1 July 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-40.008

Première chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C100571

Titres et sommaires

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Office du juge - Question posée au juge - Pouvoir de reformulation - Absence de pouvoir de modification - Portée - Question posée devant la Cour


QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Code de la consommation - Article L. 211-3 - Article 34 de la Constitution - Principe de clarté - Méconnaissance - Non-lieu à renvoi au conseil constitutionnel

Texte de la décision

CIV. 1

COUR DE CASSATION



CF


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 1er juillet 2021




NON-LIEU A RENVOI


Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen faisant fonction de président



Arrêt n° 571 FS-B

Affaire n° W 21-40.008




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 1ER JUILLET 2021

Le tribunal judiciaire de Lille a transmis à la Cour de cassation, par jugement rendu le 22 avril 2021, une question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 26 avril 2021, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

Mme [X] [E], domiciliée [Adresse 1],

d'autre part,

1°/ la société Cometik, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ la société Locam, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Cometik, et l'avis de Mme Legohérel, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 juin 2021 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, M. Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, Champ, Robin-Raschel, conseillers référendaires, Mme Legohérel, avocat général référendaire, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Le 14 octobre 2017, hors établissement, Mme [E], ergothérapeuthe, a souscrit auprès des sociétés Cometik et Locam deux contrats de licence d'exploitation et de location financière d'un site internet d'une durée ferme et irrévocable de quarante-huit mois. Ces sociétés lui ayant dénié le droit de se rétracter, elle les a assignées, le 9 juin 2020, en annulation des contrats. Au cours de cette procédure, la société Cometik a posé une question prioritaire de constitutionnalité.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

2. Par jugement du 22 avril 2021, le tribunal judiciaire de Lille a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

L'article L. 221-3 du code de la consommation suivant lequel « les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq », en tant qu'il fixe le champ d'application des dispositions sur les contrats conclus hors établissements entre deux professionnels, est-il contraire au principe de clarté de la loi découlant de l'article 34 de la Constitution, dès lors qu'il ne définit pas en des termes suffisamment clairs et précis le critère tenant au « champ de l'activité principale » ?

3. Devant la Cour, la société Cometik demande que soit posée la question suivante :

L'article L. 221-3 du code de la consommation suivant lequel « les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq », appréhendé de façon autonome mais aussi en combinaison avec l'article L. 242-6 du code de la consommation en tant qu'il fixe le champ d'application de l'incrimination pénalement sanctionnée par ce dernier texte, est-il contraire au principe de légalité des délits et des peines découlant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ainsi qu'au principe de clarté de la loi découlant de l'article 34 de la Constitution, dès lors qu'il ne définit pas en des termes suffisamment clairs et précis le critère tenant au « champ de l'activité principale » ?

4. Si la question peut être reformulée par le juge à l'effet de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, il ne lui appartient pas d'en modifier l'objet ou la portée, de sorte que ne peuvent être examinés ni le grief d'inconstitutionnalité de l'article L. 242-6 du code de la consommation ni la méconnaissance par la disposition contestée du principe constitutionnel de légalité des délits et des peines qui n'ont pas été soumis au tribunal judiciaire.

5. Il y a donc lieu pour la Cour de cassation de se prononcer sur le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité telle qu'elle a été posée par la juridiction qui la lui a transmise et soulevée dans le mémoire distinct produit devant celle-ci.

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

6. La disposition contestée est applicable au litige au sens et pour l'application de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958.

7. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

8. Cependant, si le principe de clarté de la loi découlant de l'article 34 de la Constitution, composante de l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, impose au législateur d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques, sa méconnaissance ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution.

9. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille vingt et un.

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