8 June 2022
Cour d'appel de Bastia
RG n° 22/00075

Chambre civile Section 2

Texte de la décision

Chambre civile

Section 2



ARRÊT n°



du 8 JUIN 2022



n° RG 22/75

n° Portalis DBVE-V-

B7G-CDDH JJG - C



Décision déférée à la cour :

jugement au fond, origine juge de l'exécution du tribunal judicaire de Bastia, décision attaquée du 16 décembre 2021, enregistrée sous le n° 20/47







S.A.S. NACC





C/





[U]

S.A. BANQUE POPULAIRE MÉDITERRANÉE













Copies exécutoires délivrées aux avocats le



































COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU



HUIT JUIN DEUX-MILLE-VINGT-DEUX







APPELANTE :



S.A.S. de NÉGOCIATION ACHAT DE CRÉANCES CONTENTIEUSES -NACC-

représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, venant aux droits de la Caisse d'épargne et de prévoyance Côte d'Azur

[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Frédérique GENISSIEUX de la SCP CABINET RETALI & ASSOCIÉS, avocate au barreau de BASTIA





INTIMÉS :



M. [W] [U]

né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 7] (Haute-Corse)

[Adresse 8]

[Localité 3]



Représenté par Me Jean-François MARIANI, avocat au barreau de BASTIA



S.A. BANQUE POPULAIRE MÉDITERRANÉE

Société anonyme à capital variable anciennement dénommée BANQUE POPULAIRE PROVENÇALE ET CORSE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 1]



Représentée par Me Frédérique GENISSIEUX de la SCP CABINET RETALI & ASSOCIÉS, avocate au barreau de BASTIA











COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue à l'audience publique du 7 avril 2022, devant la cour composée de :



Jean-Jacques GILLAND, président de chambre

Judith DELTOUR, conseillère

Stéphanie MOLIES, conseillère



qui en ont délibéré.



GREFFIER LORS DES DÉBATS :



Françoise COAT.



Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 8 juin 2022.



ARRÊT :



Contradictoire,



Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Françoise COAT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






EXPOSÉ DES FAITS



Par acte d'huissier du 31 août 2011, la S.A. Caisse d'épargne et de prévoyance Provence-Alpes-Corse a fait assigner M. [W] [U] devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bastia aux fins de voir :



'- constater que le créancier poursuivant titulaire d'une créance liquide et exigible agit en vertu d'un titre exécutoire



- constater que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables



- statuer sur les éventuelles contestations



- déterminer les modalités de poursuite de la procédure,







- mentionner le montant de la créance du créancier poursuivant,



- en cas de vente forcée , fixer la date d'adjudication et déterminer les modalités de visite de l'immeuble,



- ordonner l'emp1oi des dépens en frais privilégiés de vente.'



Par jugement du 20 décembre 2012, le retrait du rôle a été prononcé et le 27 juin 2013, par jugement, les effets du commandement valant saisie immobilière du 10 mai 2011, publié au service de la publicité foncière de [Localité 7] le 5 juillet 2011 volume 2011 S n° 20 ont été prorogés de deux ans et, le 7 avril 2015, l'affaire a été réinscrite au rôle, avant une nouvelle prorogation de deux ans le 4 juin 2015, puis à nouveau de deux ans le 1er juin 2017.



Selon contrat du 21 septembre 2018 , la S.A. Caisse d'épargne et de prévoyance Provence-Alpes-Corse a cédé sa créance détenue contre M. [W] [U] à la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses et, par jugement du 9 mai 2019, les effets du commandement valant saisie immobilière du 10 mai 2011 ont été prorogés une nouvelle fois de deux ans ; le 9 octobre 2020, la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle



Par jugement du 16 décembre 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bastia a :



'- Constaté la péremption du commandement du 10 mai 2011 publié le 5 juil1et2011 au service de la publicité foncière de [Localité 7] volume 2011 S n° 20,



- Débouté la SAS NACC'de ses demandes,



- Dit que cette décision est publiée en marge du commandement du 10 mai 2011 publié 1e 5 juillet 2011 au service de la publicité foncière de [Localité 7] volume 2011 S n° 20,



- Dit n'y avoir lieu application de l'article 700 du code de procédure civile,



- Condamné la SAS NACC aux dépens en ce compris les frais de saisie.'



