7 September 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-16.254

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:C100629

Titres et sommaires

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Démarchage et vente à domicile - Contrat - Nullité - Office du juge

Modifie l'objet du litige et viole ainsi l'article 4 du code de procédure civile le tribunal qui prononce, d'office, la nullité d'un contrat de prestation de services sur le fondement des articles L. 221-3, L. 221-5 et L. 242-1 du code de la consommation, alors que le débiteur proposait à l'audience un paiement échelonné de sa dette et ne contestait pas celle-ci dans son principe

CASSATION - Moyen - Méconnaissance des termes du litige - Chose demandée - Protection des consommateurs - Contrat de prestation de service - Absence de contestation du débiteur

Texte de la décision

CIV. 1

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 septembre 2022




Cassation


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 629 F-B

Pourvoi n° B 21-16.254




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 7 SEPTEMBRE 2022

La société Memo.Com, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 21-16.254 contre le jugement rendu le 8 avril 2021 par le tribunal judiciaire d'Agen (PPP contentieux général), dans le litige l'opposant à M. [Z] [W], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Memo.Com, après débats en l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire d'Agens, 8 avril 2021), rendu en dernier ressort, le 7 novembre 2019, à l'occasion d'un démarchage, M. [W], exerçant comme auto-entrepreneur une activité de nettoyage automobile, a signé un bon de commande établi par la société Memo.Com (la société) et portant sur la parution d'une publicité dans un annuaire.

2. En l'absence de règlement par celui-ci, la société l'a assigné en paiement de la somme principale de 1 264,03 euros.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société fait grief au jugement de constater la nullité du contrat et de rejeter ses demandes, alors « qu'il ressort des commémoratifs du jugement que M. [W] acceptait d'honorer la facture dont le paiement était sollicité par la société Memo.Com pour l'année 2020, moyennant des délais de paiement, auxquels la société Memo.com ne s'opposait pas ; qu'en rejetant toutefois l'ensemble des demandes de la société Memo.Com, le tribunal judiciaire a violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

4. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

5. Pour rejeter les demandes de la société, après avoir relevé que le bon de commande ne comportait aucune référence à l'article L. 221-5 du code de la consommation et n'était pas accompagné d'un formulaire de rétractation, le tribunal a prononcé d'office la nullité du contrat sur le fondement de l'article L. 242-1 du même code.

6. En statuant ainsi, après avoir relevé que M. [W], qui proposait à l'audience un paiement échelonné de sa dette, ne contestait pas celle-ci dans son principe, le tribunal, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 8 avril 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire d'Agen ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire d'Agen autrement composé ;

Condamne la société Memo.Com aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Memo.Com

Le jugement attaqué, critiqué par la SARL MEMO.COM, encourt la censure ;

EN CE QU'il a constaté la nullité du contrat et débouté en conséquence la SARL MEMO.COM de l'ensemble de ses demandes ;

ALORS QUE, premièrement, il ressort des commémoratifs du jugement que M. [W] acceptait d'honorer la facture dont le paiement était sollicité par la société MEMO.COM pour l'année 2020, moyennant des délais de paiement, auxquels la société MEMO.COM ne s'opposait pas (jugement p. 2 § 3-4) ; qu'en rejetant toutefois l'ensemble des demandes de la société MEMO.COM, le Tribunal judiciaire a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, avant que de rejeter les demandes de la société MEMO.COM sur le fondement de la nullité du contrat, tirée de ce qu'il n'était pas accompagné d'un formulaire de rétractation, il incombait au Tribunal judiciaire d'inviter les parties à présenter leurs observations sur les conditions posées par les textes qu'il appliquait d'office ; qu'en s'abstenant de solliciter les observations des parties, le Tribunal judiciaire a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, troisièmement, et en tout cas, il ressort de l'article L. 221-3 du code de la consommation que seuls sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels les dispositions des sections 2, 3,6 du chapitre I du titre II du Livre II du code de la consommation ; qu'en rejetant les demandes de la société MEMO.COM sur le fondement de la nullité prévue par l'article L. 242-1 du code de la consommation, disposition du titre IV du Livre II du code de la consommation, non applicable aux rapports entre deux professionnels, la Cour d'appel a violé les articles L. 221-3 et L. 242-1 du code de la consommation.

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