2 June 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-16.072

Deuxième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin - Publié au Rapport

ECLI:FR:CCASS:2022:C200554

Titres et sommaires

SECURITE SOCIALE, ALLOCATION VIEILLESSE POUR PERSONNES NON SALARIEES - Professions libérales - Cotisations - Paiement - Paiement tardif - Validation - Défaut - Portée

L'article 1 du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales implique, lorsqu'une personne est assujettie à titre obligatoire à un régime de retraite à caractère essentiellement contributif, un rapport raisonnable de proportionnalité exprimant un juste équilibre entre les exigences de financement du régime de retraite considéré et les droits individuels à pension des cotisants. L'article R. 643-10 du code de la sécurité sociale prévoit, s'agissant des professions libérales, que lorsque les cotisations arriérées n'ont pas été acquittées dans le délai de cinq ans suivant la date de leur exigibilité, les périodes correspondantes ne sont pas prises en considération pour le calcul de la pension de retraite de base. Les points acquis en contrepartie du paiement des cotisations devant être regardés comme l'étant au fur et à mesure de leur versement, le défaut de prise en compte des cotisations payées au-delà du délai de cinq ans suivant leur date d'exigibilité, mais avant la liquidation du droit à pension, porte une atteinte excessive au droit fondamental garanti en considération du but qu'il poursuit et ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence

CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Protocole additionnel n° 1 - Article 1 - Violation - Cas - Profession libérale - Cotisations vieillesse - Paiement tardif

Texte de la décision

CIV. 2

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 2 juin 2022




Cassation


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 554 FS-B+R

Pourvoi n° D 21-16.072






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________



ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 JUIN 2022

M. [P] [C], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 21-16.072 contre l'arrêt rendu le 5 mars 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le Défenseur des droits a présenté des observations en application de l'article 33 de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations et plaidoiries de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. [C], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 12 avril 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, Mmes Coutou, Renault-Malignac, M. Rovinski, Mme Cassignard, M. Leblanc, conseillers, Mme Vigneras, M. Labaune, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 mars 2021), M. [C] (l'assuré), affilié à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (la Caisse), du 1er avril 1978 au 31 décembre 1995, a sollicité la liquidation de sa pension de vieillesse à effet au 1er juillet 2014.

2. La Caisse n'ayant pas pris en considération pour le calcul de la pension de retraite de base les points correspondant aux cotisations acquittées tardivement au titre des années 1982 à 1984, 1987 et 1990 à 1995, l'assuré a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. L'assuré fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors :

« 1°/ que l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales implique, lorsqu'une personne est assujettie à titre obligatoire à un régime de retraite à caractère essentiellement contributif, un rapport raisonnable de proportionnalité exprimant un juste équilibre entre les exigences de financement du régime de retraite considéré et les droits individuels à pension des cotisants ; que le droit individuel à pension constitue un intérêt patrimonial substantiel entrant dans le champ d'application de l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le dispositif de l'article R. 643-10 du code de la sécurité sociale qui sanctionne le retard de paiement des cotisations au-delà d'un délai de cinq ans suivant leur date d'exigibilité par une absence totale d'attribution de points au titre desdites cotisations dans le régime de retraite de base constitue une ingérence dans le droit de propriété des assurés affiliés au régime, en ce qu'il porte une atteinte à la substance de leurs droits à pension, en les privant de pension de retraite s'ils ne justifient pas du paiement de leur cotisations dans le délai de cinq ans suivant leur date d'exigibilité et ce alors même qu'ils ont déjà réglé des majorations et pénalités de retard ; que cette ingérence contrevient aux principes qui régissent l'aménagement des régimes obligatoires de base d'assurance vieillesse, dont le régime d'assurance vieillesse des indépendants fait partie, et, notamment, au caractère contributif des régimes énoncé à l'article L. 111-2-1, II, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale ; que l'intérêt légitime attaché au recouvrement des contributions sociales comme l'équilibre financier des régimes concernés, ne justifient pas une atteinte disproportionnée aux droits des assurés, telle la privation totale d'une allocation de subsistance venant en contrepartie de cotisations effectivement versées, même avec plus de cinq ans de retard, durant des périodes d'activité ; qu'en statuant comme elle l'a fait et en considérant notamment que la réduction du montant de la pension de retraite au regard des cotisations versées au délai du délai de cinq ans à compter de leur date d'exigibilité instituée par l'article R. 643-10 du code de la sécurité sociale, qui ne parait pas d'une rigueur excessive à l'endroit du cotisant et lui permet de régulariser effectivement sa dette pour préserver ses droits futurs, n'était pas incompatible avec la protection du droit de propriété instituée par le droit européen, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne ;

