2 March 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-17.844

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00255

Texte de la décision

SOC.

OR



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 2 mars 2022




Rejet


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 255 F-D

Pourvoi n° T 18-17.844







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 MARS 2022

Mme [X] [Z]-[M], domiciliée [Adresse 2], exerçant sous l'enseigne Auto école [Z], a formé le pourvoi n° T 18-17.844 contre l'arrêt rendu le 22 mai 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 11), dans le litige l'opposant à Mme [P] [G], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Mme [G] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Techer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme [Z]-[M], de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme [G], après débats en l'audience publique du 12 janvier 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Techer, conseiller référendaire rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 mai 2018), Mme [G] a été engagée le 6 septembre 2010 par Mme [Z]-[M], qui exploite une activité d'auto-école, suivant contrat de professionnalisation, en qualité de secrétaire. La relation de travail s'est poursuivie en contrat à durée indéterminée le 1er septembre 2011 et la salariée a occupé à compter de cette date la fonction d'enseignante de conduite.

2. Elle a saisi la juridiction prud'homale le 23 janvier 2014 de demandes tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail et au paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de celui-ci.

3. Elle a été licenciée le 17 décembre 2014.

Examen des moyens

Sur les premier moyen, deuxième moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, et troisième moyen du pourvoi principal, et sur le moyen du pourvoi incident, ci-après annexés


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche

Énoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts et de le condamner à payer à la salariée certaines sommes à titre d'heures supplémentaires, d'indemnité de préavis, outre congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement et pour licenciement abusif, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en constatant, pour accorder un rappel d'heures supplémentaires de 133 heures à Mme [G], qu'elle réclame, dans un courrier du 21 janvier 2014, à son employeur le paiement de 133 heures supplémentaires qu'elle a ensuite portées à 168,50 heures en appel et que les agendas produits par Mme [G], à partir desquels elle a établi son relevé d'heures hebdomadaires, ''… ne comportent, au jour le jour, aucune mention concernant ses jours et horaires de présence au centre de formation et à l'auto-école, ni aucune mention de rendez-vous pendant les horaires à l'auto-école permettant de connaître les heures travaillées mais mentionnent uniquement les activités privées de Mme [G] ; que les agendas ont simplement été complétés par la mention manuscrite portée sous chaque jour de la semaine de l'amplitude de travail quotidien, sans mention des horaires effectués, faisant apparaître des semaines de travail de 40 heures et plus'', ce dont il ressort que les éléments de preuve fournis par Mme [G] ne sont pas suffisamment précis pour étayer sa demande de rappel d'heures supplémentaires, la cour, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel, qui a constaté que la salariée produisait un relevé d'heures hebdomadaires, ainsi que les agendas à partir desquels elle avait établi ce relevé, lesquels comportaient une mention manuscrite sur l'amplitude de travail quotidien alors que l'employeur ne justifiait pas de l'horaire de travail de la salariée, a exactement décidé que ces éléments étaient suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétendait avoir accomplies, afin de permettre à l'employeur d'y répondre en produisant ses propres éléments.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois, tant principal qu'incident ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour Mme [Z]-[M], demanderesse au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir pas lieu de rejeter les conclusions n° 2 de Mme [G] notifiées par RPVA le 30 novembre 2017,

AUX MOTIFS QUE « Sur l'incident de procédure
A l'audience du 2 décembre 2016 à laquelle les conseils des parties étaient présents, le calendrier des échanges entre les parties a été fixé avec leur accord, les dernières conclusions devant être transmises à la cour par RPVA le 2 octobre 2017.
Le conseil de Mme [G] a notifié le 30 novembre 2017 des conclusions et une pièce 61 constituée par l'attestation du docteur [B] en date du 3 décembre 2016 dont il est demandé le rejet des débats par le conseil de Mme [Z]-[M].
La cour ne fait pas droit à la demande de rejet des conclusions, étant relevé que le seul développement nouveau figurant en page 27 de ses conclusions est consacré au rejet de la demande de dommages-intérêts formée par Mme [Z]-[M], argumentaire auquel son conseil qui a disposé de plusieurs jours pour en prendre connaissance, était en mesure de répondre utilement à l'audience.
En revanche, la cour estime tardive la communication le 30 novembre 2017, de l'attestation du docteur [B] datée du 3 décembre 2016 et l'écarte des débats » ;

