16 September 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-17.623

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C300626

Titres et sommaires

OFFICIERS PUBLICS ET MINISTERIELS - Notaire - Responsabilité - Action en responsabilité - Prescription - Suspension - Impossibilité d'agir - Appréciation - Cas - Etat de sujétion psychologique des vendeurs au moment de la réitération de l'acte authentique de vente

Ne tire par les conséquences de ses propres constatations et viole l'article 2234 du code civil, la cour d'appel qui, pour déclarer prescrite une action en responsabilité délictuelle engagée contre des notaires par des vendeurs, retient que ceux-ci avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la date de réitération de l'acte authentique de vente, de sorte que celle-ci constitue le point de départ de la prescription, après avoir relevé que les vendeurs étaient, au moment de la réitération, dans un état de sujétion psychologique, ce dont il résultait que la prescription n'avait pas pu commencer à courir à cette date

PRESCRIPTION CIVILE - Suspension - Causes - Impossibilité d'agir - Appréciation - Cas - Etat de sujétion psychologique des vendeurs au moment de la réitération de l'acte authentique de vente

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Notaire - Responsabilité - Action en responsabilité - Prescription - Point de départ - Découverte du dommage par la victime - Détermination - Exclusion - Cas

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Réparation - Action en responsabilité - Prescription - Point de départ - Date de la manifestation du dommage - Détermination - Exclusion - Cas

Texte de la décision

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 septembre 2021




Cassation


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 626 FS-B+C

Pourvoi n° U 20-17.623




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 SEPTEMBRE 2021

1°/ M. [F] [T],

2°/ M. [X] [T],

3°/ Mme [K] [G], épouse [T],

4°/ Mme [S] [T],

5°/ M. [H] [T],

domiciliés tous cinq [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° U 20-17.623 contre l'arrêt rendu le 4 mars 2020 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [J] [R], domicilié [Adresse 2], Notaire,

2°/ à M. [B] [M], domicilié [Adresse 3], Notaire, anciennement notaire associé de la société Balluteaud-Galliay aujourd'hui dénommé Audhuy-Galliay,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat des consorts [T], de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de MM. [R] et [M], et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 22 juin 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Farrenq-Nési, MM. Jacques, Boyer, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, M. Zedda, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 4 mars 2020), par acte du 8 juillet 2008 dressé par M. [M], avec la participation de M. [R], notaires, MM. [F] [T], [H] [T], [X] [T] et Mme [S] [T] (les consorts [T]) ont vendu à la société Araneus un immeuble situé lieudit « Tissandier » à Montflanquin au prix de 210 000 euros.

2. Par arrêt définitif du 4 juin 2013, M. [Q] a été condamné à dix ans d'emprisonnement pour s'être rendu l'auteur, entre le 1er janvier 1999 et le 21 octobre 2009, au préjudice des consorts [T], d'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse des victimes en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer leur jugement pour les conduire à des actes gravement préjudiciables pour elles, en l'espèce, le détournement de leur épargne et la cession de leurs actifs immobiliers.

3. Par acte du 9 décembre 2014, les consorts [T], soutenant avoir été sous l'emprise de M. [Q] lors de cette vente, ont assigné M. [R] et M. [M] en paiement de dommages-intérêts, sur le fondement de leur responsabilité délictuelle.

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

4. Les consorts [T] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable comme prescrite leur action dirigée contre M. [R] et M. [M], alors
« que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant soit de la loi, de la convention ou de la force majeure ; que son point de départ est reporté jusqu'à ce qu'il puisse agir ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 8 juillet 2008, comme jugé par des motifs pertinents par le tribunal que la cour fait siens, pour se terminer le 8 juillet 2013 » et, par motifs réputés adoptés du tribunal, que les consorts [T] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 8 juillet 2008 », tout en considérant que les consorts [T] étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [Q], le jugement entrepris rappelant en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [T] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérise l'impossibilité d'agir des consorts [T], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 » et l'arrêt considérant qu'« à compter du 12 décembre 2009, et a fortiori de juin 2011, ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un événement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, en cet état, les consorts [T] ne se trouvaient pas, lors de la vente, empêchés d'agir, de sorte que la prescription n'avait pas pu commencer à courir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 2234 du code civil :