2°/ qu'une réglementation ne peut porter atteinte à l'intérêt patrimonial protégé par l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne qu'aux conditions d'être justifiée par un intérêt public ou général légitime, et d'être proportionnée au but poursuivi ; que le juste équilibre à préserver n'est pas respecté si l'atteinte portée à l'intérêt patrimonial que constitue une prestation de sécurité sociale, est excessive dès lors qu'il n'y a pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre le but poursuivi et les moyens employés ; qu'en prévoyant comme sanction que les cotisations de retraite payée au-delà du délai de cinq ans suivant leur exigibilité n'attribuent au cotisant aucun point pour le calcul du montant de la retraite de base manifestement disproportionnée au regard du montant des cotisations mises à sa charge au cours de la période de constitution des droits et effectivement réglées même avec plus de cinq ans de retard, la clause de l'article R. 643-10 du code de la sécurité sociale, si elle contribue à l'équilibre financier du régime de retraite concerné et à la solidarité entre génération, porte une atteinte excessive au droit fondamental garanti en considération du but qu'elle poursuit, et ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence ; qu'en refusant dès lors d'écarter l'application de l'article R. 643-10 du code de la sécurité sociale susvisé, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 643-1 et R. 643-10 du code de la sécurité sociale :

4. Aux termes du premier de ces textes, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

5. Le droit individuel à pension d'une personne assujettie à titre obligatoire à un régime de retraite à caractère essentiellement contributif constitue un intérêt patrimonial substantiel entrant dans le champ d'application de ces dispositions, qui impliquent un rapport raisonnable de proportionnalité, exprimant un juste équilibre entre ce droit individuel et les exigences de financement du régime de retraite considéré.

6. Aux termes du deuxième, le montant de la pension servie par le régime d'assurance vieillesse de base des professions libérales est obtenu par le produit du nombre total de points porté au compte de l'intéressé par la valeur de service du point.

7. Aux termes du dernier, lorsque les cotisations arriérées n'ont pas été acquittées dans le délai de cinq ans suivant la date de leur exigibilité, les périodes correspondantes ne sont pas prises en considération pour le calcul de la pension de retraite de base.

8. Ce dispositif, en tant qu'il exclut toute prise en considération, pour le calcul de la pension de retraite de base, des cotisations acquittées plus de cinq ans après leur date d'exigibilité, constitue une ingérence dans le droit de propriété des assurés affiliés à ce régime en portant atteinte à la substance de leurs droits à pension.

9. Cette ingérence, qui repose sur des dispositions légales et réglementaires de droit interne, accessibles, précises et prévisibles, poursuit un motif d'intérêt général dès lors qu'elle contribue à l'équilibre financier de ce régime de retraite par répartition et qu'elle est de nature à inciter les cotisants à la célérité dans le paiement de leurs cotisations obligatoires.

10. Toutefois, les points acquis en contrepartie du paiement des cotisations doivent être regardés comme l'étant au fur et à mesure de leur versement. Dès lors, le défaut de prise en compte des cotisations payées au-delà du délai de cinq ans suivant leur date d'exigibilité, mais avant la liquidation du droit à pension, porte une atteinte excessive au droit fondamental garanti en considération du but qu'elle poursuit et ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence. Par suite, il y a lieu d'écarter l'application de l'article R. 643-10 du code de la sécurité sociale.

