14 March 2019
Cour d'appel de Paris
RG n° 17/00941

Pôle 2 - Chambre 2

Texte de la décision

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 2 - Chambre 2





ARRÊT DU 14 MARS 2019





(n° 2019 - 83, 14 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00941 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B2MVW





Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Décembre 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/01905








APPELANTS





Monsieur I... X...


Né le [...] à MOULAY BOUAZZA (MAROC)


[...]


[...]








Représenté et assisté à l'audience de Me Emilie DUMEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0085








La SAS INGENISIS Systèmes d'information, prise en la personne de son représentant légal


N° SIRET : 439 564 758 00019


[...]


[...]





ET





SCP R... D... L... Q... (BTSG), prise en la personne de Maître C... P... agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS INGENISIS Systèmes d'information


[...]


[...]








Représentés et assistés à l'audience de Me Caroline MENGUY de la SELEURL MENGUY AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0152











INTIMES





Monsieur I... X...


Chez Mme E... - [...]


[...]








Représenté par Me Emilie DUMEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0085





L'URSSAF ILE DE FRANCE - UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES ILE-DE-FRANCE , agissant poursuites et diligences de son directeur habilité en vertu des dispositions de l'article L122-1 du Code de la Sécurité Sociale


[...]


[...]








Représentée et assistée à l'audience de Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065














COMPOSITION DE LA COUR :





L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2019, en audience publique, devant la cour composée de :


Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre


Madame Patricia LEFEVRE, conseillère


Madame Marie-José BOU, conseillère





qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-José BOU conseillère dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.











Greffière, lors des débats : Madame Fatima-Zohra AMARA














ARRÊT :


- contradictoire





- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.





- signé par Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.





**************


La société INGENISIS Systèmes d'information, ci-après la société Ingenisis, créée le 8 octobre 2001, dont le président était M. I... X..., avait pour activité le conseil en systèmes d'information et prestations de service.





Sur assignation délivrée le 17 janvier 2012 à la requête de l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, ci-après l'URSSAF, le tribunal de commerce de Paris, a, par jugement réputé contradictoire du 5 avril 2012, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à son encontre.





La société Ingenisis a relevé appel de cette décision.





Par ordonnance en date du 29 mai 2012 du délégué du premier président de la cour d'appel de Paris, l'exécution provisoire du jugement de liquidation judiciaire a été arrêtée.





Par arrêt du 8 novembre 2012, la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement et débouté l'URSSAF de sa demande d'ouverture d'une procédure collective.





Le 16 janvier 2014, la société Ingenisis a attrait l'URSSAF Ile de France en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Paris.





Par jugement du 13 février 2014, à la suite d'une déclaration de cessation des paiements déposée par l'entreprise, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une nouvelle procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société Ingenisis en désignant la SELAFA MJA en la personne de Maître F... aux fonctions de mandataire liquidateur.





La SELAFA MJA ès qualités est intervenue volontairement à l'instance, de même que M. X....





Reprochant à l'URSSAF diverses fautes, la SCP BTSG, prise en la personne de Maître P..., désignée en qualité de mandataire liquidateur par jugement du 25 juin 2015, a demandé au tribunal de déclarer l'URSSAF responsable des préjudices financiers de la société Ingenisis, caractérisés par des gains manqués et des pertes de chance au titre de contrats en cours et à venir, et de condamner l'URSSAF à l'indemniser à ces titres.





M. X... a également mis en cause la responsabilité de l'URSSAF et sollicité l'allocation de dommages et intérêts en réparation de son propre préjudice.





Par jugement contradictoire du 15 décembre 2016, le tribunal a :


- dit recevables les conclusions d'intervention volontaire signifiées pour la SCP BTSG ès qualités et M. X... ;


- débouté la SCP BTSG ès qualités et M. X... de l'intégralité de leurs demandes ;


- condamné la SCP BTSG ès qualités et M. X... chacun à payer la somme de 500 euros à l'URSSAF au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;


- condamné la SCP BTSG ès qualités et M. X... in solidum aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





La SCP BTSG ès qualités a relevé appel de ce jugement le 11 janvier 2017 et M. X... en a interjeté appel le 12 janvier 2017.






Les procédures ont été jointes le 10 mai 2017.






Par conclusions récapitulatives notifiées le 14 décembre 2018 par voie électronique, la SCP BTSG ès qualités demande à la cour, au visa des articles 1382 (nouveau 1240), 32-1, 1154 (nouveau 1343-2), 1235 (nouveau 1302), 1376 (nouveau 1302-1) et 1153-1 (nouveau 1231-7), 1351 (nouveau 1355), 1356 (1383-2), 1315 (nouveau 1353), 1253 (nouveau 1342-10), et 1256 (nouveau 1342-10) du code civil, 4, 6, 9, 31, 122, et 480 du code de procédure civile, R. 131-4 du code monétaire et financier, L. 622-6, L. 641-4, L. 641-9, L. 640-1, R. 640-1, R. 631-2, L. 631-1, L. 631-2, L. 631-3, L. 641-3, L. 622-27, L. 641-13 du code de commerce, R. 243-21, R. 242-5, L. 244-2, L. 243-5, L. 243-15 et L. 243-14 du code de la sécurité sociale, des circulaires n° 48 bis SS-imputation des paiements du 2 mai 1957, DSS/5c n°2009-83 du 29 mars 2009, n° DSS/AAF/A1-95.14, 24 février 1995 : BOSS n° 95-14, p. 159 s, n°DSS/SD5C/2012/186 du 16 novembre 2012 et du rapport parlementaire sur les relations entre URSSAF et les entreprises, et sous divers dire et juger qui ne sont que la reprise de ses moyens, de :


- déclarer la SCP BTSG ès qualités recevable et bien-fondée en son appel et ses demandes ;


- réformer le jugement en tous points ;


statuant de nouveau,


- débouter l'URSSAF de l'ensemble de ses demandes ;


