10 November 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-12.660

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:C201050

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 10 novembre 2021




Cassation


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1050 F-D

Pourvoi n° D 19-12.660







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 NOVEMBRE 2021

M. [V] [R], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 19-12.660 contre l'arrêt n° RG : 17/03354 rendu le 11 octobre 2018 par la cour d'appel de Versailles (3e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MMA Iard, société anonyme,

2°/ à la société MMA Iard assurances mutuelles, société anonyme,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [R], de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 11 octobre 2018) et les productions, M. [R], afin de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à l'occasion du dispositif dit « Girardin Industriel », prévu par l'article 199 undecies B du code général des impôts, a souscrit, par bulletin signé le 24 mai 2011, au produit « Snc GIR Réunion », proposé par la société Gesdom, pour l'acquisition et la mise en location des stations autonomes d'éclairage (SAE), alimentées par des panneaux photovoltaïques sur l'Ile de la Réunion.

2. Lors de la souscription, M. [R] a émis un chèque d'un montant de 7 488 euros à l'ordre de GIR Réunion et un chèque de 330 euros à l'ordre de la société Gesdom.

3. Affirmant n'avoir pas reçu de la société Gesdom l'attestation fiscale lui permettant de bénéficier de la réduction d'impôt escomptée, la loi de finances n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 pour l'année 2011 ayant rendu inéligibles à la défiscalisation les investissements portant sur des installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative au soleil, M. [R] a assigné, aux fins d'indemnisation, devant un tribunal de grande instance, la société Covea Risks, assureur au titre de la responsabilité civile de la société Gesdom.

4. Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles (les assureurs), venant aux droits de la société Covea Risks, sont intervenues à l'instance.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches

Enoncé du moyen

5. M. [R] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes formées contre les assureurs et de le condamner aux dépens de première instance et d'appel, alors :

« 3°/ que, subsidiairement, alors que la faute dolosive visée à l'article L. 113-1 du code des assurances, entendue de manière autonome, s'entend du manquement délibéré de l'assuré ayant pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire totalement disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque, de sorte qu'en énonçant que la société Gesdom avait commis une faute dolosive exclusive d'aléa, sans caractériser le caractère délibéré du manquement de la société Gesdom à ses obligations, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances ;

4°/ qu'en énonçant qu'il était certain que tous les professionnels du secteur ne pouvaient que conclure, à compter de la loi de finances du 29 décembre 2010, à l'inéligibilité à la défiscalisation des stations autonomes d'éclairage et ne pouvaient faire valoir aux investisseurs potentiels un avantage fiscal devenu manifestement exclu, sans rechercher, comme elle y était invitée par M. [R], s'il ne résultait pas aussi bien des termes de la loi que des travaux préparatoires, que l'article 36 de la loi de finances pour l'année 2011 pouvait être interprété en ce sens que l'exclusion du champ d'application de la loi Girardin des investissements portant sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil, ne concernait pas les stations autonomes d'éclairage, de sorte que, lors de la souscription de M. [R], la réalisation du dommage n'était pas inéluctable et que l'aléa attaché à la couverture du risque n'avait donc pas disparu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances ;

5°/ que la faute dolosive visée à l'article L. 113-1 du code des assurances doit être appréciée in concreto de sorte qu'en retenant qu'il était certain que tous les professionnels du secteur ne pouvaient que conclure, à compter de la loi de finances du 29 décembre 2010, à l'inéligibilité à la défiscalisation des stations autonomes d'éclairage et ne pouvaient faire valoir aux investisseurs potentiels un avantage fiscal devenu manifestement exclu, la cour d'appel, qui s'est fondée sur une appréciation in abstracto relative à l'interprétation supposée du texte litigieux par tous les professionnels du secteur, sans apprécier in concreto le comportement de la société Gesdom, a violé l'article L. 113-1 du code des assurances ; que la faute dolosive visée à l'article L. 113-1 du code des assurances, entendue de manière autonome, s'entend du manquement délibéré de l'assuré ayant pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire totalement disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque, de sorte qu'en énonçant que la société Gesdom avait commis une faute dolosive exclusive d'aléa, alors qu'elle avait uniquement considéré que l'avantage fiscal du produit vendu par la société Gesdom n'était, à compter de l'adoption de la loi de finances du 29 décembre 2010, plus garanti, et que la société Gesdom aurait dû, à tout le moins, suspendre la commercialisation des produits concernés et interroger l'administration fiscale sur l'éligibilité des stations autonomes d'éclairage au dispositif Girardin, la cour d'appel, qui a statué par des motifs dont il résulte que la réalisation du dommage n'était pas inéluctable et que l'aléa attaché à la couverture du risque n'avait donc pas disparu, a violé l'article L. 113-1 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 113-1 du code des assurances :

