9 June 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-23.153

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin - Publié au Rapport

ECLI:FR:CCASS:2021:SO00722

Titres et sommaires

REPRESENTATION DES SALARIES - comité social et économique - mise en place - mise en place au niveau de l'entreprise - détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts - modalités - accord collectif - défaut - décision de l'employeur - critères - autonomie de gestion du responsable de l'établissement - définition - détermination - portée

Selon l'article L. 2313-4 du code du travail, en l'absence d'accord conclu dans les conditions mentionnées aux articles L. 2313-2 et L. 2313-3 du même code, le nombre et le périmètre des établissements distincts pour la mise en place des comités sociaux et économiques est fixé compte tenu de l'autonomie de gestion du responsable de l'établissement, notamment en matière de gestion du personnel. Il en résulte que caractérise au sens de ce texte un établissement distinct l'établissement qui présente, notamment en raison de l'étendue des délégations de compétence dont dispose son responsable, une autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service. Lorsqu'ils sont saisis d'un recours dirigé contre la décision unilatérale de l'employeur, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (le direccte), par une décision motivée, et le tribunal judiciaire se fondent, pour apprécier l'existence d'établissements distincts au regard du critère d'autonomie de gestion ainsi défini, sur les documents relatifs à l'organisation interne de l'entreprise que fournit l'employeur, et sur les documents remis par les organisations syndicales à l'appui de leur contestation de la décision unilatérale prise par ce dernier. La centralisation de fonctions support ou l'existence de procédures de gestion définies au niveau du siège ne sont pas de nature à exclure en elles-mêmes l'autonomie de gestion des responsables d' établissement. Il appartient en conséquence au tribunal judiciaire de rechercher, au regard des éléments produits tant par l'employeur que par les organisations syndicales, si les directeurs des établissements concernés ont effectivement une autonomie de décision suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service, et si la reconnaissance à ce niveau d'établissements distincts pour la mise en place des comités sociaux et économiques est de nature à permettre l'exercice effectif des prérogatives de l'institution représentative du personnel. Prive dès lors sa décision de base légale le tribunal qui, pour rejeter la demande d'annulation de la décision du direccte, se contente de retenir que cette décision vise les textes applicables dans leur dernier état, les décisions rendues, les écritures communiquées et la procédure suivie, qu'elle a été rendue après une étude sérieuse des éléments fournis par les parties, qu'elle est en outre motivée en droit, en ce qu'elle rappelle les critères essentiels pour les appliquer à la situation de fait et qu'en particulier l'autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service a été bien prise en compte dans l'analyse de la situation de l'entreprise

Texte de la décision

SOC. / ELECT

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 juin 2021




Cassation


M. CATHALA, président



Arrêt n° 722 FS-P+R

Pourvoi n° J 19-23.153




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 JUIN 2021

La société GE Medical Systems, société en commandite simple, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 19-23.153 contre le jugement rendu le 17 septembre 2019 par le tribunal d'instance de Versailles (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :

1°/ au syndicat CFE-CGC métallurgie Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ au syndicat CFDT Symétal sud francilien, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ au syndicat CGT/UFICT CGT Gems, dont le siège est [Adresse 1],

4°/ au syndicat CFE-CGC métallurgie Provence, dont le siège est [Adresse 4],

5°/ au syndicat UGICT-CGT, dont le siège est [Adresse 5],

6°/ à la Direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités de la région Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 6],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société GE Medical Systems, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat CFE-CGC métallurgie Ile-de-France, du syndicat CFDT Symétal sud francilien et du syndicat CFE-CGC métallurgie Provence, et l'avis de Mme Grivel, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 avril 2021 où étaient présents M. Cathala, président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, MM. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, M. Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Grivel, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Versailles, 17 septembre 2019), la société GE Medical Systems (la société) a décidé unilatéralement la mise en place d'un comité social et économique (CSE) unique.