- déclarer l'URSSAF entièrement responsable de l'ensemble des préjudices financiers et économiques subis par la société Ingenisis, caractérisés par des gains manqués et des pertes de chances au titre des divers contrats en cours et à venir ;


- condamner l'URSSAF à payer les sommes suivantes :


o pertes éprouvées coûts AGS dus aux licenciements : 528 466,15 euros ;


o pertes éprouvées coûts URSSAF et retraites dus aux licenciements : 136 741 euros ;


o pertes éprouvées investissement : 2 455 153 euros ;


o contrat PMO Target2 Securities :


o le manque à gagner est de 11 720 euros ;


o la perte de chance est de 717 264 euros ;


o contrat MOA T2 SEMOP :


o le manque à gagner est de 12 672 euros ;


o la perte de chance est de 216 691 euros ;


o contrat MOA Target2 Securities (T2S) :


o la perte de chance est de 542 138 euros ;


o contrat1 MOE Target 2 Securities : T2S :


o le manque à gagner est de 14 232 euros ;


o la perte de chance est de 648 979 euros ;


o contrat2 MOE Target 2 Securities : T2S :


o le manque à gagner est de 36 712 euros ;


o la perte de chance est de 627 775 euros ;


o contrat MOE Target 2 Microfocus-Cobol: T2 :


o le manque à gagner est de 15 033 euros ;


o la perte de chance est de 685 504 euros ;


o contrat MS20120027


o le manque à gagner est de 9 102 euros ;


o contrat MS20120026 :


o le manque à gagner est de 38 584 euros ;


o contrat MS2010279 :


o le manque à gagner est de 51 048 euros ;


o contrat PI20110083D :


o le manque à gagner est de 4 682 euros ;


o perte de chance : liée aux prestations «maîtrise d''uvre SWIFT» Banque de France :


675 347,4 euros


o perte de chance liée aux prestations «maîtrise d''uvre Swift» CDC : 144 717,3 euros ;


o contrats REFIG :


o la perte de chance de maintenance est de 1 824 000 euros ;


o la perte de chance de revente du savoir est 2 850 000 euros ;


o perte de chance opportunités :


o SEPA Banque de France et GCE-paiements : 4 248 000 euros ;


o EBICS Banque de France : 285 000 euros ;


o Orange et ISO 20022 : en cours d'évaluation


o perte appels d'offres avec référencement-2012-2013 : 577 320,62 euros ;


o perte appels d'offres hors référencement-2012-2013 :


o activité T2S-T2-Microfocus : 594 755,1 euros ;


o activités courantes transversales : 925 546,48 euros ;


o perte référencements 2012-2013 : BDF2014002 et BDF2013032 : 494 760 euros ;


o perte référencements 2012-2013 : référencement BDF2013001 et BDF2014011: 321 594 euros;


o perte référencements 2012-2013 : référencement BDF2013033-AE20130019, BDF2012045, BDF2013022-AE20130015, BDF2013057, BDF2013024-AE20130016, BDF2013031 : 1 377 990 euros ;


o perte référencements 2012-2013: référencement BDF2013013 : 302 431 euros ;


o perte référencements 2012-2013: référencement BDF2012038 et BDF2013021 : pas d'analyse à ce jour ;


o perte de clientèle : 1 800 000 euros ;


o perte subie au cours de l'année 2010 : 343 945,6 euros (159 258,00 + 184 687,6) ;


o répétition de l'indu pour 3 804,12 euros concernant les imputations ;


o répétition de l'indu pour 2 287,14 euros pour les paiements non dus suite à la liquidation judiciaire;


- juger que l'ensemble des sommes sollicitées par la société Ingenisis représentée par Maître P... ès qualités sera assorti des intérêts légaux à compter de la date du jugement du 5 avril 2012 ;


- ordonner la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1153-1 du code civil ;


- juger que les condamnations prononcées par la cour ne doivent pas être assorties à la TVA ;


- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant tout recours ;


- condamner l'URSSAF à verser à la société Ingenisis représentée par la société BSTG, la somme de 35 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, en application de l'article 699 du code de procédure civile.





Par conclusions récapitulatives notifiées le 14 décembre 2018 par voie électronique, M. X... demande à la cour, au visa des articles, circulaires et rapport précités et sous divers dire et juger qui ne sont que la reprise de ses moyens, de :


- déclarer M. X... recevable et bien fondé en son appel ;


- infirmer le jugement ;


- débouter l'intimée de toutes demandes ;


- donner acte à M. X... qu'il fait siennes les pièces et conclusions de la SCP BTSG ès qualités ;


- condamner l'URSSAF à payer à M. X... les sommes de :


* 765 652 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, ainsi que la capitalisation des intérêts légaux à compter du 1er janvier 2013, sur le fondement de l'article 1153-1 du code civil ;


* 2 984 258,93 euros au titre de la perte de chance de maintenir son salaire par application du barème de capitalisation de la Gazette du Palais 2018, ou subsidiairement 2 786 355 euros a minima pour treize années de rémunération annuelle moyenne, charges comprises ;


* 300 000 euros au titre du préjudice moral subi ;


* 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.





Par conclusions notifiées le 12 juin 2017 par voie électronique, l'URSSAF demande à la cour de :


- déclarer mal fondés les appels ;


- infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevables les conclusions d'intervention volontaire signifiées par la SCP BTSG ès qualités ;


statuant à nouveau sur ce point :


- déclarer irrecevables les conclusions d'intervention volontaire signifiées par la SCP BTSG ès qualités ;


- confirmer le jugement pour le surplus ;


- débouter toutes les parties de leurs demandes ;


- condamner solidairement la SCP BTSG ès qualités et M. X... à payer les sommes de :


* 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;


* 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens d'instance, recouvrés par Maître Frédérique ETEVENARD, qui seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.





L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2019.









