10 May 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-81.090

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:CR00675

Texte de la décision

N° W 22-81.090 F-D

N° 00675


ODVS
10 MAI 2022


REJET


M. SOULARD président,






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 10 MAI 2022



M. [C] [Z] a formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 4 février 2022, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, de travail dissimulé, en bande organisée, blanchiment, détention et usage de faux administratifs, association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Rouvière, conseiller référendaire, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de M. [C] [Z], et les conclusions de M. Lesclous, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 mai 2022 où étaient présents M. Soulard, président, M. Rouvière, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Interpellé dans le cadre d'une information judiciaire, M. [C] [Z] a été placé en garde à vue, mesure levée le 13 janvier 2022 à 13 heures 30.

3. Il a été mis en examen des chefs précités par un juge d'instruction le même jour à 17 heures 52.

4. Saisi par le juge d'instruction, le juge des libertés et de la détention a fait comparaître M. [Z] devant lui au cours d'un débat contradictoire ayant débuté le 14 janvier 2022 à 1 heure 28, et a rendu une ordonnance de placement en détention provisoire.

5. M. [Z] a relevé appel de cette décision.


Examen de la recevabilité du pourvoi formé par M. [Z]


6. M. [Z] ayant épuisé son droit à se pourvoir contre l'arrêt attaqué, par l'exercice qu'en a fait son avocat, en son nom, le 14 février 2022, il était irrecevable à se pourvoir à nouveau le 22 février 2022 contre la même décision.

7. Seul est ainsi recevable le pourvoi formé par l'avocat de M. [Z] le 14 février 2022.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

8. Le moyen est pris de la violation des articles 5, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et 593 du code de procédure pénale.

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté le moyen de nullité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention tiré de son défaut de comparution immédiate devant ce juge, alors :

« 1°/ qu'ensuite de la déclaration d'inconstitutionnalité à intervenir de l'article 145, alinéa 1er, du code de procédure pénale, qui, en ce qu'il n'encadre d'aucune limite ni garantie le délai susceptible de s'écouler entre l'ordonnance du juge d'instruction saisissant le juge des libertés et de la détention aux fins de placement en détention de la personne mise en examen et la comparution de cette personne devant ce juge, méconnaît les principes de respect de la présomption d'innocence, de dignité de la personne et de liberté individuelle, garantis par l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, le préambule de la Constitution de 1946 et l'article 66 de la Constitution, l'arrêt attaqué se trouvera privé de base légale ;

2°/ qu'en tout état de cause, ensuite de l'ordonnance du juge d'instruction saisissant le juge des libertés et de la détention aux fins de placement en détention de la personne mise en examen, cette dernière doit être libérée si elle ne comparaît pas immédiatement devant le juge des libertés et de la détention ; qu'en écartant la nullité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention tirée du défaut de comparution immédiate de M. [Z] devant le juge des libertés et de la détention après avoir pourtant constaté que plusieurs heures s'étaient écoulées entre l'ordonnance du juge d'instruction saisissant le juge des libertés et de la détention et sa comparution devant ce juge, la chambre de l'instruction a méconnu l'article 5, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ;

3°/ que plus subsidiairement, en retenant, pour écarter la nullité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention tirée du défaut de comparution immédiate de M. [Z] devant le juge des libertés et de la détention, qu'aucune disposition ne l'imposait et que compte tenu du nombre de personnes mises en examen et de la complexité de la procédure qui comportait déjà plus de 7 000 cotes, un délai de plusieurs heures n'était pas excessif, sans mieux s'expliquer sur les motifs ayant conduit à différer de plus de 7 heures 00 sa comparution devant le juge des libertés et de la détention, quand il était notamment soutenu que trois juges des libertés et de la détention étaient présents pour statuer sur le placement en détention provisoire de dix personnes, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 5, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Sur le moyen, pris en sa première branche

10. Par arrêt distinct de ce jour, la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu de transmettre cette question au Conseil constitutionnel. Il en résulte que le grief est sans objet.

Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

11. Pour écarter le moyen de nullité pris de sa comparution devant le juge des libertés et de la détention le lendemain de sa saisine, l'arrêt attaqué énonce qu'après son arrestation, M. [Z] a été conduit devant l'autorité judiciaire compétente et qu'aucune disposition légale n'exige que la comparution devant le juge des libertés et de la détention ait lieu le jour du défèrement.

12. Les juges ajoutent que, compte tenu du nombre de personnes mises en examen, qui s'élevait à dix, et de la complexité de la procédure, qui comportait plus de sept mille cotes, un délai de plusieurs heures n'était pas excessif.

13. En statuant ainsi, et dès lors qu'elle s'est assurée que la personne mise en examen avait comparu à bref délai devant le juge des libertés et de la détention après sa saisine par le juge d'instruction, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées.

14. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.

15. Par ailleurs l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé par M. [C] [Z] :

LE DÉCLARE IRRECEVABLE ;

Sur le pourvoi formé par l'avocat de M. [C] [Z] :

LE REJETTE ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix mai deux mille vingt-deux.

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