21 January 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-40.061

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C300166

Titres et sommaires

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique - Article L. 323-3 - Principe d'égalité - Liberté d'entreprendre - Caractère sérieux - Renvoi au Conseil constitutionnel

Texte de la décision

CIV. 3

COUR DE CASSATION



MF


______________________

QUESTIONS PRIORITAIRES
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 21 janvier 2021




RENVOI


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 166 FS-P

Affaires n° G 20-40.061
et J 20-40.062 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 JANVIER 2021

La juridiction de l'expropriation des Bouches-du-Rhône siégeant au tribunal judiciaire de Marseille a transmis à la Cour de cassation, suite aux jugements rendus le 21 octobre 2020 (RG : 20/00045 et 20/00057), les questions prioritaires de constitutionnalité, reçues le 26 octobre 2020, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

1°/ la société [...], dont le siège est [...] ,

2°/ la société Somaré (Société de maintenance de réparation de matériel maritime), dont le siège est [...] ,

D'autre part,

l'Etablissement public d'aménagement Euroméditerranée - EPAEM, dont le siège est [...] ,

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la Société de maintenance de réparation de matériel maritime et de la société [...], de Me Le Prado, avocat de l'Etablissement public d'aménagement Euroméditerranée, l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 janvier 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire apporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Boyer, Mme Abgrall, M. Jobert, conseillers, Mmes Georget, Renard, M. Zedda, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Jonction

1. En raison de leur connexité, les questions prioritaires de constitutionnalité n° J 20-40.062 et G 20-40.061 sont jointes.

Faits et procédure

2. Après avoir acquis, par voie de cessions amiables, les parcelles nécessaires à la réalisation d'un projet qui avait préalablement été déclaré d'utilité publique, l'établissement public d'aménagement Euroméditerranée (l'EPAEM) a saisi le juge de l'expropriation aux fins de fixation des indemnités d'éviction revenant à la société [...] et à la Société de maintenance de réparation de matériel maritime, locataires des biens en cause.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

3. Par jugements du 21 octobre 2020, la juridiction de l'expropriation des Bouches-du-Rhône a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article L. 323-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique en ce qu'elles ne s'appliquent pas aux locataires occupant un bien ayant fait l'objet d'un transfert de propriété par voie de cession amiable au profit de l'expropriant, portent-t-elles atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment le principe d'égalité devant la loi et la liberté d'entreprendre ? ».

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

4. La disposition contestée est applicable au litige, qui porte sur la fixation d'une indemnité d'éviction par le juge de l'expropriation au profit d'un locataire commerçant dont le relogement ou la réinstallation n'est pas assurée par l'expropriant.

5. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

6. La question posée présente un caractère sérieux en ce que cette disposition, qui permet aux locataires ou preneurs commerçants, artisans, industriels ou agricoles d'un bien exproprié d'obtenir un acompte, représentant la moitié du montant des offres de l'expropriant, est réservée aux locataires d'un bien ayant fait l'objet d'une ordonnance d'expropriation, à l'exclusion des locataires d'un bien ayant donné lieu à une cession amiable consentie à l'expropriant après déclaration d'utilité publique, est susceptible de porter atteinte aux principes d'égalité devant la loi et de la liberté d'entreprendre.

7. En conséquence, il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille vingt et un.

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