MOTIFS DE LA DÉCISION





Sur l'irrecevabilité des conclusions d'intervention volontaire de la SCP BTSG ès qualités





La SCP BTSG ès qualités soutient la recevabilité de ses conclusions d'intervention volontaire. Elle fait valoir que le rapport à justice de la SELAFA MJA quant à un plan de redressement ne la lie pas au regard de l'instance en cours.





L'URSSAF soulève l'irrecevabilité des conclusions d'intervention volontaire de la SCP BTSG ès qualités au motif que cette intervention volontaire est en contradiction avec les écritures déposées le 17 septembre 2012 par la SELAFA MJA ès qualités devant la cour, dans le cadre de l'appel du premier jugement de liquidation judiciaire.





***


Il ressort des pièces versées aux débats par l'intimée que lors du recours formé contre le jugement du 5 avril 2012 ayant ouvert une première procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Ingenisis, la SELAFA MJA, désignée par ce jugement en qualité de mandataire liquidateur, a déposé des conclusions par lesquelles elle a déclaré être réservée sur la demande d'infirmation dudit jugement formée par la société Ingenisis et s'en est rapportée à justice sur le mérite de cette demande. La position ainsi prise par la SELAFA MJA ès qualités était celle d'un simple rapport à justice, non d'une opposition expresse à la demande d'infirmation du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire. En toute hypothèse, cette position a été adoptée dans le cadre du premier mandat de liquidateur judiciaire confié à la SELAFA MJA, au titre de l'instance relative à la première procédure collective affectant la société Ingenisis, soit une procédure distincte de celle relative à la mise en cause de la responsabilité civile de l'URSSAF ayant donné lieu au jugement entrepris dans laquelle la SELAFA MJA puis la SCP BTSG sont intervenues au titre d'un autre mandat confié à elles dans le cadre de la seconde procédure collective. Il ne saurait dès lors en résulter une fin de non-recevoir.





Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit recevables les conclusions d'intervention volontaire de la SCP BTSG ès qualités.





Sur la responsabilité de l'URSSAF et les demandes de dommages et intérêts





La SCP BTSG ès qualités soutient que l'URSSAF a engagé sa responsabilité à plusieurs titres.





En premier lieu, elle lui reproche des fautes dans le traitement des demandes d'échéanciers. Elle lui fait grief d'un défaut de réponse aux demandes de sursis à poursuites et d'échéanciers dans les délais impartis, ayant entraîné un défaut de remise des certificats de vigilance indispensables à son activité pour répondre à des appels d'offre publique, alors que la société Ingenisis était à jour du paiement de ses cotisations salariales à chaque sollicitation. Elle invoque une conduite disproportionnée de l'URSSAF dans l'appréciation de ses demandes, au regard des montants de cotisations annuelles et de la dette en jeu. Elle prétend que le rejet de la proposition faite le 25 octobre 2010 par la société Ingenisis constitue un abus de droit caractérisé. Elle impute à l'URSSAF d'avoir trahi les légitimes attentes de la société Ingenisis suscitées par elle en s'engageant à instruire le dossier aussitôt que les charges sociales seraient réglées, puis en ne respectant pas ses engagements. Elle soutient une violation par l'URSSAF des règles d'imputation des paiements.





En deuxième lieu, elle reproche à l'URSSAF des fautes liées à la première mise en liquidation judiciaire, non justifiée et abusive. Elle fait valoir que l'assignation a été délivrée pour une dette ni certaine, ni exigible, un paiement partiel ayant notamment été réalisé une semaine avant l'assignation. Elle invoque l'intention de nuire, à tout le moins la légèreté blâmable de l'URSSAF qui a dissimulé ce paiement ainsi que celui de 140 000 euros réalisé un mois avant l'audience du 13 mars 2012 et trompé le tribunal de commerce dès lors que la créance restante était payable grâce à l'actif disponible et qu'un redressement judiciaire aurait pu en tout cas être envisagé. Elle argue de l'aveu judiciaire de l'URSSAF qui, dans ses conclusions, a reconnu que sa dette, à la date du jugement d'ouverture, était bien moindre que celle alléguée lors de l'audience devant la juridiction commerciale. Elle fait aussi grief à l'URSSAF d'avoir dissimulé les paiements effectués depuis septembre 2011, conduisant le tribunal de commerce à conclure à l'absence d'activité, et de n'avoir jamais démontré l'état de cessation des paiements.





En troisième lieu, elle reproche à l'URSSAF d'avoir, à deux reprises, menacé la société Ingenisis d'assignations en liquidation judiciaire, comme moyen de pression en vue de se faire payer.





En quatrième lieu, elle lui reproche, durant la période post-liquidation judiciaire, le refus de remise des pénalités, majorations de retard et frais de poursuite. Elle lui fait aussi grief d'avoir, devant la cour d'appel, déclaré une créance de 637 770,96 euros, sans titre exécutoire, ni contrainte, tentant de tromper la cour, et de s'être abstenue de mauvaise foi de se présenter ou d'être représentée devant cette juridiction. Elle lui impute également un refus de la recevoir pour se prononcer sur le montant de sa dette en juillet 2012, et l'absence de réponse à la proposition de la société Ingenisis de lui régler définitivement sa créance en octobre 2012.





Elle reproche en cinquième lieu à l'URSSAF des fautes liées à la phase post-infirmation du jugement de liquidation judiciaire. Elle lui fait grief d'avoir refusé de lui délivrer les certificats de vigilance en dépit du règlement de toutes les cotisations dues et de procéder aux remises sur les majorations, pénalités et frais de poursuite. Elle se plaint d'un prélèvement d'un montant de 14 559 euros consécutif à un redressement sur le contrôle des cotisations de transport. Elle invoque des réponses tardives de l'URSSAF à ses demandes et l'absence totale de réponse à certaines de ses sollicitations.





