21 September 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-10.291

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2017:SO02135

Titres et sommaires

UNION EUROPEENNE - travail - salarié - principe de non-discrimination - directive 2000/78/ce du conseil du 27 novembre 2000 - application directe - application directe dans les rapports entre particuliers - portée

Par arrêt du 13 septembre 2011 (CJUE, arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a., C-447/09), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 2, § 5, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, doit être interprété en ce sens que les Etats membres peuvent autoriser, par des règles d'habilitation, les partenaires sociaux à adopter des mesures au sens de cet article 2, § 5, dans les domaines visés à cette disposition qui relèvent des accords collectifs et à condition que ces règles d'habilitation soient suffisamment précises afin de garantir que lesdites mesures respectent les exigences énoncées audit article 2, § 5, qu'une mesure nationale, qui fixe à 60 ans l'âge limite à compter duquel les pilotes ne peuvent plus exercer leur activité professionnelle alors que les réglementations nationale et internationale fixent cet âge à 65 ans, n'est pas une mesure nécessaire à la sécurité publique et à la protection de la santé, au sens du même article 2, § 5, que l'article 4, § 1, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'une clause d'une convention collective fixe à 60 ans l'âge limite à compter duquel les pilotes sont considérés comme n'ayant plus les capacités physiques pour exercer leur activité professionnelle alors que les réglementations nationale et internationale fixent cet âge à 65 ans et que l'article 6, § 1, alinéa 1, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens que la sécurité aérienne ne constitue pas un objectif légitime au sens de cette disposition ; cette interprétation de la directive du 27 novembre 2000 s'applique mutatis mutandis au personnel navigant commercial. L'article 4.2 du règlement du personnel navigant commercial d'Air France n'ouvrait qu'une simple possibilité au salarié de solliciter la prolongation de son activité au-delà de 55 ans soumise à l'accord de la compagnie et ces dispositions, en application de l'article 3 de la loi n° 2004-734 du 26 juillet 2004, ont cessé d'être applicables au 6 mai 2006. Il en résulte que la différence de traitement fondée sur l'âge instituée par l'article 4.1 du règlement du personnel navigant commercial, qui ne constituait pas un moyen nécessaire à la réalisation de l'objectif de politique d'emploi et de marché du travail, n'était ni nécessaire ni proportionnée à un objectif de sécurité publique et de protection de la santé

Texte de la décision

SOC.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 septembre 2017




Cassation


M. FROUIN, président



Arrêt n° 2135 FS-P+B

Pourvoi n° S 16-10.291
et T 16-10.292 JONCTION







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois n° S 16-10.291 et T 16-10.292 formés par :

1°/ Mme Evelyne Y..., domiciliée [...],

2°/ M. Eric B... C..., domicilié [...],

contre deux arrêts rendus le 29 octobre 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans les litiges les opposant à la société Air France, société anonyme, dont le siège est [...],

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse au pourvoi n° S 16-10.291 invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Le demandeur au pourvoi n° T 16-10.292 invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 11 juillet 2017, où étaient présents : M. Frouin, président, M. Betoulle, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Geerssen, MM. Chauvet, Maron, Déglise, Mmes Farthouat-Danon, Slove, Basset, M. Pietton, conseillers, Mmes Sabotier, Salomon, Depelley, Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Chamley-Coulet, M. Joly, conseillers référendaires, M. Boyer, avocat général, Mme Becker, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Betoulle, conseiller, les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de Mme Y... et de M. B... C... , de Me Le Prado, avocat de la société Air France, l'avis écrit de M. Boyer, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la connexité, joint les pourvois 16-10.291 et 16-10.292 ;

Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail dans sa rédaction applicable en la cause, l'article L. 1134-1 du même code, l'article 6 § 1er de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, ensemble les articles 4.1 et 4.2 du règlement du personnel navigant commercial d'Air France alors applicable ;

