30 June 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-10.229

Deuxième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:C200733

Titres et sommaires

JUGEMENTS ET ARRETS - Exécution - Conditions - Arrêt d'appel - Signification de l'arrêt et du jugement - Nécessité

En application de l'article 503, alinéa 1, du code de procédure civile, l'exécution forcée des condamnations résultant d'un jugement, confirmées en appel, est subordonnée à la signification de l'arrêt et du jugement

JUGEMENTS ET ARRETS - Exécution - Conditions - Notification - Signification de l'arrêt d'appel et du jugement - Nécessité

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 juin 2022




Cassation


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 733 FS-B

Pourvoi n° C 21-10.229



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 JUIN 2022

1°/ M. [T] [X],

2°/ Mme [R] [Y], épouse [X],

tous deux domiciliés [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° C 21-10.229 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-9), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Cabinet Lafage transactions, enseigne Century 21, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à la société Sorrentino Bruneau, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société Lilamand-Tosello,

3°/ à la société Sorrentino Bruneau, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. et Mme [X], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Sorrentino Bruneau, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 24 mai 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mmes Kermina, Durin-Karsenty, M. Delbano, conseillers, Mmes Jollec, Bohnert, M. Cardini, Mmes Latreille, Bonnet, conseillers référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 septembre 2020), sur le fondement d'un jugement d'un tribunal de grande instance du 18 novembre 2013, et d'un arrêt confirmatif d'une cour d'appel du 17 septembre 2015, par lesquels M. et Mme [X] ont été notamment condamnés à payer au cabinet D. Nardi et à la société Cabinet Lafage transactions diverses sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, cette dernière a fait signifier, le 8 février 2016, à M. et Mme [X], un commandement de payer à fin de saisie-vente, puis, le 18 février 2016, elle a ensuite fait pratiquer une saisie-attribution sur des comptes de M. [X].

2. A la suite de la dénonciation de cette dernière saisie le 22 février 2016, M. et Mme [X] ont, le 10 mars 2016, saisi le juge de l'exécution d'un tribunal de grande instance d'une demande d'annulation de la saisie-attribution et du commandement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, le deuxième et le troisième moyens, ci-après annexés


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. et Mme [X] font grief à l'arrêt de déclarer valides le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 février 2016, pour la somme globale de 2 815,16 euros, et le procès-verbal de saisie-attribution du 18 février 2016 pour la somme globale de 2 916,06 euros, alors « que s'ils n'ont pas été signifiés, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que l'arrêt du 17 septembre 2015 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui avait confirmé partiellement le jugement du 18 novembre 2013 du tribunal de grande instance de Nice pouvait être exécuté en l'absence de signification de ce jugement dès lors que l'arrêt avait été signifié ; qu'en statuant ainsi, bien que le commandement aux fins de saisie-vente et le procès-verbal de saisie attribution aient été délivrés pour recouvrement de condamnations prononcées dans ces deux décisions de justice, si bien que la signification du jugement était impérative, la cour d'appel a violé les articles 503 du code de procédure civile, R. 221-1 et R. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 503, alinéa 1, du code de procédure civile :

5. Selon ce texte, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire.

6. L'exécution forcée des condamnations résultant d'un jugement, confirmées en appel, est subordonnée à la signification de l'arrêt et du jugement.

7. Pour confirmer le jugement du juge de l'exécution en ce qu'il a déclaré valides le commandement de payer du 8 février 2016 et le procès-verbal de saisie-attribution du 18 février 2016, l'arrêt, après avoir constaté que le jugement du 18 novembre 2013 n'avait pas été signifié aux débiteurs saisis, mais que l'arrêt du 17 septembre 2015 l'avait été, retient que ce dernier arrêt constituait le titre exécutoire de l'intimée lui permettant de poursuivre le recouvrement des sommes allouées par le jugement du 18 novembre 2013, sans que M. et Mme [X] ne puissent valablement opposer l'absence de signification de la décision de première instance non revêtue de l'exécution provisoire.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne la société Cabinet Lafage transactions et la société Sorrentino Bruneau aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Cabinet Lafage transactions à payer à M. et Mme [X] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille vingt-deux.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [X]

Premier moyen de cassation

Les époux [X] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré valides le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 février 2016, pour la somme globale de 2 815,16 €, et le procès-verbal de saisie-attribution du 18 février 2016 pour la somme globale de 2 916,06 € ;