Elle soutient l'existence d'un lien de causalité direct entre les fautes de l'URSSAF et les préjudices invoqués. Elle prétend que du fait des agissements de l'URSSAF en 2010, la société Ingenisis a perdu un chiffre d'affaires important et que son placement en liquidation judiciaire a porté atteinte à la continuité de son activité, laquelle atteinte a été exacerbée par le refus de délivrance des certificats de vigilance réclamés.





Elle invoque avoir été privée de la poursuite de relations d'affaires et de la conclusion de nouveaux contrats, distinguant pour chaque contrat ou prestation les gains manqués et/ou la perte de chance. Elle se plaint également de l'impossibilité d'exploiter la clientèle à l'avenir, des investissements perdus et des coûts des licenciements et des charges supportés en pure perte.





M. X... développe pour l'essentiel les mêmes manquements à l'encontre de l'URSSAF. Il se prévaut d'un lien de causalité direct entre les agissements de l'URSSAF et le préjudice qu'il a personnellement éprouvé. Il avance sa perte de rémunération depuis 2013 et de toute protection sociale depuis la mise en liquidation judiciaire de la société. Il argue d'une perte de gains professionnels futurs jusqu'à sa retraite prévue à 67 ans, au motif que la liquidation judiciaire a jeté le discrédit à son égard, l'empêchant de retrouver un travail et un salaire équivalents et de monter un nouveau projet du même type. Il affirme avoir subi un préjudice moral très important du fait de cette liquidation.





L'URSSAF conteste l'existence de fautes engageant sa responsabilité. Elle fait valoir que l'infirmation du jugement du 5 avril 2012 ne caractérise pas sa faute. Elle soutient qu'à la date où le tribunal de commerce a statué, la société Ingenisis était en état de cessation des paiements, arguant d'une somme due à son égard s'élevant alors à 127 323,24 euros et de nombreuses diligences antérieures pour parvenir au paiement de sa créance de manière amiable. Elle relève que l'infirmation de ce jugement résulte de moratoires obtenus après, auprès de différents créanciers, et que le second jugement de liquidation a d'ailleurs fixé la date de cessation des paiements au 13 août 2012. Elle prétend avoir toujours répondu aux lettres de la société Ingenisis et soutient que les demandes d'attestation ainsi que de remise des majorations de retard étaient irrecevables, faute de paiement de la part salariale des cotisations, ajoutant que la mise en place d'un échéancier n'est pas une obligation pour l'URSSAF mais relève du pouvoir d'appréciation de son directeur. Elle nie toute menace.





Elle soutient l'absence de justification du lien de causalité entre ses prétendues fautes et le préjudice.





Elle conteste enfin les préjudices allégués. Elle fait notamment valoir que l'absence de poursuite des contrats en cours résulte de la décision du liquidateur de licencier immédiatement l'ensemble des salariés et que les sommes sollicitées sont disproportionnées au regard du résultat de la société durant les dernières années.





***


- sur les fautes antérieures à l'assignation en liquidation judiciaire





Il résulte de l'article R. 243-21 du code de la sécurité sociale que le directeur de l'organisme chargé du recouvrement des cotisations a la possibilité, après règlement intégral des cotisations ouvrières, d'accorder des sursis à poursuites pour le règlement des cotisations patronales, des pénalités et majorations de retard et que le sursis doit être assorti de garanties du débiteur appréciées par le directeur.





Il résulte en outre de l'article L. 243-15 du même code, dans sa version applicable, que l'attestation de vigilance est délivrée dès lors que l'employeur acquitte les cotisations et contributions à leur date d'exigibilité et, le cas échéant, a souscrit et respecte un plan d'apurement des cotisations et contributions restant dues ou conteste leur montant par recours contentieux.





La circulaire du 23 mars 2009 relative au traitement des demandes de délais de paiement par les URSSAF prévoit que la branche du recouvrement doit ainsi s'engager à répondre dans un délai maximum de 3 jours ouvrables à toute demande formulée par courriel, si celle-ci comporte bien les éléments nécessaires à son instruction. Un délai maximum légèrement plus long (5 jours) pourra être fixé pour les demandes de délai formulées par téléphone.





Les appelants prétendent d'abord que le représentant de la société Ingenisis se serait déplacé le 29 mars 2010 au centre d'accueil de Paris nord pour solliciter un échéancier, sans obtenir de réponse malgré le paiement des cotisations salariales par chèque encaissé au début du mois d'avril 2010. Cependant aucun élément n'atteste d'une telle démarche hormis une lettre de la société Ingenisis datée du 10 avril 2010 qui y fait référence, mais qui est insuffisante à la prouver. A la date du 29 mars 2010, il existait de plus un arriéré de cotisations salariales impayées de 32 874 euros selon le relevé produit. Aucun manquement de l'URSSAF n'existe à ce stade.





Il est prétendu que la société Ingenisis aurait renouvelé sa demande le 10 avril 2010 par lettre, sans obtenir de réponse avant le 14 mai 2010. Toutefois, rien ne justifie de l'envoi et de la réception de ce courrier, l'URSSAF ayant seulement répondu à une demande datée du 11 mai 2010. Si la somme précitée de 32 874 euros a été payée au début du mois d'avril 2010, l'URSSAF a, de manière fondée, par sa lettre du 14 mai 2010, dans un délai de seulement trois jours après la demande, opposé à celle-ci une irrecevabilité dès lors que dans l'intervalle, la part salariale du mois de mars 2010 était devenue exigible le 15 avril 2010, sans être réglée. L'URSSAF n'a pas davantage commis de manquement à ce stade.





