8 February 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-84.280

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:CR00164

Titres et sommaires

COUR D'ASSISES - Appel - Appel de l'accusé - Absence de l'accusé devant la cour d'assises d'appel sans excuse valable - Effets - Application de la procédure de défaut en matière criminelle (non) - Qualification de l'arrêt - Contradictoire à signifier

L'arrêt rendu par la cour d'assises, statuant en appel, lorsque l'accusé, absent sans excuse valable, est appelant, doit être qualifié de contradictoire à signifier et ne peut faire l'objet que d'un pourvoi en cassation


COUR D'ASSISES - Droits de la défense - Accusé appelant en fuite n'ayant ni fait le choix ni sollicité la désignation d'un avocat - Désignation d'office par le président d'un avocat à l'accusé - Obligation

Il se déduit des dispositions combinées des articles 274, 317 et 379-7 du code de procédure pénale que le président de la cour d'assises doit désigner d'office un avocat à l'accusé appelant en fuite, qui n'a ni fait le choix ni sollicité la désignation d'un défenseur

Texte de la décision

N° P 22-84.280 F- B

N° 00164


GM

IRRECEVABILITE
8 FÉVRIER 2023


REJET



M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 FÉVRIER 2023



M. [I] [W] a formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'assises de Vaucluse, en date du 14 octobre 2021, qui, pour vols avec arme, vols, destructions aggravées, en bande organisée, et association de malfaiteurs, en récidive, l'a condamné à vingt-cinq ans de réclusion criminelle, a ordonné une mesure de confiscation, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [I] [W], et les conclusions de M. Petitprez, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Leprieur, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,




la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par ordonnance du 18 août 2014, le juge d'instruction a ordonné la mise en accusation de M. [I] [W] devant la cour d'assises du Gard, des chefs précités.

3. Par arrêt du 3 juillet 2015, ladite cour d'assises a condamné M. [W] à vingt-deux ans de réclusion criminelle et a ordonné une mesure de confiscation.

4. M. [W] a interjeté appel principal. Le ministère public a interjeté appel incident.

5. L'accusé, en fuite, qui avait fait l'objet d'un mandat d'arrêt, n'a pas comparu devant la cour d'assises statuant en appel.

Examen de la recevabilité du pourvoi formé par l'avocat de l'accusé


6. Le demandeur ayant épuisé, par l'exercice qu'il en avait fait lui-même, le 28 mars 2022, le droit de se pourvoir contre les arrêts attaqués, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre les mêmes décisions, le 30 mars 2022, par l'intermédiaire de son avocat.

7. Seul est recevable le pourvoi formé le 28 mars 2022.

Examen des moyens

Sur les deuxième à sixième moyens

8. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.







Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [W] des chefs de vol aggravé et destruction volontaire par incendie à la peine de vingt-cinq ans de réclusion criminelle, alors :

« 1°/ qu'a excédé son office et n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 270, 274, 379-3 alinéa 2, 379-7, 591 ou 593 du code de procédure pénale, la cour d'assises d'appel qui a statué à l'encontre de M. [W], accusé en fuite, par arrêt contradictoire à signifier, tout en constatant qu'un avocat avait été commis d'office par le président pour assurer la défense de l'accusé à son insu sans qu'aucun mandat de représentation ne lui ait été confié ;

2°/ que les dispositions combinées des articles 270, 274 et 379-3 alinéa 2, 379-7 du code de procédure pénale, à supposer qu'elles permettent au président de la cour d'assises de commettre d'office un avocat pour représenter l'accusé en fuite, à son insu, en le privant en conséquence des dispositions relatives au défaut criminel, seraient nécessairement contraires au droit de toute personne à un procès équitable, au droit à un recours effectif ainsi qu'au principe d'égalité devant la loi tels qu'ils sont garantis par les articles 1er, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et à la compétence confiée au législateur par l'article 34 de la Constitution ; qu'à la suite de la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, l'arrêt attaqué sera privé de base légale ;

3°/ que porte une atteinte disproportionnée aux droits de la défense et le droit de toute personne à un procès équitable et viole les articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 270, 274, 379-3 alinéa 2, 379-7, 591 ou 593 du code de procédure pénale, la cour d'assises d'appel qui condamne l'accusé en fuite, par arrêt contradictoire à signifier, en se fondant sur la commission d'office d'un avocat par le seul président, à l'insu et sans le moindre accord de l'accusé, qui, partant a conduit à exclure ce dernier du bénéfice des dispositions relatives au défaut criminel. »

Réponse de la Cour

10. La cour d'assises a condamné M. [W] en son absence, après qu'il avait été représenté, lors des débats, par un avocat commis d'office par le président. L'arrêt pénal attaqué a été qualifié de réputé contradictoire à l'égard de l'accusé.



11. En statuant ainsi, la cour d'assises n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

12. En effet, en premier lieu, selon l'article 379-7 du code de procédure pénale, la procédure de défaut en matière criminelle n'est pas applicable lorsque l'absence de l'accusé, sans excuse valable, est constatée à l'ouverture de l'audience ou, à tout moment, au cours des débats, devant la cour d'assises désignée à la suite de l'appel formé par l'accusé. Dans ce cas, le procès se déroule ou se poursuit jusqu'à son terme, conformément aux articles 306 à 379-1 du même code, relatifs aux débats et au jugement, à l'exception des dispositions relatives à l'interrogatoire et à la présence de l'accusé, en présence de l'avocat qui assure la défense de ses intérêts. Le délai de pourvoi en cassation court à partir de la date à laquelle l'arrêt est porté à la connaissance de l'accusé.

13. Il résulte de ces dispositions que la procédure de défaut en matière criminelle n'est pas applicable devant la cour d'assises statuant en appel, lorsque l'accusé, absent sans excuse valable, est appelant.

14. L'arrêt rendu par la cour d'assises, dans une telle hypothèse, doit donc être qualifié de contradictoire à signifier et ne peut faire l'objet que d'un pourvoi en cassation.

15. En second lieu, il se déduit des dispositions précitées, combinées à celles des articles 274 et 317 du code de procédure pénale, que le président de la cour d'assises doit désigner d'office un avocat à l'accusé appelant en fuite, qui n'a ni fait le choix ni sollicité la désignation d'un défenseur.

16. Dès lors que cette désignation d'office, sans effet sur la qualification de l'arrêt, ne prive pas l'accusé du bénéfice d'une voie de recours, elle a, loin de porter une atteinte aux droits de la défense et au droit à un procès équitable, au contraire pour objet d'en garantir l'effectivité, dans toute la mesure rendue possible par la fuite de l'accusé.

17. Enfin, la Cour de cassation ayant, par arrêt du 11 janvier 2023, dit n'y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité, le grief de la deuxième branche est devenu sans objet.

18. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.

19. Par ailleurs la procédure est régulière et la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury.




PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé le 30 mars 2022 :

Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;

Sur le pourvoi formé le 28 mars 2022 :

Le REJETTE ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille vingt-trois.

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