2. Sur recours des organisations syndicales, le 22 mars 2019, le directeur régional des entreprises, de l'économie, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (le direccte) a fixé à trois le nombre des établissements distincts.

3. Le 10 avril 2019, la société a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de cette décision.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première et quatrième branches

Enoncé du moyen

4. La société fait grief à l'arrêt de la débouter de l'intégralité de ses demandes et d'ordonner la mise en place en son sein de trois CSE avec le périmètre suivant : établissement Distribution, établissement Ingineering et Manufacturing et établissement Fonction support et HQ, alors :

« 1°/ qu'il appartient au tribunal d'instance saisi de la contestation d'une décision de l'autorité administrative fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts d'examiner l'ensemble des contestations, qu'elles portent sur la légalité interne ou la légalité externe de cette décision ; qu'en cas de contestation du découpage retenu, le juge doit, sans se borner à examiner superficiellement la motivation de cette décision, apprécier le découpage opéré par la Direccte en fonction des éléments de fait et de preuve qui lui sont soumis ; que, dans cette perspective, il lui appartient de s'expliquer, au vu des éléments de fait et de preuve, sur l'autonomie de gestion des responsables d'établissement ; qu'en se bornant à relever, pour dire qu'il n'y avait lieu ni d'annuler la décision de la Direccte, ni de modifier le nombre et le périmètre des établissements distincts, que la décision de la Direccte est parfaitement motivée, en ce qu'elle rappelle les critères essentiels pour les appliquer à la situation de fait et qu'en particulier l'autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service a été bien prise en compte dans l'analyse de la situation de l'entreprise et que la décision de la Direccte est parfaitement fondée en fait et en droit, le tribunal d'instance a méconnu son office et violé l'article L. 2313-5 du code du travail.

4°/ que caractérise un établissement distinct au sens de l'article L. 2313-4 du code du travail l'établissement qui présente, notamment en raison de l'étendue des délégations de compétence dont dispose son responsable, une autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service ; que pour motiver sa décision fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts, le juge doit faire ressortir, par des constatations concrètes et précises, les pouvoirs décisionnels dont dispose le responsable de l'établissement, notamment en matière de gestion du personnel ; qu'à supposer que le tribunal d'instance ait repris à son compte les motifs de la décision de la Direccte, en se bornant à relever, pour dire que les trois pôles regroupant de manière cohérente sept familles de métiers disposent chacun d'un responsable des ressources humaines qui, selon les organigrammes des ressources humaines, disposent de compétences et d'une autonomie en matière de gestion du personnel, le tribunal d'instance, qui n'a constaté aucune manifestation concrète de cette autonomie de gestion des responsables des ressources humaines en matière de gestion du personnel, a placé la Cour de cassation dans l'impossibilité d'exercer son contrôle et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2313-4 et L. 2313-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2313-4 et L. 2313-5 du code du travail :

5. Selon le premier de ces textes, lorsqu'ils résultent d'une décision unilatérale de l'employeur, le nombre et le périmètre des établissements distincts pour la mise en place des comités sociaux et économiques sont fixés compte tenu de l'autonomie de gestion du responsable de l'établissement , notamment en matière de gestion du personnel. Caractérise au sens de ce texte un établissement distinct l'établissement qui présente, notamment en raison de l'étendue des délégations de compétence dont dispose son responsable, une autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service.

6. Lorsqu'ils sont saisis d'un recours dirigé contre la décision unilatérale de l'employeur, le direccte, par une décision motivée, et le tribunal d'instance se fondent, pour apprécier l'existence d'établissements distincts au regard du critère d'autonomie de gestion ainsi défini, sur les documents relatifs à l'organisation interne de l'entreprise que fournit l'employeur, et sur les documents remis par les organisations syndicales à l'appui de leur contestation de la décision unilatérale prise par ce dernier.

7. La centralisation de fonctions support ou l'existence de procédures de gestion définies au niveau du siège ne sont pas de nature à exclure en elles-mêmes l'autonomie de gestion des responsables d'établissement.

