16 March 1994
Cour de cassation
Pourvoi n° 90-41.773

Chambre sociale

Titres et sommaires

(SUR LE 1ER MOYEN) CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - imputabilité - démission du salarié - caractère sérieux et non équivoque - constatations suffisantes

Texte de la décision

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le pourvoi formé par M. Roger X..., demeurant à Vanves (Hauts-de-Seine), ..., en cassation d'un arrêt rendu le 22 janvier 1990 par la cour d'appel de Paris (22e chambre A), au profit de la société Sergi, société anonyme, dont le siège social est sis à Boissy-Saint-Léger (Val-de-Marne), zone industrielle Haie Griselle, défenderesse à la cassation ;


LA COUR, en l'audience publique du 2 février 1994, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, M. Guermann, conseiller rapporteur, MM. Saintoyant, Waquet, Ferrieu, Monboisse, Mme Ridé, MM. Merlin, Desjardins, conseillers, M. Aragon-Brunet, Mlle Sant, Mme Blohorn-Brenneur, MM. Frouin, Boinot, conseillers référendaires, M. Martin, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;


Sur le rapport de M. le conseiller Guermann, les observations de Me Choucroy, avocat de M. X..., les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 janvier 1990), que M. X..., embauché le 1er février 1985 par la société Sergi en qualité d'ingénieur commercial ayant le statut de VRP, rémunéré à la commission, a pris acte le 17 octobre 1987 de la rupture de son contrat de travail du fait de l'employeur ;


Sur le premier moyen :


Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt d'avoir estimé qu'il était démissionnaire et de l'avoir en conséquence débouté de ses demandes d'indemnités de licenciement, alors, selon le moyen, d'une part, que la volonté du salarié de démissionner doit être réelle, sérieuse et non équivoque ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a retenu que M. X... avait démissionné, sans rechercher si les termes de la lettre du 17 octobre 1987 caractérisaient la volonté non équivoque de son auteur de démissionner, n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard de l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part, que la modification de la rémunération présente un caractère essentiel et rend la rupture imputable à l'employeur ;

que, par suite, la cour d'appel n'a pu, sans contradiction de motifs, relever, d'un côté, que, dans sa lettre de rupture du 17 octobre 1987, l'intéressé déplorait être tenu à l'écart de la clientèle, ne plus être tenu informé des affaires traitées, ce qui permettait à son employeur de ne plus lui régler certaines commissions, et que celui-ci faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, qu'en raison des agissements de la société Sergi, qui s'est abstenue de lui régler les sommes dont elle était redevable, il prenait acte de la rupture de son contrat, d'un autre côté, que le salarié n'établit pas que la rupture des relations soit imputable à son employeur ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;


Mais attendu qu'ayant relevé que c'était le salarié qui avait pris l'initiative de considérer son contrat de travail comme rompu et retenu qu'aucune preuve n'était apportée ni d'une modification d'un élément essentiel du contrat de travail de l'intéressé, ni d'un manquement de l'employeur à ses obligations, les juges du fond ont, hors toute contradiction, pu décider que la rupture s'analysait en une démission ;


Que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;


Et sur le second moyen :


Attendu que le salarié reproche aussi à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande de rappel de commissions pour l'année 1986, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il incombe à l'employeur, débiteur de l'obligation, de rapporter la preuve du paiement des salaires afférents au travail effectivement accompli ;

qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, le salarié précisait et démontrait que les commissions, en principe, assises sur la base de calcul des commandes signées par le client, et non sur le matériel livré et facturé, avait été différé à la date des facturations ou des livraisons, et chiffrait le montant des commissions dues à la somme de 183 423,80 francs ; que, par suite, la cour d'appel n'a pu, sans renverser la charge de la preuve, "prétendre que M. X... ne démontre pas que les sommes dues lui ont été versées" ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ; et alors, d'autre part, que, dans une note sur le projet de l'expert produite au débat, le salarié chiffrait précisément le montant des commissions dues à la somme de 183 423,80 francs, la somme précédemment réclamée à l'expert procédant d'une erreur matérielle ;

d'où il suit que la cour d'appel n'a pu, sans dénaturer ce document et violer l'article 1134 du Code civil, retenir que le salarié ne fournit aucune explication du nouveau chiffre de commissions qu'il a sollicité, tant devant la cour d'appel que devant le conseil de prud'hommes ;


Mais attendu que la cour d'appel, après avoir relevé que l'intéressé avait accepté, sans réserve, les deux arrêtés de compte successifs concernant la période en cause, a retenu, hors toute dénaturation et sans inverser la charge de la preuve, qu'il n'établissait pas l'inexactitude des décomptes approuvés ;


Que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi ;


Condamne M. X..., envers la société Sergi, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du seize mars mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.

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