16 May 2008
Cour d'appel de Paris
RG n° 07/18210

Texte de la décision

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



14ème Chambre - Section B



ARRÊT DU 16 MAI 2008



(no 311 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/18210



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Octobre 2007 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2007063995 prononcé par Monsieur DE BAECQUE, président, Madame RAULT et Monsieur VILARRUBLA, juges





APPELANTES



S.A.S. CARREFOUR FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son Président

Route de Paris

Zone Industrielle

14120 MONDEVILLE





S.A.S. CARREFOUR HYPERMARCHES FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son Président

ZAE Saint-Guenault

1 Rue Jean Mermoz

BP 75

91002 EVRY





S.A.S COMPTOIRS MODERNES agissant poursuites et diligences en la personne de son Président

Route de Paris

Zone Industrielle

14120 MONDEVILLE





S.A. CARREFOUR agissant poursuites et diligences en la personne de son Président

26 Quai Michelet

92300 LEVALLOIS PERRET





S.N.C. INTERDIS agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant

Route de Paris

Zone Industrielle

14120 MONDEVILLE



représentées par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avoués à la Cour

assistées de Me Bertrand CHARLET et de Me Caroline DEMEYERE, avocats au barreau de LILLE (SCP BEDNARSKI- CHARLET & Associés)











INTIMÉE



S.A. COOP-ATLANTIQUE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

3 rue du Docteur Jean

17100 SAINTES



représentée par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avoués à la Cour

assistée de Me Philippe LAUZERAL et de Me Frédéric BECCARIA, avocats au barreau de PARIS, toque : R 59 (SCP COTTY VIVANT MARCHISIO & LAUZERAL)





*



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 avril 2008, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Martine PROVOST-LOPIN, conseiller et Madame Sophie DARBOIS, conseiller chargé du rapport.





Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Thérèse FEYDEAU, président

Madame Martine PROVOST-LOPIN, conseiller

Madame Sophie DARBOIS , conseiller



Greffier : lors des débats, Madame Emmanuelle TURGNÉ.





ARRÊT :



- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Thérèse FEYDEAU, Présidente de Chambre, qui a remis la minute à Madame Emmanuelle TURGNÉ greffière, pour signature.





*



Vu les appels formés par la S.A.S. CARREFOUR FRANCE, la S.A.S. CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, la S.N.C. INTERDIS, la S.A.S. COMPTOIRS MODERNES et la S.A. CARREFOUR du jugement rendu en la forme des référés le 26 octobre 2007 par le tribunal de commerce de Paris qui les a déboutées de leurs demandes de rétractation des ordonnances du 3 et du 5 octobre 2007, a réservé les autres demandes et renvoyé la cause au 31 octobre 2007 à 14 h 15 ;



Vu l'ordonnance en date du 22 novembre 2007 de jonction des instances enrôlées sous les numéros 07/18210 et 07/18293 ;



Vu les conclusions en date du 3 avril 2008 par lesquelles les appelantes demandent à la cour, au visa des articles 145, 496 et suivants, 875, 493, 1458 et 1466 du code de procédure civile, de :

- constater que le tribunal arbitral convenu à l'article 17 du contrat signé entre la société COOP-ATLANTIQUE et la société COMPTOIRS MODERNES a été saisi et se trouve définitivement constitué,

- renvoyer en conséquence la société COOP-ATLANTIQUE à mieux se pourvoir devant le tribunal arbitral saisi, lequel se trouve exclusivement compétent pour statuer sur les mesures conservatoires sollicitées,

- déclarer irrecevable la société COOP-ATLANTIQUE en toutes ses prétentions, à tout le moins, la débouter de toutes demandes, fins et conclusions contraires,

en toutes hypothèses,

- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- en conséquence, rétracter les ordonnances rendues les 3 et 5 octobre 2007 par le président du tribunal de commerce de Paris,

- constater que les ordonnances ci-dessus n'ont plus aucune utilité en conséquence de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Paris en date du 7 novembre 2007,

- si mieux n'aime la cour, dire nuls et de nul effet les constats d'huissiers dressés en vertu desdites ordonnances et, en conséquence, "dire et juger" qu'ils seront remis à chacune des parties auprès desquelles ils ont été dressés,