Les appelants reprochent également à l'URSSAF une réponse négative en date du 19 août 2010, en dépit du paiement des cotisations salariales. Par lettre datée du 12 août 2010, évoquant la remise d'un chèque en date du même jour de 33 164,40 euros pour les cotisations salariales des mois de mars et mai 2010 et les frais de dossier, une nouvelle demande d'échéancier a été faite par la société Ingenisis. Dans sa lettre du 19 août 2010, l'URSSAF a répondu que la demande du 17 août 2010 était irrecevable en l'absence de paiement des éléments précités. La SCP BTSG ès qualités et M. X... objectent que dans un courrier ultérieur du 21 septembre 2010, l'URSSAF fait état du versement effectué le 12 août 2010 pour 33 164,40 euros. Cependant, rien ne justifie que le chèque ait été déposé le jour même de son établissement à l'URSSAF, le tampon qui y figure ne portant aucun signe distinctif de cet organisme. En outre, le montant d'un chèque ne peut matériellement être payé le jour même de sa remise au créancier. La lettre du 21 septembre 2010 établit seulement que le chèque du 12 août 2010 a été honoré mais, faute pour les appelants de démontrer qu'à la date du 19 août 2010, l'URSSAF avait déjà reçu le chèque et l'assurance de son encaissement, il n'est pas non plus justifié d'une faute au titre de sa réponse du 19 août 2010, laquelle n'apparaît pas non plus tardive, les dates d'envoi et de réception de la lettre du 12 août 2010 n'étant pas justifiées. Au surplus, à supposer que le paiement ait déjà eu lieu au 19 août 2010, il rendait seulement recevable la demande mais n'obligeait pas le directeur de l'URSSAF à l'accueillir. Il résulte du relevé au 12 août 2010 que sa créance était, hors part salariale et frais, d'environ 170 000 euros, soit un montant particulièrement conséquent, et que la demande d'échéancier formulée dans la lettre du 12 août 2010 n'était assortie d'aucune garantie, de sorte que l'URSSAF n'avait pas de raison de faire droit à un sursis. L'existence d'un préjudice lié à une éventuelle faute dans la prise en compte du chèque n'est, ce faisant, pas établie.


Les appelants se plaignent encore du refus de l'URSSAF le 29 octobre 2010. Par lettre datée du 25 octobre 2010, la société Ingenisis a réitéré une demande d'échéancier à laquelle l'URSSAF a à nouveau opposé une irrecevabilité, dans une lettre du 29 octobre 2010 au motif de l'absence de paiement de la part salariale des mois d'août et septembre 2010 à hauteur de 24 315 euros et des frais. Or, il n'est pas justifié qu'à cette date, l'intégralité de cette somme était payée. En effet, les règlements invoqués par les appelants, datant pour le plus récent du 14 octobre 2010, n'ont pu en tout état de cause couvrir les cotisations salariales du mois de septembre 2010 dès lors qu'il résulte des explications des appelants que l'échéance du mois n'était exigible que le 15 du mois n + 1. Par ailleurs, si la société Ingenisis a effectué un virement de 11 862,33 euros le 27 octobre 2010 au profit de l'URSSAF, elle a précisé qu'il visait les cotisations salariales d'août 2010, si bien qu'à la date de la réponse, le 29 octobre 2010, il subsistait des cotisations salariales impayées pour le mois de septembre 2010. Ainsi, la décision d'irrecevabilité du 29 octobre 2010, prise sans tarder, est fondée et ne révèle aucun manquement de l'URSSAF.





La SCP BTSG ès qualités se plaint encore que l'URSSAF ait répondu à la nouvelle demande du 29 octobre 2010 par une irrecevabilité, tardivement et de manière erronée, dès lors que la société Ingenisis était à jour de la part salariale compte tenu des saisies attribution opérées précédemment qui auraient dû être prioritairement affectées aux cotisations salariales. Mais il n'est pas justifié de la date d'envoi et de celle de réception de la lettre datée du 29 octobre 2010 de la société Ingenisis par l'URSSAF, laquelle vise dans sa réponse une demande du 9 novembre 2010, de sorte qu'aucun retard n'est établi. En outre, ne provenant pas d'une exécution volontaire par le débiteur, les sommes obtenues par l'URSSAF au moyen des saisies attribution réalisées les 1er et 14 octobre 2010 ne sont pas soumises aux règles d'imputation des paiements prévues à l'article 1256 du code civil dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 si bien qu'il ne saurait être reproché à l'URSSAF de ne pas les avoir affecté en priorité aux cotisations salariales. La décision d'irrecevabilité du 12 novembre 2010 fondée sur l'absence de paiement de la part salariale à hauteur de 12 452,67 euros ne saurait dès lors être critiquée.





Les appelants se plaignent également du retard et des pressions avec lesquelles l'URSSAF a répondu à la demande d'échéancier du 17 décembre 2010, laquelle faisait état et justifiait du paiement de la totalité des charges salariales. Mais il n'est pas justifié de la date d'envoi et de celle de réception de la lettre datée du 17 décembre 2010 de la société Ingenisis par l'URSSAF, laquelle vise dans sa réponse une demande du 22 décembre 2010. Par lettre du 29 décembre 2010, l'URSSAF, joignant un relevé mentionnant une dette totale de 213 394,91 euros, a indiqué que le dossier était en cours d'étude, invitant le débiteur à effectuer les règlements proposés. Cette réponse est rapide, étant souligné que la circulaire invoquée est inapplicable s'agissant d'une demande par lettre. L'étude du dossier évoquée dans la réponse ne caractérise aucun manquement de la part de l'URSSAF mais apparaît au contraire légitime dès lors que la société Ingenisis connaissait des difficultés de paiement depuis de nombreux mois, avait une dette très élevée et ne faisait état d'aucune garantie dans sa demande. Le fait que l'URSSAF ait demandé au début du mois de janvier 2011 à la société Ingenisis de diminuer sa dette de charges patronales et ait attendu ce règlement ainsi que le paiement d'un redressement, de majorations et de l'échéance de décembre 2010, ce dont la société Ingenisis s'est acquittée le 18 janvier 2011 pour un montant total d'environ 120 000 euros et a justifié par lettre du 24 janvier 2011, pour donner son accord le 28 janvier 2011, est également légitime au regard de ces circonstances, l'URSSAF étant fondée à obtenir des garanties pour répondre favorablement et celles demandées n'apparaissant pas excessives.





