20 October 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-20.428

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C300742

Titres et sommaires

ARCHITECTE ENTREPRENEUR - Réception de l'ouvrage - Définition - Réception tacite - Volonté non équivoque de recevoir - Présomption - Exclusion - Cas - Constructeur non convoqué à la réception expresse

Une cour d'appel, qui retient que la demande de l'architecte et de son assureur, tendant à constater l'existence d'une présomption de réception tacite à l'égard d'un constructeur non convoqué à la réception expresse, visait à contourner l'exigence du respect du contradictoire, en déduit à bon droit qu'elle devait être rejetée. Le constructeur n'ayant pas été appelé à l'instance, une cour d'appel n'est pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes sur le prononcé d'une réception judiciaire, qui ne peut l'être que contradictoirement en application de l'article 1792-6 du code civil

ARCHITECTE ENTREPRENEUR - Réception de l'ouvrage - Définition - Réception judiciaire - Prononcé - Conditions - Détermination

ARCHITECTE ENTREPRENEUR - Réception de l'ouvrage - Réception amiable - Défaut - Constructeur non convoqué - Effet - Réception tacite - Présomption - Exclusion

Texte de la décision

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 octobre 2021




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 742 FS-B

Pourvoi n° T 20-20.428




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 OCTOBRE 2021

1°/ M. [Y] [K], domicilié [Adresse 3],

2°/ la société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° T 20-20.428 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2020 par la cour d'appel de Versailles (4e chambre), dans le litige les opposant à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], ès qualités d'assureur de la société 2SP, défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. [K] et de la société Mutuelle des architectes français, et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 septembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Boyer, Mme Abgrall, M. Laurent conseillers, Mme Djikpa, M. Zedda, Mme Brun, M. Baraké, Mme Gallet, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, Mme Besse, greffier de chambre ;

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 6 juillet 2020), M. [V] a, sous la maîtrise d'oeuvre complète de M. [K], architecte, assuré auprès de la société Mutuelle des architectes français (la MAF), confié des travaux de rénovation d'un chalet en bois à la société Georges, aux droits de laquelle vient la société 2SP bâtiment, aujourd'hui en liquidation judiciaire, assurée auprès de la société Allianz IARD (la société Allianz).

2. Se plaignant de malfaçons, M. et Mme [V] ont, après expertise, assigné en indemnisation M. [K], la MAF et la société Allianz. L'architecte et son assureur ont recherché la garantie de la société Allianz.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. [K] et la MAF font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes contre la société Allianz, alors :

« 1°/ que la prise de possession des lieux et le fait qu'aucune somme ne soit réclamée par l'entrepreneur permettent de caractériser une présomption de réception tacite ; que cette présomption est renforcée par l'existence d'une réception expresse même non opposable à un constructeur, réception expresse qui n'interdit donc pas la possibilité d'une réception tacite ; qu'en l'espèce, pour rejeter les demandes dirigées contre la Sa Allianz IARD, en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale de la société 2SP Bâtiment, fondée sur une présomption de réception tacite, la cour d'appel a retenu qu'une telle réception ne pouvait être prononcée qu'en l'absence d'une réception expresse, « en recherchant si le maître d'ouvrage avait eu ou non l'intention non équivoque de recevoir l'ouvrage, cette intention n'étant alors, par définition, matérialisée par un acte de réception » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1792-6 du code civil ;

2°/ que dans leurs conclusions d'appel, M. [K] et la MAF ont subsidiairement demandé à la cour de prononcer la réception judiciaire à la date du 18 juin 2007, une telle réception pouvant être prononcée même si elle n'a pas de caractère contradictoire ; qu'en rejetant leurs demandes dirigées contre l'assureur de garantie décennale de l'entrepreneur sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. La cour d'appel a relevé que la volonté de M. [V], maître de l'ouvrage, de recevoir l'ouvrage a été concrétisée par la signature, le 18 juin 2007, d'un procès-verbal de réception avec l'architecte.

5. D'une part, ayant retenu que la demande de l'architecte et de son assureur, de constater l'existence d'une présomption de réception tacite à l'égard de la société 2SP bâtiment, qui n'avait pas été convoquée à la réception expresse, visait à contourner l'exigence du respect du contradictoire, la cour d'appel en a déduit à bon droit qu'elle devait être rejetée.

6. D'autre part, le liquidateur judiciaire de la société 2SP bâtiment n'ayant pas été appelé à l'instance, elle n'était pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes sur le prononcé d'une réception judiciaire, celle-ci devant être prononcée contradictoirement en application de l'article 1792-6 du code civil.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [K] et la société Mutuelle des architectes français aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. [K] et la société Mutuelle des architectes français

M. [K] et la Mutuelle des Architectes Français font grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté leurs demandes dirigées contre la Sa Allianz Iard,

1/ Alors que la prise de possession des lieux et le fait qu'aucune somme ne soit réclamée par l'entrepreneur permettent de caractériser une présomption de réception tacite ; que cette présomption est renforcée par l'existence d'une réception expresse même non opposable à un constructeur, réception expresse qui n'interdit donc pas la possibilité d'une réception tacite ; qu'en l'espèce, pour rejeter les demandes dirigées contre la Sa Allianz Iard, en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale de la société 2SP Bâtiment, fondée sur une présomption de réception tacite, la cour d'appel a retenu qu'une telle réception ne pouvait être prononcée qu'en l'absence d'une réception expresse, « en recherchant si le maître d'ouvrage avait eu ou non l'intention non équivoque de recevoir l'ouvrage, cette intention n'étant alors, par définition, matérialisée par un acte de réception » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1792-6 du Code civil ;

2/ Alors que dans leurs conclusions d'appel, M. [K] et la MAF ont subsidiairement demandé à la cour de prononcer la réception judiciaire à la date du 18 juin 2007, une telle réception pouvant être prononcée même si elle n'a pas de caractère contradictoire ; qu'en rejetant leurs demandes dirigées contre l'assureur de garantie décennale de l'entrepreneur sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

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