1 December 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-26.264

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:SO01367

Texte de la décision

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 1er décembre 2021




Cassation partielle


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 1367 F-D

Pourvoi n° R 19-26.264







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 1ER DÉCEMBRE 2021

M. [G] [I], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 19-26.264 contre l'arrêt rendu le 30 octobre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 10), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Duff et Phelps, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de la SARL Ortscheidt, avocat de M. [I], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Duff et Phelps, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à M. [I] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre pôle emploi.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, le 30 octobre 2019), M. [I] a été engagé le 9 mars 2009 par la société Duff et Phelps (la société), en qualité de « managing director » de la division Investment banking.

3. Il a été licencié le 22 mai 2012 et, contestant la qualité de cadre dirigeant, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes à caractère salarial ou indemnitaire.

Examen des moyens

Sur les deuxième à cinquième moyens, ci-après annexés


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à la condamnation de la société à lui verser diverses sommes à titre d'heures supplémentaires et au titre des congés payés afférents, alors « que sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres participant à la direction de l'entreprise, auxquels sont confiés des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise ou dans l'établissement ; que pour retenir ou écarter la qualité de cadre dirigeant d'un salarié, il appartient au juge d'examiner la fonction que le salarié occupe réellement au regard de chacun de critères cumulatifs énoncés par l'article L. 3111-2 du code du travail ; qu'en se bornant à énoncer, pour considérer que M. [I] était cadre dirigeant, qu'il occupait des fonctions de première importance au sein de l'entreprise, percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués au sein de celle-ci et qu'il ne résultait d'aucun élément probant l'existence d'un manque d'autonomie ou de responsabilité l'obligeant à recevoir la validation de sa hiérarchie de ses décisions, sans préciser davantage si les conditions réelles d'exercice de l'activité professionnelle de M. [I] lui permettaient de bénéficier d'une autonomie décisionnelle suffisante à lui conférer la qualité de cadre dirigeant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3111-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3111-2 du code du travail :

6. Selon cet article, sont considérés comme cadres dirigeants les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.

7. Pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires, l'arrêt retient que le contrat de travail stipulait qu'au regard tant de sa rémunération que de l'importance de ses responsabilités, le salarié entrait dans la catégorie des cadres dirigeants au sens de l'article L. 3111-2 du code du travail et ne serait donc pas soumis à l'essentiel de la réglementation sur la durée du travail.

8. L'arrêt ajoute que l'annexe 1 du contrat de travail détaillait ainsi les fonctions du salarié : « Le directeur de la division Investment Banking est responsable de la gestion des opérations locales et doit être au service des besoins des clients de Duff and Phelps de la division Investment Banking. La stratégie à mettre en oeuvre devra être cohérente et conforme à la stratégie globale du groupe. Le managing director de la division Investment Banking est responsable du développement et de la mise en oeuvre de solutions efficaces et innovantes aux problèmes rencontrés en définissant des objectifs réalistes et pragmatiques, et en concevant des stratégies efficaces et des plans d'action logiques pour la division Investment Banking... »

9. L'arrêt en déduit que le salarié occupait une fonction de première importance au sein de l'entreprise et relève qu'il ne résulte d'aucun élément probant l'existence d'un manque d'autonomie ou de responsabilité l'obligeant à recevoir validation de sa hiérarchie de ses décisions. Il relève, enfin qu'il avait été demandé à l'ensemble du personnel de remplir des feuilles de temps car il s'agissait d'un nouvel outil plus large de gestion des plannings et expertises.

10. En se déterminant ainsi, sans caractériser que, dans l'exercice de ses fonctions, le salarié était effectivement habilité à prendre des décisions de façon largement autonome, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [I] de sa demande tendant à la condamnation de la société Duff et Phelps au paiement d'un rappel de salaire à titre d'heures supplémentaires, outre les congés payés afférents, l'arrêt rendu le 30 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Duff et Phelps aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Duff et Phelps et la condamne à payer à M. [I] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SARL Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. [I]