8. En application du second des textes susvisés, relèvent de la compétence du tribunal d'instance, en dernier ressort, à l'exclusion de tout autre recours, les contestations élevées contre la décision de l'autorité administrative fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts. Il appartient, en conséquence, au tribunal d'instance d'examiner l'ensemble des contestations, qu'elles portent sur la légalité externe ou sur la légalité interne de la décision du direccte, et, s'il les dit mal fondées, de confirmer la décision, s'il les accueille partiellement ou totalement, de statuer à nouveau, par une décision se substituant à celle de l'autorité administrative, sur les questions demeurant en litige.

9. Pour débouter la société de sa demande d'annulation de la décision du direccte du 22 mars 2019, le jugement retient que cette décision vise les textes applicables dans leur dernier état, les décisions rendues, les écritures communiquées et la procédure suivie, qu'il est donc manifeste que cette décision a été rendue après une étude sérieuse des éléments fournis par les parties, qu'elle est en outre motivée en droit, en ce qu'elle rappelle les critères essentiels pour les appliquer à la situation de fait et qu'en particulier l'autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service a été bien prise en compte dans l'analyse de la situation de l'entreprise et qu'ainsi la décision du direccte étant parfaitement fondée en fait et en droit il n'y a pas lieu de l'annuler ni de modifier le nombre et le périmètre des établissements.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, au regard des éléments produits tant par l'employeur que par les organisations syndicales, si les responsables des établissements concernés avaient effectivement une autonomie de décision suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service et si la reconnaissance à ce niveau d'établissements distincts pour la mise en place des comités sociaux et économiques était de nature à permettre l'exercice effectif des prérogatives de l'institution représentative du personnel, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 17 septembre 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Versailles autrement composé ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société GE Medical Systems

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que la décision de la DIRECCTE en date du 22 mars 2019 est motivée en fait et en droit et conforme à la législation applicable, d'AVOIR débouté la société GEMS de l'intégralité de ses demandes et d'AVOIR ordonné la mise en place de trois CSE au sein de la société GEMS avec le périmètre suivant : établissement Distribution, établissement Ingineering et Manufacturing et établissement Fonction Support et HQ et d'AVOIR condamné la société GEMS à payer 1.000 euros au syndicat CFDT Symétal, au syndicat CFE-CGC Métallurgie Ile-de-France Smidef CFE-CGC, au syndicat CGC Métallurgie Provence SMPCA CFE CGC ;

AUX MOTIFS QUE :
« l'article L2314-4, modifié par Ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 - art. 1 dispose :
Lorsque le seuil de onze salariés a été franchi dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 2311-2, l'employeur informe le personnel tous les quatre ans de l'organisation des élections par tout moyen permettant de conférer date certaine à cette information. Le document diffusé précise la date envisagée pour le premier tour. Celui-ci doit se tenir, au plus tard, le quatre-vingt-dixième jour suivant la diffusion.
Selon Article L2313-4 du code du travail, modifié par l'Ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 - art. 1 :
En l'absence d'accord conclu dans les conditions mentionnées aux articles L. 2313-2 et L. 2313-3, l'employeur fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts, compte tenu de l'autonomie de gestion du responsable de l'établissement, notamment en matière de gestion du personnel.
L'article L 2313-5 du code du travail, modifié par l'Ordonnance n°2017-1718 du 20 décembre 2017 - art. 1, prévoit que :
En cas de litige portant sur la décision de l'employeur prévue à l'article L. 2313-4, le nombre et le périmètre des établissements distincts sont fixés par l'autorité administrative du siège de l'entreprise dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. Lorsqu'elle intervient dans le cadre d'un processus électoral global, la saisine de l'autorité administrative suspend ce processus jusqu'à la décision administrative et entraîne la prorogation des mandats des élus en cours jusqu'à la proclamation des résultats du scrutin.
La décision de l'autorité administrative peut faire l'objet d'un recours devant le juge judiciaire, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.