Par déclaration au greffe du 4 février 2022, la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses, venant aux droits de la S.A. Caisse d'épargne et de prévoyance Provence-Alpes-Corse, a interjeté appel du jugement prononcé en ce qu'il a :



'- Constaté la péremption du commandement du 10 mai 2011 publié le 5 juillet 2011 au service de la publicité foncière de [Localité 7] volume 2011 S n°20 ;



- Débouté la SAS NACC de ses demandes ;











- Dit que cette décision est publiée en marge du commandement du 10 mai 2011 publié le 5 juillet 2011 au service de la publicité foncière de [Localité 7] volume 2011 S n°20 ;



- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;



- Condamné la SAS NACC aux dépens en ce compris les frais de saisie.'



Par requête déposée au greffe le 9 février 2022, la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses a demandé au premier président de la cour d'appel de Bastia d'être autorisée à assigner à jour fixe M. [W] [U].



Par ordonnance du 10 février 2022, le premier président de la cour d'appel de Bastia a autorisé la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses a assigner à jour fixe pour l'audience du 7 avril 2022 à 8 heures 30 M. [W] [U].



Par ordonnance du 22 mars 2022, le premier président de la cour d'appel de Bastia a, statuant en référé, ordonné le sursis à l'exécution du jugement d'orientation du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bastia du 16 décembre 2021.



Par conclusions déposées au greffe le 28 mars 2021, M. [W] [U] a demandé à la cour de :



'Vu les articles 1699 et suivants et 2224 du Code Civil,



Vu l'article 11 du Code de Procédure Civile,



Vu les articles L. 311-1 et suivants du Code des Procédures Civiles d'Exécution,



Vu les articles R321-20 et suivants anciens du Code des Procédures Civiles d'Exécution,



Vu le jugement rendu par le Juge de l'Exécution près du Tribunal Judiciaire de BASTIA,



À titre principal,



Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il constaté la péremption du commandement du 10 mai 2011 publié le 5 juillet 2011 au service de la publicité foncière de [Localité 7] volume 2011 S n°20,



Ordonner la radiation dudit commandement,



À titre subsidiaire,



Constater que la SAS NACC se refuse a communiquer le prix de cession de la créance qu'elle a acquis auprès de la CAISSE D'ÉPARGNE PROVENCE ALPES CORSE, empêchant Madame [I] et Monsieur [H] de faire valoir leur droit de retrait tel que prévu par les dispositions de l'article 1699 du Code Civil,







En conséquence,



Débouter la SAS NACC de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,



À titre infiniment subsidiaire,



Juger que la SAS NACC ne justifie pas de l'exigibilité des sommes qu'elle réclame,



Juger que la SAS NACC ne peut voir fixer sa créance a la somme 394.410,43 Euros,



En conséquence,



Débouter la SAS NACC de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,



En tout état de cause,



Condamner la SAS NACC à payer aux concluants la somme de 5.000 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,



La condamner aux entiers dépens de l'instance.



SOUS TOUTES RÉSERVES.'