1) ALORS QUE sont écartés des débats, les prétentions, moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense ; qu'en refusant de faire droit à la demande de rejet des conclusions n° 2 de Mme [G] communiquées le 30 novembre 2017 quand le dispositif de ces conclusions demande le rejet de la demande reconventionnelle de dommages et intérêts formée par Mme [Z] et comporte un développement nouveau consacré au rejet de cette demande qui a été repris par la cour pour y faire droit, la cour a violé l'article R. 1454-19-3 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [G] aux torts de Madame [Z] et d'avoir condamné cette dernière à lui payer les sommes de 1 188 euros au titre des heures supplémentaires, 4 853,43 euros à titre d'indemnité de préavis, outre congés payés afférents, 614,38 à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et 15 000 euros pour licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la rupture du contrat de travail
Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée.
C'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.
A l'appui de sa demande de résiliation judiciaire, Madame [G] invoque plusieurs manquements.

Sur le non paiement d'heures supplémentaires
Madame [G] soutient avoir accompli 168,50 heures supplémentaires impayées pendant la durée de son contrat de professionnalisation mais également pendant l'exécution de son contrat à durée indéterminée, sa présence étant requise au-delà de son horaire de travail pendant toute la durée d'ouverture de l'auto-école, à la différence que les heures supplémentaires effectuées pendant l'exécution de son contrat à durée indéterminée lui étaient payées en espèces et n'ont donné lieu à aucune cotisation sociale.
Madame [Z]-[M] conteste la réalisation d'heures supplémentaires ainsi que les relevés et agendas produits par Madame [G], établis selon elle pour les besoins de la cause, trois ans après la saisine du conseil de prud'hommes, et qui ne seraient pas de nature, selon elle, à démontrer la réalité des heures prétendument effectuées, dans la mesure où, pendant la durée de son contrat de professionnalisation, Madame [G] partageait son temps entre le centre de formation et l'auto-école. De plus, elle n'était pas seule en charge du secrétariat puisque Monsieur [Z], père de Madame [Z]-[M], s'y consacrait bénévolement pendant quelques heures. Elle fait observer enfin que les décomptes de Madame [G] présentent des incohérences, le relevé d'heures ne correspondant pas à ses agendas, privant ces pièces de toute valeur probante.
Selon l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, la preuve des horaires de travail effectués n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
Pour la période du 6 septembre 2010 au 31 août 2011, Madame [G] affirme avoir réalisé 168,50 heures supplémentaires.
Le contrat de professionnalisation précise que la durée de travail hebdomadaire est de 35 heures réparties entre le centre de formation et la présence en auto-école, sans autre précision.
Madame [G] soutient qu'elle travaillait en réalité 44 heures par semaine réparties comme suit :
- le lundi, au centre de formation : de 9h30 à 12h30 et de 13h30 à 17h30,
- du mardi au jeudi: le matin, au centre de formation et l'après-midi à l'auto école (sans précision d'horaire),
- le vendredi à l'auto-école de 10h à 13 h et de 14h à19 h,
- le samedi de 10h à 13 h et de 14 h à 16h.
Elle produit aux débats un relevé d'heures hebdomadaires faisant apparaître des dépassements systématiques de l'horaire contractuel de 35 heures (sa pièce 17). Elle produit également les agendas à partir desquels elle a établi ce relevé.
Madame [Z]-[M] à qui il appartient de justifier des horaires de travail de la salariée et de la répartition de son temps de travail dans la semaine ne produit aucun élément permettant de déterminer l'horaire de travail auquel était soumise Madame [G]. Elle n'a pas répondu aux courriers de réclamation de Madame [G] des 24 décembre 2012, 5 juin 2013et 21 janvier 2014 et . Elle admet néanmoins dans ses conclusions (page 11) que Madame [G], à qui elle accordait des jours d'absence pendant les semaines où elle avait la charge de ses enfants, était effectivement amenée à compenser ces absences par des heures supplémentaires. Elle n'est toutefois pas en mesure de justifier que les heures supplémentaires réalisées ont effectivement été compensées par un repos compensateur de même durée.
Au vu des pièces produites, la cour a la conviction que Madame [G] a travaillé au-delà de l'horaire contractuel mais pas dans les proportions qu'elle indique puisque :
- dans un courrier du 21 janvier 2014, elle réclamait à l'employeur le paiement de 133 heures supplémentaires, portées à 168h50 dans le cadre de l'instance,
- elle admet que Monsieur [Z] consacrait du temps au secrétariat en plus d'elle même,
- les agendas qu'elle produit ne comportent, au jour le jour, aucune mention concernant ses jours et horaires de présence au centre de formation et à l'auto-école, ni aucune mention de rendez-vous pendant les horaires à l'auto-école permettant de connaître les heures travaillées mais mentionnent uniquement les activités privées de Madame [G] ; les agendas ont simplement été complétés par la mention manuscrite portée sous chaque jour de la semaine de l'amplitude de travail quotidien, sans mention des horaires effectués, faisant apparaître des semaines de travail de 40 heures et plus.
Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'allouer à Madame [G] la somme de 1.188 euros pour 133 heures supplémentaires sur la base du taux horaire retenu par l'appelante outre les congés payés afférents.
Concernant les heures supplémentaires effectuées pendant l'exécution du contrat à durée indéterminée, le contrat de travail prévoit une durée de travail hebdomadaire de heures réparties dans les plages horaires de 7h à 20h du lundi au vendredi et le samedi entre 8h et 16h.
Madame [G] affirme qu'elle travaillait en moyenne 44 heures par semaine réparties comme suit :
- du lundi au vendredi : de 9h à 13h puis de 14h à 18h, soit 40 heures de travail (8 heures travaillées x 5 jours) ;
- un samedi sur deux : de 9h à 13h puis de 14h à 18h, soit 8 heures de travail une semaine sur deux.
Elle produit des relevés d'horaire hebdomadaire (ses pièces 38 et 39) et ses agendas comportant les heures de conduite qu'elle assurait quotidiennement et a fait sommation à l'employeur de communiquer les fiches de suivi des élèves pour la période du 2 janvier au 10 10 novembre 2012 permettant de corroborer les jours et nombre d'heures d'enseignement par élève, sommation à laquelle l'employeur n'a pas déféré.
Madame [Z]-[M] à qui il appartient de justifier des horaires de travail de la salariée et de la répartition de son temps de travail dans la semaine ne produit aucun élément permettant de déterminer l'horaire de travail auquel était soumise Madame [G].
Il est acquis au vu des pièces produites par Madame [G], et non utilement contredites par l'intimée, que des heures supplémentaires ont été réalisées sans que l'employeur ne les reporte sur les bulletins de paie de Madame [G] et n'ont donc été soumises à aucune cotisation sociale, Madame [G] qui déclare avoir été payée de ces heures en espèces ne réclamant aucun rappel de salaire à ce titre.
Il résulte de ce qui précède que le premier manquement de l'employeur invoqué par Madame [G] est établi.

