19 May 2015
Cour de cassation
Pourvoi n° 14-17.007

Chambre commerciale financière et économique

ECLI:FR:CCASS:2015:CO00457

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :


Vu l'article 1178 du code civil ;


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Dat développement (la société Dat), propriétaire de plusieurs terrains, a cédé à la société X...
Y...
Z... groupe (la société GGL) ses participations dans deux sociétés filiales par un protocole du 16 novembre 2007 ; que celui-ci prévoyait une première acquisition, immédiate et ferme, d'une partie des titres de chacune de ces sociétés, puis une seconde acquisition, conditionnelle et différée, portant sur une autre partie de ces titres, à un prix devant être déterminé par la levée, au plus tard le 31 mars 2009, de quatre conditions suspensives, au nombre desquelles l'obtention d'un arrêté préfectoral portant autorisation au titre de la loi sur l'eau ; que la société Dat a assigné la société GGL en demande de paiement de complément du prix ;


Attendu que, pour rejeter la demande de la société Dat, l'arrêt retient que l'arrêté préfectoral a été sollicité et obtenu le 1er juin 2010 par la société Prodevar en sa qualité d'aménageur et que la collusion invoquée par la société Dat entre les sociétés Prodevar et GGL n'est pas établie, de sorte que la condition suspensive ne peut être réputée accomplie ;


Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société GGL, qui était obligée sous cette condition au paiement du complément de prix, n'en avait pas, faute de diligences, empêché l'accomplissement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;


Condamne la société X...
Y...
Z... groupe aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Dat développement et rejette sa demande ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille quinze.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Dat développement.


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Dat Développement de sa demande tendant à la condamnation de la société CGL Groupe à lui payer une somme de 711. 057, 10 ¿ à titre de complément de prix,


AUX MOTIFS QUE la convention du 16 novembre 2007 prévoyait, d'une part, en ses articles 1 à 6, la cession immédiate de 49 % des 3000 parts sociales composant le capital social de la société Prodevar et de 49 % des 2205 parts sociales composant le capital social de la société 3M (Titre I intitulé « Sur la cession de la première partie des titres »), et d'autre part, en ses articles 7 à 14, la cession différée et conditionnelle de 510 parts sociales de la société Prodevar et de 765 parts sociales de la société 3M (Titre II intitulé « Sur la cession sous conditions suspensives de la seconde partie des titres ») ; que la réalisation des conditions suspensives prévues à l'acte conditionnait, d'une part, le complément du prix de cession de la première partie des titres (art. 2-2), et d'autre part, la cession de la seconde partie des titres (art. 12) ; que la réalisation des conditions suspensives prévues à l'acte conditionnait, d'une part, le complément de prix de cession de la première partie des titres (art. 2-2), et d'autre part, la cession de la seconde partie des titres (art. 12) ; que dans les deux cas, les conditions suspensives devaient être réalisées au plus tard le 31 mars 2009, sauf prorogation convenue entre les parties (art. 12-1), la convention prévoyant, en outre, que « si l'une des conditions suspensives relatives à l'aménagement de la ZAC, visées à l'article 12-1 du Titre II n'est pas réalisée et si le cessionnaire s'en prévaut pour ne pas acquérir les titres visés au Titre II, les cessions de parts sociales prévues au présent Titre I seront résolues si bon semble aux cédants » (art. 6) ; qu ¿ il s'ensuit que, contrairement aux affirmations contenues dans une partie des écritures de la société appelante, la réalisation des conditions suspensives à laquelle était soumis le paiement du complément du prix de cession de la première partie des titres, était bien enfermée dans un délai, fixé au 31 mars 2009, ce qu'elle avait d'ailleurs admis dans son courrier de mise en demeure adressé le 2 décembre 2010 à la société GGL Groupe dans lequel elle écrivait notamment que « ces conditions suspensives devaient être réalisées avant le 31 mars 2009, sauf prorogation convenue entre les parties, en application de l'article 12-1 du protocole d'acquisition du 16 novembre 2007 » ; que l'une des conditions suspensives concernant la délivrance de l'arrêté préfectoral portant autorisation au titre de la loi sur l'eau n'a pas été réalisée à la date du 31 mars 2009, cet arrêté n'étant délivré que le 1er juin 2010 ; que la société appelante reproche à la société CGL d'avoir empêché la réalisation de cette condition, si bien qu'elle doit, selon elle, être réputée accomplie ; que l'arrêté dont s'agit a été sollicité et finalement obtenu par la société Prodevar en sa qualité d'aménageur et non par la société CGL ; qu ¿ au cours d'une réunion des associés de la société Prodevar tenue le 30 octobre 2008, à laquelle ont participé les associés et gérant de la société Dat Développement, il a été décidé « à l'unanimité des associés » de rompre le contrat avec le bureau d'études C2I, chargé du dossier eau, pour le confier à un autre bureau d'études, AEE, présenté par la société Dat Développement ; que le simple fait que le dirigeant de la société Prodevar soit le même que celui de la société CGL Groupe et que ces deux personnes morales aient le même siège social est insuffisant à établir la prétendue collusion invoquée par la société appelante ; qu ¿ il s'ensuit qu'en l'absence de preuve, à la charge de la société Dat Développement, de toute faute ou de toute défaillance à son devoir de loyauté de la société CGL Groupe, la condition ne peut être réputée accomplie ;


