28 September 2022
Cour d'appel de Bordeaux
RG n° 18/05682

CHAMBRE SOCIALE SECTION A

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 28 SEPTEMBRE 2022







PRUD'HOMMES



N° RG 18/05682 - N° Portalis DBVJ-V-B7C-KV2D

















Madame [L] [N]



c/



SASU AP2M

















Nature de la décision : AU FOND





























Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 octobre 2018 (R.G. n°F 17/00045) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LIBOURNE, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 22 octobre 2018,





APPELANTE :

Madame [L] [N]

née le 10 Janvier 1983 à [Localité 3] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sylvie BERTRANDON de la SELARL BARRET-BERTRANDON-JAMOT-MALBEC-TAILHADES, avocat au barreau de PERIGUEUX





INTIMÉE :

SASU AP2M, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 2]

N° SIRET : 448 091 918

représentée par Valérie SEMPE, avocat au barreau de BORDEAUX





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 juin 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Hylaire, présidente et Madame Sophie Masson, conseillère chargée d'instruire l'affaire

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sophie Masson, conseillère

Monsieur Rémi Figerou, conseiller



Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,





ARRÊT :



- contradictoire



- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
















***





EXPOSÉ DU LITIGE



Madame [L] [N], née en 1983, a été engagée en qualité de secrétaire comptable par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 3 juillet 2006 par la société AP2M dont le gérant était son frère, M. [H] [N].

Le 3 octobre 2014, M. [N] a cédé l'intégralité de ses parts à la société Eiffage Energie Aquitaine et démissionné de son mandat de dirigeant puis a été engagé en qualité de directeur d'exploitation.

Un contrat de travail a été signé entre Mme [N] et la société le 18 décembre 2014 avec la reprise de son ancienneté antérieure et la qualification d'assistante de gestion.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des employés techniciens agents de maîtrise du bâtiment.



Par lettre datée du 1er décembre 2016, Mme [N] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 20 décembre 2016.

Elle a ensuite été licenciée pour faute grave par lettre datée du 16 janvier 2017, l'employeur lui reprochant des opérations comptables frauduleuses commises au profit d'une société gérée par son frère (société AP3M).



Le 24 mars 2017, Mme [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Libourne en contestation de son licenciement et paiement de diverses sommes.



Le 29 juin 2017, la société AP2M a déposé plainte auprès du parquet de Libourne puis, le 2 mai 2018, déposé une plainte avec constitution de partie civile entre les mains du doyen des juges d'instruction de Libourne pour des faits de faux et usage de faux, escroquerie, abus des biens ou d'un crédit d'une SARL par un gérant à des fins personnelles et abus de confiance, notamment contre M. [N].



Par jugement prononcé le 9 octobre 2018, le conseil de prud'hommes a statué ainsi qu'il suit :

- ordonne le sursis à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction pénale ;

- dit qu'il appartiendra à la partie la plus diligente de communiquer au conseil de prud'hommes la copie de la décision de la juridiction pénale pour que l'affaire soit réinscrite au rôle du conseil de prud'hommes ;

- réserve les dépens.



Mme [N] a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe du 22 octobre 2018.



Par dernières conclusions communiquées le 21 mai 2021 par voie électronique, Mme [N] demande à la cour d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Libourne, de juger qu'il n'y a pas lieu à ordonner un sursis à statuer et en conséquence de

A titre principal,

- dire que les fautes reprochées à Mme [N] sont prescrites et dire que le licenciement pour faute est abusif ;

A titre subsidiaire,

- dire que l'erreur commise par Mme [N] ne constitue pas une faute grave et que son licenciement est abusif ;

En tout état de cause,

- condamner la société AP2M à lui régler :

* à titre de dommages et intérêts (24 mois de salaires): 59.730 euros,

* au titre du préavis (2 mois): 4.612,5 euros,

* congés payés sur préavis: 461,25 euros,

* indemnité conventionnelle de licenciement: 6.584,84 euros,

* régularisation du salaire de janvier 2015: 215 euros ;

Mme [N] sollicite l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant appel et sans caution, ainsi que les intérêts légaux sur l'ensemble des sommes allouées à compter de la saisine en application de l'article 1153 du code civil ainsi que la condamnation de son employeur en tous les dépens et au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Par dernières écritures communiquées le 15 avril 2019 par voie électronique, la société AP2M demande à la cour de :

In limine litis, vu les articles 4 alinéa 3 du code de procédure pénale et 378 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a sursis à statuer sur les demandes dont il est saisi jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur l'action publique à la suite de la plainte avec constitution de partie civile déposée par la société AP2M auprès du doyen des juges d'instruction de Libourne le 2 mai 2018 ;

Subsidiairement,

- juger que les faits ayant motivé le licenciement sont constitutifs de fautes graves,

- juger Madame [L] [N] mal fondée en ses demandes, fins et conclusions,

- débouter Madame [L] [N] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Madame [L] [N] au paiement d'une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.



Par lettre adressée aux parties le 19 août 2022, la cour a, au visa de l'article 380 du code de procédure civile, invité les parties à présenter leurs observations sur la recevabilité de l'appel formé par Mme [N] sans autorisation préalable du premier président de la cour d'appel de Bordeaux, et ce, au plus tard le 15 septembre 2022.



Par note en délibéré du 5 septembre 2022, la société AP2M a conclu à l'irrecevabilité de l'appel de Mme [N] en rappelant qu'une telle irrecevabilité pouvait être relevée d'office par la cour.



Le conseil de Mme [N] n'a pas fait parvenir d'observations.



Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'au jugement déféré.






MOTIFS DE LA DÉCISION



L'article 380 du code de procédure civile, dans sa rédaction ici applicable, dispose :

« La décision de sursis peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime.

La partie qui veut faire appel saisit le premier président, qui statue dans la forme des référés. L'assignation doit être délivrée dans le mois de la décision.

S'il accueille la demande, le premier président fixe, par une décision insusceptible de pourvoi, le jour où l'affaire sera examinée par la cour, laquelle est saisie et statue comme en matière de procédure à jour fixe ou comme il est dit à l'article 948, selon le cas. »



En vertu de ce texte et de l'article 544 alinéa 2 du code de procédure civile, puisque le sursis à statuer est un incident qui ne met pas fin à l'instance, est irrecevable l'appel immédiat formé contre une telle décision sans autorisation du premier président et cette irrecevabilité est d'ordre public et doit être relevée d'office.



En l'espèce, Mme [N] n'a pas, préalablement à l'appel interjeté le 22 octobre 2018 contre le jugement du 9 octobre 2018 ordonnant le sursis à statuer, demandé au premier président l'autorisation de former son recours.

Son appel sera en conséquence déclaré irrecevable.



La cour dira n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamnera l'appelante au paiement des dépens.





PAR CES MOTIFS,



La cour,



Déclare irrecevable l'appel formé le 22 octobre 2018 par Madame [L] [N] contre le jugement prononcé le 9 octobre 2018 par le conseil de prud'hommes de Libourne.



Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



Condamne Madame [L] [N] à payer les dépens de la procédure d'appel.





Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire

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