Sur l'attitude injurieuse de l'employeur
Madame [G] reproche à Madame [Z]-[M] d'avoir tenu des propos injurieux à son égard auprès de tiers, de s'être adressée à elle en hurlant et en la menaçant de la dénoncer à l'inspection du travail lorsqu'elle s'est présentée le 22 décembre 2012 à l'auto-école, pendant son arrêt maladie, pour chercher son bulletin de paie du mois de novembre 2012. Elle lui reproche également d'avoir appeler son médecin traitant pour connaître son état de santé.
Madame [Z]-[M] conteste les griefs et les attestations produites par l'appelante. Elle indique qu'elle a, au contraire, toujours soutenu Madame [G] avait laquelle elle avait noué des liens d'amitié mais qui, par son attitude agressive, a compromis l'ambiance au sein de l'auto-école à partir de 2012, au point qu'un salarié a préféré donner sa démission.
Elle ajoute que Madame [G] a menacé de ruiner sa société, faits pour lesquels elle a déposé une main-courante le 17 mai 2013 (sa pièce 5-1), que cherchant toujours à la déstabiliser, Madame [G] a eu cinq absences injustifiées entre avril et août 2014 et qu'elle a faussement déclaré un accident du travail non reconnu par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie. Elle indique enfin que, Madame [G] lui ayant interdit de la contacter, elle a appelé son médecin dans le seul but de lui faire préciser la date de reprise de Madame [G] figurant sur son arrêt de travail.
Madame [G] produit l'attestation de Madame [Y] qui a effectué en novembre 2012 un stage de formation à l'auto-école [Z] et qui indique qu'à l'occasion d'une discussion au cours de laquelle elles évoquaient la maladie de Madame [G], Madame [Z]-[M] a déclaré devant un élève: « a santé de [P], j'en ai rien à foutre... », et encore que Madame [G] ne savait pas élever ses enfants, qu'elle était procédurière et qu'elle prenait trop de vacances, propos qu'elle avait réitérés le 21 décembre 2012.
Madame [Z]-[M] soutient que cette attestation émanant d'une amie de Madame [G] est de pure complaisance. La cour considère que les propos rapportés par le témoin sont précis et réitérés et qu'aucun élément ne permet de mettre en cause la sincérité de ce témoignage, de sorte que le grief est suffisamment établi.
Madame [G] produit également l'attestation de Monsieur [C], ancien salarié licencié pour faute grave, qui confirme que Madame [Z]-[M] a accueilli Madame [G] le 22 décembre 2012 en lui disant qu'elle n'avait rien à faire à l'autoécole et en la menaçant de la dénoncer à l'inspection du travail pour « venue illégale ».
Madame [Z]-[M] conteste les faits et indique que Madame [G] l'a immédiatement prise à parti en arrivant, que l'attestation de Monsieur [C] est de pure complaisance, celui-ci ayant été licencié pour faute grave et assisté lors de l'entretien préalable par Madame [G], les salariés ayant attesté l'un pour l'autre dans leurs instances respectives devant le conseil de prud'hommes.
La cour estime que l'attestation de Monsieur [C] est insuffisante à elle seule à établir le grief, compte tenu du contexte décrit et des intérêts communs des salariés contre l'employeur.

