12 July 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-10.537

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00871

Texte de la décision

SOC.

CA3



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 juillet 2022




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 871 F-D

Pourvoi n° N 21-10.537




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 JUILLET 2022

La société Ledvance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 21-10.537 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2020 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à M. [A] [E], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

M. [E] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Ledvance, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [E], après débats en l'audience publique du 1er juin 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Lanoue, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 17 novembre 2020), M. [E] a été engagé, le 13 mai 1991, par la société Osram, aux droits de laquelle vient la société Ledvance (la société), en qualité de régleur. Depuis 2003, il occupe un poste de régleur au coefficient 240 classification N3 E3 de la convention collective de la métallurgie du Bas-Rhin.

2. Le 9 mai 2017, le salarié, qui exerce depuis 2009 des fonctions syndicales et de représentant du personnel au sein de la société, a saisi la juridiction prud'homale, s'estimant victime d'une discrimination syndicale.

3. Après autorisation par l'inspecteur du travail par décision du 11 septembre 2018, le salarié a été licencié pour motif économique le 14 septembre 2018.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal, ci-après annexé


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le déclarer irrecevable en son action en réparation pour la période antérieure au 9 mai 2012, alors « que si l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination, les dommages-intérêts réparent l'entier préjudice résultant de la discrimination pendant toute sa durée ; qu'en déclarant irrecevables les prétentions afférentes à la période antérieure au 9 mai 2012, soit cinq ans avant la saisine de la juridiction prud'homale, et en limitant en conséquence la période retenue pour apprécier le préjudice subi par le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1134-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

6. La société conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que le salarié n'a pas discuté en cause d'appel la prescription partielle de sa demande, pourtant expressément soulevée par elle dans ses écritures et qu'il ne s'est pas prévalu en appel des dispositions de l'article L. 1134-5 du code du travail.

7. Cependant, il résulte des dispositions de l'article 619 du code de procédure civile que n'est pas irrecevable le moyen né de la décision attaquée. En outre, le salarié se prévalait dans ses conclusions d'appel, pour soutenir le montant de sa demande, d'une période de discrimination subie de neuf ans, entre 2009 et 2018.

8. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 1134-5, alinéa 3, du code du travail :

9. Aux termes de ce texte, les dommages et intérêts réparent l'entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.

10. Pour déclarer le salarié irrecevable en son action en réparation pour la période antérieure au 9 mai 2012 et limiter en conséquence à une certaine somme le montant de la condamnation de l'employeur à des dommages-intérêts pour discrimination syndicale pour la seule période du 9 mai 2012 au 14 septembre 2018 au titre des préjudices matériel et moral, l'arrêt retient que, conformément à l'article L. 1134-5 du code du travail, ce n'est que le 9 mai 2017, en saisissant le conseil de prud'hommes, que le salarié a interrompu la prescription, celle-ci atteignant toutes les prétentions à réparation afférentes à la période antérieure au 9 mai 2012. Il en déduit que l'appréciation de l'étendue du préjudice sera limitée à la période non couverte par la prescription, la demande étant irrecevable pour le surplus.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi principal ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare M. [E] irrecevable en son action en réparation pour la période antérieure au 9 mai 2012 et limite à la somme de 20 000 euros le montant de la condamnation de la société Ledvance à dommages-intérêts pour discrimination syndicale au titre des entiers préjudices matériel et moral, l'arrêt rendu le 17 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société Ledvance aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Ledvance et la condamne à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Ledvance, demanderesse au pourvoi principal


Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Ledvance à payer à M. [E] la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale du 9 mai 2012 au 14 septembre 2018 au titre des entiers préjudices matériel et moral ;

