24 November 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-20.962

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:SO01325

Titres et sommaires

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - comité social et économique - opérations électorales - modalités d'organisation et de déroulement - protocole d'accord préélectoral - validité - stipulations contraires à l'ordre public - contestation - recevabilité - conditions - détermination - portée

Il résulte de l'article L. 2314-6 du code du travail que lorsque le protocole d'accord préélectoral répond aux conditions prévues à cet article, il ne peut être contesté devant le juge judiciaire qu'en ce qu'il contiendrait des stipulations contraires à l'ordre public, notamment en ce qu'elles méconnaîtraient les principes généraux du droit électoral. Toutefois un syndicat, qui, soit a signé un tel protocole, soit a présenté des candidats sans émettre de réserves, ne saurait, après proclamation des résultats des élections professionnelles, contester la validité du protocole d'accord préélectoral et demander l'annulation des élections, quand bien même invoquerait-il une méconnaissance par le protocole préélectoral de règles d'ordre public

Texte de la décision

SOC. / ELECT

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 novembre 2021




Cassation partielle sans renvoi


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 1325 F-B

Pourvoi n° Y 20-20.962






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 NOVEMBRE 2021

La société Supplay, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Y 20-20.962 contre le jugement rendu le 30 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Saint-Quentin (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :

1°/ au syndicat CGT Intérim, dont le siège est [Adresse 7],

2°/ à la Fédération des services CFDT, dont le siège est [Adresse 1],

3°/ à la Fédération nationale encadrements commerces services CFE-CGC, dont le siège est [Adresse 13],

4°/ à la Fédération commerces services FCS UNSA, dont le siège est [Adresse 4],

5°/ à la Fédération employés et cadres CGT FO FEC FO, dont le siège est [Adresse 10],

6°/ à M. [J] [V], domicilié [Adresse 6],

7°/ à Mme [Z] [I], domiciliée [Adresse 5],

8°/ à Mme [B] [A], domiciliée [Adresse 8],

9°/ à M. [G] [W], domicilié [Adresse 11],

10°/ à M. [C] [M], domicilié [Adresse 12],

11°/ à Mme [X] [H], domiciliée [Adresse 2],

12°/ à M. [P] [R], domicilié [Adresse 9],

défendeurs à la cassation.

La Fédération nationale encadrements commerces services CFE-CGC a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La Fédération commerces services FCS UNSA a formé également un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

La Fédération nationale encadrements commerces services CFE-CGC invoque, à l'appui de son pourvoi incident, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La Fédération commerces services FCS UNSA invoque, à l'appui de son pourvoi incident, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Supplay et de la Fédération commerces services FCS UNSA, de la SARL Cabinet Briard, avocat de la Fédération nationale encadrements commerces services CFE-CGC, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat CGT Intérim, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, Mme Sommé, conseiller, M. Gambert, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Saint-Quentin, 30 septembre 2020), en vue de la mise en place du comité social et économique de la société Supplay (la société) qui exerce dans le secteur du travail temporaire, le 1er juillet 2019 a été signé un protocole d'accord préélectoral entre la société d'une part, les syndicats CGT-Intérim, UNSA, CFE-CGC et CFDT d'autre part.

2. Le premier tour des élections s'est déroulé le 14 novembre 2019 et les résultats ont été proclamés le même jour.

3. Par requête du 2 décembre 2019, le syndicat CGT-Intérim a saisi le tribunal judiciaire aux fins d'annuler le protocole d'accord préélectoral ainsi que le premier tour des élections des membres au comité social et économique, titulaires et suppléants, pour l'ensemble des collèges. L'employeur et les deux organisations syndicales représentées ont soulevé l'irrecevabilité de ces demandes, présentées par un syndicat ayant signé le protocole et participé aux élections en présentant des candidats sans réserve.