- ordonner par voie de conséquence que les pièces et documents recueillis par les huissiers en vertu des ordonnances des 3 et 5 octobre 2007, comme les constats d'huissiers dressés, actuellement séquestrés entre les mains de la SCP Philippe Duparc et Carole Duparc-Crussard, huissier de justice à Paris, seront remis aux parties auprès desquelles ils ont été obtenus : en l'occurrence les sociétés INTERDIS S.N.C., COMPTOIRS MODERNES S.A.S. et CARREFOUR FRANCE S.A.S. à Mondeville et, le cas échéant, la société CARREFOUR S.A. à Levallois-Perret, ainsi qu'auprès de tous les fournisseurs tels que visés dans les requêtes et ordonnances obtenues par la société COOP-ATLANTIQUE auprès du président du tribunal de commerce de Paris et ce, à peine d'astreinte qui sera mise à la charge de la société COOP-ATLANTIQUE à hauteur de 100 000 € par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir,

- condamner la société COOP-ATLANTIQUE à payer à chacune des sociétés "requérantes" la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive en application de l'article 380 du code civil et celle de 50 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens ;



Vu les conclusions en date du 2 avril 2008 par lesquelles l'intimée demande à la cour de :

* in limine litis, au visa des articles 15, 16, 132 et 135 du code de procédure civile,

- rejeter des débats, pour défaut de communication, l'accord de partenariat conclu entre la société CARREFOUR FRANCE et la société MATERNE pour l'année 1998,

* au visa de l'article 145 du code de procédure civile,

- dire les sociétés CARREFOUR, CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS irrecevables et en tout cas mal fondées en leur appel,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande formée par ces sociétés tendant à la rétractation des ordonnances des 3 et 5 octobre 2007 rendues par le président du tribunal de commerce de Paris,

- débouter ces sociétés de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

* à titre infiniment subsidiaire, au visa des articles 179 et suivants du code de procédure civile,


- procéder, dans des conditions garantissant le respect d'une stricte confidentialité et du secret des affaires, à la vérification des procès-verbaux de son choix parmi les quarante procès-verbaux de constat dressés par les huissiers commis en vertu des ordonnances des 3 et 5 octobre 2007 et actuellement séquestrés auprès de la SCP Philippe Duparc et Carole Duparc-Crussard, et constater les taux de coopération commerciale figurant auxdits constats, ou dans une partie d'entre eux au moins, ainsi que la différence existant entre ces taux et ceux figurant dans BCP, tels que relevés par Me Jacques Nivet, huissier de justice, dans des procès-verbaux dressés en 2007 à la demande de la société COOP-ATLANTIQUE,

* à titre reconventionnel,

- condamner solidairement les sociétés CARREFOUR, CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS à payer à la société COOP-ATLANTIQUE la somme de 60 000 € à titre de dommages-intérêts,

* en tout état de cause,

- condamner solidairement les sociétés CARREFOUR, CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS à payer à la société COOP-ATLANTIQUE la somme de 60 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance et d'appel ;





SUR CE, LA COUR,



Considérant que, dès lors que les sociétés appelantes n'ont pas communiqué l'accord de partenariat conclu entre la société CARREFOUR FRANCE et la société MATERNE pour l'année 1998, la demande de leur contradicteur tendant à ce que cette pièce soit écartée des débats s'avère, ainsi qu'elles le soulignent, sans objet, étant toutefois précisé que ce défaut de communication rend toute référence à ce document dans leurs conclusions inopérante ;



Considérant que la S.A. COOP-ATLANTIQUE a, le 26 septembre 1997, signé deux contrats distincts d'enseigne et d'approvisionnement, l'un, pour l'exploitation d'hypermarchés lui appartenant sous l'enseigne CARREFOUR avec la S.A.S. CARREFOUR FRANCE et l'autre, pour l'exploitation de supermarchés lui appartenant sous l'enseigne STOC, actuellement CHAMPION, avec la S.A.S. COMPTOIRS MODERNES par lesquels ces sociétés se sont engagées à faire bénéficier COOP ATLANTIQUE "de l'ensemble des conditions d'achat négociées par elles avec les fournisseurs" ;