11. Pour débouter l'assuré de son recours, l'arrêt relève qu'il est de l'intérêt public, général et légitime que les cotisations soient versées à leur date d'exigibilité, ou régularisées dans un délai limité, afin que le système social de répartition puisse fonctionner au mieux. Il retient que le délai de cinq ans, bien supérieur au délai de grâce maximal que le juge civil peut accorder à un débiteur, ne paraît pas être d'une rigueur excessive à l'endroit du cotisant et lui permet de régulariser effectivement sa dette pour préserver ses droits futurs. L'arrêt ajoute que si le retard de paiement de cotisations peut, de manière générale en droit de la sécurité sociale, entraîner des majorations de retard et des pénalités, ce mécanisme n'exclut pas en matière de retraite l'existence d'une sanction plus lourde touchant à l'étendue des droits à pension acquis. Il en déduit que le versement de l'intégralité des cotisations est un préalable légal à l'ouverture des droits à la pension de retraite, et que la réduction du montant de cette pension de retraite au regard des cotisations versées au-delà de cinq années à compter de leur date d'exigibilité instituée par l'article R. 643-10 du code de la sécurité sociale n'est pas incompatible avec la protection du droit de propriété instituée par le droit européen.

12. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

13. L'assuré fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande de dommages-intérêts, alors « qu'aux termes de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en procédure orale, il ne peut être présumé qu'un moyen relevé d'office par le juge a été débattu contradictoirement, dès lors qu'une partie n'était pas présente à l'audience ; que pour déclarer l'assuré irrecevable en ses demandes de dommages-intérêts, la cour énonce que celles-ci sont formées pour la première fois en appel ; qu'en statuant ainsi, alors que l'assuré a été dispensé de comparaître et n'était donc pas présent à l'audience et qu'il ne ressort ni de la décision ni des pièces du dossier de procédure que la Caisse, partie présente ait été, au préalable, invitée à formuler ses observations sur le moyen relevé d'office, pris de la nouveauté de la demande de dommages-intérêts en appel, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

14. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

15. En procédure orale, il ne peut être présumé qu'un moyen relevé d'office par le juge a été débattu contradictoirement, dès lors qu'une partie n'était pas présente à l'audience.

16. Pour déclarer irrecevable la demande tendant à la condamnation de la Caisse au paiement de dommages-intérêts, l'arrêt retient que cette demande a été formée pour la première fois en cause d'appel.

17. En statuant ainsi, alors que l'assuré, dispensé de comparaître, n'était pas présent à l'audience et qu'il ne ressort ni de la décision ni des pièces du dossier de procédure qu'il ait été, au préalable, invité à formuler ses observations sur le moyen relevé d'office, pris de l'irrecevabilité de sa demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse et la condamne à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux juin deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. [C]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