Examen des moyens

Sur les moyens du pourvoi principal de l'employeur et du pourvoi incident de la fédération FCS UNSA, pris en leur première branche, rédigés en des termes identiques, réunis

Enoncé du moyen

4. La société et la fédération FCS UNSA font grief au jugement de rejeter les fins de non-recevoir, d'annuler le protocole d'accord préélectoral en date du 1er juillet 2019, d'annuler le premier tour des élections au comité social et économique de la société, des membres titulaires et suppléants, pour l'ensemble des collèges électoraux, alors « qu'un syndicat qui, sans émettre de réserve, a signé un protocole préélectoral et présenté des candidats aux élections professionnelles ne peut en demander l'annulation après la proclamation des résultats ; qu'en l'espèce, le juge a constaté que le syndicat CGT Interim avait signé et présenté des candidats Iors du premiers tours des élections sans émettre de réserve", ce dont il résultait qu'il n'était ni recevable ni fondé dans sa demande d'annulation postérieure ; qu'en considérant cependant que le protocole d'accord préélectoral et le premier tour les élections du comité social et économique régulièrement organisées devaient être annulées, le tribunal judiciaire n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 2314-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 2314-6 du code du travail :

5. Aux termes de ce texte, sauf dispositions législatives contraires, la validité du protocole d'accord préélectoral conclu entre l'employeur et les organisations syndicales intéressées est subordonnée à sa signature par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, dont les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ou, lorsque ces résultats ne sont pas disponibles, la majorité des organisations représentatives dans l'entreprise.

6. Il en résulte que lorsque le protocole d'accord préélectoral répond à ces conditions, il ne peut être contesté devant le juge judiciaire qu'en ce qu'il contiendrait des stipulations contraires à l'ordre public, notamment en ce qu'elles méconnaîtraient les principes généraux du droit électoral. Toutefois un syndicat, qui, soit a signé un tel protocole, soit a présenté des candidats sans émettre de réserves, ne saurait, après proclamation des résultats des élections professionnelles, contester la validité du protocole d'accord préélectoral et demander l'annulation des élections, quand bien même invoquerait-il une méconnaissance par le protocole préélectoral de règles d'ordre public.

7. Pour déclarer recevable l'action du syndicat CGT Intérim alors qu'il n'était pas contesté que le protocole d'accord préélectoral signé le 1er juillet 2019 répondait aux conditions de validité fixées par l'article L. 2314-6 du code du travail, le jugement, après avoir constaté que le syndicat CGT Intérim a signé le protocole d'accord et présenté des candidats lors du premier tour des élections sans émettre de réserves, retient que les demandes du syndicat sont fondées sur le fait que le protocole ne respecte pas un principe général du droit électoral.

8. En statuant ainsi, le tribunal a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal de l'employeur et des pourvois incidents de la fédération FCS UNSA et du syndicat SNES CFE-CGC, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la fin de non-recevoir tirée du délai pour agir, le jugement rendu le 30 septembre 2020, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Saint-Quentin ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DÉCLARE le syndicat CGT Intérim irrecevable en ses demandes ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille vingt et un.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société Supplay, demanderesse au pourvoi principal

La Société Supplay fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les fins de non-recevoir ; d'avoir annulé le protocole d'accord préélectoral en date du 1 juillet 2019 conclu entre la Société Supplay, le syndicat CGT-INTERIM, le syndicat UNSA, le syndicat CFE-CGC et le syndicat CFDT ; d'avoir annulé le premier tour des élections au Comité Social et Économique de la Société Supplay, des membres titulaires et suppléants, pour l'ensemble des collèges électoraux ;

1°) ALORS QU'un syndicat qui, sans émettre de réserve, a signé un protocole préélectoral et présenté des candidats aux élections professionnelles ne peut en demander l'annulation après la proclamation des résultats ; qu'en l'espèce, le juge a constaté que le syndicat CGT INTERIM avait "signé et présenté des candidats lors du premiers tours des élections sans émettre de réserve" (jugement, p. 3 in fine), ce dont il résultait qu'il n'était ni recevable ni fondé dans sa demande d'annulation postérieure ; qu'en considérant cependant que protocole d'accord préélectoral et le premier tour les élections du Comité Social et Économique régulièrement organisées devaient être annulées, le tribunal judiciaire n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 2314-6 du code du travail ;