Attendu d'une part que, par arrêt du 13 septembre 2011 (CJUE, Prigge, aff. C-447/09), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, doit être interprété en ce sens que les États membres peuvent autoriser, par des règles d'habilitation, les partenaires sociaux à adopter des mesures au sens de cet article 2, paragraphe 5, dans les domaines visés à cette disposition qui relèvent des accords collectifs et à condition que ces règles d'habilitation soient suffisamment précises afin de garantir que lesdites mesures respectent les exigences énoncées audit article 2, paragraphe 5 ; qu'une mesure nationale, qui fixe à 60 ans l'âge limite à compter duquel les pilotes ne peuvent plus exercer leur activité professionnelle alors que les réglementations nationale et internationale fixent cet âge à 65 ans, n'est pas une mesure nécessaire à la sécurité publique et à la protection de la santé, au sens du même article 2, paragraphe 5 ; que l'article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'une clause d'une convention collective, telle que celle en cause au principal, fixe à 60 ans l'âge limite à compter duquel les pilotes sont considérés comme n'ayant plus les capacités physiques pour exercer leur activité professionnelle alors que les réglementations nationale et internationale fixent cet âge à 65 ans ; que l'article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens que la sécurité aérienne ne constitue pas un objectif légitime au sens de cette disposition ; que cette interprétation de la directive du 27 novembre 2000 s'applique mutatis mutandis au personnel navigant commercial ;

Attendu d'autre part que l'article 4.2 du règlement du personnel navigant commercial d'Air France n'ouvrait qu'une simple possibilité au salarié de solliciter la prolongation de son activité au-delà de 55 ans soumise à l'accord de la compagnie et que ces dispositions, en application de l'article 3 de la loi n° 2004-734 du 26 juillet 2004, ont cessé d'être applicables au 6 mai 2006 ;

Qu'il en résulte que la différence de traitement fondée sur l'âge instituée par l'article 4.1 du règlement du personnel navigant commercial, qui ne constituait pas un moyen nécessaire à la réalisation de l'objectif de politique d'emploi et de marché du travail, n'était ni nécessaire ni proportionnée à un objectif de sécurité publique et de protection de la santé ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., née le [...], a été engagée par la société Air Inter en qualité d'hôtesse à compter du 6 mars 1972 et est devenue chef de cabine le 9 novembre 1977, puis chef de cabine principale le 1er novembre 1991 ; que son contrat de travail a été transféré à la société Air France en avril 1992 ; que M. B... C..., né le [...], a été engagé par la société Air Inter en qualité de steward par contrat à durée indéterminée du 22 octobre 1979 et est devenu chef de cabine le 1er octobre 1989, puis chef de cabine principal le 1er décembre 1999 ; que par lettre du 4 septembre 2005, Mme Y... a demandé à son employeur une prolongation de son activité jusqu'à l'anniversaire de sa 56e année et que par lettre du 27 septembre 2005, Air France a fait droit à cette demande pendant une période de trois mois à compter du 1er février 2006, soit jusqu'au 30 avril 2006 ; que par lettre du 17 mars 2006, la société Air France a informé Mme Y... de la date de cessation d'activité, comme indiqué dans son courrier du 27 septembre 2005, au 1er mai 2006 ; que par lettre du 20 juin 2005, la société Air France, à qui son contrat de travail avait été transféré depuis 1997, a informé M. B... C... que, conformément à la réglementation en vigueur, il cesserait son activité le 1er septembre 2005 ; qu'estimant que leur employeur avait mis fin unilatéralement à leur contrat de travail, sans rechercher si cette solution correspondait à leurs attentes ni leur proposer un autre emploi au sein de l'entreprise, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de paiement d'indemnités ;

Attendu que pour débouter les salariés de leurs demandes, l'arrêt retient que ceux-ci soutiennent que les dispositions du règlement du personnel navigant commercial sont discriminatoires au regard du critère de l'âge car elles s'analysent comme « une clause-couperet » visant à interrompre l'activité des salariés en fonction de leur âge et à l'exclusion de tout autre critère ; que l'arrêt relève que, contrairement à cette affirmation, la possibilité est laissée au personnel navigant commercial de prolonger son activité au-delà de 55 ans, de sorte que le règlement n'instaure aucune règle de retraite-couperet impérative, ni d'ailleurs aucune interdiction de voler, mais instaure un âge de cessation d'activité anticipée plus avantageuse, laissant au salarié la faculté de poursuivre son contrat de travail jusqu'à 60 ans, et même au-delà, s'il le désire ; qu'en prévoyant que le personnel navigant commercial peut continuer de voler au-delà de l'âge de 55 ans sur simple demande, le règlement ne réalise aucune discrimination par l'âge ; qu'en tout état de cause, la limite d'âge prévue à l'article 4.1 poursuit un objectif légitime de sécurité des utilisateurs transportés comme des personnels navigants commerciaux ; qu'elle est en adéquation avec l'objectif de sécurité poursuivi, en raison des sujétions particulières auxquelles sont soumis les navigants dans l'exercice de leurs fonctions, qui diffèrent de celles du personnel navigant technique ; que la rupture du contrat de travail en application du règlement est un moyen approprié pour favoriser l'accès des plus jeunes générations à l'emploi ; qu'enfin, la société Air France, en appliquant le règlement à tous ses personnels navigants commerciaux, ne peut se voir reprocher une pratique discriminatoire ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, les arrêts rendus le 29 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Air France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Air France et condamne celle-ci à payer à Mme Y... et à M. B... C... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyen produit au pourvoi n° S 16-10.291 par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme Y....

