26 June 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-26.992

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2019:CO10293

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 juin 2019




Rejet non spécialement motivé


Mme MOUILLARD, président



Décision n° 10293 F

Pourvoi n° R 17-26.992







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société Annealsys, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 27 juin 2017 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre), dans le litige l'opposant à la société Thermocoax, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...],

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 14 mai 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Richard de la Tour, premier avocat général, Mme Labat, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de Me Isabelle Galy, avocat de la société Annealsys, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Thermocoax ;

Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, l'avis de M. Richard de la Tour, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;


REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Annealsys aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Thermocoax la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par Me Isabelle Galy, avocat aux Conseils, pour la société Annealsys.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société Annealsys de son action en responsabilité contre la société Thermocoax pour inexécution de ses obligations contractuelles et de sa demande de dommages-intérêts,

AUX MOTIFS QUE « la convention des parties résulte des documents suivants : - le cahier des charges version VI, daté du 19 juin 2006, relatif à la réalisation d'un porte substrat chauffant, émanant de la société Annealsys et transmis confidentiellement à la SAS Thermocoax, définissant ce produit comme suit (page 3) : « Le cahier des charges concerne un porte substrat chauffant qui sera intégré dans un réacteur MOCVD à injection liquide directe permettant de déposer tous types de matériaux sur des substrats jusqu'à 100 mm de diamètre. Suivant l'application on pourra configurer le réacteur de telle manière qu'il puisse fonctionner à basse température (= 250°-300°C) pour des dépôts métalliques (Ag, Ru, lr..), à moyenne température (= 500°C) pour les dépôts d'oxydes et nitrures simples (
.) et hautes températures (=900° C) pour des oxydes complexes type YBa3Cu3O2. Cette machine doit être utilisée à des fins de recherche et développement et de petites productions pour des applications de niches. » - l'offre en réponse émise par la SAS Thermocoax, adressée le 16 octobre 2006 à la SAS Annealsys, exigeant une étude thermique préalable, facturée au prix de 1.050,00 € et des frais d'industrialisation pour le premier exemplaire, d'un montant de 550,00 €, le porte substrat lui-même, option inconel + nickel de 120 mm de diamètre, étant proposé au prix de 5.400,00 € HT ; - l'étude thermique réalisée le 5 janvier 2007 par la SAS Thermocoax, dont l'objectif était (page 2) : « d'apprécier l'homogénéité thermique d'un porte substrat constitué d'une plaque chauffante en nickel, d'un plateau support, d'un plateau écran et d'un axe en inconel 600. L'ensemble est porté en température par un élément chauffant Thermocoax dont le type est à définir en fonction du cahier des charges. », étude qui a procédé à la modélisation en 3 D du porte substrat et de l'élément chauffant, réalisé en 4 versions testées à des chaleurs élevées dont la conclusion était la suivante (page 37/37) : « Cette étude montre qu'il n'est pas possible d'atte(i)ndre le gradient thermique demandé sur l'aire du wafer, à savoir +/- 2° C à 850° C mais on peut s'en rapprocher en adopter (ant) un pas variable pour l'élément chauffant et en disposant un écran radiatif en périphérie du plateau chauffant. Ceci a pour effet de limiter les effets de bord. Dans ce cas (quatrième version) le gradient thermique maxi sur l'emplacement destiné au wafer est de 10° C. » ; - l'offre modifiée émise le 10 avril 2007 par la SAS Thermocoaxpour la réalisation de ce porte substrat, au prix de6.260,00 € HT, outre 550,00 € HT de frais d'industrialisation, et 50 € de frais de port en sus, décrivant le porte substrat sur le plan technique et précisant notamment : « Ce système est compatible avec un environnement de type vide. Il permettra d'atteindre une température de 850° C minimum sur le substrat (P = 1440 watts sous U max=94 Volts). Le gradient thermique ne peut être garanti en fonctionnement normal. Des mesures pratiques devront être réalisées afin de valider le résultat. Les caractéristiques mécaniques générales du porte substrat (dimension, planéité, état de surface