6. Il résulte de ce texte que la faute dolosive, autonome de la faute intentionnelle, justifiant l'exclusion de la garantie de l'assureur dès lors qu'elle fait perdre à l'opération d'assurance son caractère aléatoire, suppose un acte délibéré de l'assuré qui ne pouvait ignorer qu'il conduirait à la réalisation inéluctable du sinistre.

7. L'arrêt énonce qu'en application de l'article L. 124-3 du code des assurances, M. [R] est fondé à engager une action directe contre les assureurs et à invoquer la mise en oeuvre de la police d'assurance responsabilité civile n° 112 788 909 souscrite par la Chambre nationale des conseillers en investissements financiers (Cncif) pour le compte de la société Gesdom (police n° 112 788 909) et celle souscrite par la société Gesdom sous le n° 114 247 742, et relève qu'elles excluent « les dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ».

8. La décision retient qu'il est constant que l'article 36-1 de la loi de finances pour l'année 2011 du 29 décembre 2010 a exclu du champ d'application de la loi dite « Girardin » les investissements portant « sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil », que la société Gesdom a alors proposé à des épargnants d'investir dans des stations autonomes d'éclairage (SAE) alimentées par des panneaux photovoltaïques.

9. Elle relève que les SAE produisent de l'électricité au moyen de panneaux photovoltaïques par l'énergie radiative du soleil et qu'il est certain que tous les professionnels du secteur ne pouvaient qu'en conclure à l'inéligibilité à la défiscalisation des SAE et ne pouvaient faire valoir aux investisseurs potentiels un avantage fiscal devenu manifestement exclu.

10. L'arrêt retient enfin qu'à tout le moins, la société Gesdom devait suspendre la commercialisation des produits concernés et interroger l'administration fiscale sur ce point, l'argument tiré du délai de réponse de celle-ci étant à l'évidence inopérant au regard des enjeux et des risques que la société Gesdom faisait encourir aux investisseurs en poursuivant sa commercialisation.

11. En se déterminant ainsi, par des motifs de caractère général, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la société Gesdom avait délibérément manqué à ses obligations en proposant à M. [R] d'investir dans les SAE et sans caractériser la conscience qu'elle avait de la réalisation inéluctable du dommage de nature à faire disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles et les condamne à payer à M. [R] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour M. [R]

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté les demandes formées par M. [R] contre les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances mutuelles et d'avoir condamné M. [R] aux dépens de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE Sur les manquements allégués Le dispositif de défiscalisation institué à l'article 199 undecies B du code général des impôts, connu sous le nom du dispositif "Loi Girardin Industriel", autorise les contribuables à bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des "investissements productifs neufs" réalisés dans les départements d'outre-mer, dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole, industrielle, commerciale ou artisanale, à charge pour l'investisseur de souscrire au capital de différentes sociétés transparentes fiscalement, investissant dans des matériels industriels, installés et exploités Outre Mer. Les investisseurs sont regroupés dans des sociétés de portage, le plus souvent des SNC, qui acquièrent des biens grâce à des prêts bancaires, donnés à bail à des entreprises locales. Les loyers qu'elles versent servent à rembourser les emprunts. Les investisseurs conservent les parts de SNC durant cinq ans et à l'issue de cette période, l'exploitant des matériels les rachète au prix d'un euro. Les investisseurs perdent le capital investi mais bénéficient, dès l'année de souscription, d'une réduction d'impôt.

Il ne saurait donc être contesté qu'en investissant dans le programme qui lui était présenté, M. [R] recherchait un avantage fiscal.