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes tendant à, titre principal, ce que la rupture de son contrat de travail soit requalifiée en licenciement nul, à ce que la moyenne des 12 derniers mois de salaire soit fixée à 5722, 89 euros et à ce que la société Air France soit condamnée à lui verser des sommes à titre de dommages et intérêts en réparation de l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement et à des dommages et intérêts réparant le préjudice sur ses droits à retraite complémentaire et CNAVTS et d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes subsidiaires tendant à ce que la rupture de son contrat de travail soit requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse et à la condamnation de la société Air France à lui verser les mêmes sommes ;

AUX MOTIFS QUE Mme Y... a atteint l'âge de 55 ans le [...] ; que la procédure de rupture de son contrat de travail a été menée jusqu'à son terme avant la date du 6 mai 2006, à partir de laquelle le personnel d'Air France est entré dans le champ d'application de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile résultant de la loi du 26 juillet 2004 sur la privatisation de la société, qui avait expressément prévu le maintien du statut à caractère réglementaire jusqu'à l'entrée en vigueur d'un accord collectif de substitution et au plus pendant deux ans à compter du transfert au secteur privé de la majorité du capital social de la société ; que le règlement du personnel navigant commercial - RPNC - applicable à Mme Y..., en sa qualité de steward, et en vigueur à la date de la rupture de son contrat de travail, prévoit : « Article 4.1 Principes : l'âge de cessation définitive du PNC est fixé à 55 ans. La cessation d'activité prend effet le 1er jour du mois suivant celui au cours duquel l'intéressé atteint son 55ème anniversaire (...). Article 4.2 Prolongation d'activité : la possibilité de poursuivre son activité au-delà de 55 ans est offerte au PNC dans les conditions suivantes : le PNC doit en faire la demande écrite, au plus tard deux mois avant son 55ème anniversaire, la prolongation est à durée déterminée pour une période minimum de 12 mois (à titre exceptionnel, des prolongations de 3,6 ou 9 mois peuvent être accordées sans qu'il y ait alors possibilité de renouvellement), à l'issue de cette période, le PNC qui souhaite bénéficier d'une deuxième prolongation doit en faire la demande deux mois avant la date prévue de cessation d'activité : cette seconde période pourra avoir pour effet de maintenir le PNC en activité au-delà de 60 ans. Toute prolongation d'activité doit faire l'objet d'un avenant au contrat de travail signé par l'intéressé » ; que Mme Y... soutient que ces dispositions seraient discriminatoires au regard du critère de l'âge car elles s'analysent comme « une clause-couperet » visant à interrompre l'activité des salariés en fonction de leur âge et à l'exclusion de tout autre critère ; que toutefois, contrairement à cette affirmation, la possibilité est laissée au PNC de prolonger son activité au-delà de 55 ans, prolongation dont elle a d'ailleurs demandé le bénéfice, de sorte que le règlement n'instaure aucune règle de retraite-couperet impérative, ni d'ailleurs aucune interdiction de voler, mais instaure un âge de cessation d'activité anticipée plus avantageuse, laissant au salarié la faculté de poursuivre son contrat de travail jusqu'à 60 ans, et même au-delà, s'il le désire ; qu'elle invoque également la non-conformité du RPNC à la directive 2008/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail en ce que la limite d'âge des navigants qu'il prévoit ne poursuit pas un objectif légitime et n'est ni approprié ni nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi ; que l'article 6 de la directive dispose que les Etats membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'en prévoyant que le PNC peut continuer de voler au-delà de l'âge de 55 ans sur simple demande, le RPNC ne réalise aucune discrimination par l'âge ; qu'en tout état de cause la limite d'âge prévue à l'article 4.1 poursuit un objectif légitime de sécurité des utilisateurs transportés comme des personnels navigants commerciaux ; qu'elle est en adéquation avec l'objectif de sécurité poursuivi, en raison des sujétions particulières auxquelles sont soumis les navigants dans l'exercice de leurs fonctions, qui diffèrent de celles du personnel navigant technique ; que la rupture du contrat de travail en application du RPNC est un moyen approprié pour favoriser l'accès des plus jeunes générations à l'emploi ; qu'enfin, la société Air France en appliquant le RPNC à tous ses PNC, ne peut se voir reprocher une pratique discriminatoire du RPNC ; que Mme Y... fait également valoir que la société Air France n'aurait pas rempli son obligation loyale d'exécution du contrat de travail car elle n'a effectué aucune recherche en vue de son reclassement au sol ; que toutefois le texte litigieux prévoit que la prolongation d'activité du salarié n'est possible que si celui-ci en fait la demande écrite au plus tard deux mois avant son 55ème anniversaire, demande que l'appelant a une première fois formulée, mais n'a pas renouvelé, de sorte qu'il ne peut faire grief à l'employeur de ne pas avoir rempli une obligation de reclassement à laquelle il n'était pas soumis par le RPNC applicable en l'espèce ;

AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE Madame Y... était régie par le règlement du personnel navigant commercial qui fixe dans sa quatrième partie les modalités de cessation de service et dans sa cinquième partie les modalités de cessation définitive de service ; que le paragraphe 3 stipule qu'en cas d'atteinte de la limite d'âge, cela ne donnait lieu à aucune recherche de reclassement au sol ; qu'il est prévu par l'article 3 de la loi n° 2004-734 du 26 juillet 2004 que les dispositions du RPNC demeuraient en vigueur jusqu'à la date d'entrée en vigueur de la convention ou des accords d'entreprise devant se substituer aux dispositions du RPNC et au plus tard, pendant un délai de deux ans à compter du transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Air France ; que le transfert envisagé par l'article 3 de la loi n° 2004-734 du 26 Juillet 2004 a été réalisé le 6 mai 2006 ;

1/ ALORS QUE la fixation à l'âge de 55 ans pour exercer le métier de personnel navigant commercial n'est, de par son caractère général, ni nécessaire, ni proportionnée au objectif de sécurité publique et de protection de la santé dès lors que les conséquences de l'âge sont très différentes d'un individu à l'autre et que des obligations individuelles de contrôle médical régulier permettent de satisfaire, de manière plus appropriée, à l'objectif de sécurité ; que pour cette catégorie d'emploi, la différence de traitement fondée sur l'âge n'est pas objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime de sécurité aérienne et que les moyens pour réaliser cet objectif ne sont pas appropriés et nécessaires ; que cette mesure n'était pas non plus un moyen approprié et nécessaire dans le cadre d'une politique de l'emploi dès lors que cette limite d'âge avait été repoussée jusqu'à 65 ans par la loi du 17 décembre 2008 applicable au 1er janvier 2009 ; qu'en retenant malgré tout que la limitation d'âge imposée à la salariée répondait à ces deux objectifs et ne caractérisait pas une pratique discriminatoire, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail, l'article 6 § 1 de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, l'article 21 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

2/ ALORS QUE, à tout le moins, pour avoir déclaré que la rupture du contrat de travail pour atteinte de la limite d'âge de 55 ans était un moyen approprié pour favoriser l'accès des plus jeunes générations à l'emploi, sans développer de manière appropriée et suffisante cette justification générale, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;

3/ ALORS QUE de l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, il s'infère un principe général du droit imposant à l'employeur de rechercher le reclassement au sol du personnel navigant commercial ayant atteint la limite d'âge pour naviguer ; qu'il découle par ailleurs de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile applicable à la date du 1er septembre 2005 que le contrat de travail du navigant ne peut être rompu du fait qu'il ait atteint la limite d'âge que si l'employeur se trouve dans l'impossibilité de proposer un reclassement dans un emploi au sol ou si l'intéressé refuse l'emploi qui lui est offert ; qu'ayant constaté que Mme Y... avait formulé une demande de prolongation d'activité en date du 4 septembre 2005 jusqu'à son 56ème anniversaire, c'est-à-dire jusqu'au 20 janvier 2007, tout en refusant de considérer que celle-ci impliquait une obligation de rechercher son reclassement au sol jusqu'à cette date, la cour d'appel a tiré des conséquences erronées de ses propres constatations et partant a violé l'article 4.1 du règlement du personnel navigant commercial de la société Air France, l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile, l'article 1222-1 du code du travail ;