) seront re-validées entre Annealsys et Thermocoax lors de la réalisation des plans (basées sur le plan Annealsys 5109MRU027-C). » ; - la facture émise, après la livraison le 29 octobre 2007 d'unexemplaire du porte substrat, par la SAS Thermocoax d'un montant de 6.860,00 € HT, adressée à la SAS Annealsys (pièce n°5). Il n'y a pas eu d'expertise technique, même amiable entre les parties, mais la SAS Thermocoax ne conteste pas avoir par la suite manqué à délivrer un porte substrat exactement conforme techniquement aux stipulations de la commande passée par la société Annealsys, et ce malgré diverses modifications techniques apportées au fil du temps à ce porte substrat, à ses frais. La société Annealsys indique que le porte substrat n'a jamais pu fonctionner correctement au-dessus d'une température de 770° C alors qu'il était souhaité qu'il fonctionne au-dessus de celle de 850° C au minimum. La société Annealsys ne demande pas la résolution pour inexécution du contrat de vente. Elle fonde exclusivement ses demandes de dommages et intérêts sur les articles 1134 et 1147 du code civil, du fait de l'inexécution contractuelle fautive reprochée à la SAS Thermocoax. En l'absence de résolution sollicitée du contrat, il n'y a pas lieu d'ordonner la restitution de l'acompte de 3.155,00 € HT qu'elle a versé, ni du montant des factures d'études thermiques qu'elle avait accepté de payer, à hauteur de la somme de 1.600,00 €, lesquelles sommes ne sont demandées qu'à titre de dommages et intérêts par la SAS Annealsys. Le tribunal de commerce de Montpellier n'avait lui non plus pas ordonné une telle restitution, faute d'être saisi de cette prétention. La société Annealsys demande uniquement et globalement une somme totale de 358.184,00 € de dommages et intérêts (141.133,00 euros de frais financiers, 117.284,00 € de dépréciation de l'équipement, 95.015,00 € de frais de personnel, 1.600,00 € de factures payées à Thermocoax, et 3.155,00 € de remboursement de l'acompte), prétendant avoir exposé des dépenses d'investissement importantes pour aboutir au résultat escompté et avoir subi un préjudice économique important du fait du retard provoqué par l'échec de ce porte substrat, dans la mise en oeuvre de son projet de réacteur MC 100. Pour fonder sa demande, la société Annealsys soutient que la société Thermocoax avait une obligation de résultat, ce qui est inexact s'agissant de la fabrication d'un prototype dont la réalisation comportait un aléa technique réel, notamment lié aux conditions économiques restrictives posées en préalable, dont elle avait manifestement connaissance. En effet, il est constant qu'aucun porte substrat identique n'avait été construit auparavant par la société Thermocoax et la preuve de sa construction par une autre entreprise n'est pas non plus rapportée par la société Annealsys. Cette dernière, à cet égard, produit seulement un article de presse universitaire locale de Lyon en 2013, disant qu'elle a inauguré son réacteur MC 100, sans qu'il puisse s'en évincer que celui-ci fonctionne effectivement et de façon satisfaisante avec un porte substrat correspondant aux spécifications techniques élevées du projet soumis à la société Thermocoax en juin 2006. Le caractère aléatoire du résultat attendu, compte-tenu des exigences techniques d'une part et des contraintes économiques d'autre part, ressort en outre de la rédaction même par la SAS Annealsys de son cahier des charges (pièce n°1) susvisé. Il indiquait notamment (pages 9 et 10) : « Les spécifications techniques du porte substrat ont été données et décrites de manière détaillée dans ce document. Ce document reste bien entendu strictement confidentiel. Toutes les parties pourront être sujettes à modification avec Thermocoax, si nous nous trouvons confronté(s) à un verrou technologique. Nous souhaiterions que Thermocoax soit force de proposition s'ils jugent que certaines parties puissent être simplifier(ées) sans nuire au bon fonctionnement du procédé décrit. Si Thermocoax pense que ces spécifications techniques sont trop fortes ou n'entre(nt) pas dans le champ de leur savoir faire, nous aimerions recevoir une proposition dite « dégradée » de manière à ne pas prématurément fermer la porte à une possible collaboration. Nous tenons quand même à rappeler que le réacteur de dépôt MC 100 s'adressera à des équipes de R&D du domaine public, semi-public ou privé pour des applications de niches. Le coût de l'équipement est un paramètre essentiel pour ce type de clientèle. Toute solution technique devra intégrer ce paramètre de manière à rester dans un budget en adéquation avec le marché visé. Enfin, les solutions techniques qui ont été définies dans ce cahier des charges restent à titre indicatif car l'expert dans le domaine technique est à nos yeux la société Thermocoax. Pour résumer, notre demande porte sur une plaque chauffante permettant de chauffer un échantillon plan circulaire de 100 mm de diamètre avec la meilleure homogénéité possible sur toute la surface de l'échantillon. La température de l'axe support devra pour des raisons d'intégration dans l'équipement, rester compatible avec les systèmes de fixation du commerce. » Il est de principe à cet égard que lorsque la réalisation du but poursuivi par le contrat présente un aléa, on doit supposer, sauf volonté contraire des parties clairement exprimée, que l'obligation assumée est une obligation générale de prudence et de diligence et non une obligation de résultat. Tel est bien le cas en l'espèce, au vu des éléments susvisés de la convention des parties et il appartient donc à la SAS Annealsys de rapporter la preuve, outre le défaut de fonctionnement conforme aux spécifications techniques exigées, qui n'est pas contesté, d'un manquement de la SAS Thermocoax, lors de la réalisation de ce prototype, à son obligation de moyen pour y parvenir » (arrêt p. 10-13),