Concernant l'intrusion dans sa vie privée consistant à s'informer de sa maladie auprès de son chirurgien, le docteur [U], dans une attestation délivrée le 16 juillet 2014 à Madame [Z]-[M], confirme que celle-ci l'a interrogé uniquement sur les dates de l'arrêt de travail de Madame [G], qu'elle ne lui avait posé aucune question sur l'état de santé de cette dernière et ne l'avait pas menacé de déposer plainte auprès de l'Ordre des médecins pour avoir établi des certificats médicaux de complaisance, contrairement à ce que soutient Madame [G] (page 4 et 24 de ses conclusions). Le grief n'est donc pas établi.
Sur la réticence dans la communication des éléments à l'assurance maladie Madame [G] reproche à l'employeur d'avoir retardé son indemnisation par la caisse d'assurance maladie en ne fournissant pas l'attestation de salaire nécessaire au calcul de ses prestations de sécurité sociale, et ce malgré plusieurs relances.
Aucune négligence imputable à l'employeur n'est établie dès lors qu'il résulte des pièces produites que la caisse primaire d'assurance maladie s'est adressée à Madame [G] pour obtenir l'attestation de salaire, par courrier du 28 mars 2013 et une relance le 2 mai 2013.
A cette date, Madame [Z]-[M] établit (sa pièce 30-3) qu'elle avait envoyé l'attestation de salaire à la CPAM qui en a accusé réception le 4 avril 2013.
Madame [G] n'établit pas qu'elle a subi un retard dans le versement des indemnités journalières de sécurité sociale.
Enfin, les démarches auprès de la caisse de prévoyance ont été faites dès le 14 mars 2013 ( pièce 30-4 de l'intimée), de sorte que le retard de versement des prestations au mois de juin 2013 n'est manifestement pas imputable à l'employeur. Le grief n'est pas établi.