AUX MOTIFS QUE les premiers juges ont exactement décrit la chronologie de la conclusion de l'exécution et de la rupture - cette dernière n'est pas contentieuse - du contrat de travail ayant lié les parties ; que l'appelant, comme en première instance, exerce seulement une action en réparation de la discrimination syndicale qu'il soutient avoir subie et dont les premiers juges l'ont débouté, ce qu'il critique par son appel principal, et il sera vu que c'est avec pertinence : qu'en premier lieu il doit être ajouté - les premiers juges comme l'appelant étant muets à cet égard - que c'est justement que la SAS observe que conformément à l'article L. 1134-5 du Code du Travail, alors que ce n'est que le 9 mai 2017 en saisissant le CPH que l'appelant a interrompu la prescription ; que celle-ci atteint toutes les prétentions à réparation afférentes à la période antérieure au 9 mai 2012 ; que pour autant, ce constat ne fait pas obstacle à la prise en compte d'éléments de faits survenus au cours de toute la période arguée par le salarié comme étant celle où a été commise la discrimination, soit de 2009 à 2018, pour rechercher si selon le régime probatoire édicté par l'article L. 1134-1 du code du travail celle-ci s'avère établie ; que ce n'est que l'appréciation de l'étendue du préjudice qui sera limitée à la période non couverte par la prescription, la demande étant irrecevable pour le surplus ; que pour définir la discrimination qu'il dénonce. l'appelant rappelle que depuis 2003 sa classification et son coefficient sont demeurés identiques et qu'au contraire d'autres salariés embauchés dans des conditions équivalentes aux siennes - et il les énumère nominativement - il a été écarté de toute évolution de carrière du fait de son appartenance au Syndicat CGT et de l'exercice en cette qualité de mandats électifs de représentant du personnel ou de désignation comme représentant syndical, et ceci sans solution de continuité de 2009 à 2018 ; qu'il ajoute que corrélativement il n'a pas bénéficié dans le même temps d'augmentations individuelles de rémunération, seules les augmentations annuelles de salaire décidées par l'employeur pour tous les salariés lui ayant été consenties ; que la présentation de ces faits se trouve bien de nature à faire supposer la discrimination alléguée, d'autant que la SAS confirme que plusieurs des salariés cités par l'appelant comme avant été engagés en temps contemporain de son embauche dans des conditions de classification équivalentes, ont, eux, vu leur carrière progresser plus favorablement (accession à des coefficients supérieurs et à des postes de responsabilité) pendant toute la durée de la période incriminée ; qu'il incombe donc à la SAS intimée de prouver que ses décisions à cet égard sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que sur ce point c'est de manière inopérante que la SAS entend essentiellement asseoir son raisonnement sur la comparaison de la situation de l'appelant à celles des salariés se trouvant dans une situation identique de 2009 à 2018 - soit ayant le même coefficient et les mêmes fonctions, et elle lui reproche en vain de ne pas désigner en ce sens de personnes avec lesquelles la comparaison pourrait s'effectuer - ce qui ne serait pertinent qu'au cas où le litige serait limité à une allégation de rupture d'égalité salariale, ce qui n'est pas le cas ; que la circonstance que l'appelant avait durant toute la période visée exécuté effectivement des fonctions correspondant à la définition conventionnelle de son coefficient ne suffit pas objectivement à exclure une discrimination ; qu'il en est de même de l'observation de la SAS selon laquelle en moyenne, dans l'entreprise, l'ensemble des élus du personnel avait bénéficié de revalorisations salariales supérieures aux autres salariés ; que reste l'appréciation des critères afférents à la compétence professionnelle, l'autonomie et l'implication dans l'exécution des missions relevant de leur sphère contractuelle, dont la SAS doit justifier objectivement qu'ils lui ont imposé, comme elle le soutient, de prévoir des différences d'évolution de carrière entre salariés placés initialement dans une situation équivalente à celle de l'appelant ; que la SAS se borne de ce chef à ne faire état que des insuffisances professionnelles de l'appelant - au moyen des témoignages de deux responsables d'atelier et de l'ingénieur sécurité qui décrivent les carences techniques de celui-ci qui selon eux ont empêché l'extension de sa polyvalence et de son autonomie - mais sans comparaison objective précise avec les qualités des salariés cités par l'appelant dont elle décrit elle-même l'évolution positive de carrière ; que sont dépourvues de valeur probante suffisante les déclarations des témoins précités qui de manière trop peu circonstanciée affirment que « certains régleurs avaient des connaissances multiples » ou que l'appelant se serait volontairement cantonné dans des tâches répétitives ; qu'il en est de même de la circonstance que dans le cadre de la procédure de licenciement économique, l'appelant aurait refusé un poste ; que l'appelant est fondé à soutenir qu'au vu de ce qui précède, pour satisfaire à son obligation probatoire la SAS devait exciper - ce qu'elle ne fait pas - d'éléments concernant les salariés qu'elle cite elle-même et dont la carrière a évolué plus favorablement que la sienne ; qu'en s'abstenant de faire ressortir que ceux-ci et l'appelant ont bénéficié des mêmes formations pour les adapter à l'évolution de leur emploi et leur permettre de répondre aux objectifs fixés, et que les attentes en la matière ont pour tous été déterminées dans des conditions comparables, la SAS n'établit pas l'absence de discrimination ; que la SAS ne combat pas les allégations de l'appelant sur l'absence de formation et l'affectation systématique à des tâches sans responsabilité, ni polyvalence avant obéré l'atteinte de ses objectifs ; que la SAS qui se réfère elle-même pour justifier ses décisions aux conclusions des entretiens d'évaluation, ce dont il s'évince qu'elle détient les moyens de l'obligation de preuve dont elle est débitrice, ne produit ceux-ci pour la période considérée que pour l'appelant, mais pas pour les salariés dont elle admet que la carrière commencée de manière comparable à celle de celui-ci, a évolué plus favorablement, et dans ces documents s'il est souligné l'insuffisance de rendement de l'appelant il n'est toutefois apporté aucune réponse par l'employeur à ses demandes de formation ainsi qu'à ses observations sur son absence d'évolution et sur les conditions de travail se dégradant ; que son argument selon lequel le fait que ces salariés ne sont plus dans une situation identique à celle de l'appelant exclurait toute comparaison doit être écarté alors qu'elle n'établit aucunement les motifs objectifs étrangers à toute discrimination syndicale avant motivé son choix de faire progresser leur classification et rémunération ; que cette analyse commande d'infirmer totalement le jugement qui a fait sien les moyens de la SAS ; qu'en considération de la durée non prescrite de discrimination, c'est la condamnation de la SAS à payer à l'appelant la somme de 21.000 euros à titre de dommages et intérêts qui remplira celui-ci de tous ses droits à réparation des préjudices financiers et moraux consécutivement subis, étant observé qu'il forme lui-même une demande toutes causes de préjudices confondues ;