Que, doutant du respect, par ces sociétés et celles du "Groupe CARREFOUR", de leurs engagements contractuels, en particulier sur la question du reversement des marges arrière payées par les fournisseurs faisant apparaître selon elle un écart le plus souvent de 5,40 % en sa défaveur, la société COOP-ATLANTIQUE a, le 3 octobre 2007, obtenu aux termes de 40 ordonnances du président du tribunal de commerce de Paris statuant sur requête, la désignation de la SCP Philippe Duparc et Carole Duparc-Crussard, huissiers audienciers, et de plusieurs huissiers de justice aux fins de se rendre dans les sièges et établissements de fournisseurs précis et dans les sièges et établissements de la société CARREFOUR à Levallois-Perret, de la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE à Evry et des sociétés INTERDIS, CARREFOUR FRANCE et COMPTOIRS MODERNES à Mondeville ainsi qu'en tous autres lieux où serait assurée la gestion administrative et/ou l'exploitation de sociétés du "Groupe CARREFOUR" concernées, et de se faire communiquer par les fournisseurs et par les sociétés concernées du "Groupe CARREFOUR" un certain nombre de documents et d'informations précisément énoncées, notamment, une copie des «accords de partenariat» et des «accords commerciaux», en ce compris les annexes relatives aux conditions tarifaires, pour les années 2005, 2006 et 2007, des factures et documents récapitulatifs devant être établis par les distributeurs en application des articles L. 441-3 et L. 441-7 II 4o du code de commerce ainsi que les dates auxquelles les marges arrière correspondant à ces contrats ont été versées par les fournisseurs au "Groupe CARREFOUR" ;



Que les huissiers ont été autorisés à se faire assister de tout expert judiciaire ou technicien et/ou de tout professionnel de leur choix, notamment en matière informatique ou comptable ; qu'ils ont été autorisés à avoir accès à l'ensemble des serveurs et postes informatiques et à prendre des photos et des copies sur supports papier et/ou informatiques des éléments trouvés et en rapport direct ou indirect avec la mission confiée ; que le constat qu'ils avaient mission de dresser était précisément défini ; qu'il était enfin prévu que l'ensemble des éléments recueillis devait être transmis à la SCP Philippe Duparc et Carole Duparc-Crussard, huissiers audienciers, et conservés par cette dernière en séquestre jusqu'au 22 octobre 2007 à 14 heures, date et heure auxquelles ils devront être remis au magistrat afin d'être examinés de façon contradictoire ;



Que les sociétés CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, INTERDIS, COMPTOIRS MODERNES et CARREFOUR EUROPE ayant formé un appel- nullité contre l'ordonnance 07-1727 -déclaration d'appel finalement annulée par arrêt de cette chambre de la cour rendu le 22 octobre 2007, la société COOP-ATLANTIQUE a, le 5 octobre 2007, obtenu du président du tribunal de commerce de Paris statuant sur requête deux nouvelles ordonnances aux mêmes fins ;



Que, conformément aux énonciations de l'ensemble de ces ordonnances, la société COOP-ATLANTIQUE a fait assigner les 34 sociétés fournisseurs et les sociétés CARREFOUR, CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS afin d'obtenir, à l'issue d'un débat contradictoire, la remise de l'ensemble des éléments (copies de documents, supports informatiques et/ou tous autres produits) recueillis par les huissiers commis ;



Que, parallèlement, les sociétés CARREFOUR, CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS ont fait assigner la société COOP-ATLANTIQUE pour obtenir la rétractation de "l'ordonnance rendue le 5 octobre 2007", demande étendue en cours d'instance à l'ensemble des ordonnances sur requête ;



Que c'est dans ces conditions, qu'après jonction des instances, a été rendu, en la forme des référés par le tribunal statuant en formation collégiale présidée par le juge des requêtes, le jugement entrepris ;



Qu'indépendamment du présent appel dont la cour est saisie, le président du tribunal de commerce de Paris s'est prononcé sur le surplus des demandes selon ordonnance rendue le 9 novembre 2007 dont seules les pages 1 et 42 ont été versées aux débats aux termes de laquelle (en l'état de la partie communiquée) il a, notamment :

- ordonné à la SCP Philippe Duparc et Carole Duparc-Crussard (représentée par Me Carole Duparc-Crussard) de communiquer tant à la société COOP-ATLANTIQUE qu'aux sociétés concernées les procès-verbaux de constats établis à l'encontre des sociétés CARREFOUR, CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS,