La loi 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour l'année 2011 a modifié l'article 199 undecies B du code général des impôts précité, en excluant de la défiscalisation les investissements portant sur des installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil qui étaient jusqu'alors proposés aux investisseurs.

La société Gesdom a alors proposé à des épargnants d'investir dans des stations autonomes d'éclairage (SAE) alimentées par des panneaux photovoltaïques.

Le 7 mai 2012, Gesdom informait M. [R] qu'elle ne pouvait lui délivrer l'attestation fiscale au titre de l'année 2011, préférant reporter, "par prudence", le bénéfice de cette réduction pour l'année 2012, exposant qu'à la fin de l'année 2011 l'administration fiscale avait pour la première fois et de manière massive remis en cause les réductions d'impôt dont avaient bénéficié jusqu'alors les investisseurs, en considérant que l'année de rattachement de cette réduction devait s'entendre de la mise en service effective des matériels et non de la date de leur livraison. Gesdom a confirmé cette information le 20 juin 2012, Elle a ultérieurement reconnu qu'en tout état de cause les SAE n'étaient pas éligibles au dispositif fiscal "Girardin Industriel".

Il ne saurait pourtant être tiré argument d'un revirement de l'administration fiscale quant aux conditions d'éligibilité de l'avantage fiscal. L'article 199 undecies B se réfère en effet expressément aux "investissements productifs neufs" et l'Instruction du 30 janvier 2007 vient préciser "que l'année de réalisation de l'investissement s'entend de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée, par entreprise ou lui est livrée au sens de l'article 1604 du code civil, ou est mise à disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail".

Il n'est par ailleurs nullement démontré ni même allégué que la société assurée avait attiré l'attention de M. [R] sur la possibilité que l'avantage fiscal recherché pouvait être remis en cause si la mise en production de l'installation n'était pas effective au 31 décembre de l'année concernée. Bien au contraire, cet avantage fiscal lui a été présenté comme certain. Aux termes de sa souscription au portefeuille de la société Gesdom, M. [R] bénéficiait de l'engagement de Gesdom de lui reverser les montants abondés sans restriction ni autre condition que celle de la non réalisation de l'investissement au 31 décembre 2011.

Il est constant que c'est à fonds perdus que M. [R] a versé le montant de sa souscription - soit la somme de 7 488 euros- dès lors qu'il n'a obtenu aucune réduction d'impôt.

La faute de la société Gesdom a donc consisté à ne pas fournir à M. [R] un produit répondant aux conditions d'éligibilité au dispositif de défiscalisation présenté pour ses revenus 2011. C'est donc à raison que le tribunal a jugé que Gesdom a engagé sa responsabilité, la cour observant que les appelantes ne contestent pas cette appréciation, réservant leurs observations à la mise en oeuvre de leurs garanties et leur étendue.

- Sur les garanties

Sur le fondement de l'article L. 124-3 du code des assurances, M. [R] est fondé à engager l'action directe contre les sociétés MMA Iard et MMA Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covea Risks, assureur de la société Gesdom.

La CNCIF a souscrit, une police d'assurance n° 112.788.909 à effet du 1er janvier 2008 auprès de la société Covea Risks. C'est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a jugé que cette police avait vocation à s'appliquer, étant relevé que la société Gesdom avait la qualité de conseiller en investissements financiers. La cour observe, qu'ainsi que le souligne l'intimé et ce que ne contestent pas les appelantes, la première page des conditions générales de la police n° 112 788 909 mentionne pour le calcul de la prime due par le membre de la CNCIF « les Opérations Industrielles et Immobilières de Défiscalisation dans les 00M-TOM" et que s'agissant des franchises il y est indiqué que la" franchise RCP est portée à 15.000 euros pour les opérations industrielles et immobilières de défiscalisation dans les DOM-TOM".

M. [R] est donc fondé à invoquer la mise en oeuvre de police d'assurance n° 112.788.909 souscrite par la CNIF et celle souscrite par Gesdom sous le numéro n°114247742.

Le chapitre 2 de la police souscrite par Gesdom, dans son chapitre 2 A relatif aux garanties, prévoit que" le présent contrat garantit les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'assuré petit encourir en raison notamment des négligences, inexactitudes, erreurs de faits, de droit, omission commis par lui, ses membres, ses agents, les préposés salariés ou non dans l'exercice de leurs activités normales et plus généralement par tout acte dommageable".

