26 January 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-16.855

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:C200111

Titres et sommaires

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Accidents successifs - Invalidité - Indemnisation - Faute inexcusable - Majoration de l'indemnité

Il résulte de la combinaison des articles L. 434-2, alinéa 4, L. 452-2, alinéa 2, R. 434-4 et R. 452-2 du code de la sécurité sociale qu'en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la majoration des indemnités prévue par le premier alinéa de l'article L. 452-2 s'applique à l'indemnité en capital afférente à l'accident ou à la maladie et non à la rente choisie par la victime en remplacement de l'indemnité en capital

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Majoration de l'indemnité - Détermination - Accidents successifs - Capital

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 janvier 2023




Rejet


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 111 F-B

Pourvoi n° E 21-16.855







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 JANVIER 2023

M. [N] [G], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° E 21-16.855 contre l'arrêt rendu le 19 mars 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant :

1°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4], dont le siège est [Adresse 3],

2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [G], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4], après débats en l'audience publique du 6 décembre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 mars 2021), la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4] (la caisse) ayant pris en charge au titre de la législation professionnelle les maladies déclarées successivement par M. [G] (la victime) et lui ayant notifié des taux d'incapacité permanente de 8 % et 7 % pour chacune d'entre elles, ce dernier a opté, le 27 septembre 2017, pour le versement d'une rente.

2. À la suite d'un arrêt du 22 juin 2017 de la cour d'appel de Paris, ayant reconnu la faute inexcusable de l'employeur dans la survenance des deux affections et ordonné la majoration de la rente à son maximum, la caisse a notifié à la victime, le 20 septembre 2017, la majoration des deux indemnités en capital afférentes aux deux maladies.

3. La victime a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexé


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La victime fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors « que lorsque par suite d'accidents successifs, la somme des taux d'incapacité permanente est égale ou supérieure à 10 %, l'indemnisation se fait, sur demande de la victime, soit par l'attribution d'une rente qui tient compte de la ou des indemnités en capital précédemment versées, soit par l'attribution d'une indemnité en capital et, à la condition que la fixation du taux d'incapacité permanente afférente à chacun des accidents successifs soit définitive, l'option souscrite par la victime revêt un caractère définitif (Civ. 2 14 mars 2019 n° 17-27.954 B) ; que la reconnaissance d'une faute inexcusable, postérieurement à l'option définitive par laquelle la victime a sollicité le versement d'une rente, ne remet pas en cause le caractère définitif de l'option exercée, si bien qu'elle engendre une majoration de la rente versée à la victime et non une majoration des indemnités en capital ; que, refusant le caractère définitif de l'option exercée par la victime le 27 septembre 2010 pour le versement d'une rente, et pour considérer que la caisse lui avait valablement notifié la majoration de deux indemnités en capital correspondant à chacune des maladies professionnelles, et qui ont fait l'objet de la reconnaissance d'une faute inexcusable par un arrêt du 22 juin 2017, la cour d'appel retient que « la combinaison des articles R. 434-3, R. 452-2, L. 452-2 ne permet pas la majoration de la rente versée à la victime à la suite de l'exercice par celle-ci de son option en application de l'article R. 434-3 du code de la sécurité sociale, puisque le versement d'une rente dans cette hypothèse aurait nécessairement pour conséquence que le total des sommes versées serait supérieure à celui correspondant au capital majoré » ; qu'en refusant ainsi le caractère définitif de l'option exercée par la victime pour le versement d'une rente antérieurement à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 434-1, L. 434-2, L. 452-2, R. 434-3, et R. 452-2 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

6. La caisse conteste la recevabilité du moyen, en raison de sa nouveauté.

7. Cependant, le moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond, est de pur droit.

8. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien-fondé du moyen

9. Selon les articles L. 434-2, alinéa 4, et R. 434-4 du code de la sécurité sociale, lorsque, à la suite d'accidents ou maladies successifs, la somme des taux d'incapacité permanente est égale ou supérieure à 10 %, l'indemnisation se fait, sur demande de la victime, soit par l'attribution d'une rente qui tient compte de la ou des indemnités en capital précédemment versées, soit par l'attribution d'une indemnité en capital.

10. Selon l'article R. 452-2 du même code, lorsque l'indemnité en capital a été remplacée par une rente dans les conditions ci-dessus le montant de la majoration due en cas de faute inexcusable de l'employeur est calculé conformément au deuxième alinéa de l'article L. 452-2.