2°) ALORS QUE le protocole d'accord préélectoral qui fixe les modalités qui président aux élections professionnelles dans l'entreprise lie les parties ; que les stipulations du protocole d'accord préélectoral dont la validité n'a pas été contestée avant les élections, dans le délai convenu par les partenaires sociaux s'imposent aux parties ; qu'un syndicat, qui a régulièrement présenté des candidats aux élections professionnelles et n'a exprimé aucune réserve sur les modalités de calcul de l'ancienneté de l'électorat retenues par le protocole d'accord préélectoral, au plus tard lors du dépôt de sa liste de candidats, est réputé y avoir adhéré ; qu'en l'espèce, le protocole signé le 1er juillet 2019 stipule expressément, en son article 4.3.1 relatif à l'électorat des salariés intérimaires quelles sont les conditions requises pour calculer leur ancienneté et l'article 4.3.3 prévoit une date de confection des listes électorales pendant la période du 9 au 15 septembre ; que l'employeur et les organisations syndicales avaient, au surplus, prévu une procédure d'ajout de "tout salarié intérimaire", sur simple demande, pour parfaire la liste électorale pendant la période du 15 septembre au 7 novembre 2019 ; que, sans être contredite, la Société Supplay soutenait n'avoir reçu aucune demande en ce sens ni de la part des salariés concernés, ni de la part des organisations syndicales, de sorte que la validité de la liste ne pouvait plus être contestée après ce délai ; qu'en annulant cependant le protocole préélectoral convenu par les parties et les élections professionnelles, après la proclamation des résultats, au motif inopérant et contraire à la volonté des parties négociantes que "la date d'appréciation des conditions d'électorat et d'éligibilité se trouve donc fixée à une date différente de la date du premier tour des élections" (jugement, p. 4 § 5), le tribunal a violé les articles précités du protocole, ensemble les articles 1103 du code civil, L. 2324-4 et L. 2324-4-1 du code du travail ;

3°) ALORS QUE le protocole d'accord préélectoral qui répond aux conditions de validité définies par l'article L. 2314-6 du code du travail ne peut être contesté devant le juge judiciaire qu'en ce qu'il contiendrait des stipulations contraires à l'ordre public, notamment en ce qu'elles méconnaîtraient les principes généraux de droit électoral ; qu'en l'espèce, le juge a considéré que les dispositions du protocole d'accord préélectoral privaient "nécessairement" une partie des électeurs de leurs droits électoraux, et dérogeaient à "un principe général du droit électoral" (jugement, p. 4 § 5), tandis le calendrier prévu par le protocole préélectoral ne comportait aucune disposition contraire à l'ordre public mais réservait, selon la volonté collective des organisations syndicales, une période d'appréciation de l'acquisition de l'ancienneté plus large que celle prévue par le cadre légal ; qu'en affirmant le contraire, sans vérifier si cette appréciation n'avait pas eu un effet positif sur le socle électoral et le taux de participation des salariés intérimaires, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2314-20 du code du travail et de l'accord national interprofessionnel du 27 octobre 1988 relatif à la représentation du personnel des entreprises de travail temporaire ;

4°) ALORS QUE l'employeur et les syndicats sont tenus dans le cadre de la négociation préélectorale à une obligation de loyauté, qui les obligent à contester les règles qui président à la validité du protocole d'accord préélectoral convenu par les parties avant la tenue des élections ; qu'en jugeant néanmoins, que le protocole d'accord préélectoral et le premier tour des élections subséquentes au Conseil Social et Économique devaient être annulé, alors que, sans être contredit, l'employeur soutenait que le syndicat CGT INTERIM avait participé tant à la négociation qu'à la conclusion dudit protocole dont il n'a contesté la validité qu'après la proclamation des résultats défavorables de sorte que l'action en annulation était exercée de mauvaise foi, le tribunal judiciaire a violé les articles L. 2314-5, L. 2314-6 et L. 2314-20 du code du travail.
Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour la Fédération nationale encadrements commerces services CFE-CGC, demanderesse au pourvoi incident


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'avoir annulé le protocole d'accord préélectoral du 1er juillet 2019 et le premier tour des élections au comité social et économique de la société Supplay, titulaires et suppléants, pour l'ensemble des collèges électoraux