1°) ALORS QUE l'engagement souscrit par le débiteur d'atteindre un résultat déterminé est une obligation de résultat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté qu'après la réalisation d'une étude thermique afin de vérifier l'aptitude du porte substrat à atteindre les objectifs fixés par le cahier des charges de la société Annealsys, la société Thermocoax avait émis le 10 avril 2007 une offre portant sur la réalisation d'un porte substrat, mentionnant : « il permettra d'atteindre une température de 850°C minimum sur le substrat » ; que la société Annealsys faisait valoir que le porte substrat n'avait jamais pu atteindre qu'une température de 770°C ; qu'en retenant que la société Thermocoax n'était pas tenue d'une obligation de résultat, s'agissant de la fabrication d'un prototype dont la réalisation comportait un aléa technique réel, quand la société Thermocoax s'était engagée sans réserve, au vu des résultats de l'étude thermique préalable qu'elle avait effectuée, à fabriquer un porte substrat capable d'atteindre une température déterminée, ce qui s'analysait en une obligation de résultat, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil en sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 applicable en l'espèce.

2°) ALORS QUE le juge ne peut soulever aucun moyen d'office sans inviter les parties à s'en expliquer ; qu'en l'espèce, la société Thermocoax n'invoquait aucun aléa résultant des « contraintes économiques » posées par le cahier des charges de la société Annealsys ; qu'en énonçant, pour écarter l'obligation de résultat de la société Thermocoax, que la réalisation du porte substrat comportait un aléa technique « notamment lié aux conditions économiques restrictives posées en préalable », et que le résultat attendu était aléatoire « compte tenu des exigences techniques d'une part et des contraintes économiques d'autre part », la cour d'appel, qui a soulevé d'office un moyen tiré d'un aléa résultant des « contraintes économiques » posées par la société Annealsys, sans avoir invité les parties à s'en expliquer, a méconnu le principe du contradictoire et violé l'article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société Annealsys de son action en responsabilité contre la société Thermocoax pour inexécution de ses obligations contractuelles et de sa demande de dommages-intérêts,