Enfin l'article R2313-2 du code du travail, modifié par le Décret n°2018-920 du 26 octobre 2018 - art. 2, précise que :
Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi prend sa décision dans un délai deux mois à compter de la réception de la contestation. Cette décision est notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception portant mention des voies et délais de recours. Elle peut faire l'objet d'un recours devant le tribunal d'instance dans un délai de quinze jours suivant sa notification.
En cas de décision implicite de rejet du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise et les organisations syndicales ayant constitué une section syndicale dans l'entreprise ou, lorsque les négociations se sont déroulées conformément à l'article L. 2313-3, le comité social et économique peuvent saisir, dans un délai de quinze jours, le tribunal d'instance afin qu'il soit statué sur la contestation.
En fait,
La décision en date du 22 mars 2019 de la DIRECCTE a été rendu au visa :
- des délégations de signature successives en date des 17 janvier 2019 et 27 février 2019, permettant à monsieur [R] [G], responsable du Pôle travail de l'Unité Départementale des Yvelines de prendre une décision ;
- des dispositions des articles L2314-4, L 2313-5 et R 2313-2 du Code du travail,
- du courrier reçu le 31 janvier 2019 par lequel les organisations syndicales de l'entreprise ont saisi l'autorité administrative en vue d'un arbitrage portant sur la détermination du périmètre des établissements distincts de la société GMS SCS ;
- des éléments produits par les parties et ceux recueillis lors de la réunion tenue le 27 février 2019 en présence de la Direction de l'entreprise et des organisations syndicales représentatives ainsi que de leur conseil respectif.
Elle est ainsi motivée :
Considérant sur la saisine :
- qu'aucun accord n'a pu être trouvé entre les parties,
- qu'une décision unilatérale de l'employeur est intervenue en date du 25 janvier 2019 sur la détermination du périmètre des établissements distincts au sein de I'entreprise,
- que c'est cette décision unilatérale fixant un seul établissement pour la mise en place du CSE qui fait l'objet de la contestation de l'ensemble des organisations syndicales.
Considérant sur les critères qui fondent l'existence d'un établissement distinct :
=> Sur le critère de l'autonomie de gestion en matière de gestion du personnel :