Il est constant que M. [R] ne sollicite pas des assureurs l'exécution de la prestation attendue mais des dommages et intérêts résultant des manquements de Gesdom à ses obligations contractuelles, le préjudice résidant dans la disparition des fonds investis et dans la perte de la chance de pouvoir bénéficier d'une déduction fiscale.

En application de l'article L 112-6 du code des assurances, l'assureur peut opposer au tiers qui invoque le bénéfice de la police les exceptions opposables au souscripteur originaire.

Il résulte de l'article L. 113-1 du code des assurances qu'une exclusion de garantie ne peut qu'être formelle et limitée et ne saurait aboutir, sans retirer son objet au contrat d'assurance. à annuler dans sa totalité la garantie stipulée.

Les deux polices d'assurances excluent notamment "les dommages provenant d'une faille intentionnelle ou dolosive de l'assuré", cette faute étant de nature à faire disparaître l'aléa qui est de l'essence même du contrat d'assurance. Cette clause est formelle, limitée et ne vide aucunement la garantie de sa substance.

Il est constant que l'article 36-l de la loi de finance pour l'année 2011 du 29 décembre 2010 a exclu du champ d'application de la loi dite "Girardin" les investissements portant ‘‘sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil''. Or, les SAE produisent de l'électricité au moyen de panneaux photovoltaïques soit par l'énergie radiative du soleil.

Il est certain que tous les professionnels du secteur ne pouvaient qu'en conclure à l'inéligibilité à la défiscalisation des SAE et ne pouvaient faire valoir aux investisseurs potentiels un avantage fiscal devenu manifestement exclu. A tout le moins, Gesdom devait-elle suspendre la commercialisation des produits concernés et interroger l'administration fiscale sur ce point, l'argument tiré du délai de réponse de l'administration fiscale étant à l'évidence inopérant au regard des enjeux et des risques que Gesdom faisait encourir aux investisseurs en poursuivant sa commercialisation.

Pour échapper à l'exclusion de garantie opposée par les assureurs. M. [R] fait valoir, de façon assez singulière, que Gesdom pouvait "légitimement penser que les SAE étaient éligibles" et qu'il ne peut être considéré qu'elle a pris un risque délibéré "alors qu'elle s'est entourée des conseils nécessaires". Elle vise à cet égard la consultation sollicitée par Gesdom auprès du Cabinet Landwell, spécialisé en matière fiscale.

La cour observe que cette consultation daterait de septembre 2011, alors que la loi précitée était applicable depuis plus de 8 mois et que le produit de défiscalisation a été proposé à M. [R] avant cette consultation. Cette consultation n'est pas versée aux débats par M. [R], les sociétés MMA s'y référant comme étant la pièce adverse n° 11 qui, à la lecture du bordereau de communication joint aux dernières conclusions a été retirée des débats par l'intimé.

La cour observe que les appelantes ne sont pas contredites par M. [R] lorsqu'elles affirment que cette note n'est pas signée et ne serait, en septembre 2011, qu'un projet. Les appelantes versent par ailleurs aux débats une décision de la cour d'appel de Montpellier, du 21 novembre 2017, qui de surcroît donne à penser que la date réelle de la consultation est bien incertaine.

En tout état de cause, ce n'est qu'en avril 2013 que l'administration fiscale a enfin été interrogée sur ce point et qu'elle a répondu sans l'ombre d'une hésitation et sans surprise que l'exclusion définie par l'article 36 précité visait toutes les installations générant de l'électricité à partir du rayonnement solaire et que les SAE constituant des installations chargées de produire de l'électricité obtenue par conversion photovoltaïque de l'énergie solaire, elles étaient bien exclues du dispositif fiscal.

Il y a lieu de juger en conséquence qu'en vendant en 2011 ce produit de défiscalisation dont l'avantage fiscal n'était plus garanti, Gesdom a commis une faute dolosive exclusive de tout aléa. de telle sorte que les assureurs sont fondés à opposer à M. [R] une exclusion de garantie dont les demandes seront rejetées.