5. Aux termes de ce texte, la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.

6. Pour déclarer prescrite l'action engagée le 9 décembre 2014 par les consorts [T], l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que ceux-ci avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 8 juillet 2008, de sorte que cette date constitue le point de départ de la prescription, et, par motifs propres, qu'à compter du 12 décembre 2009 et a fortiori de juin 2011 ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un événement insurmontable caractérisant une situation de force majeure, telle que requise par l'article 2234 du code civil, et les ayant empêchés d'introduire l'action en responsabilité dans le délai de cinq ans, qui n'expirait que le 8 juillet 2013.

7. En statuant ainsi, après avoir relevé qu'il n'était pas discuté par les parties que les consorts [T] étaient, au moment de la réitération de l'acte de vente du 8 juillet 2008, dans un état de sujétion psychologique, ce dont il résultait que la prescription n'avait pas pu commencer à courir à cette date, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 mars 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. [R] et M. [M] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [R] et M. [M] et les condamne à payer aux consorts [T] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour les consorts [T]

Les consorts [T] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme prescrite leur action en justice dirigée à l'encontre de Monsieur [R] et Monsieur [M] ;

Alors, d'une part, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 8 juillet 2008, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 8 juillet 2013 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [T] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 8 juillet 2008 », sans indiquer comment les consorts [T], qui étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [Q], ainsi qu'il résulte des énonciations tant de l'arrêt attaqué que du jugement entrepris, qui rappelle en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le Tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [T] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérisent l'impossibilité d'agir des consorts [T], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 », auraient, le 8 juillet 2008, pu avoir conscience de cette situation de sujétion psychologique et, partant, connaissance des faits leur permettant d'exercer leur droit d'engager une action en responsabilité contre les notaires ayant établi l'acte de vente, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

Alors, d'autre part, que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 8 juillet 2008, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 8 juillet 2013 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [T] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 8 juillet 2008 » puisqu'ils ne soutenaient pas que les procurations qu'ils avaient données en vue de la vente, qui étaient explicites, auraient été falsifiées, et n'établissaient pas qu'elle aurait été dissimulée à Monsieur [F] [T] ou que Madame [K] [T] n'en aurait pas été informée par le truchement de son époux, sans indiquer comment les consorts [T], qui étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [Q], ainsi qu'il résulte des énonciations tant de l'arrêt attaqué que du jugement entrepris, qui rappelle en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le Tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [T] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérisent l'impossibilité d'agir des consorts [T], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 », auraient, le 8 juillet 2008, se trouvant dans cette situation de sujétion psychologique, pu avoir la révélation de leur dommage, résultant d'une vente à laquelle, dans ces conditions, ils n'avaient pas librement consenti, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

Alors, de troisième part, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 8 juillet 2008, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 8 juillet 2013 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [T] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 8 juillet 2008 », tout en considérant que les consorts [T] étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [Q], le jugement entrepris rappelant en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le Tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [T] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérisent l'impossibilité d'agir des consorts [T], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 », sans rechercher, comme le lui demandaient les consorts [T], si, lors de la vente, leur discernement n'était pas aboli, de sorte qu'ils ne connaissaient pas et ne pouvaient pas connaître les faits leur permettant d'agir en justice, puisqu'ils n'avaient pas eu et ne pouvaient avoir eu, en particulier, la révélation de leur dommage, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

