15 December 2022
Cour d'appel de Montpellier
RG n° 22/02312

2e chambre de la famille

Texte de la décision

Grosse + copie

délivrées le

à











COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre de la famille



ARRET DU 15 DECEMBRE 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/02312 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PMYZ





Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du 22 AVRIL 2022

PRESIDENT DU TJ DE NARBONNE

N° RG 22/00007





APPELANT :



Monsieur [E] [Y]

né le 26 Août 1957 à [Localité 2] ([Localité 2])

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Sedami armand ADIDO, avocat au barreau de NARBONNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/005765 du 08/06/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER) substitué par Me ROBAGLIA





INTIMES :



Maître Rebecca PUECH

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représenté par Me Gilles LASRY de la SCP SCP D'AVOCATS BRUGUES - LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER



S.E.L.A.R.L. DI PERSIO

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Gilles LASRY de la SCP SCP D'AVOCATS BRUGUES - LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER



Ordonnance de clôture du 02 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 NOVEMBRE 2022,en chambre du conseil, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre,chargée du rapport et Mme Morgane LE DONCHE, Conseillère,.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Mme Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre

Mme Karine ANCELY, Conseillère

Mme Morgane LE DONCHE, Conseillère



Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO



ARRET :



- contradictoire ;



- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;



- signé par Mme Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.




*

* *



EXPOSÉ DU LITIGE



[G] [Y] est veuf, et non remarié, de [T] [J] [H] [I].





Par acte authentique du 6 septembre 2010, Monsieur [G] [Y] a consenti une donation-partage à ses trois enfants, [D], [F] et [E] [Y].





Aux termes de cet acte, il a fait une donation entre vifs à titre de partage anticipé à ses enfants co-donataires qui l'ont accepté par parts égales entre eux, à concurrence du tiers de la totalité en pleine propriété de :

- un garage situé [Adresse 1] évalué à 21 000 euros cadastré I-IE n°96 ;

- la somme de 12 600 euros ;

- une autre somme de 12 600 euros.



Au terme de cet acte, il leur a également été fait donation de la totalité en nue-propriété :

- d'un immeuble à usage d'habitation situé [Adresse 1] cadastré [Cadastre 5] évalué à l'époque en pleine propriété à 209 000 euros et en nue-propriété à 167 200 euros.







Il a ainsi été attribué à [D] [Y] :

- les 6541/ 16720 en nue-propriété de l'immeuble précité ;

- une soulte de 2 800 euros à recevoir de [E] [Y] pour équilibrer les comptes.



Il a été attribué à [F] [Y]':

- les 6541/16720 en nue-propriété de l'immeuble précité ;

- une soulte de 2 800 euros à recevoir de [E] [Y] pour équilibrer les comptes.



Il a été attribué à [E] [Y]':

- les 3638/16720 en nue-propriété de l'immeuble précité ;

- à charge pour lui de verser une soulte de 2 800 euros à [D] et [F] [Y].



Le 7 février 2019, [G] [Y] est décédé.



Un différend entre les héritiers est survenu à la suite d'une demande formulée par [E] [Y] d'autorisation de raccordement au tout à l'égout du garage attenant à la maison indivise.



Par courrier en date du 1er octobre 2019, Monsieur [F] [Y] et Madame [D] [Y] ont annulé la promesse de non réclamation d'indemnité qu'ils avaient formulé. Ils ont assigné Monsieur [E] [Y] le 10 juillet 2020 devant le tribunal judiciaire de Narbonne. Ils ont sollicité notamment la sortie de l'indivision, l'autorisation de procéder à la vente de l'immeuble, la libération des lieux et leur remise en état par [E] [Y], ainsi que la condamnation de ce dernier à une indemnité d'occupation d'un montant de 600 euros par mois à compter du 8 février 2019 au profit de l'indivision.



Les parties ont par la suite trouvé un accord ayant abouti à la signature d'un compromis de vente les 3 et 10 juin 2021, réitéré par acte authentique du 29 octobre 2021 établi par Maître Rebecca Puech, notaire.



Une clause d'absence de convention de séquestre a été stipulée à la demande du requérant au terme de l'acte de vente du 29 octobre 2021. Il est précisé également que la vente a été conclue moyennant le prix de 170 000 euros, payé comptant par l'acquéreur.