Alors qu'en vertu de l'article L. 2314-20 du code du travail, dans les entreprises de travail temporaire, les conditions d'ancienneté sont, pour les salariés temporaires, de trois mois pour être électeur et de six mois pour être éligible, ces conditions étant appréciées en totalisant les périodes pendant lesquelles ces salariés ont été liés à ces entreprises par des contrats de mission au cours des douze mois ou des dix-huit mois précédant l'élection, selon qu'il s'agit d'électorat ou d'éligibilité, ce délai étant réduit à six mois en cas de création d'entreprise ou d'ouverture d'établissement, aucune disposition du code du travail n'imposant que la réalisation de cette condition soit obligatoirement appréciée à la date du premier tour de scrutin, un protocole d'accord préélectoral conclu sur le fondement des articles L. 2314-5 du code du travail pouvant valablement retenir une autre date pour apprécier la réalisation des conditions d'électorat et d'éligibilité dans une entreprise de travail temporaire, à condition de ne pas être moins favorable aux salariés, en application de l'article L. 2251-1 du code du travail ; qu'en l'espèce, en conférant un caractère d'ordre public à la date de premier tour de scrutin pour apprécier l'électorat et l'éligibilité des salariés des entreprise de travail temporaire, le tribunal judiciaire a violé les dispositions susvisées.


SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'avoir rejeté les fins de non-recevoir et annulé le premier tour des élections au comité social et économique de la société Supplay, titulaires et suppléants, pour le deuxième et le troisième collège électoral,

Alors qu'il résulte de la combinaison des articles L. 2314-32 du code du travail et 31 du code de procédure civile que l'intérêt à former un recours contre des élections au comité social et économique s'apprécie en fonction de la participation au processus électoral, un syndicat n'ayant présenté aucun candidat à un collège électoral lors d'une élection étant en principe dépourvu d'intérêt à demander l'annulation de l'élection au sein de ce collège ; qu'en l'espèce, la CGT Intérim n'avait présenté de candidats que pour l'élection au 1er collège (ouvriers et employés), à l'exclusion du 2ème collège (techniciens, agents de maitrise) et du 3ème collège (ingénieurs et cadres) et n'avait pas soutenu, ni a fortiori démontré, avoir été privée de la possibilité de présenter des candidats dans les deuxième et troisième collèges du fait de l'organisation du processus électoral et des stipulations du protocole d'accord préélectoral du 1er juillet 2019 ; qu'en prononçant néanmoins l'annulation du premier tour des élections au comité social et économique de la société Supplay, titulaires et suppléants, pour l'ensemble des collèges électoraux, sans constater que la CGT Intérim avait été privée de la possibilité de présenter des candidats au 2ème et 3ème collège par l'effet du protocole d'accord préélectoral du 1er juillet 2019 dont il prononçait parallèlement l'annulation, le Tribunal judiciaire de Saint-Quentin a privé sa décision de base légale au regard des dispositions susvisées.
Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la Fédération commerces services FCS UNSA, demanderesse au pourvoi incident


La Fédération Commerces Services FCS UNSA fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les fins de non-recevoir ; d'avoir annulé le protocole d'accord préélectoral en date du 1 juillet 2019 conclu entre la Société Supplay, le syndicat CGT-INTERIM, le syndicat UNSA, le syndicat CFE-CGC et le syndicat CFDT ; d'avoir annulé le premier tour des élections au Comité Social et Économique de la Société Supplay, des membres titulaires et suppléants, pour l'ensemble des collèges électoraux ;

1°) ALORS QU'un syndicat qui, sans émettre de réserve, a signé un protocole préélectoral et présenté des candidats aux élections professionnelles ne peut en demander l'annulation après la proclamation des résultats ; qu'en l'espèce, le juge a constaté que le syndicat CGT INTERIM avait "signé et présenté des candidats lors du premiers tours des élections sans émettre de réserve" (jugement, p. 3 in fine), ce dont il résultait qu'il n'était ni recevable ni fondé dans sa demande d'annulation postérieure ; qu'en considérant cependant que protocole d'accord préélectoral et le premier tour les élections du Comité Social et Économique régulièrement organisées devaient être annulées, le tribunal judiciaire n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 2314-6 du code du travail ;