Sur la mise à l'écart et la modification des horaires de travail Madame [G] reproche à Madame [Z]-[M] d'avoir vidé son contrat de travail de toute substance en ne lui confiant plus d'heures de conduite à son retour de congé maladie et en la cantonnant à l'enseignement du code au sous-sol de l'auto-école et d'avoir modifié ses horaires de travail en lui imposant de rester tard le soir, contrainte qu'elle savait incompatible avec ses obligations familiales.
Madame [Z]-[M] confirme que Madame [G] n'a plus assuré d'heures de conduite à son retour d'arrêt maladie mais justifie le changement de poste à l'enseignement du code par la restriction du médecin du travail dans son avis d'aptitude portant sur le port de charges lourdes, interdisant en particulier le changement de roue.
Madame [G] considère que cette restriction pouvait être respectée en lui adjoignant l'autre moniteur en cas de problème ou en mettant à sa disposition une bombe anti-crevaison et ne pouvait justifier une modification de ses attributions.

La restriction médicale ne justifiait pas en effet que Madame [G] soit privée de toute heure de conduite et cantonnée à l'enseignement du code, alors que le médecin du travail l'avait déclarée apte à la reprise de son poste d'enseignante de conduite.
De même, si le changement d'horaire relève normalement du pouvoir de direction de l'employeur, dans le cas présent, force est de constater que Madame [Z]-[M] connaissait les contraintes familiales de Madame [G] pour lui avoir délivré dans le cadre de sa procédure de divorce une attestation concernant l'aménagement de ses horaires de travail lui permettant d'accueillir ses enfants et qu'elle ne pouvait de bonne foi lui imposer une modification de ses horaires l'obligeant à rester tous les soirs de la semaine jusqu'à ou 20 heures.
Par ailleurs, elle n'établit pas que ces modifications de poste et d'horaires étaient nécessaires pour l'organisation de l'activité de l'auto-école.
Cette modification des conditions de travail imposées par l'employeur a eu des répercussions sur l'état de santé de Madame [G], déjà affaiblie sur le plan psychologique par la maladie dont elle venait de se remettre, ainsi que le démontre son arrêt de travail du 20 septembre 2014 pour état anxio dépressif réactionnel et l'avis d'inaptitude.
Le grief est donc établi.

Sur la retenue de salaire du mois d'août 2014
Madame [G] fait valoir que l'employeur a procédé à une retenue injustifiée sur son salaire de 775,81 euros dont elle demande le paiement, pour une absence qualifiée à tort d'injustifiée du 20 au 28 août 2014 alors qu'elle était en congé autorisé.
Madame [Z]-[M] soutient qu'il s'agissait bien d'une absence injustifiée.
Il résulte d'un courrier recommandé du 7 mai 2014 de Madame [Z]-[M] (pièce 49 de l'appelante) que celle-ci avait autorisé les congés de Madame [G] du 1er u 28 août 2014, dont 15 jours au titre d'un report de congés de 2012/2013 dont Madame [G] n'avait pu bénéficier en raison de son arrêt maladie, ainsi que Madame [Z]-[M] le lui a confirmé par courrier du 27 mai 2014. La fiche de paie de Madame [G] confirme qu'elle avait acquis au titre de l'année en cours 7,50 jours de congés payés.
Par conséquent, c'est à tort que l'employeur a considéré que Madame [G] était en absence injustifiée du 20 au 28 août 2014, ayant expressément accordé ces congés à la salariée qui disposait du crédit de congés payés suffisant.
Il y a lieu par conséquent de condamner Madame [Z]-[M] au remboursement de la somme de 775,81 euros outre celle de 77,58 euros au titre des congés payés afférents. Le grief est caractérisé.
Il résulte de ce qui précède que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [G] est justifié par des manquements suffisamment graves de l'employeur rendant impossible le maintien du contrat de travail à savoir : le non-paiement d'heures supplémentaires malgré plusieurs demandes de la salariée, l'absence de déclaration des heures supplémentaires, l'attitude injurieuse établie à une reprise, une modification imposée à la salariée de ses conditions de travail qui n'était justifié ni par les nécessités d'organisation de l'auto-école, ni par l'état de santé de Madame [G] et qui n'était pas compatibles avec la vie privée de cette dernière, ce que l'employeur n'ignorait pas, outre une retenue de salaire injustifiée.
Il y a donc lieu de prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de Madame [Z]-[M] à effet au 17 décembre 2014, date du licenciement. Le jugement est infirmé de ce chef ;
[…]
Sur les conséquences de la résiliation judiciaire
La résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Madame [G] a droit à l'indemnité de préavis ainsi qu'à l'indemnité de licenciement conventionnelle.
L'article 2.12 de la convention collective nationale des services de l'automobile applicable au litige fixe à deux mois le préavis pour un salarié ayant une ancienneté de plus de deux ans.
Il y a donc lieu d'allouer à Madame [G] les sommes qu'elle sollicite soit 4.853 euros à titre d'indemnité de préavis outre 485 € à titre de congés payés y afférents.
L'article 2.13 de la convention collective nationale des services de l'automobile dispose que, sauf en cas de faute grave ou lourde, une indemnité de licenciement est due au salarié ayant au moins un an d'ancienneté dans l'entreprise, appréciée par années et mois complets pour le calcul de cette indemnité de licenciement. L'indemnité de licenciement est, à partir d'un an d'ancienneté, égale à 2/10e de mois par année, à compter de la date d'entrée dans l'entreprise.
Justifiant à l'issue du préavis d'une ancienneté de 4 ans et 5 mois, Madame [G] a droit à une indemnité de licenciement de 2.190,18 euros calculée comme suit :
- 2.479,45 x (1/5) x 4 ans = 1.983,56 euros - 2.479,45 x (1/5) /12 x 5 mois = 206,62 euros.
Madame [G] ayant perçu à ce titre la somme de 1.575,80 euros limite sa demande au solde dû de 614,38 euros. Il convient de faire droit à sa demande.
Le jugement est donc infirmé sur ces chefs de demande.
Madame [G] sollicite la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Madame [Z]-[M] s'y oppose.
Madame [G] était âgée au jour de son licenciement de 50 ans et avait une ancienneté de 4 ans et 5 mois au sein d'une entreprise de moins de onze salariés.
Au vu des circonstances de la rupture et du préjudice de Madame [G] tel qu'il résulte des pièces produites, la cour estime la juste réparation du préjudice résultant de la perte injustifiée d'emploi à la somme de 15.000 euros en application de l'article L. 1235-5 du code du travail » ;