Toutefois, le notaire a indiqué ne pas être en mesure de procéder à la répartition des fonds issus de la vente de l'immeuble sus visé et notamment de la part revenant à Monsieur [E] [Y] tant qu'une procédure judiciaire était en cours.



Par courriel en date du 12 novembre 2021, le conseil du requérant a rappelé au notaire la présence de la clause d'absence de séquestre permettant la libération des fonds de la vente. Opposant la connaissance de désaccords entre les héritiers, le notaire a refusé de se dessaisir des fonds.



Une mise en demeure d'avoir à restituer à [E] [Y] sa part a été adressée au notaire en date du 14 décembre 2021, sans qu'il n'y soit donné suite.



Par acte d'huissier délivrée le 7 janvier 2022 [E] [B] a assigné Maître Rebecca Puech et à la SELURL Sandra di Persio devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Narbonne aux 'ns de voir condamner sous astreinte les défenderesses à restituer au requérant la part du prix de vente et des provisions sur dommages et intérêts.

Par ordonnance de référé en date du 22 avril 2022, le Juge des référés du tribunal judicaire de Narbonne a notamment :



au principal, renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront, mais dès à présent, par provision,



déclaré le juge des référés, juge de l'évidence, incompétent pour statuer sur les demandes présentées par [E] [Y],

laissé les dépens de l'instance à la charge de [E] [Y],

dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

dit n'y avoir lieu au vu de ce qui précède à statuer plus amplement.

rappelé que la décision de première instance est exécutoire à titre provisoire.



Par déclaration d'appel en date du 27 avril 2022, Monsieur [E] [Y] a interjeté appel de la décision en ce que le jugement a':



- déclaré le juge des référés, juge de l'évidence, incompétent pour statuer sur les demandes présentées par [E] [Y],

- laissé les dépens de l'instance à la charge de [E] [Y],

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu au vu de ce qui précède à statuer plus amplement,

- rappelé que la décision de première instance est exécutoire à titre provisoire.



Dans ses dernières conclusions en date du 02 septembre 2022, l'appelant, Monsieur [E] [Y] demande à la cour de :



déclarer recevable la déclaration d'appel formé par Monsieur [E] [Y],



infirmer l'ordonnance rendue le 22 avril 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Narbonne,



Y ajoutant,









- ordonner à Maître Rebecca Puech et la SELURL Sandra Di Persio, notaire associé, solidairement, l'un à défaut de l'autre, de restituer à Monsieur [Y] [E] sa part des sommes indûment séquestrées sous astreinte de 200€ par jour de retard,

- assortir cette somme de l'intérêt légal à partir du 14 décembre 2021,

- ordonner à Maître Rebecca Puech et la SELURL Sandra Di Persio, Notaire associé de remettre à Monsieur [Y] [E] la facture des honoraires et frais du notaire afin que ce dernier puisse véri'er le montant restitué,

- condamner Maître Rebecca Puech et la SELURL Sandra Di Persio, Notaire associé solidairement, l'un à défaut de l'autre, à payer à Monsieur [Y] [E] la somme de 1000€ à titre de provision sur dommages et intérêts,

condamner Maître Rebecca Puech et la SELURL Sandra Di persio, Notaire associé, solidairement, l'un à défaut de l'autre, à payer à Monsieur [Y] [E] la somme de 2000€ en première instance et 2500€ en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépense première instance et d'appel.

dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à intervenir.



L'intimé, Madame Rebecca Puech, SELURL Sandra Di Persio dans ses conclusions en date du 02 juin 2022 demande à la cour de :



confirmer en toute ses dispositions l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Montpellier en date du 22 avril 2022



A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour réformait l'ordonnance du 22 avril 2022 :



I Sur les demandes de Monsieur [Y] sont affectées de contestations sérieuses et excèdent les pouvoirs du juge des référés,



juger que le juge des référés n'est pas compétent pour connaître de la responsabilité civile professionnelle du notaire, à défaut d'obligation non sérieusement contestable,



Sur le maintien des fonds sous séquestre,



juger que les fonds issus de la vente du 21 octobre 2021 sont indivis, et qu'en conséquence, le consentement de tous les indivisaires est requis (article 815-3 du Code civil),



juger qu'en l'absence d'accord entre les coïndivisaires et Monsieur [E] [Y] ou de décision de justice définitive se prononçant sur la libération des fonds, le notaire est tenu d'un devoir de neutralité lui interdisant de se départir du prix de vente litigieux,



juger que le Notaire ne viole ni l'obligation de bonne foi ni le principe de l'estoppel,



débouter Monsieur [Y] de sa demande de condamnation du Notaire à lui remettre la facture des honoraires et frais de notaire,