Le jugement entrepris – rectifié le 21 avril 2017 – sera en conséquence infirmé en toutes ses dispositions ».

1°/ ALORS QUE la faute intentionnelle ou dolosive, au sens de l'article L. 113-1 du code des assurances, suppose la volonté de l'assuré de créer le dommage tel qu'il est survenu, de sorte qu'en se bornant, pour retenir que les assureurs étaient fondés à dénier leur garantie, à énoncer que la société Gesdom avait vendu un produit de défiscalisation alors que l'avantage fiscal qui devait en résulter n'était plus garanti et que cette faute dolosive était exclusive d'aléa, sans caractériser la volonté de la société Gesdom de créer le dommage tel qu'il est survenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances ;

2°/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la faute dolosive visée à l'article L. 113-1 du code des assurances, entendue de manière autonome, s'entend du manquement délibéré de l'assuré ayant pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire totalement disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque, de sorte qu'en énonçant que la société Gesdom avait commis une faute dolosive exclusive d'aléa, alors qu'elle avait uniquement considéré que l'avantage fiscal du produit vendu par la société Gesdom n'était, à compter de l'adoption de la loi de finances du 29 décembre 2010, plus garanti, et que la société Gesdom aurait dû, à tout le moins, suspendre la commercialisation des produits concernés et interroger l'administration fiscale sur l'éligibilité des stations autonomes d'éclairage au dispositif Girardin, la cour d'appel, qui a statué par des motifs dont il résulte que la réalisation du dommage n'était pas inéluctable et que l'aléa attaché à la couverture du risque n'avait donc pas disparu, a violé l'article L. 113-1 du code des assurances ;

3°/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la faute dolosive visée à l'article L. 113-1 du code des assurances, entendue de manière autonome, s'entend du manquement délibéré de l'assuré ayant pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire totalement disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque, de sorte qu'en énonçant que la société Gesdom avait commis une faute dolosive exclusive d'aléa, sans caractériser le caractère délibéré du manquement de la société Gesdom à ses obligations, a privé sa décision de base légale au regard l'article L. 113-1 du code des assurances ;

4°/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en énonçant qu'il était certain que tous les professionnels du secteur ne pouvaient que conclure, à compter de la loi de finances du 29 décembre 2010, à l'inéligibilité à la défiscalisation des stations autonomes d'éclairage et ne pouvaient faire valoir aux investisseurs potentiels un avantage fiscal devenu manifestement exclu, sans rechercher, comme elle y était invitée par M. [R] (conclusions d'appel, p. 23-24), s'il ne résultait pas aussi bien des termes de la loi que des travaux préparatoires, que l'article 36 de la loi de finances pour l'année 2011 pouvait être interprété en ce sens que l'exclusion du champ d'application de la loi Girardin des investissements portant sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil, ne concernait pas les stations autonomes d'éclairage, de sorte que, lors de la souscription de M. [R], la réalisation du dommage n'était pas inéluctable et que l'aléa attaché à la couverture du risque n'avait donc pas disparu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du codes des assurances ;

5°/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la faute dolosive visée à l'article L. 113-1 du code des assurances doit être appréciée in concreto de sorte qu'en retenant qu'il était certain que tous les professionnels du secteur ne pouvaient que conclure, à compter de la loi de finances du 29 décembre 2010, à l'inéligibilité à la défiscalisation des stations autonomes d'éclairage et ne pouvaient faire valoir aux investisseurs potentiels un avantage fiscal devenu manifestement exclu, la cour d'appel, qui s'est fondée sur une appréciation in abstracto relative à l'interprétation supposée du texte litigieux par tous les professionnels du secteur, sans apprécier in concreto le comportement de la société Gesdom, a violé l'article L. 113-1 du code des assurances ;

6°/ ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en reprochant également à la société Gesdom l'absence de fourniture à M. [R] d'un produit répondant aux conditions d'éligibilité au dispositif de défiscalisation présenté pour ses revenus 2011, à défaut d'une mise en service effective au 31 décembre 2011 des installations photovoltaïques, sans caractériser, au regard de ce manquement, la faute intentionnelle ou dolosive de la société Gesdom, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances.

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