1°) Alors que s'ils n'ont pas été signifiés, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que l'arrêt du 17 septembre 2015 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui avait confirmé partiellement le jugement du 18 novembre 2013 du tribunal de grande instance de Nice pouvait être exécuté en l'absence de signification de ce jugement dès lors que l'arrêt avait été signifié ; qu'en statuant ainsi, bien que le commandement aux fins de saisie-vente et le procès-verbal de saisie attribution aient été délivrés pour recouvrement de condamnations prononcées dans ces deux décisions de justice, si bien que la signification du jugement était impérative, la cour d'appel a violé les articles 503 du code de procédure civile, R 221-1 et R.211-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

2°) Alors qu'il résulte des mentions du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 février 2016 et du procès-verbal de saisie-attribution du 18 février 2016 que la société Cabinet Lafage transactions Century 21 agissait en vertu d'un jugement du tribunal de grande instance de Nice du 18 novembre 2013 et d'un arrêt du 17 septembre 2015 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; que la cour d'appel a considéré qu'il résultait des articles L 111-3 du code des procédures civiles d'exécution et 503 du code de procédure civile que l'arrêt du 17 septembre 2015 constituait le titre exécutoire de la société Cabinet Lafage transactions Century 21 lui permettant de poursuivre le recouvrement des sommes allouées par le jugement du 18 novembre 2013 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé par omission le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 février 2016 et le procès-verbal de saisie attribution du 18 février 2016, en violation de l'obligation pour les juges de ne pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ;

3°) Alors que le commandement de payer aux fins de saisie-vente comme le procès-verbal de saisie attribution doivent à peine de nullité préciser les montants dus pour chaque débiteur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré au contraire qu'il ne résultait pas des articles R.221-1 et R 211-1 du code des procédures civiles d'exécution l'obligation pour le créancier de mentionner pour chaque débiteur le montant des sommes qu'il devait ; qu'en statuant ainsi, la cour a violé ces textes.

Deuxième moyen de cassation

Les époux [X] font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déboutés de leur demande tendant à ce que soient mis à la charge de la SCP Lilamand-Tosello, aux doits de laquelle est la Sas Sorrentino-Bruneau, les frais de la saisie attribution et le coût du commandement ;

1°) Alors que la cassation s'étend à toutes les dispositions de la décision cassée ayant un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation critiquant les chefs de dispositif ayant débouté les époux [X] de leurs demandes en annulation du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 février 2016 et du procès-verbal de saisie-attribution du 18 février 2016 entraînera par voie de conséquence celle du chef de dispositif ayant débouté les époux [X] de leur demande à l'encontre de la SCP Lilamand-Tosello, dès lors que ce chef est lié par un lien de dépendance nécessaire avec celui visé par le premier moyen de cassation, ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°) Alors que les frais des actes nuls par l'effet de leur faute sont à la charge des huissiers de justice ; qu'en l'espèce, les époux [X] ont fait valoir que la SCP Lilamand-Tosselo avait commis des fautes dans la rédaction du commandement de payer aux fins de saisie-vente et du procès-verbal de saisie-attribution car l'un des titres exécutoires fondant ces actes, soit le jugement du 18 novembre 2013 du tribunal de grande instance de Nice, n'avait pas été signifié, et car ces actes ne comportaient pas un décompte distinct des sommes dues par chacun des débiteurs ; qu'en rejetant la demande de condamnation de la SCP Lilamand-Tossello à prendre en charge le coût de ces actes, sans examiner ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Troisième moyen de cassation (subsidiaire)

Les époux [X] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré valides le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 février 2016 pour la somme globale de 2 815,16 € et le procès-verbal de saisie-attribution du 18 février 2016 pour une somme globale de 2 916,06 € ;

Alors que si la signification de la décision fondant une mesure d'exécution forcée est un préalable à celle-ci, elle ne constitue pas une telle mesure et son coût n'entre pas dans les frais d'exécution contrôlés par le juge de l'exécution ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé qu'il convenait de laisser le coût de l'acte de signification de l'arrêt du 17 septembre 2015 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence à la charge des époux [X] en vertu de l'article L 111-8 du code des procédures civiles d'exécution, violant ainsi ce texte.

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