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. [I] de sa demande tendant à la condamnation de la société Duff & Phelps à lui verser les sommes de 278.941 euros à titre d'heures supplémentaires et 27.894,10 euros au titre des congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE M. [I] soutient qu'il n'avait pas la qualité de cadre dirigeant et qu'il est donc recevable à réclamer des heures supplémentaires ; que selon l'article L. 3111–2, du code du travail, les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions des titres II et III ; que sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant, les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ; que le contrat de travail de M. [I] stipulait qu'au regard tant de sa rémunération que de l'importance de ses responsabilités, il entrait dans la catégorie des cadres dirigeants au sens de l'article L. 3111-2 du code du travail et ne serait donc pas soumis à l'essentiel de la réglementation sur la durée du travail ; que l'annexe 1 du contrat de travail de M. [I] détaillait ses fonctions : « Le directeur de la division Investment Banking est responsable de la gestion des opérations locales et doit être au service des besoins des clients de Duff and Phelps de la division Investment Banking. La stratégie à mettre en oeuvre devra être cohérente et conforme à la stratégie globale du groupe. Le managing director de la division Investment Banking est responsable du développement et de la mise en oeuvre de solutions efficaces et innovantes aux problèmes rencontrés en définissant des objectifs réalistes et pragmatiques, et en concevant des stratégies efficaces et des plans d'action logiques pour la division Investment Banking » ; que M. [I] occupait une fonction de première importance au sein de l'entreprise et percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués au sein de celle-ci ; qu'en outre, il percevait une indemnité de voiture de 1000 euros par mois ; qu'il ne résulte d'aucun élément probant l'existence d'un manque d'autonomie ou de responsabilité l'obligeant à recevoir validation de sa hiérarchie de ses décisions ; que par ailleurs, il avait été demandé à l'ensemble du personnel de remplir des feuilles de temps car il s'agissait d'un nouvel outil plus large de gestion des plannings et expertises ; qu'ainsi, M. [I] sera débouté de sa demande au titre des heures supplémentaires ;

AUX MOTIFS ADOPTES QU'en application des dispositions de l'article L. 3111-2 du Code du travail, il apparaît que M. [G] [I] exerçait des fonctions de première importance au sein de l'entreprise en sa qualité de Managing Director et bénéficiait de ce fait d'une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, l'intéressé étant en outre habilité à prendre des décisions de façon largement autonome dans le cadre de la gestion des membres de son équipe et percevant une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise, son contrat de travail précisant d'ailleurs que le plan de bonus du groupe dont il pouvait éventuellement bénéficier était réservé aux cadres dirigeants, le salarié participant dès lors de manière non contestable à la direction de la structure ; que par conséquent, M. [G] [I] devant être considéré comme un cadre dirigeant au sens des dispositions susvisées, l'intéressé n'étant dès lors pas soumis aux dispositions relatives à la durée du travail, il convient de le débouter de ses différentes demandes de ce chef ;

1°) ALORS QUE sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres participant à la direction de l'entreprise, auxquels sont confiés des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise ou dans l'établissement ; que pour retenir ou écarter la qualité de cadre dirigeant d'un salarié, il appartient au juge d'examiner la fonction que le salarié occupe réellement au regard de chacun de critères cumulatifs énoncés par l'article L. 3111-2 du code du travail, peu important que le contrat de travail retienne la qualité de cadre dirigeant du salarié ; qu'en jugeant que M. [I] était cadre dirigeant, en se référant aux stipulations du contrat de travail et de son annexe 1 détaillant ses tâches, sans examiner la fonction réellement occupée par M. [I] au regard de chacun des trois critères visés par l'article précité afin de vérifier si le salarié participait à la direction de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3111-2 du code du travail ;

2°) ALORS QUE sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres participant à la direction de l'entreprise, auxquels sont confiés des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise ou dans l'établissement ; que pour retenir ou écarter la qualité de cadre dirigeant d'un salarié, il appartient au juge d'examiner la fonction que le salarié occupe réellement au regard de chacun de critères cumulatifs énoncés par l'article L. 3111-2 du code du travail ; qu'en se bornant à énoncer, pour considérer que M. [I] était cadre dirigeant, qu'il occupait des fonctions de première importance au sein de l'entreprise, percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués au sein de celle-ci et qu'il ne résultait d'aucun élément probant l'existence d'un manque d'autonomie ou de responsabilité l'obligeant à recevoir la validation de sa hiérarchie de ses décisions, sans constater que la participation de M. [I] à la direction de l'entreprise était suffisante à lui conférer la qualité de cadre dirigeant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3111-2 du code du travail ;