M. [P] [C] FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir débouté de l'ensemble de ses demandes

1°) ALORS QUE l'article 1er du Protocole additionnel n°1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales implique, lorsqu'une personne est assujettie à titre obligatoire à un régime de retraite à caractère essentiellement contributif, un rapport raisonnable de proportionnalité exprimant un juste équilibre entre les exigences de financement du régime de retraite considéré et les droits individuels à pension des cotisants ; que le droit individuel à pension constitue un intérêt patrimonial substantiel entrant dans le champ d'application de l'article 1er du Protocole additionnel n°1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le dispositif de l'article R 643-10 du code de la sécurité sociale qui sanctionne le retard de paiement des cotisations au-delà d'un délai de cinq ans suivant leur date d'exigibilité par une absence totale d'attribution de points au titre desdites cotisations dans le régime de retraite de base constitue une ingérence dans le droit de propriété des assurés affiliés au régime, en ce qu'il porte une atteinte à la substance de leurs droits à pension, en les privant de pension de retraite s'ils ne justifient pas du paiement de leur cotisations dans le délai de cinq ans suivant leur date d'exigibilité et ce alors même qu'ils ont déjà réglé des majorations et pénalités de retard ; que cette ingérence contrevient aux principes qui régissent l'aménagement des régimes obligatoires de base d'assurance vieillesse, dont le régime d'assurance vieillesse des indépendants fait partie, et, notamment, au caractère contributif des régimes énoncé à l'article L. 111-2-1, II, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale ; que l'intérêt légitime attaché au recouvrement des contributions sociales comme l'équilibre financier des régimes concernés, ne justifient pas une atteinte disproportionnée aux droits des assurés, telle la privation totale d'une allocation de subsistance venant en contrepartie de cotisations effectivement versées, même avec plus de cinq ans de retard, durant des périodes d'activité ; qu'en statuant comme elle l'a fait et en considérant notamment que la réduction du montant de la pension de retraite au regard des cotisations versées au délai du délai de cinq ans à compter de leur date d'exigibilité instituée par l'article R 643-10 du code de la sécurité sociale, qui ne parait pas d'une rigueur excessive à l'endroit du cotisant et lui permet de régulariser effectivement sa dette pour préserver ses droits futurs, n'était pas incompatible avec la protection du droit de propriété instituée par le droit européen, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne ;

2°) ALORS QUE en tout état de cause, une règlementation ne peut porter atteinte à l'intérêt patrimonial protégé par l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne qu'aux conditions d'être justifiée par un intérêt public ou général légitime, et d'être proportionnée au but poursuivi ; que le juste équilibre à préserver n'est pas respecté si l'atteinte portée à l'intérêt patrimonial que constitue une prestation de sécurité sociale, est excessive dès lors qu'il n'y a pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre le but poursuivi et les moyens employés ; qu'en prévoyant comme sanction que les cotisations de retraite payée au-delà du délai de cinq ans suivant leur exigibilité n'attribuent au cotisant aucun point pour le calcul du montant de la retraite de base manifestement disproportionnée au regard du montant des cotisations mises à sa charge au cours de la période de constitution des droits et effectivement réglées même avec plus de cinq ans de retard, la clause de l'article R643-10 du code de la sécurité sociale, si elle contribue à l'équilibre financier du régime de retraite concerné et à la solidarité entre génération, porte une atteinte excessive au droit fondamental garanti en considération du but qu'elle poursuit, et ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence ; qu'en refusant dès lors d'écarter l'application de l'article R. 643-10 du code de la sécurité sociale susvisé, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne.

SECOND MOYEN DE CASSATION

M. [P] [C] FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué de l'avoir déclaré irrecevable en ses demandes de dommages-intérêts.

1°) ALORS QUE aux termes de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en procédure orale, il ne peut être présumé qu'un moyen relevé d'office par le juge a été débattu contradictoirement, dès lors qu'une partie n'était pas présente à l'audience ; que pour déclarer M. [C] irrecevable en ses demandes de dommages-intérêts, la cour énonce que celles-ci sont formées pour la première fois en appel ; qu'en statuant ainsi, alors que M. [C] a été dispensé de comparaitre et n'était donc pas présent à l'audience et qu'il ne ressort ni de la décision ni des pièces du dossier de procédure que la Cipav, partie présente ait été, au préalable, invitée à formuler ses observations sur le moyen relevé d'office, pris de la nouveauté de la demande de dommages-intérêts en appel, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

2°) ALORS QUE la cour d'appel est tenue d'examiner au regard de chacune des exceptions prévues aux articles 565 et 566 du code de procédure civile, si la demande est nouvelle ; qu'il résulte de l'article 565 du code de procédure civile que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent et de l'article 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge ; que pour déclarer M. [C] irrecevable en ses demandes de dommages-intérêts, la cour énonce que celles-ci sont formées pour la première fois en appel ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, même d'office, si ces demandes ne tendaient pas aux mêmes fins ou ne constituaient pas l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles formées par M. [C] en première instance, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 565 et 566 du code de procédure civile.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.