Par conclusions déposées au greffe le 4 avril 2022, la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses a demandé à la cour de :



'RECEVOIR la concluante en son appel comme régulier en la forme



INFIRMER le jugement d'orientation en date du 16.12.2021 en ce qu'il :



"- Constate la péremption du commandement du 10 mai 2011 publié le 5 juillet 2011 au

service de la publicité foncière de [Localité 7] volume 2011 S n°20 ;

- Déboute la SAS NACC de ses demandes ;

- Dit que cette décision est publiée en marge du commandement du 10 mai 2011 publié le 5 juillet 2011 au service de la publicité foncière de [Localité 7] volume 2011 S n°20 ;

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne la SAS NACC aux dépens en ce compris les frais de saisie"



Statuant à nouveau :



Vu les articles R311-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution '



CONSTATER que les conditions des articles L311-2, L 311-4 et L 311-6 du code des procédures d'exécution sont réunies ;



DÉBOUTER Monsieur [U] de l'intégralité de ses griefs,







JUGER que les conditions préalables à la mise en 'uvre du retrait litigieux ne sont pas réunies en l'espèce ;



FIXER la créance du poursuivant à la somme totale de 394 410,43 Euros, outre frais et intérêts au taux de 5 % à compter du 10.12.2020 et jusqu'à complet règlement ;



ORDONNER la vente forcée des biens et droits immobiliers sus visés et en déterminer les modalités ;



Fixer la date de l'adjudication ;



DIRE qu'en tant que de besoin le créancier poursuivant est autorisé à faire visiter l'immeuble, objet de la vente avec le concours d'un huissier de justice et au besoin avec l'assistance d'un serrurier et de la force publique à raison d'une heure dans les 45 jours précédant la vente ;



DIRE que la publicité de la vente se fera conformément aux règles édictées par les articles R322-30 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;



DIRE que les frais préalables seront taxés au jour de l'adjudication ou de la vente amiable ;



DÉCLARER les frais privilégiés de vente les dépens de la présente instance ;



JUGER que dans le cas où il sera décidé d'une vente amiable, l'acquéreur sera tenu, en sus du prix, des frais préalables mais encore des droits et émoluments revenant à l'avocat poursuivant tels que prévus par l'article A 444-102 de l'arrêté du 26.02.2016.



Dans tous les cas,



CONDAMNER Monsieur [U] à payer à la société NACC la somme de 5.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Sous toutes réserves.'





Le 7 avril 2022, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 8 juin 2022.



La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait, en application de l'article 455 du code de procédure civile, expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions notifiées par les parties.










SUR CE



Pour statuer comme il l'a fait le premier juge a considéré que malgré l'allongement à cinq ans de la durée de validité du commandement de payer valant saisie prévu par l'article R 321-20 du code des procédures civiles d'exécution le 1er janvier 2021, y compris pour les procédures en cours, cette disposition nouvelle n'était pas applicable en l'espèce en raison de l'autorité de la chose jugée, la prorogation pour une période de deux ans résultant d'une jugement prononcé le 9 mai 2019.



* Sur la péremption de l'instance



En l'espèce, il est certain qu'au jour de l'entrée en vigueur du nouveau délai de cinq ans , le 1er janvier 2021, le commandement de payer délivré à M. [W] [U] était toujours valable et la nouvelle disposition légale s'appliquant de plein droit aux instances en cours à cette date, la durée de validité du dit commandement s'est trouvée rallongée de trois années supplémentaires et donc jusqu'au 9 mai 2024 comme le fait valablement valoir l'appelante et comme cela est prévu de manière fort semblable pour les règles relatives à la prescription, selon les dispositions de l'article 2222 du code civil auxquelles il est loisible de se reporter utilement pour l'application dans le temps de dispositions nouvelles..



Il convient donc de rejeter ce moyen et d'infirmer le jugement entrepris.



* Sur l'exercice du droit de retrait



L'intimée dans le dispositif de ses conclusions, qui seul lie la cour, fait état du droit de retrait des cautions hypothécaire, M. [H] et Mme [I], et non de celui de M. [W] [U], rendant ainsi inopérant le moyen soulevé.



De plus, il convient de relever que l'intimé ne produit aucune sommation de communiquer le prix de cession à son nom alors que l'article 1699 du code civile dispose que «Celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s'en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite», limitant cette invocation au cédé ayant fait une quelconque démarche relativement à un retrait, ce dont l'intimé, ne peut se prévaloir en produisant uniquement une sommation de communiquer au nom d'une des deux cautions hypothécaires, Mme [X] [I], et non en son nom propre.



