14 September 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-14.066

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00914

Texte de la décision

SOC.

OR



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 septembre 2022




Cassation partielle


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 914 F-D

Pourvoi n° Y 21-14.066

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [R] [Z].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 janvier 2021.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 SEPTEMBRE 2022

M. [C] [R] [Z], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-14.066 contre l'arrêt rendu le 4 décembre 2019 par la cour d'appel de Montpellier (4e A chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à l' AGS CGEA [Localité 5], dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à Mme [V] [E], domiciliée [Adresse 3], en qualité de mandataire liquidateur de la société Bogota Sud Construction,

3°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 4],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Monge, conseiller, les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de M. [R] [Z], après débats en l'audience publique du 9 juin 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Monge, conseiller rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 4 décembre 2019), soutenant qu'il avait été engagé en qualité de maçon par la société Bogota sud construction (la société) suivant contrat à durée déterminée du 1er février 2011 pour une durée d'un an, M. [R] [Z] a, le 2 mai 2015, saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir un rappel de salaire et des dommages-intérêts pour rupture anticipée.

2. Le 5 septembre 2011, une procédure de liquidation judiciaire avait été ouverte à l'égard de la société, Mme [E] étant désignée en qualité de liquidatrice.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre d'une rupture anticipée du contrat de travail, alors « que sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail ; qu'une rupture de fait du contrat de travail, par suite d'un manquement de l'employeur à ses obligations, s'analyse comme un licenciement à la charge de l'employeur ; qu'en rejetant les demandes indemnitaires de M. [R] [Z] au titre de la rupture anticipée du contrat de travail aux motifs que "le seul défaut de fourniture de travail et de paiement du salaire ne suffit pas à caractériser une telle rupture", tandis qu'elle avait constaté le non-paiement de salaires pendant une période de trois mois entre février et avril 2011, ce qui constituait un manquement grave aux obligations essentielles de l'employeur caractérisant une rupture de fait du contrat de travail imputable à l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 1243-1 et L. 1243-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1243-1 et L. 1243-4 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 :

4. Aux termes du premier de ces textes, sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure.

5. Selon le second, la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l'initiative de l'employeur, en dehors des cas de faute grave ou de force majeure, ouvre droit pour le salarié à des dommages-intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8.

6. Pour rejeter la demande du salarié en paiement de dommages-intérêts pour rupture anticipée du contrat à durée déterminée, l'arrêt retient qu'il n'est fait état par le salarié d'aucun élément montrant une rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur à la fin du mois d'avril 2011, que le seul défaut de fourniture de travail et de paiement du salaire ne suffit pas à caractériser une telle rupture et que le mandataire conteste l'existence d'un licenciement verbal ou d'une rupture, indiquant que le salarié reste « dans le flou le plus absolu sur les conditions de la rupture et de fait, sur l'imputabilité de celle-ci ». Il en déduit qu'en l'absence d'élément permettant de caractériser la rupture par l'employeur du contrat à durée déterminée avant son terme, de demande de résiliation judiciaire du contrat ou de rupture à l'initiative du salarié, celui-ci doit être débouté de l'ensemble de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail.

7. En se déterminant ainsi, alors qu'elle avait constaté un non-paiement affectant les salaires des mois de février à avril 2011, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si une rupture de fait du contrat de travail à durée déterminée n'était pas intervenue à l'initiative de l'employeur, n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande en paiement de dommages-intérêts formée par M. [R] [Z] au titre d'une rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée, l'arrêt rendu le 4 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne l'AGS CGEA [Localité 5] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat aux Conseils, pour M. [R] [Z]

M. [R] [Z] FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté ses demandes au titre d'une rupture anticipée du contrat de travail ;

ALORS QUE sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail ; qu'une rupture de fait du contrat de travail, par suite d'un manquement de l'employeur à ses obligations, s'analyse comme un licenciement à la charge de l'employeur ; qu'en rejetant les demandes indemnitaires de M. [R] [Z] au titre de la rupture anticipée du contrat de travail aux motifs que « le seul défaut de fourniture de travail et de paiement du salaire ne suffit pas à caractériser un telle rupture » (arrêt, p. 6 § 11), tandis qu'elle avait constaté le non-paiement de salaires pendant une période de 3 mois entre février et avril 2011, ce qui constituait une manquement grave aux obligations essentielles de l'employeur caractérisant une rupture de fait du contrat de travail imputable à l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 1243-1 et L. 1243-4 du code du travail.

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