14 September 2022
Cour d'appel de Paris
RG n° 22/00203

Pôle 5 - Chambre 4

Texte de la décision

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRET DU 14 SEPTEMBRE 2022



(n° 140 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/00203 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFPU7



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du conseiller de la mise en état du Pôle 5 chambre 4 en date du 22 Février 2022 sous le N° RG: 21/15034





APPELANTE



S.A.S. PROSOL agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 528 593 866

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Assistée de Me Elvire MAZET du la SALAS CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE LYON, Avocat au Barreau de LYON, toque 659, avocat plaidant







INTIMEE



E.A.R.L. LA FRAISERAIE DE SOLOGNE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 441 472 032[Localité 5] - [Localité 4]

[Localité 2]



Représentée par Me Jérémie ASSOUS, avocat au barreau de PARIS, toque K0021,avocat postulant

Assistée de Me Pauline GUYONNET-DUPERAT, avocat au barreau de Paris, toque K0021, avocat plaidant





COMPOSITION DE LA COUR



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre et Mme Camille LIGNIERES,Conseillère.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :



Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre

Madame Brigitte BRUN-LALLEMAND, Présidente

Madame Camille LIGNIERES,Conseillère



Greffière, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL





ARRET :



- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre,et par Claudia CHRISTOPHE, Greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.





******





Par jugement du 12 janvier 2021, le tribunal de commerce de Lyon a débouté la société La Fraiseraie de Sologne de sa demande d'indemnisation et :



Dit que la rupture brutale de la relation commerciale liant la société La Fraiseraie de Sologne à la société Prosol ne constitue pas une pratique restrictive de concurrence,



Jugé que les clauses déséquilibrées visées et reportées dans le contrat émis par la société Prosol qui n'a jamais été signé ne constituent pas une tentative restrictive de concurrence,



Jugé que les demandes de rabais de la société Prosol ne constituent pas une pratique restrictive de concurrence,



Jugé que les retards de paiement ne constituent pas une pratique restrictive de la concurrence,



Débouté la Fraiseraie de Sologne de sa demande de condamnation de la société Prosol à lui payer la somme de 200.000 euros au titre du préjudice subi en raison des différentes pratiques restrictives de concurrence.



Ce jugement a été signifié à le 26 janvier 2021 à la société La Fraiseraie de Sologne.



Par déclaration du 18 février 2021, cette dernière a interjeté appel de ce jugement devant la cour d'appel de Lyon.



Par déclaration du 30 juillet 2021, ,la société La Fraiseraie de Sologne a interejeté appel de ce même jugement devant la cour d'appel de Paris.



Par ordonnance du 2 novembre 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Lyon a donné acte à la société La Fraiseraie de Sologne de son désistement d'appel.



La société Prosol a soulevé devant le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Paris l'irrecevabilité de l'appel interjeté devant cette dernière pour tardiveté.



Par ordonnance du 22 février 2022, le magistrat chargé de la mise en état a :



Rejeté la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel ;

Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la société Prosol aux dépens d'incident.





Par requête du 31 mars 2022, la société Prosol a déféré cette ordonnance à la Cour.



Vu les dernières conclusions de la société Prosol, déposées et notifiées le 13 juin 2022, par lesquelles il est demandé à la Cour de :



Vu les articles 527, 538, 640, 641 et 916 du Code de procédure civile

Vu l'article D. 442-2 du Code de commerce

Vu l'article 700 du Code de procédure civile



- Dire bien fondé le déféré ;



En conséquence :



- Infirmer l'Ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état le 22 février 2022 en ce qu'elle a :


o Rejeté la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel ;

o Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

o Condamné la société Prosol aux dépens d'incident.



Statuant à nouveau :



- Constater que le premier appel interjeté devant la Cour d'appel de Lyon par la Fraiseraie de Sologne est affecté d'une fin de non-recevoir et n'a pu dès lors interrompre le délai d'appel ;

- Déclarer irrecevable comme tardif l'appel interjeté par la société La Fraiseraie de Sologne;



En tout état de cause :



- Condamner la société Fraiseraie de Sologne à verser à Prosol la somme de 8.712,00 € (huit mille sept cent douze euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;



- Condamner la société Fraiseraie de Sologne aux entiers dépens.