Sur la demande provisionnelle,



juger que la demande provisionnelle est sérieusement contestable,



débouter Monsieur [E] [Y] de sa demande provisionnelle dommages et intérêts formée à hauteur de 1.000 euros à l'encontre du Notaire, faute de preuve d'un manquement, d'un préjudice et d'un lien de causalité,



Sur la demande d'astreinte'



juger que le notaire exécutera de manière spontanée toute décision de justice exécutoire ou définitive relative au sort du solde du prix de vente,



juger n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte à l'encontre du notaire,



débouter Monsieur [E] [Y] de sa demande de condamnation sous astreinte de 200 euros par jour de retard assortie de l'intérêt légal à partir du 14 décembre 2021, à libérer les fonds séquestrés par Maître Puech,



En tout état de cause,

débouter Monsieur [Y] de toutes ses demandes fins et conclusions contraires à l'encontre du notaire,



condamner Monsieur [E] [Y] à verser au notaire la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.



Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.



L'ordonnance de clôture est intervenue le 02 novembre 2022.




SUR CE LA COUR



L'appelant se fondant sur l'existence d'un contrat de vente prévoyant «les parties conviennent, directement entre elles et après avoir reçu toutes les informations en la matière de la part du rédacteur des présentes, de ne séquestrer aucune somme à la sûreté des engagements pris dans l'acte », soulève l'existence d'un trouble manifestement illicite causé par le refus de remise des fonds issus de la vente par le notaire. Il conteste le caractère individu des fonds à l'issue de la vente, et met en cause la bonne foi du notaire relevant l'existence d'un positionnement qualifiable au terme du principe de l'estopel. Il pointe par ailleurs le fait qu'il n'a jamais mis en cause la responsabilité du notaire dans le cadre de la présente procédure, et sollicite le prononcé d'une astreinte compte tenu des circonstances.



L'intimée sollicite le rejet des demandes indiquant que la recherche de la responsabilité du notaire, l'évaluation de la bonne foi du notaire excèdent les pouvoirs du juge des référés, elle relève par ailleurs l'absence de contradiction au détriment de l'appelant et l'anormalité de l'absence aux débats des co-indivisaires et souligne l'obligation de prudence qui doit guider le notaire ainsi que le principe de neutralité.



À titre liminaire à la cour relève que c'est de manière pertinente que l'appelant relève que le contentieux soumis à la cour n'implique en rien la mise en cause de la responsabilité du notaire au regard de la demande formulée par ce dernier.



Il résulte des dispositions de l'article 835 alinéa premier du code de procédure civile que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.



Par ailleurs l'article 815 ' 10 du Code civil prévoit que sont de pleins droits indivis, par l'effet d'une subrogation réelle, les créances et indemnités qui remplacent des biens indivis, ainsi que les biens acquis, avec le consentement de l'ensemble des indivisaires, en emploi ou remploi des biens indivis.



S'il ne peut être contesté que la clause inscrite au contrat de vente est claire il ne saurait en être déduit que les indivisaires pour lesquels la vente constitue entre eux une opération préliminaire de partage ont accepté la libération des fonds qui au terme de l'article 815-hj10 du Code civil par l'effet d'une subrogation réelle sont devenus de plein droit indivis au lieu et place du bien vendu.



Par ailleurs la cour relève que l'absence de mise en cause des autres héritiers ne permet pas de connaître leur position sur ce point.



Il n'existe donc pas de trouble manifestement illicite, causé par le refus du notaire dont la bonne foi ne peut être mise en cause.



La décision déférée sera confirmée par motifs substitués.



Sur les frais irrépétibles



Il n'est pas inéquitable de condamner à payer à la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



Sur la charge des dépens



M. [E] [Y] succombant sera tenu de supporter la charge des entiers dépens d'appel



PAR CES MOTIFS



la cour, statuant , par arrêt contradictoire, après débats hors la présence du public, après en avoir délibéré conformément à la loi et en dernier ressort, par mise en disposition de l'arrêt au greffe ;



CONFIRME l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions critiquées,



CONDAMNE Monsieur [E] [Y] à payer à Maître Rebecca PUECH et à la SELARL DI PERSIO la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



Le greffier Le président

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