11. Selon l'article L. 452-2, alinéa 2, du code de la sécurité sociale, lorsqu'une indemnité en capital a été attribuée à la victime, le montant de la majoration ne peut dépasser le montant de cette indemnité.

12. Il résulte de la combinaison de ces textes qu'en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la majoration des indemnités prévue par le premier alinéa de l'article L. 452-2 s'applique à l'indemnité en capital afférente à l'accident ou à la maladie et non à la rente choisie par la victime en remplacement de l'indemnité en capital.

13. Dès lors, c'est à bon droit que la cour d'appel a dit que la victime ne pouvait prétendre qu'à la majoration des deux indemnités en capital correspondant à chacune des maladies professionnelles dues à la faute inexcusable de l'employeur.

14. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [G] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille vingt-trois.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [G]

La victime fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR

« débouté de sa contestation des décisions de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4] du 20 septembre 2017 régularisant le versement des indemnités majorées en capital à la suite de la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur dans la survenance des maladies prises en charge au titre de la législation sur les risques professionnels le 2 mars 2009, débouté de sa demande tendant à voir ordonner à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4] de mettre en place la majoration à son taux maximum de la rente versée à M. [G] par notification du 27 septembre 2010 »

1) ALORS QUE lorsque, par suite d'accidents successifs, la somme des taux d'incapacité permanente est égale ou supérieure à 10 %, l'indemnisation se fait, sur demande de la victime, soit par l'attribution d'une rente qui tient compte de la ou des indemnités en capital précédemment versées, soit par l'attribution d'une indemnité en capital et, à la condition que la fixation du taux d'incapacité permanente afférente à chacun des accidents successifs soit définitive, l'option souscrite par la victime revêt un caractère définitif (Civ.2 14 mars 2019 n° 17-27.954 B) ; que la reconnaissance d'une faute inexcusable, postérieurement à l'option définitive par laquelle la victime a sollicité le versement d'une rente, ne remet pas en cause le caractère définitif de l'option exercée, si bien qu'elle engendre une majoration de la rente versée à la victime et non une majoration des indemnités en capital ; que, refusant le caractère définitif de l'option exercée par la victime le 27 septembre 2010 pour le versement d'une rente, et pour considérer que la caisse lui avait valablement notifié la majoration de deux indemnités en capital correspondant à chacune des maladies professionnelles, et qui ont fait l'objet de la reconnaissance d'une faute inexcusable par un arrêt du 22 juin 2017, la cour d'appel retient que « la combinaison des articles R.434-3, R.452-2, L.452-2 ne permet pas la majoration de la rente versée à la victime à la suite de l'exercice par celle-ci de son option en application de l'article R.434-3 du code de la sécurité sociale, puisque le versement d'une rente dans cette hypothèse aurait nécessairement pour conséquence que le total des sommes versées serait supérieure à celui correspondant au capital majoré » ; qu'en refusant ainsi le caractère définitif de l'option exercée par la victime pour le versement d'une rente antérieurement à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 434-1, L. 434-2, L. 452-2, R. 434-3, et R. 452-2 du code de la sécurité sociale ;

2) ALORS QUE – subsidiairement – lorsqu'un arrêt passé en force de chose jugée reconnaît la faute inexcusable de l'employeur et condamne la caisse à verser à la victime une majoration de sa rente, celle-ci – pour obtenir l'exécution de l'arrêt – n'a pas à assigner la caisse et l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale ; que la cour d'appel retient que « l'appelant soutient que la cour de céans a jugé dans son arrêt du 22 juin 2017 que la caisse devait majorer la rente pour laquelle il avait opté en application de l'article R. 434-3 du code de la sécurité sociale… il convient de relever que l'arrêt du 22 juin 2017, n°11-01187 a jugé l'action en faute inexcusable de M. [G] à l'encontre de son employeur, la société [5], en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4] – dans le cadre de la présente instance, M. [G] conteste les décisions de la caisse lui notifiant le 20 septembre 2017 la majoration du capital qui lui avait été attribué au titre de l'invalidité des maladies prises en charge au titre de la législation sur les risques professionnels – dès lors, la chose demandée n'est pas la même et la demande n'est pas fondée sur la même cause, et il n'y a pas lieu de constater l'autorité de la chose jugée » ; qu'en retenant ainsi que la caisse pouvait échapper à l'exécution du titre exécutoire que constituait l'arrêt passé en force de chose jugée l'ayant condamnée au versement de la rente majorée, la cour d'appel a violé les 500 et 501 du code de procédure civile.

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