4/ ALORS QUE, en tout état de cause, il découle de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile applicable à la date du 1er septembre 2005 que le contrat de travail du navigant ne peut être rompu du fait qu'il ait atteint la limite d'âge que si l'employeur se trouve dans l'impossibilité de proposer un reclassement dans un emploi au sol ou si l'intéressé refuse l'emploi qui lui est offert ; que cette obligation s'impose à l'employeur quand bien même le salarié n'aurait pas formulé de demande écrite de prolongation de son activité après la limite d'âge telle que prévue par l'article 4.1 du règlement du personnel navigant commercial de la société Air France ; qu'en déclarant que la salariée dont le contrat de travail avait été rompu le 30 avril 2006 n'avait pas formulé une demande écrite de prolongation d'activité, de sorte que la société Air France ne pouvait se voir reprocher de ne pas avoir recherché son reclassement au sol, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Moyen produit au pourvoi n° T 16-10.292 par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. B... C... .

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes tendant à, titre principal, ce que la rupture de son contrat de travail soit requalifiée en licenciement nul, à ce que la moyenne des 12 derniers mois de salaire soit fixée à 5236,62 euros et à ce que la société Air France soit condamnée à lui verser des sommes à titre de dommages et intérêts en réparation de l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement et à des dommages et intérêts réparant le préjudice sur ses droits à retraite complémentaire et CNAVTS et d'AVOIR débouté l'exposant de ses demandes subsidiaires tendant à ce que la rupture de son contrat de travail soit requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse et à la condamnation de la société Air France à lui verser les mêmes sommes ;

AUX MOTIFS QUE M. B... C... a atteint l'âge de 55 ans le [...] ; que la procédure de rupture de son contrat de travail a été menée jusqu'à son terme avant la date du 6 mai 2006, à partir de laquelle le personnel d'Air France est entré dans le champ d'application de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile résultant de la loi du 26 juillet 2004 sur la privatisation de la société, qui avait expressément prévu le maintien du statut à caractère réglementaire jusqu'à l'entrée en vigueur d'un accord collectif de substitution et au plus pendant deux ans à compter du transfert au secteur privé de la majorité du capital social de la société ; que le règlement du personnel navigant commercial - RPNC - applicable à M. B... C... , en sa qualité de steward, et en vigueur à la date de la rupture de son contrat de travail, prévoit : « Article 4.1 Principes : l'âge de cessation définitive du PNC est fixé à 55 ans. La cessation d'activité prend effet le 1er jour du mois suivant celui au cours duquel l'intéressé atteint son 55ème anniversaire (...). Article 4.2 Prolongation d'activité : la possibilité de poursuivre son activité au-delà de 55 ans est offerte au PNC dans les conditions suivantes : le PNC doit en faire la demande écrite, au plus tard deux mois avant son 55ème anniversaire, la prolongation est à durée déterminée pour une période minimum de 12 mois (à titre exceptionnel, des prolongations de 3,6 ou 9 mois peuvent être accordées sans qu'il y ait alors possibilité de renouvellement), à l'issue de cette période, le PNC qui souhaite bénéficier d'une deuxième prolongation doit en faire la demande deux mois avant la date prévue de cessation d'activité : cette seconde période pourra avoir pour effet de maintenir le PNC en activité au-delà de 60 ans. Toute prolongation d'activité doit faire l'objet d'un avenant au contrat de travail signé par l'intéressé » ; que M. B... soutient que ces dispositions seraient discriminatoires au regard du critère de l'âge car elles s'analysent comme « une clause-couperet » visant à interrompre l'activité des salariés en fonction de leur âge et à l'exclusion de tout autre critère ; que toutefois, contrairement à cette affirmation, la possibilité est laissée au PNC de prolonger son activité au-delà de 55 ans, de sorte que le règlement n'instaure aucune règle de retraite-couperet impérative, ni d'ailleurs aucune interdiction de voler, mais instaure un âge de cessation d'activité anticipée plus avantageuse, laissant au salarié la faculté de poursuivre son contrat de travail jusqu'à ans, et même au-delà, s'il le désire ; qu'il invoque également la non-conformité du RPNC à la directive 2008/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail en ce que la limite d'âge des navigants qu'il prévoit ne poursuit pas un objectif légitime et n'est ni approprié ni nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi ; que l'article 6 de la directive dispose que les Etats membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'en prévoyant que le PNC peut continuer de voler au-delà de l'âge de 55 ans sur simple demande, le RPNC ne réalise aucune discrimination par l'âge ; qu'en tout état de cause la limite d'âge prévue à l'article 4.1 poursuit un objectif légitime de sécurité des utilisateurs transportés comme des personnels navigants commerciaux ; qu'elle est en adéquation avec l'objectif de sécurité poursuivi, en raison des sujétions particulières auxquelles sont soumis les navigants dans l'exercice de leurs fonctions, qui diffèrent de celles du personnel navigant technique ; que la rupture du contrat de travail en application du RPNC est un moyen approprié pour favoriser l'accès des plus jeunes générations à l'emploi ; qu'enfin, la société Air France en appliquant le RPNC à tous ses PNC, ne peut se voir reprocher une pratique discriminatoire du RPNC ; que M. B... C... fait également valoir que la société Air France n'aurait pas rempli son obligation loyale d'exécution du contrat de travail car elle n'a effectué aucune recherche en vue de son reclassement au sol ; que toutefois le texte litigieux prévoit que la prolongation d'activité du salarié n'est possible que si celui-ci en fait la demande écrite au plus tard deux mois avant son 55ème anniversaire, demande que l'appelant n'a pas formulée, de sorte qu'il ne peut faire grief à l'employeur de ne pas avoir rempli une obligation de reclassement à laquelle il n'était pas soumis par le RPNC applicable en l'espèce ;

AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE Monsieur B... C... était régi par le règlement du personnel navigant commercial qui fixe dans sa quatrième partie les modalités de cessation de service et dans sa cinquième partie les modalités de cessation définitive de service ; que le paragraphe 3 stipule qu'en cas d'atteinte de la limite d'âge, cela ne donnait lieu à aucune recherche de reclassement au sol ; qu'il est prévu par l'article 3 de la loi n° 2004-734 du 26 juillet 2004 que les dispositions du RPNC demeuraient en vigueur jusqu'à la date d'entrée en vigueur de la convention ou des accords d'entreprise devant se substituer aux dispositions du RPNC et au plus tard, pendant un délai de deux ans à compter du transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Air France ; que le transfert envisagé par l'article 3 de la loi n° 2004-734 du 26 Juillet 2004 a été réalisé le 6 mai 2006 ;

1/ ALORS QUE la fixation à l'âge de 55 ans pour exercer le métier de personnel navigant commercial n'est, de par son caractère général, ni nécessaire, ni proportionnée au objectif de sécurité publique et de protection de la santé dès lors que les conséquences de l'âge sont très différentes d'un individu à l'autre et que des obligations individuelles de contrôle médical régulier permettent de satisfaire, de manière plus appropriée, à l'objectif de sécurité ; que pour cette catégorie d'emploi, la différence de traitement fondée sur l'âge n'est pas objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime de sécurité aérienne et que les moyens pour réaliser cet objectif ne sont pas appropriés et nécessaires ; que cette mesure n'était pas non plus un moyen approprié et nécessaire dans le cadre d'une politique de l'emploi dès lors que cette limite d'âge avait été repoussée jusqu'à 65 ans par la loi du 17 décembre 2008 applicable au 1er janvier 2009 ; qu'en retenant malgré tout que la limitation d'âge imposée au salarié répondait à ces deux objectifs et ne caractérisait pas une pratique discriminatoire, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail, l'article 6 § 1 de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, l'article 21 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

2/ ALORS QUE, à tout le moins, pour avoir déclaré que la rupture du contrat de travail pour atteinte de la limite d'âge de 55 ans était un moyen approprié pour favoriser l'accès des plus jeunes générations à l'emploi, sans développer de manière appropriée et suffisante cette justification générale, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;

3/ ALORS QUE il découle de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile applicable à la date du 1er septembre 2005 que le contrat de travail du navigant ne peut être rompu du fait qu'il ait atteint la limite d'âge que si l'employeur se trouve dans l'impossibilité de proposer un reclassement dans un emploi au sol ou si l'intéressé refuse l'emploi qui lui est offert ; que cette obligation s'impose à l'employeur quand bien même le salarié n'aurait pas formulé de demande écrite de prolongation de son activité après la limite d'âge telle que prévue par l'article 4.1 du règlement du personnel navigant commercial de la société Air France ; qu'en déclarant que le salarié dont le contrat de travail avait été rompu le 1er septembre 2005 n'avait pas formulé une demande écrite de prolongation d'activité, de sorte que la société Air France ne pouvait se voir reprocher de ne pas avoir recherché son reclassement au sol, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.