5 May 2022
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 21/05319

Chambre 1-7

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 05 MAI 2022



N° 2022/ 187













Rôle N° RG 21/05319 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHIJS







S.A.S. FRAM





C/



[H] [I]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jennifer GABELLE-CONGIO



Me Delphine CASALTA de la SELARL ARNOUX-POLLAK

























Décision déférée à la Cour :





Jugement du Tribunal de proximité d'Aubagne en date du 02 Février 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 1120000286.







APPELANTE



S.A.S. FRAM prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, demeurant 13 rue deville - 31000 TOULOUSE





représentée par Me Jennifer GABELLE-CONGIO de l'AARPI O.G.C, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Florence GRACIE-DEDIEU, avocat au barreau de TOULOUSE





INTIME





Monsieur [H] [I]

né le 30 Juillet 1973, demeurant 1 allée du Stade - 13821 LA PENNE SUR HUVEAUNE



représenté par Me Delphine CASALTA de la SELARL ARNOUX-POLLAK, avocat au barreau de MARSEILLE,

assisté de Me Lauriane BUONOMANO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE











*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR





En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargée du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère





Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Mai 2022.







ARRÊT



Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Mai 2022.



Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***





































































EXPOSÉ DU LITIGE



Le 30 novembre 2019, Madame [H] [I] a réservé auprès de la société FRAM un voyage en Egypte du 14 au 21 mars 2020, composé d'un vol aller-retour LYON/LOUXOR et d'une croisière de sept nuits pour un montant de 1861 euros.



Madame [I] et son compagnon, partis le 14 mars 2020, ont été rapatriés le 18 mars 2020 en raison de l'épidémie de la COVID 19.



Le 17 septembre 2020, le conseil de Madame [I] a mis en demeure la société FRAM à lui verser dans un délai de 15 jours la somme de 685 euros correspondant au montant des prestations non réalisées, outre des dommages et intérêts à hauteur de 4500 euros.



Par acte d'huissier du 03 novembre 2020, Madame [I] a fait assigner la société FRAM aux fins de la voir condamner à lui verser la somme de 685 euros au titre des prestations non réalisées, 4500 euros de dommages et intérêts et 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Par jugement réputé contradictoire du 02 février 2021 signifié le 26 mars 2021, le tribunal de proximité d'Aubagne a :

- déclaré recevable l'action de Madame [H] [I],

- condamné la SAS FRAM à payer à Madame [I] la somme de 652 euros au titre des prestations non réalisées,

- condamné la SAS FRAM à payer à Madame [I] la somme de 1500 euros de dommages et intérêts pour le préjudice subi,

- condamné la SAS FRAM à payer à Madame [I] la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS FRAM aux dépens,

- débouté du surplus des demandes,

- constaté l'exécution provisoire de droit.



Le premier juge a fait application des articles L 211-16 et L 211-17 du code de la consommation. Il a indiqué que la société FRAM était responsable de plein droit de l'exécution des services prévues au contrat conclu avec Madame [I]. Il a précisé que le voyageur avait droit à une réduction de prix appropriée pour toute période de non conformité des services fournis dans le cadre du contrat mais également à des dommages et intérêts.

Il a indiqué que le total des prestations non réalisées auquel s'ajoutait la réduction offerte de 213 euros s'élevait à la somme de 652 euros.

Il a alloué à Madame [I] la somme de 1500 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle avait subi à raison des démarches amiables qui étaient restées sans réponse.



Le 12 avril 2021, la société FRAM a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a déclaré recevable l'action de Madame [I], en ce qu'elle a été condamnée à verser à Madame [I] les somme de 652 euros au titre des prestations non réalisées, 1500 euros de dommages et intérêts et 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Madame [I] a constitué avocat et formé un appel incident.





Par conclusions notifiées le 25 juin 2021 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, la SAS FRAM demande à la cour de statuer en ce sens :

'REFORMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de proximité d'Aubagne en date du 2 février 2021,

JUGER que la SAS FRAM n'a commis aucune faute,

JUGER que la SAS FRAM a répondu à ses obligations découlant des articles L211-16 et L211-17 du Code de tourisme en accordant une réduction de 213 euros à Madame [I] à valoir pendant un an sur un prochain voyage,

JUGER satisfactoire la valeur de ladite réduction,

JUGER le caractère exceptionnel et inévitable de la crise sanitaire Covid 19,

JUGER l'absence de préjudice de Madame [I],

JUGER l'exonération de responsabilité de la SAS FRAM en raison du caractère exceptionnel et inévitable de la crise sanitaire Covid 19,

JUGER ne pas avoir lieu à indemnisation au profit de Madame [I],

CONDAMNER Madame [I] au paiement de la somme de 2500 euros au titre de l'article

700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens'.



Elle expose avoir envoyé à Madame [I] un bon à valoir de 213 euros correspondant aux prestations terrestres non utilisées et qu'elle estime correspondre à une réduction de prix, conformément à l'article L 211-16 du code du tourisme.

Elle estime n'avoir pas à verser une somme au titre des prestations aériennes non utilisées puisque Madame [I] et son compagnon ont été rapatriés.

Subsidiairement, elle indique que le montant total des prestations aériennes et terrestres non utilisées s'élèvent à 439 euros.