3°) ALORS QUE sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres participant à la direction de l'entreprise, auxquels sont confiés des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise ou dans l'établissement ; que pour retenir ou écarter la qualité de cadre dirigeant d'un salarié, il appartient au juge d'examiner la fonction que le salarié occupe réellement au regard de chacun de critères cumulatifs énoncés par l'article L. 3111-2 du code du travail ; qu'en se bornant à énoncer, pour considérer que M. [I] était cadre dirigeant, qu'il occupait des fonctions de première importance au sein de l'entreprise, percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués au sein de celle-ci et qu'il ne résultait d'aucun élément probant l'existence d'un manque d'autonomie ou de responsabilité l'obligeant à recevoir la validation de sa hiérarchie de ses décisions, sans préciser davantage si les conditions réelles d'exercice de l'activité professionnelle de M. [I] lui permettaient de bénéficier d'une autonomie décisionnelle suffisante à lui conférer la qualité de cadre dirigeant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3111-2 du code du travail ;

4°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel délaissées (cf. p. 17 à 20, prod.), M. [I] faisait valoir qu'il n'était pas habilité à prendre des décisions de manière largement autonome dès lors qu'avant de signer un mandat avec un client, il devait obtenir l'approbation du comité des engagements au sein duquel il ne siégeait pas, que les divers comités dont il ne faisait pas partie validaient ou non l'activité commerciale, les remboursement de frais et le moindre investissement, qu'il n'avait aucun pouvoir sur l'évolution des salaires des membres du service Fusions/Acquisitions, qu'il n'était pas habilité à prendre des décisions de manière largement autonome en matière de recrutement et de fixation de la rémunération des salariés dont il était responsable, qu'il ne pouvait pas décider de la formation professionnelle des membres de son équipe sans avoir préalablement obtenu l'accord de la maison mère américaine et que ses évaluations sur les membres de l'équipe M&A faisaient systématiquement l'objet d'une révision par la direction américaine ; qu'en affirmant qu'il ne résultait d'aucun élément probant l'existence d'un manque d'autonomie de M. [I] ou de responsabilité l'obligeant à recevoir validation de sa hiérarchie de ses décisions, sans avoir répondu à ces chefs pertinents des conclusions d'appel, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (cf. p. 18 et 19, prod.), M. [I] faisait valoir qu'il ne disposait d'aucune indépendance dans l'organisation de son emploi du temps dès lors que depuis le mois de juillet 2009, lors du changement de l'outil de gestion des plannings, il lui avait été demandé de rentrer avant chaque semaine, les heures de travail prévues et les périodes disponibles, que l'employeur avait mis sur tous les ordinateurs l'outil de supervision de Microsoft « LYNC », qu'il était régulièrement relancé pour remplir ses Timesheet, qui étaient systématiquement validés par sa hiérarchie et les ressources humaines et qu'ainsi, son employeur contrôlait son activité puisqu'il devait soumettre chaque semaine ses fiches de temps ; qu'en se bornant à affirmer « qu'il avait été demandé à l'ensemble du personnel de remplir des feuilles de temps car il s'agissait d'un nouvel outil plus large de gestion des plannings et expertises », sans avoir recherché si l'obligation pour M. [I] de remplir, chaque semaine, des fiches de temps depuis le mois de juillet 2009 n'excluait pas toute indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 3111-2 du code du travail ;

6°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel délaissées (cf. p. 20 et 21, prod.), M. [I] faisait valoir que son salaire n'était que le treizième salaire (fixe et variable) de la société française Duff & Phelps alors que la société comptait en 2011, huit « managing directors », que 25 % des salariés de l'entreprise avaient une rémunération supérieure à la sienne et que sa rémunération représentait en moyenne la moitié du salaire des autres « managing director » français ; qu'en se bornant à affirmer que la rémunération de M. [I] se situait dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération, pour en déduire qu'il avait la qualité de cadre dirigeant, sans avoir répondu à ces chefs pertinents des conclusions d'appel, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 100.000 le montant de l'indemnité allouée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera infirmé de ce chef ; que compte tenu de l'ancienneté de M. [I] (un peu plus de 3 ans) de sa rémunération (précisée ci-après soit, 15 166,66 euros) et des circonstances de la rupture, il convient de lui accorder une somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