- ordonné à la SCP Philippe Duparc et Carole Duparc-Crussard (représentée par Me Carole Duparc-Crussard) de conserver en séquestre tous les autres documents saisis jusqu'à décision de justice ou accord entre les parties ;



Que, les sociétés CARREFOUR, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, CARREFOUR FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS qui ont relevé appel de cette seconde décision, se sont désistées de leur recours le 21 novembre 2007 ;



Considérant qu'au soutien de l'appel du jugement entrepris qui les a déboutées de leur demande de rétractation des ordonnances sur requête, les sociétés CARREFOUR, CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS font valoir pour l'essentiel :

- que, dès lors qu'il a, au jour où la cour statue, été définitivement constitué en vertu de la clause insérée à l'article 17 du contrat signé entre les sociétés COOP-ATLANTIQUE et COMPTOIRS MODERNES, c'est le tribunal arbitral qui est seul compétent pour statuer sur les mesures conservatoires sollicitées ; que, de plus, la compétence exceptionnelle reconnue au juge des référés en présence de clauses compromissoires, lesquelles figurent dans les deux contrats litigieux, cède lorsque la condition de l'urgence n'est pas remplie ce qui est le cas en l'espèce ; qu'en outre, la condition de l'urgence s'imposait d'autant plus que le juge étatique se trouvait saisi par voie de requête sur le fondement de l'article 875 du code de procédure civile, qu'elle ne peut être justifiée a posteriori et qu'elle n'est en tout état de cause pas caractérisée, les faits allégués remontant à l'année 2005 ;

- que l'absence de justification, pour obtenir la mesure sollicitée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, du recours à la procédure non contradictoire de la requête et de l'urgence impose la rétractation des ordonnances ;

- que le président du tribunal de commerce a statué au-delà des demandes formées dans la requête, notamment, en autorisant les huissiers commis à dresser constat de la liste des éléments recueillis ;

- que les conditions de l'article 145 du code de procédure civile ne sont pas réunies, le motif légitime invoqué par la société COOP-ATLANTIQUE n'étant pas justifié, la mesure ne présentant plus d'utilité au vu de l'ordonnance du 9 novembre 2007 et n'étant pas légalement admissible comme portant atteinte au secret des affaires ;



Considérant qu'une clause compromissoire a été insérée à l'article 17 de chacun des contrats ;



Que l'article 1458 du code de procédure civile dispose que "lorsqu'un litige dont un tribunal arbitral est saisi en vertu d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de l'Etat, celle-ci doit se déclarer incompétente. Si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi, la juridiction doit également se déclarer incompétente à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle. (...) ;



Que la compétence du juge étatique saisi d'une demande sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile s'appréciant au jour de sa saisine, le fait que le tribunal arbitral dans le différend opposant la société COOP-ATLANTIQUE à la société COMPTOIRS MODERNES soit, au jour où la cour statue, définitivement constitué et par conséquent saisi, est inopérant ;



Que l'exception d'incompétence doit donc être rejetée ;



Considérant que l'existence d'une clause compromissoire ne fait pas obstacle au pouvoir du juge des requêtes d'ordonner, sur le fondement de l'article 145 du code précité, tant que le tribunal arbitral n'est pas saisi, toutes les mesures d'instruction légalement admissibles, s'il existe, pour le demandeur, un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige ;



Que, cependant, l'article 875 du même code subordonne la saisine du président du tribunal de commerce par voie de requête à la double condition que la mesure sollicitée soit urgente et que les circonstances exigent qu'elle ne soit pas prise contradictoirement ;



Qu'en l'espèce, l'urgence n'est pas caractérisée ni même alléguée dans les requêtes, lesquelles, au surplus, ont été présentées deux ans et demi après les premières difficultés auxquelles il est fait référence pour justifier du bien fondé de la mesure sollicitée ; que cette absence de motif, à laquelle il ne peut être ultérieurement suppléé, justifie la rétractation des ordonnances sans qu'il soit besoin de statuer sur les mérites des requêtes et de répondre aux moyens surabondants ;



Considérant, dans ces conditions, qu'il y a lieu, en infirmant le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de rétracter les ordonnances des 3 et 5 octobre 2007 ;