Alors, de quatrième part, que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant soit de la loi, de la convention ou de la force majeure ; que son point de départ est reporté jusqu'à ce qu'il puisse agir ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 8 juillet 2008, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 8 juillet 2013 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [T] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 8 juillet 2008 », tout en considérant que les consorts [T] étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [Q], le jugement entrepris rappelant en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le Tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [T] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérisent l'impossibilité d'agir des consorts [T], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 » et l'arrêt considérant qu'« à compter du 12 décembre 2009, et a fortiori de juin 2011, ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un évènement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, en cet état, les consorts [T] ne se trouvaient pas, lors de la vente, empêchés d'agir, de sorte que la prescription n'avait pas pu commencer à courir, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du code civil ;

Alors, de cinquième part que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 8 juillet 2008, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 8 juillet 2013 », tout en considérant qu'« à compter du 12 décembre 2009, et a fortiori de juin 2011, ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un évènement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ce n'était pas au 12 décembre 2009, et même à la fin du mois de juin 2011, seulement, que les consorts [T] avaient pu avoir conscience de ce que la vente avait été conclue alors qu'ils se trouvaient sous l'emprise psychologique de Monsieur [Q], et que c'était donc à ce moment, seulement, qu'ils avaient pu avoir la révélation de leur dommage et, plus largement, connaître les faits leur permettant d'agir en justice, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

Alors, de sixième part que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant soit de la loi, de la convention ou de la force majeure ; que son point de départ est reporté jusqu'à ce qu'il puisse agir ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 8 juillet 2008, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 8 juillet 2013 », tout en considérant qu'« à compter du 12 décembre 2009, et a fortiori de juin 2011, ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un événement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ce n'était pas au 12 décembre 2009, et même à la fin du mois de juin 2011, seulement, que l'empêchement d'agir des consorts [T] avait pris fin, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du code civil ;

Alors, de septième part, subsidiairement, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en retenant, d'office, et sans provoquer préalablement les explications des parties à cet égard, qu'« il est constant que la suspension du délai de prescription pour impossibilité d'agir ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris fin, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription » et que « les appelants invoquent la suspension du délai de prescription au-delà de la période de prévention, soit le 21 octobre 2009, de sorte que selon eux leur action introduite le 9 décembre 2014 ne serait pas prescrite comme l'a jugé le Tribunal. Mais il résulte des pièces de la procédure pénale versées aux débats et de leurs propres écritures que les consorts [T] se sont constitués partie civile dans le cadre de la procédure d'instruction par courrier du 12 décembre 2009. Ils font aussi valoir que les médecins psychiatres attestent qu'ils ont été dans l'incapacité de gérer leurs affaires jusqu'en juin 2011. Ainsi, à compter du 12 décembre 2009, et a fortiori de juin 2011, ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un évènement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil, les ayant empêché d'introduire dans le délai de cinq ans, qui n'expirait que le 8 juillet 2013 en application du principe ci-dessus rappelé, l'action en responsabilité objet de la présente instance. Dès lors, ils disposaient encore du temps nécessaire pour agir », la Cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, violant ainsi l'article 16 du code de procédure civile ;

Alors, de huitième part, toujours subsidiairement, qu'en faisant application de la solution jurisprudentielle selon laquelle « la suspension du délai de prescription pour impossibilité d'agir ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris fin, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription », cependant que celle-ci ne concerne que l'empêchement né au cours de la période de suspension de la prescription, qu'elle est inapplicable quand l'empêchement est né dès l'origine, ce qui était le cas en l'espèce, aux termes mêmes de l'arrêt et du jugement, situation dans laquelle cet empêchement est cause non de suspension de la prescription mais de report du point de départ du délai de prescription, la Cour d'appel a violé l'article 2234 du code civil ;

Et alors, enfin, et en toute hypothèse, qu'en faisant application de la solution jurisprudentielle selon laquelle « la suspension du délai de prescription pour impossibilité d'agir ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris fin, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription », quand celle-ci ne peut plus trouver application sous l'empire de l'article 2234 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, la Cour d'appel a violé l'article 2234 du code civil.

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