Vu les dernières conclusions de la société Fraiseraie de Sologne, déposées et notifiées le 27 juin 2022, par lesquelles il est demandé à la Cour de :



Vu le code civil, notamment les articles 2241 et 2243,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces,



Juger que l'appel interjeté par la Fraiseraie de Sologne devant la Cour d'appel de Paris le 30 juillet 2021 à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal de commerce de Lyon le 12 janvier 2021 est recevable ;

En conséquence,

Rejeter les demandes formées par la société Prosol

Condamner la société Prosol à payer à la défenderesse à l'incident la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.




MOTIVATION



Sur l'irrecevabilité de l'appel pour tardiveté



La société Prosol soutient que l'appel interjeté devant la cour d'appel de Lyon le 18 février 2021 n'a pas eu pour effet d'interrompre le délai d'appel dès lors que la saisine de cette juridiction, en méconnaissance de la compétence spécialisée de la cour d'appel de Paris en matière de pratiques restrictives de concurrence, doit être sanctionnée par une fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir juridictionnel de ladite juridiction et non d'une incompétence.



Elle en déduit que le délai d'appel a expiré un mois après la signification du jugement de première instance, soit le 26 février 2021 à minuit.



La société Fraiseraie de Sologne réplique que la déclaration d'appel formée devant la cour d'appel de Paris a pu régulariser l'appel interjeté devant la cour d'appel de Lyon quand bien même le désistement n'était pas encore intervenu. Selon elle, le délai d'appel qui a commencé à courir le 26 janvier 2021 est un délai de forclusion susceptible d'être interrompu et qu'il est de jurisprudence constante que si le désistement d'appel est intervenu en raison de la saisine d'une cour d'appel incompétente, la déclaration d'appel initiale conserve son effet interruptif. En conséquence elle soutient que l'appel formé devant la cour d'appel de Lyon a eu pour effet d'interrompre le délai d'appel en application de l'article 2241 du code civil et que cette interruption s'est prolongée jusqu'à l'ordonnance du 2 novembre 2021, par laquelle l'extinction de l'instance lyonnaise a été constatée.



Elle ajoute que l'absence de pouvoir juridictionnel de la cour d'appel de Lyon résulte de la règle de compétence posée par l'article D 442-2 du code de commerce et que si en première instance, l'exception d'incompétence doit être distinguée de la fin de non-recevoir, à hauteur d'appel, la jurisprudence ne distingue pas le défaut de pouvoir juridictionnel de l'exception d'incompétence.



Réponse de la Cour



La saisine d'une cour d'appel territorialement incompétente donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée avant que le juge statue, à condition que le délai d'appel n'ait pas expiré.



En l'espèce, l'appel du jugement du 12 janvier 2021 du tribunal de commerce de Lyon a été interjeté devant la cour d'appel de Lyon le 18 février 2021, cour territorialement incompétente conformément à l'article D 442-2 du code de commerce.

Un second appel de ce jugement.a été interjeté le 30 juillet 2021 devant la cour d'appel de Paris



Si le délai d'appel expirait le 26 février 2021 à minuit, il ne peut s'en déduire que le second appel serait irrecevable comme tardif alors qu'il s'agit d'un délai de forclusion qui a été interrompu par la première déclaration d'appel en application de l'article 2241 du code civil, peu important l'incompétence de la cour d'appel initialement saisie. Cet effet interruptif du délai d'appel s'est prolongé jusqu'à l'ordonnance du 2 novembre 2021, constatant l'extinction de l'instance devant la première cour d'appel saisie conformément aux dispositions de l'article 2242 du code civil , en sorte que l'appel interjeté le 30 juillet 2021 devant la seconde cour d'appel n'est pas tardif.

Il sera ajouté que le caractère non avenu de l'interruption du délai d'appel en cas de désistement d'appel résultant de l'article 2243 du code civil ne joue pas lorsque le désistement intervient en raison de la saisine d'une cour d'appel incompétente.



L'ordonnance du conseiller de la mise en état qui a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel est confirmée.



Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile



La société Prosol qui succombe en son déféré , est condamnée aux dépens et à verser à la sosciété la Fraiseraie de Sologne la sommde 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la demande qu'elle a formée sur le fondement des dispositions de cet article étant rejetée



PAR CES MOTIFS





La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,



Confirme l'ordonnance du conseiller de la mise en état ;



Déboute la société Prosol de ses demandes ;



La Condamne aux dépens et à payer à la sosciété la Fraiseraie de Sologne la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.





LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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