ET AUX MOTIFS QU ¿ en application de l'article 1156 du code civil, on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes ; que l'exposé préalable du protocole ainsi que la référence à l'article 12-1 dans l'article 2-1-2-2-2 lient sans ambiguïté la première acquisition aux conditions suspensives de l'article 12-1 ; que l'article 12-1 forme un tout, le délai fixé pour la réalisation des conditions suspensives étant indissociable de ces conditions, l'argumentation développée par la SARL Dat Développement en ce que la disposition de délai relative aux conditions suspensives ne concernerait que la deuxième acquisition n'est pas fondé ; que les parties s'accordent pour dire que les conditions suspensives 1, 2 et 4 mentionnées à l'article 12-1 du protocole ont été levées avant le 31 mars 2009 ; que seule la condition n° 3 relative à l'obtention de l'arrêté préfectoral portant autorisation au titre de la loi sur l'eau a été levée le 1er juin 2010 ;


1° ALORS QUE le protocole d'acquisition signé le 16 novembre 2007 mentionne à l'article 2-1-2-2-1, qu'« en cas de réalisation des conditions suspensives visées à l'article 12-1 du Titre II des présentes, le Prix définitif des parts cédées sera fixé dans les mêmes conditions que le prix provisoire (¿) après une revalorisation des terrains et des titres de participations (...) sur la base de TRENTE EUROS (30 euros) par mètre carré de terrain » et à l'article 2-1-2-2-2 que c'est seulement « en cas de non réalisation des conditions suspensives » et si, « dans ce cas », les cédants ont renoncé au bénéfice de la condition résolutoire que le prix définitif sera fixé au montant du prix provisoire ; que si la défaillance des conditions suspensives à la date du 31 mars 2009 autorisait le cessionnaire à renoncer à la vente ou à en demander la résolution, le contrat ne prévoyait nullement que le complément de prix pourrait ne pas être dû au cas où les conditions suspensives seraient réalisées après une certaine date sans que le cessionnaire s'en prévale lui-même ; qu'en affirmant que le complément de prix n'était dû qu'en cas de réalisation des conditions suspensives au plus tard le 31 mars 2009, la cour d'appel a dénaturé la portée de ce protocole en y ajoutant une condition qu'il ne prévoyait pas et violé l'article 1134 du code civil ;


2° ALORS, en toute hypothèse, QUE la condition tenant à la délivrance d'une autorisation administrative doit être réputée accomplie lorsque le débiteur, qui s'est obligé sous cette condition, en a empêché la réalisation en n'accomplissant aucune diligence pour l'obtention de cette autorisation ; que la société Dat Développement faisait valoir que la société GGL Groupe, qui s'était engagée sous la condition de l'obtention d'une autorisation administrative au titre de la loi sur l'eau, avait empêché la réalisation de cette condition, s'étant abstenue de solliciter elle-même cette autorisation, d'accomplir toutes diligences auprès de la société Pardevar et de son bureau d'études pour s'assurer que la demande d'autorisation était déposée en temps utile et de manière complète, et de pallier à leur carence ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la société GGL Groupe, débitrice, n'avait pas, faute d'avoir accompli ces diligences, empêché la réalisation de la condition, la cour d'appel privé sa décision de base légale au regard de l'article 1178 du code civil ;


3° ALORS QUE la société Dat Développement faisait valoir que la condition devait être réputée accomplie dès lors que la société GGL Groupe s'était personnellement engagée à mettre tous les moyens en oeuvre pour solliciter et obtenir l'autorisation administrative nécessaire au titre de la loi sur l'eau et, donc, à effectuer les diligences nécessaires à la réalisation de la condition suspensive, et qu'elle n'avait accompli aucune formalité à cet effet (conclusions, pages 8 et 9) ; qu'elle produisait un courrier daté du 18 juin 2007, établi à l'entête de la société GGL Groupe et signé par son directeur général, M. X..., qui mentionnait « Nous mettrons en oeuvre les dossiers de réalisation et de loi sur l'eau » (cf. prod. n° 7) ; que faute d'avoir répondu aux conclusions de la société Dat Développement sur ce point et d'avoir analysé ce document, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;


4° ALORS QUE la société Dat Développement faisait encore valoir que la société GGL Groupe avait profité de sa qualité d'associé majoritaire, et du fait que son directeur général, M. X..., était également gérant de la société Prodevar pour retarder le dépôt, par celle-ci, de la demande d'autorisation au titre de la loi sur l'eau et des pièces et informations complémentaires réclamées par l'administration, dans le but de parvenir à la défaillance de la condition suspensive ; qu'elle faisait valoir que la société Prodevar, sous la direction de M. X..., avait tardivement déposé son dossier de demande, et qu'elle n'avait fourni les éléments complémentaires qui lui avaient été réclamés par l'administration qu'après le 31 mars 2009 ; qu'elle ajoutait encore que la société GGL Groupe avait dissimulé à ses associés le fait que le retard dans la délivrance de l'autorisation était dû à des demandes d'informations complémentaires non satisfaites et avait frauduleusement imputé la responsabilité de ce retard au bureau d'études ; qu'en s'abstenant de répondre à ces moyens, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile.

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