4 January 2006
Cour de cassation
Pourvoi n° 05-80.960

Chambre criminelle

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

AGRESSIONS SEXUELLES - autres agressions sexuelles - exhibition sexuelle - eléments constitutifs - elément matériel - nudité de la partie du corps exhibée

Ne caractérise pas le délit d'exhibition sexuelle l'arrêt d'une cour d'appel qui se borne à relever que le prévenu a fait un geste obscène en direction d'un tiers en prenant son sexe avec ses mains à travers son short dès lors que l'infraction suppose que le corps ou la partie du corps volontairement exposé à la vue d'autrui soit ou paraisse dénudé.

Texte de la décision

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre janvier deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;


Statuant sur le pourvoi formé par :


- X... Jean-Pierre,


contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 6 janvier 2005, qui, pour violences volontaires et exhibition sexuelle, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;


Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 222-32 du Code pénal, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;


"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du 20 mars 2003 aux termes duquel le tribunal de grande instance d'Epinal a reconnu Jean-Pierre X... coupable de violences volontaires avec arme et d'exhibition sexuelle, l'a condamné à une peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis et, sur l'action civile, l'a condamné à versé la somme de 600 euros à Régis Y... et la somme de 400 euros à Mme Z..., épouse Y... ;


"aux motifs qu'il résulte tant des déclarations de Régis Y... que de son amie ainsi que des témoignages de MM. A... et B... qui ont assisté aux faits que le 30 juin 2002 alors qu'il était occupé à relever une ligne téléphonique afin de pouvoir passer avec ses engins agricoles, Régis Y... était agressé par Jean-Pierre X... qui s'est avancé vers lui, s'est rué sur lui, menaçant, avec une grosse perche en bois dont Régis Y..., esquivant un premier coup qu'il lui a porté, a attrapé une extrémité pour le désarmer puis l'a lâchée, ce qui a déséquilibré son adversaire et l'a fait tomber à la renverse ; que dans sa chute Jean-Pierre X... s'est blessé ;


qu'après s'être relevé, il est revenu à la charge vers Régis Y... pour lui porter un second coup, que celui-ci s'est emparé de la perche et l'a jetée dans le verger ; que les deux témoins sont formels et affirment que Régis Y... s'est seulement défendu face aux violences commises par Jean-Pierre X... et ne l'a pas agressé ;


(que) les photos prises par l'amie de la victime confirment le déroulement des faits, l'attitude menaçante et violente de Jean-Pierre X... qui tenait entre ses mains un grand morceau de bois dont il ne peut justifier l'usage au motif que Régis Y... avait pour sa part une bêche dont il n'est nullement démontré qu'il l'ait utilisée au cours de l'altercation ; (que) Jean-Pierre X... qui conteste avoir insulté Mme Z... lorsqu'elle a photographié la scène, reconnaît avoir fait en sa direction un geste obscène en mettant sa main sur ses parties génitales qui caractérise une exhibition sexuelle et ce, en réaction aux photographies prises contre son gré ; (que) la preuve que cet incident aurait été orchestré contre lui par la victime et son amie avec les témoins n'est pas établie, étant précisé que si un des deux témoins est un voisin avec lequel le prévenu a des relations conflictuelles, le second, plombier, précise qu'il était venu effectuer une réparation chez celui-ci ; qu'il se trouvait donc là fortuitement et rien ne permet de mettre en doute ses déclarations ; (que) au vu de ces éléments, malgré les dénégations de Jean-Pierre X... qui se présente à tort comme une victime, c'est par une juste appréciation et des motifs pertinents que la Cour adopte que le tribunal l'a déclaré coupable des faits qui lui sont reprochés ; la déclaration de culpabilité sera confirmée " ;


"alors que, premièrement, l'exhibition sexuelle qui nécessairement implique que le prévenu expose des parties sexuelles ne peut être déduite, par conséquent, de gestes seulement obscènes ;


qu'en qualifiant d'exhibition sexuelle, le geste obscène du prévenu, qui a mis sa main sur ses parties génitales à travers son short, sans se dévêtir, la cour d'appel de Nancy a violé l'article 222-32 du Code pénal ;


"alors que, deuxièmement, les deux infractions étant distinctes, et des condamnations civiles ayant été prononcées, à raison des deux infractions, l'erreur commise sur le terrain de l'exhibition sexuelles justifie une cassation totale" ;


Vu l'article 222-32 du Code pénal, ensemble l'article 111-4 du Code pénal ;


Attendu que le délit d'exhibition sexuelle suppose que le corps ou la partie du corps volontairement exposé à la vue d'autrui soit ou paraisse dénudé ;


Attendu que, pour déclarer Jean-Pierre X... coupable d'exhibition sexuelle, l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés, relève que le prévenu a fait un geste obscène en direction d'une des personnes présentes en prenant son sexe entre ses mains à travers son short ;


Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;


D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,


CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nancy, en date du 6 janvier 2005, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;


RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Colmar, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;


ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nancy, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;


Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;


Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Le Gall, Mme Chanet, M. Pelletier, Mme Ponroy, MM. Arnould, Corneloup conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron conseillers référendaires ;


Avocat général : M. Finielz ;


Greffier de chambre : Mme Lambert ;


En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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