En conséquence, sans nécessité d'un examen prolongé, il convient d'écarter ce moyen.



* Sur la nature de la créance elle-même



M. [W] [U] conteste le caractère exigible de la créance qui lui est opposée se fondant sur le fait que l'original du titre exécutoire dont l'intimée se prévaut n'aurait pas été produit mais une simple copie.







Il est réel que, dans le dossier déposé devant le cour d'appel, ne se trouve qu'une copie de l'acte authentique, titre exécutoire sur lequel est fondée la demande en paiement.



Cependant, le contenu du dit acte n'est pas contesté, y compris en sa copie produite en appel, et rien n'oblige la production de l'original si le contenu de la copie n'est pas sujet à débat.



La réalité de l'acte authentique et de son contenu étant rapportée, il convient d'écarter ce moyen.



Ce moyen inopérant est écarté.



En ce qui concerne le montant de la créance réclamée, contrairement à ce que prétend l'intimé qui se contente d'affirmer, le taux d'intérêt appliqué aux sommes dues est de 5 % et non de 8 %.



De plus, il résulte clairement du dossier que la comparaison des décomptes produits, tant dans le cadre de commandements de payer et que lors de la déchéance du terme, permet de vérifier l'imputation des paiements opérés par le débiteur principal.



Cependant, l'intimé fait valoir la prescription biennale des sommes réclamées au titre des intérêts, ce que conteste l'appelante.



Il est constant que les créances périodiques nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire, en raison de la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur, comme en l'espèce, sont soumises au délai de prescription biennal prévu à l'article L 218-2 du code de la consommation, au regard de la nature de la créance.



En l'espèce, il résulte de la chronologie de la procédure en première instance que commandement valant saisie du 5 juillet 2011 a été prorogé régulièrement et qu'en application de l'article R 321-20 du code des procédures civiles d'exécution, la dernière prorogation courrait jusqu'au 9 mai 2024 pour une somme initiale de 325 343,29 euros, actualisée au 10 décembre 2020 à hauteur de 394 410,43 euros, les intérêts échus compte tenu des diverses prorogation interrompant le délai de prescription, celle-ci ne peut être valablement invoquée comme le prétend M. [W] [U].



Il convient donc d'écarter ce moyen et il y a lieu de faire droit à la demande présentée par l'appelante selon les modalités définies dans le dispositif du présent arrêt, en renvoyant l'appelante devant le juge de l'exécution, seul compétent, en application des dispositions de l'article R 311-2 du code des procédures civiles d'exécution, pour fixer les modalités et conditions de l'adjudication sollicitée.



* Sur les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile



S'il est équitable de laisser à la charge de l'appelante les frais irrépétibles qu'elle a engagés, il n'en va pas de même pour l'intimée ; en conséquence, il convient de débouter M. [W]







[W] [U] de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à ce titre à la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses la somme de 5 000 euros à ce titre.



PAR CES MOTIFS,



LA COUR :



Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,



Statuant à nouveau,



Fixe la créance de la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses à l'encontre de M. [W] [U] à la somme de 394 410,43 euros, outre les frais et intérêts dus au taux de 5 % l'an à compter du 10 décembre 2020 et jusqu'à complet règlement,



Ordonne la vente forcée des biens et droits immobiliers figurant au commandement,



Renvoie, à la diligence des parties, la présente procédure devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bastia pour fixation de la date d'adjudication et des modalités de celle-ci,



Déboute M. [W] [U] de l'ensemble de ses demandes,



Condamne M. [W] [U] à payer à la S.A.S. de négociation achat de créances contentieuses la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne M. [W] [U] au paiement des entiers dépens, tant ceux de première instance qu'en cause d'appel.



LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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