1) ALORS QUE la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ; qu'il s'ensuit que les motifs donnés par le jugement dont l'exposante demande la confirmation sont considérés comme intégrés dans ses conclusions d'appel et constituent autant de moyens auxquels les juges d'appel doivent répondre ; qu'en infirmant le jugement entrepris dont Mme [Z] demandait la confirmation sans répondre au motif déterminant du jugement qui écartait tout rappel d'heures supplémentaires en relevant que la période visée remonte à plus de trois ans sur les 4 années contractuelles et qu'aucune heure supplémentaire n'était sollicitée depuis la fin du contrat de professionnalisation, ce dont il ressort que ce manquement de l'employeur est trop ancien pour fonder la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [G], la cour a violé les articles 455 et 954 alinéa 5 du code de procédure civile.

2) ALORS QU' en se contentant d'affirmer péremptoirement que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [G] est justifiée par des manquements suffisamment graves de l'employeur rendant impossible le maintien du contrat de travail, à savoir le non paiement d'heures supplémentaires, l'attitude injurieuse à une reprise de la salariée et une modification imposée à la salariée de ses conditions de travail alors qu'il ressort de ses propres constatations que les heures supplémentaires litigieuses se rapportent au contrat de professionnalisation du 6 septembre au 31 août 2011, que l'attitude injurieuse de l'employeur date du 22 décembre 2012 et que la modification des conditions de travail n'est pas datée, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du code civil.

3) ALORS QU' en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en constatant, pour accorder un rappel d'heures supplémentaires de 133 heures à Mme [G], qu'elle réclame, dans un courrier du 21 janvier 2014, à son employeur le paiement de 133 heures supplémentaires qu'elle a ensuite portées à 168,50 heures en appel et que les agendas produits par Mme [G], à partir desquels elle a établi son relevé d'heures hebdomadaires, «… ne comportent, au jour le jour, aucune mention concernant ses jours et horaires de présence au centre de formation et à l'auto-école, ni aucune mention de rendezvous pendant les horaires à l'auto-école permettant de connaître les heures travaillées mais mentionnent uniquement les activités privées de Mme [G] ; que les agendas ont simplement été complétés par la mention manuscrite portée sous chaque jour de la semaine de l'amplitude de travail quotidien, sans mention des horaires effectués, faisant apparaître des semaines de travail de 40 heures et plus », ce dont il ressort que les éléments de preuve fournis par Mme [G] ne sont pas suffisamment précis pour étayer sa demande de rappel d'heures supplémentaires, la cour, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail.