- que notamment les dispositions de I 'article L2313-4 du code du travail apparaissent conférer un poids prépondérant au critère reposant sur l'autonomie en matière de gestion du personnel, en cas de décision unilatérale prise par l'employeur,
- que la taille de l'entreprise et, de fait son organisation ne permettent pas de considérer qu'il existe une gestion du personnel totalement décentralisée,
- qu'en la matière il apparaît que les responsables ressources humaines de pôles constitués tels qu'ils ressortent des organigrammes des ressources humaines France disposent de compétences et d'une autonomie en matière de gestion du personnel,
- qu'il importe que cette autonomie soit en l'occurrence suffisante,
=> Sur le critère de l'exécution du service :
- que ce critère n'apparaît plus aussi pertinent dans la mesure où la consultation des CSE d'établissement est, pour une large part, recentrée sur la politique sociale, l'emploi et les conditions de travail,
- que ce critère retrouve sa pertinence au regard des missions du CSE central qui exerce les attributions qui concernent la marche générale de l'entreprise, Considérant en fonction de ce qui précède, eu égard d'une part à la prépondérance du critère fondé sur I'autonomie de gestion du personnel, d'autre part à l'organisation de I 'entreprise :
- que l'organisation des ressources humaines France de l'entreprise a été construite en 2017 sur la base de trois pôles ayant vocation à regrouper de manière cohérente de grandes familles de métiers,
- que chacun de ces pôles dispose d'un responsable des ressources humaines,
DÉCIDE
Article unique
La société GE MÉDICAL SYSTEM SCS sera constituée de trois établissements distincts
- un établissement distribution,
- un établissement "Engineering" et "Manufacturing",
- un établissement "Fonction support et HQ". »
La régularité formelle de cette décision n'est pas en cause.
S'agissant de la qualité de sa motivation, outre que l'article L 2313-5 du code du travail précédemment rappelé donne à l'autorité administrative un pouvoir de fixation du nombre et du périmètre des établissements, ce qui n'implique aucune décision strictement individuelle donnant lieu à motivation, il convient de constater que la décision vise les textes applicables dans leur dernier état, les décisions rendues, les écritures communiquées et la procédure suivie.
Il est donc manifeste que cette décision a été rendue après une étude sérieuse des éléments fournis par les parties lesquelles ont été mises en situation d'en débattre dans le respect du principe du contradictoire.
Elle est en outre parfaitement motivée en droit, en ce qu'après avoir rappelé les textes applicables, elle rappelle les critères essentiels pour les appliquer à la situation de fait de l'entreprise. En particulier, le critère unique, nouvellement dégagé par la jurisprudence, en cas d'absence d'accord collectif, de l'autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service a bien été pris en compte dans l'analyse de la situation de la société GMS SCS.
La décision de la DIRECCTE étant parfaitement fondée en fait et en droit, il n'y a pas lieu de l'annuler, ni de modifier le nombre et le périmètre des établissements.
Au contraire, il y a lieu de constater que le nombre et le périmètre des établissements définis par la DIRECCTE sont conformes aux exigences de l'article L2313-4 du code du travail et de dire qu'il y a lieu de mettre en place trois CSE au sein de la société GMS SCS :
- un établissement distribution,
- un établissement "Engineering" et "Manufacturing",
- un établissement "Fonction support et HQ".
Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande du syndicat CGT/ UFICT CGT GEMS, tendant à voir mettre en place deux CSE. ».

1. ALORS QU'il appartient au tribunal d'instance saisi de la contestation d'une décision de l'autorité administrative fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts d'examiner l'ensemble des contestations, qu'elles portent sur la légalité interne ou la légalité externe de cette décision ; qu'en cas de contestation du découpage retenu, le juge doit, sans se borner à examiner superficiellement la motivation de cette décision, apprécier le découpage opéré par la Direccte en fonction des éléments de fait et de preuve qui lui sont soumis ; que, dans cette perspective, il lui appartient de s'expliquer, au vu des éléments de fait et de preuve, sur l'autonomie de gestion des responsables d'établissement ; qu'en se bornant à relever, pour dire qu'il n'y avait lieu ni d'annuler la décision de la Direccte, ni de modifier le nombre et le périmètre des établissements distincts, que la décision de la Direccte est parfaitement motivée, en ce qu'elle rappelle les critères essentiels pour les appliquer à la situation de fait et qu'en particulier l'autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service a été bien prise en compte dans l'analyse de la situation de l'entreprise et que la décision de la Direccte est parfaitement fondée en fait et en droit, le tribunal d'instance a méconnu son office et violé l'article L. 2313-5 du code du travail ;

2. ALORS QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les éléments de cause ; qu'en l'espèce, dans sa décision du 22 mars 2019, la Direccte a expressément refusé de tenir compte du critère de l'autonomie en matière d'exécution du service au motif que « ce critère n'apparaît plus aussi pertinent dans la mesure où la consultation des CSE d'établissement est, pour une large part, recentrée sur la politique sociale, l'emploi et les conditions de travail » et que « ce critère retrouve sa pertinence au regard des missions du CSE central qui exerce les attributions qui concernent la marche générale de l'entreprise » ; qu'en affirmant néanmoins que le critère unique de l'autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service a bien été pris en compte dans l'analyse de la situation de la société GEMS, le tribunal d'instance a dénaturé les termes clairs et précis de cette décision et violé le principe précité ;

