales mensuelles de la famille à 2 570 euros correspondant au salaire de monsieur (1 458 euros), aux indemnités chômage de madame (507 euros) et aux prestations familiales (605 euros).



Les époux [U] ont déposé à l'audience un récapitulatif écrit de leurs ressources mensuelles faisant état d'un salaire pour monsieur de 1 520,06 euros, d'un salaire pour madame de 1 927,50 euros, et de prestations familiales de 710,75 euros, soit un total de 4 158,31 euros.

Toutefois, ces montants correspondent aux dernières sommes mensuelles perçues et ne peuvent être retenus pour établir un plan à long terme. Mme [U] ne dispose pas d'un CDI et ses salaires fluctuent.

Les fiches de paye du mois de décembre 2022 font apparaître un salaire moyen mensuel de 1 236,88 euros pour monsieur et de 668,47 euros pour madame.



Quant aux charges, la commission avait retenu une somme mensuelle de 1 896 euros, se décomposant de la manière suivante : forfait chauffage 199 euros, forfait de base 1356 euros, forfait habitation 256 euros et impôts 85 euros.

La taxe foncière est désormais de 77 euros par mois (sur 12 mois) et il doit être tenu compte des frais de pensionnat pour l'un des enfants à hauteur de 217 euros par mois.



La commission avait dégagé une capacité de remboursement de 674 euros.



Les époux [U] sont propriétaires de leur résidence principale estimée à 160 000 euros.



Leur endettement était de 85 565,13 euros dont 67 703,04 euros au titre du prêt immobilier.



Ils ont d'ores et déjà bénéficié de précédentes mesures de surendettement pendant 28 mois.



La commission de surendettement avait prévu l'adoption de mesures imposées sous la forme d'un rééchelonnement des dettes sur une période de 144 mois afin de préserver leur résidence principale, avec application d'un taux d'intérêt maximum de 2,25 % pour le prêt immobilier (et reprise des conditions contractuelles), et un taux inférieur au taux légal pour tout ou partie des mesures. Elle avait établi le plan avec une mensualité de remboursement maximale de 674 euros, et un premier palier de huit mois pour régulariser les dettes pénales et réparations pécuniaires auprès du SIP [Localité 7].



A l'audience, les époux [U] se sont engagés à régler la dette de la SELARL [33] en deux fois.



Dans la mesure où les montants minimum des ressources des époux [U] tels qu'exposés ci-dessus, et le montant de leurs charges permettent de respecter le plan tel que prévu par la commission, celui-ci sera repris au titre des mesures de désendettement, sauf à dire que la créance de la SELARL [33] devra être réglée en deux fois durant le palier de huit mois octroyé. Les ressources réelles du couple sur la période actuelle permettent en effet cet apurement.



Les dépens seront laissés à la charge de l'Etat.









PAR CES MOTIFS :



La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;



Infirme le jugement déféré ;



Statuant à nouveau :



Déclare M. [B] [U] et Mme [C] [P] épouse [U] recevables à la procédure de surendettement des particuliers ;



Dit que les dettes de M. [B] [U] et Mme [C] [P] épouse [U] seront reportées et rééchelonnées selon les modalités figurant au tableau récapitulatif des mensualités du plan établi par la commission de surendettement des particuliers de la Haute-Loire le 11 mars 2022, tableau qui restera annexé à l'arrêt, prévoyant une capacité de remboursement de 674 euros, une durée de plan de 144 mois, sauf en ce qui concerne la créance de la SELARL [33] de 411,37 euros qui sera remboursée en deux versements pendant le premier palier de huit mois ;



Dit que le plan entrera en vigueur le premier jour du mois suivant la notification de l'arrêt ;



Rappelle que les débiteurs devront prendre directement et dans les meilleurs délais contact avec les créanciers figurant dans la procédure pour la mise en place des modalités de paiement des échéances du plan ;



Rappelle que M. [B] [U] et Mme [C] [P] épouse [U] seront déchus du bénéfice de la présente procédure si :

- ils aggravent leur endettement sans l'accord des créanciers ou du juge chargé du surendettement ;

- ils ne respectent pas les modalités du présent arrêt, un mois après une mise en demeure restée infructueuse d'avoir à remplir leurs obligations ;



Laisse les dépens à la charge de l'Etat.



Le greffier, La présidente,

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