Et il ne saurait être reproché à l'URSSAF d'avoir dénoncé, le 25 mai 2011, l'échéancier accordé dès lors qu'à cette date, le prélèvement correspondant à la deuxième échéance avait été rejeté.





L'URSSAF n'a ainsi commis aucune faute dans le traitement des demandes d'échéancier.





Les appelants n'établissent pas non plus de faute de l'URSSAF en raison d'un défaut de délivrance de l'attestation de vigilance dans la mesure où, avant le 28 janvier 2011, la société Ingenisis n'était pas à jour du paiement des cotisations et contributions, s'était vue légitimement opposer des réponses négatives à ses demandes d'échéancier ainsi que la nécessité d'une étude et de procéder à des paiements partiels à la suite de sa dernière demande et n'avait pas contesté le montant réclamé par recours contentieux.





Enfin, le grief d'une menace d'assignation en liquidation utilisée comme moyen de pression n'est pas fondé. Certes, dans une lettre du 21 septembre 2010 aux termes de laquelle elle a indiqué à la société Ingenisis ne pouvoir suspendre les poursuites à son égard, l'URSSAF l'a invitée à prendre rapidement contact avec elle afin d'éviter une assignation en liquidation judiciaire. Mais il résulte du relevé joint qu'à cette date, la dette de la société Ingenisis était de 225 048,12 euros et de la note interne de l'URSSAF qu'à cette époque, celle-ci avait saisi un huissier de justice aux fins de saisie attribution, avant assignation judiciaire. Il s'ensuit que l'URSSAF envisageait réellement une telle action, ce qui était légitime en cas de saisie infructueuse et en l'état d'une créance particulièrement élevée à l'égard d'une société qui éprouvait des difficultés de paiement non pas ponctuelles, mais récurrentes et graves depuis de très nombreux mois. L'évocation d'une assignation en liquidation judiciaire n'apparaît dans ces conditions pas abusive.





La demande d'indemnisation du dommage liée aux fautes antérieures à l'assignation du 17 janvier 2012, notamment la perte subie au cours de l'année 2010, doit être rejetée.





- sur les fautes liées à l'assignation en liquidation judiciaire et à la procédure devant le tribunal de commerce





L'exercice d'une action en justice constitue un droit et il appartient à celui qui se plaint d'un abus de caractériser et prouver les circonstances particulières ayant fait dégénérer en abus le droit d'ester en justice.





L'état de cessation des paiements est caractérisé par l'impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible. Les créances composant l'actif exigible doivent être certaines, liquides et exigibles.





L'infirmation du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire en date du 5 avril 2012 par l'arrêt du 8 novembre 2012 ne suffit pas à justifier de l'abus invoqué dès lors que, par l'effet dévolutif de l'appel, la cour a considéré qu'au jour où elle statuait, la société Ingenisis ne se trouvait pas en état de cessation des paiements, après avoir notamment relevé que des créanciers avaient accepté en septembre 2012, plusieurs mois après le jugement, des moratoires, réduisant d'autant le passif exigible.





Les montants de créances déclarés par l'URSSAF après le jugement d'ouverture du 5 avril 2012, notamment dans le cadre de la procédure d'appel contre ce jugement, ne sauraient être pris en compte dans la mesure où ils ne justifient pas des sommes dues à la date de l'assignation le 17 janvier 2012 et à celle de l'audience devant le tribunal de commerce le 13 mars 2012 ainsi que de l'attitude de l'URSSAF préalablement à la décision prise par cette juridiction.





Les appelants ne sauraient non plus caractériser l'abus invoqué à l'encontre de l'URSSAF par les erreurs qui auraient été commises par le tribunal de commerce dans son jugement du 5 avril 2012, ce d'autant moins qu'une large part des erreurs alléguées, portant notamment sur la situation passive globale de la société, ses actifs, notamment l'actif disponible ou sa trésorerie, et son activité, résulte du défaut de comparution devant le tribunal de commerce de la société Ingenisis, laquelle était seule à même d'apporter tous les renseignements et justificatifs utiles sur ces points. Or, ce manquement est exclusivement imputable à la société Ingenisis qui a été régulièrement assignée à l'adresse figurant sur l'extrait du registre du commerce.





Dans son assignation délivrée le 17 janvier 2012, l'URSSAF a fait état d'une créance certaine, liquide et exigible de 316 189,16 euros et invoqué le non-respect de l'échéancier accordé, un procès-verbal de carence et une saisie attribution inopérante. Elle a visé dans son bordereau de pièces des procès-verbaux de saisie attribution infructueux, signifiés les 25 août 2011 et 4 octobre 2011 à la Société Générale, et un procès-verbal de saisie vente du 8 décembre 2011 transformé en procès-verbal de carence.





Les appelants critiquent l'URSSAF pour avoir déclaré un tel montant, la SCP BTSG ès qualités faisant d'abord valoir qu'elle était toujours en attente d'une demande de remise du contrôle de transport de 2007-2008 de 14 559 euros. Mais il ne résulte pas du détail de la créance indiqué dans l'assignation que celle-ci ait inclus une somme au titre d'un redressement transport.





Les appelants reprochent aussi à l'URSSAF de ne pas avoir tenu compte de la somme de 43 276 euros payée par virement du 11 janvier 2012. Cependant, ce paiement ayant précédé de quelques jours seulement la délivrance par l'huissier de justice de l'assignation, nécessairement rédigée et transmise à l'huissier en amont, ce défaut de prise en considération ne caractérise ni une intention malveillante, ni même une légèreté blâmable. En outre, au regard de l'impayé subsistant malgré ce virement, de plus de 270 000 euros, de l'échéancier non respecté et des diverses mesures d'exécution demeurées vaines, le virement ne modifiait pas foncièrement la situation de la société Ingenisis aux yeux de l'URSSAF ou de la juridiction appelée à statuer qui, au vu des éléments susvisés, était fondée à considérer qu'en dépit de ce règlement très partiel, la société était en état de cessation des paiements et que son redressement était manifestement impossible. Le grief selon lequel l'URSSAF aurait abusivement assigné la société Ingenisis en liquidation judiciaire n'est pas justifié.