1°) ALORS QUE, sauf accord collectif ou stipulation particulière du contrat de travail prévoyant une progression de carrière, l'employeur n'est pas tenu d'assurer cette progression par des changements d'emploi ou de qualification ; qu'en l'espèce, pour retenir que M. [E] présentait des éléments laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale, la cour d'appel a relevé qu'il établissait n'avoir connu aucune évolution de coefficient de l'année 2009 à 2018 ; qu'en statuant ainsi, quand la stagnation de coefficient du salarié ne pouvait en soi laisser présumer une évolution professionnelle discriminatoire, dès lors que la cour d'appel n'avait pas identifié d'accord collectif ou de stipulation particulière du contrat de travail garantissant à M. [E] une quelconque progression de carrière, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;

2°) ALORS QUE lorsque l'existence d'une discrimination est révélée par une disparité de traitement, elle suppose la comparaison entre des salariés engagés dans des conditions identiques de diplôme et de qualification et à une date voisine ; qu'en l'espèce, pour dire que M. [E] présentait des éléments de nature à laisser supposer qu'il avait pu connaître une évolution professionnelle moindre que celle d'autres salariés de l'entreprise, la cour d'appel a relevé que M. [E] rappelle « qu'au contraire d'autres salariés embauchés dans des conditions équivalentes aux siennes - et il les énumère nominativement - il a été écarté de toute évolution de carrière du fait de son appartenance au Syndicat CGT et de l'exercice en cette qualité de mandats électifs de représentant du personnel ou de désignation comme représentant syndical, et ceci sans solution de continuité de 2009 à 2018 » (cf. arrêt p. 2) ; qu'en se déterminant ainsi, sur le fondement d'un panel comprenant des salariés dont ni l'ancienneté, ni les diplômes, ni la qualification n'étaient précisés, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;