4) ALORS QU' en s'abstenant de répondre au chef des conclusions de Mme [Z] faisant valoir que les nouvelles fonctions de gestion des cours de code qui ont été confiées à Mme [G] à son retour d'arrêt maladie correspondaient à sa qualification contractuelle et conventionnelle d'agent de conduite et ne pouvaient, par conséquent, être constitutives d'une modification de son poste par l'employeur, la cour a violé l'article du code de procédure civile.


TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Mme [Z] à payer à Mme [G] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

AUX MOTIFS QUE « Mme [G] sollicite la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral résultant de l'attitude injurieuse et humiliante de Mme [Z]-[M] qui a divulgué des éléments de sa vie privée et de sa maladie et qui, bien que connaissant sa situation personnelle, s'est néanmoins employée à la priver d'emploi.
Les propos désobligeants tenus par Mme [Z]-[M] à Mme [Y] au sujet de Mme [G], sa mise à l'écart délibérée ont causé à Mme [G] un préjudice qui sera réparé par la somme de 500 euros »,

ALORS QU' en constatant, pour condamner Mme [Z] à payer la somme de 500 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral, que « les propos désobligeants tenus par Mme [Z]-[M] à Mme [Y] au sujet de Mme [G], sa mise à l'écart délibérée ont causé à Mme [G] un préjudice qui sera réparé par la somme de euros » quand elle avait déjà pris en considération les mêmes propos désobligeants et mise à l'écart de Mme [G] pour conclure à la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur, la cour n'a pas caractérisé un préjudice distinct et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil. Moyen produit par la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour Mme [G], demanderesse au pourvoi incident


Mme [G] fait grief à l'arrêt attaqué, partiellement infirmatif, DE L'AVOIR déboutée de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé ;

1./ ALORS, D'UNE PART, QUE le caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi salarié est caractérisé lorsque l'employeur a eu connaissance des heures supplémentaires réalisées par le salarié sans les payer ou les déclarer ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui relevait l'absence de paiement ou de déclaration par l'employeur des heures supplémentaires réalisées par la salariée, ne pouvait affirmer que le caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi salarié n'était pas établi, quand elle constatait elle-même que l'employeur n'avait pas payé les heures supplémentaires de la salariée pour la période afférente à son contrat de professionnalisation, malgré ses trois courriers de réclamation de 2012, 2013 et 2014 et qu'il avait expressément admis que la salariée, à qui il avait accordé des jours d'absence pour les semaines pendant lesquelles elle avait la charge de ses enfants, avait effectivement été amenée à compenser ces absences par des heures supplémentaires, ce dont il résultait la parfaite connaissance par l'employeur des heures supplémentaires réalisées par la salariée dont il a refusé de tenir compte malgré nonobstant les demandes réitérées de la salariée; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail ;

2./ ALORS, D'AUTRE PART, QUE, le caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi salarié est caractérisé lorsque, dans une TPE, l'employeur qui connait l'existence et l'ampleur des heures supplémentaires effectuées régulièrement par un salarié ne les mentionne pas sur les bulletins de paie et ne cotise pas à ce titre; qu'en l'espèce, après avoir constaté que l'auto-école employait moins de 11 salariés et que l'employeur n'avait pas reporté, au titre de la période du contrat de travail à durée indéterminée, les heures supplémentaires de la salariée sur ses bulletins de paie et ne les avait soumises à aucune cotisation sociale, la cour d'appel ne pouvait débouter la salariée de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, aux seuls prétextes que le défaut de mention sur le bulletin de paie des heures supplémentaires et les déclarations de la salariée relativement au paiement de ces heures en espèces ne suffisaient pas à établir le caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi salarié, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la constance avec laquelle l'employeur avait fait réaliser ces heures supplémentaires à la salariée pendant son contrat de travail et l'ampleur de celles-ci caractérisaient la volonté de l'employeur de dissimuler une partie du travail de la salariée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.