2°) ALORS QUE le protocole d'accord préélectoral qui fixe les modalités qui président aux élections professionnelles dans l'entreprise lie les parties ; que les stipulations du protocole d'accord préélectoral dont la validité n'a pas été contestée avant les élections, dans le délai convenu par les partenaires sociaux s'imposent aux parties ; qu'un syndicat, qui a régulièrement présenté des candidats aux élections professionnelles et n'a exprimé aucune réserve sur les modalités de calcul de l'ancienneté de l'électorat retenues par le protocole d'accord préélectoral, au plus tard lors du dépôt de sa liste de candidats, est réputé y avoir adhéré ; qu'en l'espèce, le protocole signé le 1er juillet 2019 stipule expressément, en son article 4.3.1 relatif à l'électorat des salariés intérimaires quelles sont les conditions requises pour calculer leur ancienneté et l'article 4.3.3 prévoit une date de confection des listes électorales pendant la période du 9 au 15 septembre ; que l'employeur et les organisations syndicales avaient, au surplus, prévu une procédure d'ajout de "tout salarié intérimaire", sur simple demande, pour parfaire la liste électorale pendant la période du 15 septembre au 7 novembre 2019 ; que, sans être contredite, la Société Supplay soutenait n'avoir reçu aucune demande en ce sens ni de la part des salariés concernés, ni de la part des organisations syndicales, de sorte que la validité de la liste ne pouvait plus être contestée après ce délai ; qu'en annulant cependant le protocole préélectoral convenu par les parties et les élections professionnelles, après la proclamation des résultats, au motif inopérant et contraire à la volonté des parties négociantes que "la date d'appréciation des conditions d'électorat et d'éligibilité se trouve donc fixée à une date différente de la date du premier tour des élections" (jugement, p. 4 § 5), le tribunal a violé les articles précités du protocole, ensemble les articles 1103 du code civil, L. 2324-4 et L. 2324-4-1 du code du travail ;

3°) ALORS QUE le protocole d'accord préélectoral qui répond aux conditions de validité définies par l'article L. 2314-6 du code du travail ne peut être contesté devant le juge judiciaire qu'en ce qu'il contiendrait des stipulations contraires à l'ordre public, notamment en ce qu'elles méconnaîtraient les principes généraux de droit électoral ; qu'en l'espèce, le juge a considéré que les dispositions du protocole d'accord préélectoral privaient "nécessairement" une partie des électeurs de leurs droits électoraux, et dérogeaient à "un principe général du droit électoral" (jugement, p. 4 § 5), tandis le calendrier prévu par le protocole préélectoral ne comportait aucune disposition contraire à l'ordre public mais réservait, selon la volonté collective des organisations syndicales, une période d'appréciation de l'acquisition de l'ancienneté plus large que celle prévue par le cadre légal ; qu'en affirmant le contraire, sans vérifier si cette appréciation n'avait pas eu un effet positif sur le socle électoral et le taux de participation des salariés intérimaires, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2314-20 du code du travail et de l'accord national interprofessionnel du 27 octobre 1988 relatif à la représentation du personnel des entreprises de travail temporaire ;

4°) ALORS QUE l'employeur et les syndicats sont tenus dans le cadre de la négociation préélectorale à une obligation de loyauté, qui les obligent à contester les règles qui président à la validité du protocole d'accord préélectoral convenu par les parties avant la tenue des élections ; qu'en jugeant néanmoins, que le protocole d'accord préélectoral et le premier tour des élections subséquentes au Conseil Social et Économique devaient être annulé, alors que, sans être contredit, l'employeur soutenait que le syndicat CGT INTERIM avait participé tant à la négociation qu'à la conclusion dudit protocole dont il n'a contesté la validité qu'après la proclamation des résultats défavorables de sorte que l'action en annulation était exercée de mauvaise foi, le tribunal judiciaire a violé les articles L. 2314-5, L. 2314-6 et L. 2314-20 du code du travail.

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