Considérant que les actes d'exécution de ces ordonnances sont privés d'effet sans qu'il soit nécessaire de dire nuls et de nul effet les procès-verbaux de constats dressés par les huissiers instrumentaires ; qu'en revanche, les constats qui auront été remis à la société COOP-ATLANTIQUE en exécution de l'ordonnance du 9 novembre 2007 devront être restitués par cette société aux parties auprès desquelles ils ont été dressés ; que, dès lors que cette société ne peut en faire usage puisqu'ils sont privés d'effet, le prononcé d'une astreinte ne se justifie pas;



Qu'il convient, en outre, d'ordonner la restitution par la SCP Philippe Duparc et Carole Duparc-Crussard (représentée par Me Carole Duparc-Crussard) qui en est séquestre, des pièces et documents aux parties -appelantes et leurs fournisseurs- auprès desquelles ils ont été respectivement obtenus lors de l'exécution des mesures d'instruction ainsi que des constats dressés ; que, s'agissant d'une restitution faite par le séquestre dans les conditions précisées au dispositif ci-après, il n'y a pas davantage lieu de l'assortir d'une astreinte à l'encontre de l'intimée ;



Considérant que le sens de cet arrêt conduit à rejeter la demande subsidiaire de la société COOP-ATLANTIQUE fondée sur l'article 179 du code de procédure civile puisque la mesure de vérification et de constatation personnelle à laquelle il est demandé à la cour de se livrer devrait être exécutée sur les pièces, documents et constats écartés ;



Considérant que le bien fondé de l'appel implique le rejet de la demande de dommages-intérêts formée par l'intimée pour procédure abusive ;



Considérant que les circonstances de la cause ne permettent pas de caractériser un exercice fautif du droit pour la société COOP-ATLANTIQUE d'agir en justice ; que la demande de dommages-intérêts formée par les appelantes sera également rejetée ;



Considérant que l'intimée, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et ne peut, dès lors, se prévaloir du bénéfice de l'article 700 code de procédure civile ;



Que l'équité conduit à ne pas allouer d'indemnité de procédure aux appelantes dans le cadre de la présente procédure ;





PAR CES MOTIFS,



Constate que la demande de rejet des débats de l'accord de partenariat conclu entre la société CARREFOUR FRANCE et la société MATERNE pour l'année 1998 est sans objet ;



Rejette l'exception d'incompétence ;



Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;



Statuant à nouveau,



Rétracte l'ensemble des ordonnances sur requête des 3 et 5 octobre 2007 rendues par le président du tribunal de commerce de Paris ;



Dit que les actes d'exécution de ces ordonnances sont privés d'effet ;



En conséquence,



Constate que la demande d'annulation des constats d'huissier est sans objet ;



Ordonne, dans les huit jours de la signification du présent arrêt, la restitution par la S.A. COOP-ATLANTIQUE aux sociétés concernées auprès desquelles ils ont été dressés des procès-verbaux de constats établis à l'encontre des sociétés CARREFOUR, CARREFOUR FRANCE, CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, COMPTOIRS MODERNES et INTERDIS ;



Ordonne la restitution par la SCP Philippe Duparc et Carole Duparc-Crussard (représentée par Me Carole Duparc-Crussard) qui en est séquestre, sur présentation d'une expédition du présent arrêt par l'une des parties, des pièces et documents à la S.A.S. CARREFOUR FRANCE, la S.A.S. CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, la S.N.C. INTERDIS, la S.A.S. COMPTOIRS MODERNES, la S.A. CARREFOUR et à leurs fournisseurs auprès desquels ils ont été respectivement obtenus lors de l'exécution des mesures d'instruction ainsi que des procès-verbaux dressés ;



Dit n'y avoir lieu d'assortir ces restitutions d'une astreinte à l'encontre de la S.A. COOP-ATLANTIQUE ;



Rejette la demande formée par la S.A. COOP-ATLANTIQUE sur le fondement de l'article 179 du code de procédure civile ;



Rejette les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive formées respectivement par la S.A.S. CARREFOUR FRANCE, la S.A.S. CARREFOUR HYPERMARCHÉS FRANCE, la S.N.C. INTERDIS, la S.A.S. COMPTOIRS MODERNES et la S.A. CARREFOUR et par la S.A. COOP-ATLANTIQUE ;



Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne la S.A. COOP-ATLANTIQUE aux dépens de première instance et d'appel dont recouvrement dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.





LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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