Les appelants lui reprochent par ailleurs de ne pas avoir avisé le tribunal de commerce de ce premier virement et de celui de 140 000 euros réalisé le 14 février 2012, attesté par l'extrait de compte bancaire versé aux débats et non contesté par l'URSSAF, laquelle indique d'ailleurs que sa créance avait baissé à la date du jugement pour s'établir à la somme de 127 323,24 euros, soit une différence par rapport à la créance initialement déclarée à peu près équivalente aux paiements susvisés. Le jugement du 5 avril 2012 ne mentionne pas que l'URSSAF aurait fait état de ces virements et de la réduction de sa créance lors de sa comparution, le 13 mars 2012, devant le tribunal de commerce, qui s'est fondé dans sa décision sur une créance de 316 189,16 euros. Mais les termes du jugement, très succincts et qui ne citent pas les déclarations du représentant de l'URSSAF à l'audience ou les conclusions déposées, sont insuffisants à établir la dissimulation ou l'omission imputée à l'URSSAF quant à ces virements et aux paiements faits antérieurement. De plus, rien n'établit qu'avisé de ceux-ci, le tribunal de commerce aurait pris une autre décision puisque le montant de la créance, soit 127 323,24 euros, demeurait très élevé, que l'URSSAF justifiait d'un échéancier non respecté ainsi que de plusieurs mesures d'exécution infructueuses et que le tribunal a notamment retenu dans sa décision ne disposer d'aucune information sur le chiffre d'affaires et la situation globale passive et active de la société du fait de l'absence et de la carence du débiteur. L'existence d'une faute de l'URSSAF lors de l'instance engagée par son assignation n'est pas prouvée, pas plus que d'un lien de causalité entre cette faute et le préjudice lié à la mise en liquidation judiciaire de la société Ingenisis.





- sur les fautes postérieures au jugement du 5 avril 2012





Il convient d'observer d'abord que les appelants ne justifient pas de la réalité d'un préjudice subi du fait des prétendues fautes commises par l'URSSAF entre le jugement de liquidation judiciaire et l'arrêt du 8 novembre 2012, tenant notamment au montant de la créance qu'elle aurait produit devant la cour par application d'une taxation non justifiée, et à son absence de comparution devant celle-ci. D'une part, les préjudices allégués résultent pour l'essentiel du placement en liquidation judiciaire de la société Ingenisis alors que la cour a précisément, nonobstant les manquements reprochés à l'URSSAF, infirmé le jugement et débouté celle-ci de sa demande d'ouverture d'une procédure collective. D'autre part, le déficit d'image et la perte de confiance des salariés et clients invoqués ne sont pas établis, les salariés de la société Ingenisis ayant été licenciés dès la liquidation prononcée et ses clients n'ayant pas été attraits à l'instance d'appel. Enfin, il ne saurait être sérieusement prétendu que la perte de temps subie par la société Ingenisis du fait des manquements de l'URSSAF durant cette période, limitée à la supposer établie, soit à l'origine de son nouveau placement en liquidation judiciaire, en février 2014.





Il résulte en outre de l'article L. 243-5 alinéa 7 du code de la sécurité sociale qu'en cas de procédure de sauvegarde ou de redressement ou de liquidation judiciaire, les pénalités, majorations de retard et frais de poursuite dus par le redevable à la date du jugement d'ouverture sont remis.





Or les appelants ne sauraient valablement se prévaloir de cette disposition pour reprocher à l'URSSAF un défaut de remise des pénalités, majorations et frais antérieurs au jugement de liquidation judiciaire, dans la mesure où l'exécution provisoire du jugement de liquidation judiciaire a été arrêtée puis, par l'arrêt du 8 novembre 2012, ce jugement a été infirmé et l'URSSAF a été déboutée de sa demande. En l'absence de procédure collective, la remise prévue par ce texte n'avait pas lieu d'être appliquée et le manquement invoqué à ce titre n'est pas fondé.





Par ailleurs, il résulte de l'article L. 243-15 du code de la sécurité sociale que la délivrance de l'attestation de vigilance suppose que l'employeur acquitte les cotisations et contributions à leur date d'exigibilité, ou ait souscrit et respecte un plan d'apurement des cotisations et contributions restant dues ou conteste leur montant par recours contentieux.





Or, il ne ressort pas des pièces versées aux débats que lors des demandes d'attestation faites par la société Ingenisis, celle-ci remplissait l'une des conditions posées par ce texte, notamment celle d'un paiement des cotisations et contributions à leur date d'exigibilité.





En effet, au jour de la demande faite par courriel du 23 janvier 2013, la société Ingenisis venait de s'acquitter, le 9 janvier 2013, des cotisations et contributions dues pour les mois d'avril et mai 2012, dont la régularisation a été réclamée sous quinzaine par lettre de l'URSSAF du 5 décembre 2012, étant observé que la société Ingenisis n'a nullement fait état d'un retard de réception de ce courrier dans son courriel et sa lettre du 23 janvier 2013. Les cotisations de janvier 2013, exigibles le 15 février 2013, ont également été payées avec retard, le 13 mars 2013, justifiant la réponse négative de l'URSSAF du 28 février 2013. Outre que la lettre du 20 mars 2013 de l'URSSAF ne concerne qu'une demande de remises et de pénalités, la société Ingenisis a encore payé avec retard les cotisations du mois de février 2013, exigibles le 15 mars 2013, et celles du mois de mars 2013, exigibles le 15 avril 2013, dans la mesure où elles n'ont été réglées que le 25 avril 2013, le changement de périodicité des versements applicable à compter du 1er avril 2013 n'ayant pas modifié les dates de versement des échéances précédentes. Et il n'est pas justifié des circonstances dans lesquelles les cotisations ultérieures ont éventuellement été payées. Les manquements reprochés à l'URSSAF au titre du refus de délivrance des attestations de vigilance ne sont pas fondés. Les appelants ne justifient pas en outre du lien de causalité entre les défauts de réponse par l'URSSAF à certaines de ses demandes en 2013 et le retard pris pour répondre à celle du 23 janvier 2013 et le préjudice subi, soit la privation d'activité et la déconfiture de l'entreprise, dès lors que la condition de délivrance des certificats n'était en tout état de cause pas remplie par la société Ingenisis.