ALORS QU'aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, le juge justifie dans le jugement qu'il prononce le montant des indemnités qu'il octroie en cas de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en se bornant, pour fixer à l'indemnité minimale de six mois de salaire le montant des dommages et intérêts alloués à M. [I] en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement, à énumérer un certain nombre de critères tenant aux circonstances de la rupture, au montant de la rémunération et à l'ancienneté du salarié, sans motiver davantage sa décision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable.


TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 133.000 euros le montant dû à M. [I] par la société Duff & Phelps au titre du bonus pour les années 2009 à 2012 ;

AUX MOTIFS QUE l'article 5 du contrat de travail stipulait : « Le salarié pourra participer au plan de bonus du groupe réservé aux cadres dirigeants. La formule de calcul de ce bonus, qui dépendra de la réalisation d'objectifs, sera déterminée chaque année par le président de la société » ; qu'ainsi, si le montant de ce bonus repose sur la décision unilatérale de l'employeur qui en définit la formule de calcul, celui-ci s'est néanmoins contractuellement engagé à définir un plan de bonus des directors et fixer les objectifs entrant en ligne de compte dans le calcul du bonus ; que ces dispositions ne peuvent être remises en cause par le bonus plan dont il n'est pas justifié que le salarié a eu connaissance avant son engagement et dont le contenu est, en tout état de cause, dépourvu de tout caractère contractuel ; qu'au demeurant, ce document est en contradiction avec l'argumentation développée par la société qui se réfère à des objectifs collectifs de résultats d'une équipe pouvant déclencher le droit à prime, alors que le bonus plan prévoit que si les objectifs financiers de la société sont atteints, le résultat individuel de chaque salarié sera examiné pour déterminer la gratification ; que la société ne justifie ni de l'établissement d'un plan de bonus du groupe directors, ni de la fixation d'objectifs portés à la connaissance du salarié (objectifs individuels auxquels fait référence le bonus plan de la société, ou collectifs, selon ce que celle-ci prétend), ni de l'élaboration annuelle d'une formule de calcul du bonus telle que prévue par le contrat ; que le business plan ne détermine pas le bonus ; qu'il n'est pas établi que M. [I] a participé à sa rédaction et il ne l'a pas signé ; qu'il n'a été que destinataire de ce document ainsi qu'en atteste notamment le courriel de M. [H] du 31 octobre 2008 ; qu'en outre, il était prévu qu'en 2012 une équipe de 26 personnes alors qu'en réalité l'équipe a été 5 fois moins importante ; que le document intitulé « gratification discrétionnaire » ne peut être considéré comme définissant « le plan de bonus du groupe directors » car, d'une part, il n'est pas réservé à cette catégorie d'employés, et, d'autre part, aucune précision n'est donnée sur les objectifs à atteindre et sur les modalités de calcul du bonus ; qu'en conséquence, le business plan et ses objectifs pour les années 2009, 2010 et 2011 ne peuvent être opposés à l'appelant ; qu'en outre, les effectifs étaient nettement inférieurs et les rapports d'évaluation de M. [I] étaient particulièrement élogieux ainsi que les lettres de la société des 15 mars 2010 et 18 février 2011 le remerciant pour son dévouement, son travail et sa contribution au succès et à la croissance de la vie de celle-ci ; que l'employeur qui n'a pas respecté ses engagements contractuels ne peut donc se prévaloir de sa propre carence pour justifier le non-paiement de la rémunération variable prévue par le contrat ; qu'à défaut d'accord entre les parties sur les modalités de calcul de cette rémunération variable, il incombe au juge de déterminer son montant en fonction, notamment, des critères fixés dans le contrat et des éléments de la cause ; que M. [I] prétend qu'il peut recevoir 100 % de son salaire fixe ; que la société réplique qu'il fixait lui-même ce pourcentage à 32 % dans l'hypothèse où il aurait réalisé le chiffre d'affaires attendu et oublie de mentionner le bonus encouragement qu'il a reçu par l'octroi d'actions gratuites et « RSA RSU » en 2010 et 2011 qui devraient nécessairement venir en déduction des sommes réclamées par lui ; qu'en considération des explications et pièces fournies aux débats, au regard de la taille de l'entreprise et étant relevé que la preuve d'un engagement de la société à hauteur d'une rémunération variable équivalente au salaire fixe n'est pas rapportée, le montant de la part variable annuelle dû sera fixé à 30 % du salaire fixe, étant précisé qu'il n'y a pas lieu de déduire la gratification exceptionnelle octroyée au titre des actions « RSA/RSU » en 2010 et 2011 ; qu'il sera donc attribué à M. [I] 30 % de la rémunération brute perçue par lui pendant la période de d'emploi, soit 133 000 euros ;

ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en condamnant la société Duff & Phelps à ne verser que la somme de 133.000 euros bruts à titre de rappel de rémunération variable pour les années 2009 à 2012, au lieu des 443.333,08 euros réclamés, sans se prononcer sur les pièces 42, 38, 43 et 44 versées aux débats par M. [I], qui démontraient que le bonus attribué aux salariés de l'activité Fusions/Acquisitions était sensiblement équivalent au montant des salaires fixes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 16.026,10 euros le montant dû à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement sauf à déduire la somme déjà perçue à ce titre ;

AUX MOTIFS QUE M. [I] soutient à juste titre que son indemnité conventionnelle de licenciement a été calculée sur la base du salaire hors prime en méconnaissance de l'article 19 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques précisant que la rémunération doit inclure les primes prévues dans les contrats de travail individuels ; qu'au égard à la rémunération perçue par M. [I] de 15 166,66 euros (salaire de 11.666,66 + prime (part variable) de 3.500 euros), le montant de l'indemnité de licenciement s'élève à 16.026,10 euros dont il conviendra de déduire la somme déjà perçue à ce titre ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le troisième moyen de cassation devra entraîner, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt ayant condamné la société Duff & Phelps à payer à M. [I] la somme limitée de 16.026,10 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement sauf à déduire la somme déjà perçue à ce titre.


CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 2.500 euros le montant alloué à M. [I] à titre de complément pour le contrat de sécurisation professionnelle ;

AUX MOTIFS QUE M. [I] sollicite également le paiement d'une somme au titre d'un reliquat d'allocation de sécurisation professionnelle du fait du défaut d'intégration de la prime annuelle dans la moyenne salariale au motif que le montant de l'allocation journalière versée par Pôle emploi aurait dû être doublé en raison du doublement de sa rémunération du fait de l'intégration de son bonus dans son salaire ; que cependant, outre le fait que la cour ne retient son droit à un bonus qu'à hauteur de 30 %, la demande de Monsieur [I] doit s'analyser en une demande pour perte de chance de percevoir des sommes dont, en tout état de cause, son employeur n'est pas débiteur puisqu'il s'agit d'indemnités versées par Pôle emploi ; que certes, le montant de l'ASP versé par Pôle emploi aurait été majoré de 30 %, mais il n'est pas justifié de la situation de Monsieur [I] au regard de ses droits à Pôle emploi, hormis pour les mois d'octobre et novembre 2012, novembre et décembre 2013 ; qu'en considération de ces éléments, il sera alloué à Monsieur [I] la somme de 2.500 euros nets à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi relativement aux indemnités de chômage ; qu'il lui sera attribué la même somme de 2.500 euros nets à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour le contrat de sécurisation professionnelle ;

1°) ALORS QUE la cassation à intervenir sur le troisième moyen de cassation devra entraîner, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt ayant condamné la société Duff & Phelps à payer à M. [I] la somme limitée de 2.500 euros nets à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour le contrat de sécurisation professionnelle ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en vertu du principe de la réparation intégrale du préjudice, les dommages et intérêts alloués à la victime doivent réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu'en limitant à la somme forfaitaire de 2.500 euros le montant des dommages et intérêts attribué à M. [I] en réparation du préjudice subi pour le contrat de sécurisation professionnelle, après avoir pourtant constaté que le montant de l'allocation pour contrat de sécurisation professionnelle versé par le Pôle emploi aurait été majoré de 30 %, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale du préjudice et l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016.

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