Elle conteste devoir des dommages et intérêts. Elle indique qu'aucun manquement ne peut lui être reproché. Elle ajoute que le voyage a été écourté en raison de la fermeture des frontières prononcée en raison de l'épidémie de la COVID 19 ce qui constitue une circonstance exceptionnelle et inévitable qui écarte sa responsabilité.





Par conclusions notifiées le 15 juillet 2021 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, Madame [I] demande à la cour de statuer en ce sens :

'- de déclarer l'appel de la SAS FRAM irrecevable et infondé,

- de débouter la SAS FRAM de ses demandes,

- de confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la SAS FRAM à lui verser la somme de 1500 euros de dommages et intérêts,

- de condamner la SAS FRAM à lui verser la somme de 4500 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

* à défaut :

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SAS FRAM à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* en tout état de cause :

- de conformer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SAS FRAM à lui verser la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



- de condamner la SAS FRAM à lui verser la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Maître Lauriane BUONOMANO'.



Elle soutient que la SAS FRAM est responsable de plein droit des prestations non réalisées.

Elle souligne que trois jours de voyages n'ont pu être effectués. Elle sollicite en conséquence la somme de 439 euros à laquelle s'ajoute la réduction de prix de 213 euros.

Elle sollicite des dommages et intérêts. Elle reproche à la SAS FRAM son inertie fautive et sa résistance abusive à l'indemniser.



L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 février 2022.






MOTIVATION



Selon l'article L 211-16 du code du tourisme dans sa version applicable, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.



Le professionnel qui vend un service de voyage mentionné au 2° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution du service prévu par ce contrat, sans préjudice de son droit de recours contre le prestataire de service.



Toutefois le professionnel peut s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que le dommage est imputable soit au voyageur, soit à un tiers étranger à la fourniture des services de voyage compris dans le contrat, soit à des circonstances exceptionnelles et inévitables.



Lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations.



Aux termes de l'article L 211-17 du code du tourisme dans sa version applicable,



I.-Le voyageur a droit à une réduction de prix appropriée pour toute période de non-conformité des services fournis dans le cadre d'un contrat, sauf si l'organisateur ou le détaillant prouve que la non-conformité est imputable au voyageur.



II.-Le voyageur a droit à des dommages et intérêts de la part de l'organisateur ou du détaillant pour tout préjudice subi en raison de la non-conformité des services fournis. L'indemnisation est effectuée dans les meilleurs délais.



III.-Le voyageur n'a droit à aucune indemnisation si l'organisateur ou le détaillant prouve que la non-conformité est imputable soit au voyageur, soit à un tiers étranger à la fourniture des services de voyage compris dans le contrat et revêt un caractère imprévisible ou inévitable, soit à des circonstances exceptionnelles et inévitables.



L'ordonnance 2020-315 du 25 mars 2020 n'est pas applicable puisqu'elle traite des conséquences de la résolution d'un contrat de vente de voyage notifiée entre le 1er mars 2020 et une date antérieure au 15 septembre 2020. En l'espèce, il ne s'agit pas de statuer sur les conséquences d'une résolution d'un contrat qui n'a pas eu lieu mais sur les conséquences de prestations non effectuées en raison de l'épidémie de la COVID 19.

L'agence de voyages, qu'elle soit distributrice de forfaits touristiques ou organisatrice de voyages (tour-opérateur) est responsable de plein droit de l'inexécution du contrat ou de la mauvaise exécution de celui-ci, sauf cas d'exonération de cette responsabilité de plein droit.



Le rapatriement de Madame [I] et de son compagnon est liée à la pandémie mondiale de la COVID 19, ce qu'aucune partie ne conteste.

Cette situation s'analyse en une circonstances exceptionnelles et inévitable et comme un cas de force majeure qui permet à la société FRAM, en application des articles L 211-16 et L 211-17 du code du tourisme, de s'exonérer de sa responsabilité dans l'existence de prestations non réalisées.



La réduction proposée par la société FRAM à titre 'd'avoir' s'analyse comme un geste commercial et ne vaut pas preuve d'une reconnaissance d'une responsabilité dans le rapatriement imposé par les conditions sanitaires.



En conséquence, c'est à tort que Madame [I] sollicite une indemnisation au titre des prestations non effectuées ou au titre d'un défaut de conformité du voyage. Le jugement qui a condamné la SAS FRAM à lui verser la somme de 652 euros au titre des prestations non réalisées sera infirmé.



Sur la demande de dommages et intérêts formée par Madame [I]



Madame [I] ne démontre aucune faute commise par la société FRAM. Elle ne justifie d'aucune résistance abusive à être indemnisée.

En conséquence, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Le jugement qui a condamné la société FRAM à lui verser la somme de 1500 euros sera infirmé.



Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile



Madame [I] est essentiellement succombante. Elle sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel. Elle sera déboutée de ses demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.



Pour des raisons liées à l'équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré qui a condamné la société FRAM aux dépens et qui l'a condamnée à verser à Madame [I] la somme de 700 euros au titre des frais irrépétibles sera infirmé.

La société FRAM sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.



PAR CES MOTIFS,



La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe



INFIRME le jugement déféré,



STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,



REJETTE les demandes formées par Madame [H] [I],



CONDAMNE Madame [H] [I] aux dépens de première instance et d'appel,



REJETTE la demande de la société FRAM au titre des frais irrépétibles.



LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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