Les appelants ne caractérisent pas non plus en quoi le refus, notamment celui du 20 mars 2013, de l'URSSAF d'accorder à la société Ingenisis la remise des pénalités et majorations sollicitée par suite du paiement des cotisations y ayant donné lieu, dont il n'est pas allégué qu'il s'agissait d'une remise automatique et qui n'était présentée que comme une éventualité dans la lettre de l'URSSAF du 5 décembre 2012, est fautif, alors qu'il résulte des éléments précédents que la société Ingenisis a continué à éprouver des difficultés récurrentes à acquitter régulièrement ses cotisations et contributions. Le grief du chantage imputé à l'URSSAF sur la base de cette lettre du 5 décembre 2012 n'est pas plus fondé. En effet, si l'URSSAF y a indiqué : En l'état, aucune poursuite n'est suspendue. Une nouvelle assignation en liquidation judiciaire pourrait même être envisagée en cas d'absence de réactivité de votre part, les appelants omettent de préciser qu'avant ces termes, l'URSSAF a, dans ce même courrier, invité la société Ingenisis à régulariser son arriéré en lui rappelant qu'en cas de difficulté, des délais pourraient lui être accordés. Cette lettre traduisait ainsi avant tout une volonté de parvenir à un règlement amiable, éventuellement échelonné, contredisant l'abus invoqué. Au reste, les appelants ne justifient pas du lien de causalité entre le refus de remise ou le prétendu chantage et la liquidation judiciaire ultérieure de la société Ingenisis.





La SCP BTSG ès qualités ne prouve pas davantage la réalité du prélèvement allégué de 14 559 euros dont elle se plaint.





Enfin, s'il résulte des énonciations qui suivent que l'URSSAF a réclamé en février 2013 à la société Ingenisis le paiement de frais à hauteur de 1 014,07 euros déjà réglés, cette circonstance n'est pas à l'origine d'un préjudice financier ou économique pour la société Ingenisis et est sans lien avec son placement ultérieur en liquidation judiciaire, la soustraction de pénalités et majorations, pour environ 1 000 euros, également reprochée à l'URSSAF n'étant pas établie.





En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCP BTSG ès qualités et M. X... de leurs demandes de dommages et intérêts.





Sur les demandes en répétition de l'indu





La SCP BTSG ès qualités sollicite sur le fondement de la répétition de l'indu le paiement de :


- la somme de 3 804,12 euros qui a été prélevée au titre de la saisie attribution du 29 mars 2010 sans faire l'objet d'une quelconque imputation ;


- celle de 2 287,14 euros correspondant à des frais d'un montant de 1 014,07 euros exigés et payés deux fois, et des majorations (791 euros) et pénalités (482,07 euros) non dues.





***


Il appartient à celui qui agit en répétition de l'indu de prouver le paiement et son caractère indu.





En l'espèce, la SCP BTSG ès qualités ne verse pas aux débats le procès-verbal de saisie attribution en date du 29 mars 2010. Elle se borne à produire un tableau de la répartition de la mesure établi par ses soins, non corroboré par un document objectif permettant de déterminer le montant du produit de cette saisie-attribution. L'existence d'un indu au regard des sommes dont la société Ingenisis était redevable n'est donc pas prouvée.





Le 9 janvier 2013, la société Ingenisis a payé à l'URSSAF la somme de 49 403,60 euros réclamée par courrier du 5 décembre 2012, incluant des frais à hauteur de 1 014,07 euros. Dans sa lettre du 28 février 2013, l'URSSAF a indiqué que les cotisations de janvier 2013, d'un montant de 10 599 euros, et cette somme représentative de frais de justice étaient impayées. Cependant, la SCP BTSG ès qualités ne démontre pas que la société Ingenisis aurait réglé une seconde fois les frais litigieux, étant observé que le virement du 13 mars 2013 destiné à acquitter les cotisations de janvier 2013 n'a pas inclus ces frais puisqu'il a porté sur un montant de 10 621 euros. Elle ne prouve pas davantage le paiement de pénalités à hauteur de 482,07 euros et de majorations pour 791 euros. L'existence du second indu n'est pas établie.





Il y a lieu dès lors de débouter la SCP BTSG de ses demandes en répétition.





Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive





Sollicitant des dommages et intérêts sans préciser en quoi la SCP BTS ès qualités et M. X... auraient fait dégénérer en abus leur droit d'agir en justice, l'URSSAF ne peut qu'être déboutée de sa demande.





Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile





La SCP BTSG ès qualités et M. X..., qui succombent en leur appel, seront condamnés aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé sur les dépens de première instance. En équité et compte tenu de la situation économique de ces derniers, il n'y a pas lieu de les condamner au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel.











PAR CES MOTIFS





La cour, statuant publiquement, par mise à disposition de la décision au greffe, contradictoirement :





Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf sur la condamnation prononcée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;





Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :





Rejette toute autre demande ;





Condamne la SCP BTSG en qualité de mandataire liquidateur de la société INGENISIS Systèmes d'information et M. X... aux dépens d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.














LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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