3. ALORS QUE caractérise un établissement distinct au sens de l'article L. 2313-4 du code du travail l'établissement qui présente, notamment en raison de l'étendue des délégations de compétence dont dispose son responsable, une autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service ; qu'il est donc indispensable que le juge identifie le responsable de l'établissement qui dispose d'une autonomie aussi bien en matière de gestion du personnel que d'exécution du service ; qu'à supposer qu'il ait adopté les motifs de la décision de la Direccte, le tribunal d'instance qui n'aurait absolument pas tenu compte de l'autonomie de gestion en matière d'exécution du service, aurait privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2313-4 et L. 2313-5 du code du travail ;

4. ALORS QUE caractérise un établissement distinct au sens de l'article L. 2313-4 du code du travail l'établissement qui présente, notamment en raison de l'étendue des délégations de compétence dont dispose son responsable, une autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l'exécution du service ; que pour motiver sa décision fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts, le juge doit faire ressortir, par des constatations concrètes et précises, les pouvoirs décisionnels dont dispose le responsable de l'établissement, notamment en matière de gestion du personnel ; qu'à supposer que le tribunal d'instance ait repris à son compte les motifs de la décision de la Direccte, en se bornant à relever, pour dire que les trois pôles regroupant de manière cohérente sept familles de métiers disposent chacun d'un responsable des ressources humaines qui, selon les organigrammes des ressources humaines, disposent de compétences et d'une autonomie en matière de gestion du personnel, le tribunal d'instance, qui n'a constaté aucune manifestation concrète de cette autonomie de gestion des responsables des ressources humaines en matière de gestion du personnel, a placé la Cour de cassation dans l'impossibilité d'exercer son contrôle et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2313-4 et L. 2313-5 du code du travail ;

5. ALORS QUE selon l'article L. 2313-4 du code du travail, en l'absence d'accord collectif, le nombre et le périmètre des établissements distincts doivent être déterminés en fonction de l'autonomie de gestion du responsable de l'établissement, et non en fonction de la taille de l'entreprise ou d'une exigence de proximité du comité avec les salariés ; qu'à supposer qu'il ait adopté les motifs de la décision de la Direccte, en affirmant, pour retenir l'existence de plusieurs établissements distincts, que la taille de l'entreprise et son organisation comprenant trois responsables des ressources humaines de pôle ne permettent pas de considérer qu'il existe une gestion du personnel totalement décentralisée, le tribunal d'instance, qui s'est fondé sur un motif tout aussi inopérant qu'erroné, a violé les articles L. 2313-4 et L. 2313-5 du code du travail ;

6. ALORS QUE le respect du principe de participation, de valeur constitutionnelle, impose que l'ensemble des salariés d'une entreprise soit représenté par un comité social et économique d'établissement, lorsque plusieurs établissements sont retenus ; qu'en l'espèce, la société GEMS soutenait que le découpage de l'entreprise en établissements distincts ne permettait pas d'assurer la représentation de tous les salariés de l'entreprise, certains salariés ne relevant pas des activités entrant dans le périmètre des trois établissements définis par la Direccte ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il y était invité, si tous les salariés de l'entreprise entraient dans le périmètre des établissements retenus, le tribunal d'instance a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2313-4 et L. 2313-5 du code du travail ;

7. ALORS QUE le périmètre des établissements distincts doit présenter une certaine stabilité pour permettre au comité social et économique d'établissement de fonctionner normalement et d'exercer correctement ses missions pendant la durée du mandat de ses membres ; qu'en l'espèce, pour contester la décision de la Direccte, la société GEMS soutenait encore que le périmètre des trois pôles ne présente aucune stabilité, à tel point que le découpage retenu ne correspondait plus à l'organisation du service ressources humaines à la date de la décision de la Direccte ; qu'en s'abstenant de rechercher si les trois pôles retenus par la Direccte présentaient une stabilité suffisante pour justifier la mise en place de comités sociaux et économiques d'établissement, le tribunal d'instance a privé de plus fort sa décision de base légale au regard de l'article L. 2313-4 et L. 2313-5 du code du travail.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.