3°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, pour retenir que la présentation des faits laissait supposer la discrimination alléguée, la cour d'appel a relevé que « la SAS confirme que plusieurs des salariés cités par l'appelant comme ayant été engagés en temps contemporain de son embauche dans des conditions de classification équivalentes, ont vu leur carrière progresser plus favorablement (accession à des coefficients supérieurs et à des postes de responsabilité) pendant toute la durée de la période incriminée » (cf. arrêt p. 3) ; qu'en statuant ainsi, quand la société Ledvance faisait au contraire valoir qu'« il n'y a eu aucun changement de coefficient ni pour Monsieur [R], ni pour Monsieur [T], ni pour Monsieur [C], ni pour Monsieur [Z], ni pour Monsieur [U], ni pour Monsieur [K], ni pour Monsieur [Y], ni pour Monsieur [L] pendant la période de 2006 à 2016 » (conclusions p. 14), seul un salarié, M. [P], ayant bénéficié postérieurement à 2006 d'un changement de coefficient (conclusions p. 13), la cour d'appel, qui a dénaturé les conclusions de la société Ledvance sur ce point, a méconnu l'objet du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE seuls laissent supposer l'existence d'une discrimination syndicale les agissements de l'employeur commis à une époque où il avait connaissance des activités syndicales ou de l'engagement syndical du salarié ; qu'en l'espèce, la société Ledvance faisait valoir que les salariés inclus dans le panel de comparaison choisi par M. [E] avaient accédé au coefficient 285, donc à un coefficient supérieur au coefficient 240 de M. [E], bien avant que ce dernier ne débute ses activités syndicales fin novembre 2009, puisque tous les salariés de ce panel avaient accédé au coefficient 285, soit avant 2006, soit, pour l'un d'entre eux, en 2008 (cf. conclusions d'appel page 13 § pénultième et suiv.) ; qu'en retenant que M. [E] rappelait qu'au contraire d'autres salariés embauchés dans des conditions équivalentes aux siennes et qu'il énumérait nominativement, il avait été écarté de toute évolution de carrière du fait de son appartenance au syndicat CGT à compter de 2009, ce qui laissait présumer la discrimination alléguée, sans rechercher si ces salariés auxquels M. [E] se comparaît ne bénéficiaient pas déjà depuis plusieurs années, lorsque celui-ci a débuté ses activités syndicales, d'un coefficient supérieur au sien, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;

5°) ALORS, en toute hypothèse, QUE lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance du principe de non-discrimination et que le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, la société Ledvance faisait valoir qu'à l'exception d'un seul salarié, aucun des salariés du panel n'avait été promu postérieurement à 2009 à un coefficient supérieur au coefficient 285 auquel ils avaient accédé antérieurement aux activités syndicales de M. [E], (cf. conclusions d'appel page 13 § pénultième et suiv. ; production n° 5, pièce n° 19 en cause d'appel) ; qu'en refusant dès lors de rechercher si cette circonstance ne justifiait pas nécessairement que la stagnation de carrière de l'intéressé avait été étrangère à toute discrimination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;

6°) ALORS QUE lorsque l'existence d'une discrimination est révélée par une disparité de traitement, elle suppose la comparaison entre des salariés engagés dans des conditions identiques de diplôme et de qualification et à une date voisine ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que « c'est de manière inopérante que la SAS entend essentiellement asseoir son raisonnement sur la comparaison de la situation de l'appelant à celles des salariés se trouvant dans une situation identique de 2009 à 2018 - soit ayant le même coefficient et les mêmes fonctions, et elle lui reproche en vain de ne pas désigner en ce sens de personnes avec lesquelles la comparaison pourrait s'effectuer - ce qui ne serait pertinent qu'au cas où le litige serait limité à une allégation de rupture d'égalité salariale, ce qui n'est pas le cas » (cf. arrêt p. 3) ; qu'en statuant ainsi, quand M. [E] soutenait qu'il n'avait pas bénéficié de la même évolution de carrière, tant au niveau de classification qu'au regard de la rémunération, que ses collègues embauchés à un poste de régleur de 1999 à 2003, de sorte que seule une comparaison avec des salariés ayant le même coefficient et les mêmes fonctions que lui était de nature à établir ou au contraire à exclure objectivement l'existence d'une discrimination syndicale, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail. Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [E], demandeur au pourvoi incident


M. [E] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'AVOIR déclaré irrecevable en son action en réparation pour la période antérieure au 9 mai 2012.

ALORS QUE si l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination, les dommages intérêts réparent l'entier préjudice résultant de la discrimination pendant toute sa durée ; qu'en déclarant irrecevable les prétentions afférentes à la période antérieure au 9 mai 2012, soit cinq ans avant la saisine de la juridiction prud'homale, et en limitant en conséquence la période retenue pour apprécier le préjudice subi par le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1134-5 du code du travail.

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