AUX MOTIFS QUE « la société Thermocoax invoque pour sa part une obligation de moyen à laquelle elle considère avoir satisfait en fabriquant trois prototypes successifs et en proposant ensuite une nouvelle amélioration, finalement rejetée car jugée trop onéreuse, par la société Annealsys. Dans les faits, il apparaît que : - le porte substrat n°1, livré le 29 octobre 2007, a été retourné par lasociété Annealsys à la société Thermocoax le 30 novembre 2007, en raison de malfaçons tenant à sa fabrication (taille du tube, soudures mal faites le privant d'étanchéité notamment), - la société Thermocoax a repris ces malfaçons et livré à nouveau le porte substrat n°1 le 21 janvier 2008, - la société Annealsys a retourné ce porte substrat le 13 février 2008 car l'écran thermique n'avait pas été poli et des points de soudure étaient fissurés, - après reprise de ces malfaçons la société Thermocoax a livré à nouveau le porte substrat n°1 au mois de juin 2008, - un test de fonctionnement effectué le 24 juin 2008 a conclu à l'impossibilité de chauffer le substrat jusqu'à la température de 850°C sous pression réduite, et d'avoir une énergie thermique identique sur toute la surface, ce qui a fait l'objet d'un rapport transmis à la société Thermocoax, - après un échange de correspondances, la société Thermocoax aaccepté de réaliser un nouveau prototype, porte substrat n°2, à ses frais, prévu pour une livraison fin décembre 2008, - la livraison du porte substrat n°2 a eu lieu le 6 mars 2009, qui présentait une malfaçon au niveau des fils d'alimentation et a été retourné à la société Thermocoax le 15 mai 2009, celle-ci devant réaliser de nouveaux tests et un rapport d'essai, également, - une nouvelle livraison du porte substrat n°2 a eu lieu le 19 juin 2009, - une troisième livraison du porte substrat n°2 a eu lieu mais il ne permettait toujours pas de fonctionner correctement au-delà de la température de 770° C, dans les conditions requises, - à la suite d'une panne de l'élément chauffant de la zone centrale,le porte substrat n°2 était retourné à la société Thermocoax le 23 décembre 2009, et celle-ci, après analyse, a indiqué à la société Annealsys le 4 février 2010, qu'il n'était pas réparable, - la société Thermocoax a ensuite proposé, le 12 mars 2010, de réaliser un nouveau porte substrat, n°3, mais demandait une prise en charge de 50 % de son coût à la société Annealsys, puis le 7 mai 2010 une participation de 90 % mais avec un avoir de 50 %, soit une somme de 12.105,00 € HT, ce que celle-ci a refusé, sauf à réduire de moitié ses prétentions financières. Le 18 août 2010, la société Thermocoax a demandé à récupérer la plaque chauffante du porte-substrat n°1 toujours détenu et utilisé par la société Annealsys, ce que cette dernière a refusé le 23 septembre 2010, arguant de ce qu'elle ne disposait pas de produits de remplacement pour continuer la mise en oeuvre de son projet MC 100, financé par OSEO et la Région Languedoc Roussillon, outre ses propres investissements. Elle a alors fait état d'un préjudice de 385.490,43 €, évalué par elle-même et son expert-comptable, dont elle a sollicité d'être indemnisée, ce qui a conduit à la rupture des relations entre les parties. Il ressort de ces éléments que les livraisons initiales des porte substrats étaient affectées de malfaçons de fabrication imputables à la société Thermocoax, mais celles-ci ont toutes été reprises au fil du temps, à ses frais, et avec l'accord de la société Annealsys. De même, les délais de livraison indiqués dans les offres de la société Thermocoax, le 5 juillet 2007 pour la première livraison, étaient seulement indicatifs et non de rigueur ; d'autre part les reports nécessités par les reprises des malfaçons initiales et les problèmes de mise au point technique du porte substrat ont été acceptées par la société Annealsys, jusqu'au 18 août 2010, date de la rupture des relations entre les parties, par lettre recommandée avec accusé de réception. Il est constant à cet égard qu'aucune mise en demeure de livrer le porte substrat à une date convenue n'a été adressée à la SAS Thermocoax par la SAS Annealsys jusqu'à la rupture des relations entre les parties, notifiée le 18 août 2010. Par ailleurs, il apparaît que la société Thermocoax a elle-même tiré les conséquences de son échec technique, en abandonnant la réclamation du solde de sa facture, ne conservant que le montant de l'acompte initial versé par la SAS Annealsys, soit la somme de 3.155,00 € HT, qu'il n'y a pas lieu de restituer à cette dernière, faute de demande de celle-ci en résolution du contrat de vente. Il ne ressort donc pas de ces éléments un manquement de la société Thermocoax à son obligation de moyen ayant conduit à l'inexécution de la convention mais seulement un retard d'exécution, accepté au fur et à mesure des propositions d'intervention du vendeur, par la société Annealsys, dans le cadre de leur relation commerciale et contractuelle. L'échec du projet apparaît avoir été uniquement imputable à l'incapacité technologique pour la société Thermocoax d'arriver à fournir un porte substrat permettant une répartition homogène de l'énergie thermique au-delà de la température minimum de 850° C, pouvant aller jusqu'à 900° C, comme cela était prévu dans la convention des parties, avec un contrôle suffisant du gradient de température. Mais il n'est pas établi par les pièces produites que cet échec résulte d'un manquement par la société Thermocoax à son obligation de moyen, les causes technologiques lui ayant interdit d'arriver à cet objectif n'étant pas déterminées, notamment en l'absence de toute expertise par un professionnel compétent en la matière, d'une part. D'autre part, il n'est pas non plus justifié par les pièces versées aux débats, qu'un porte substrat respectant les conditions techniques requises dans la convention des parties, telles que définies notamment dans le cahier des charges VI susvisé, existe et fonctionne correctement, par ailleurs. La société Annealsys soutient seulement qu'elle a réussi à mettre au point son réacteur MC 100 à Lyon en 2013, soit 3 ans après la rupture des relations entre les parties, en produisant un article de presse universitaire locale, dont il ne peut être tiré que ce réacteur fonctionne avec un porte substrat correspondant aux spécifications techniques initialement convenues avec la société Thermocoax. En effet il est produit (pièce n°71) : - la description d'un projet de coopération scientifique entre l'Institut des Nanotechnologies de Lyon et la SAS Annealsys, rédigé par la coordinatrice de ce projet, Mme M... G..., pour le compte de l'Agence Nationale de la Recherche, laquelle agence ne s'engageait pas sur le contenu de l'article, qui n'évoque en rien le porte substrat utilisé, - un compte-rendu sommaire de l'inauguration le 30 octobre 2014 du laboratoire commun InCVD (Chemical Vapor Déposition = Dépôt Chimique en phase Vapeur) résultant de ce projet, dans la lettre de l'Université Claude Bernard à Lyon de novembre 2014 et sur le site internet de l'Institut Carnot de Lyon, - un article rédigé en anglais, non traduit, sur le site du laboratoire commun issu de ce projet (labcomincvd), dont une page reproduit une photo du réacteur de la société Annealsys intitulé MC 100 Low cost DLI-MOCVD/ALD 100 mm reactor). Les spécifications techniques, en langue anglaise, connue du présent rédacteur de l'arrêt, indiquent notamment qu'il dispose d'un porte substrat tournant (rotating substrate holder) mais également que ses températures de fonctionnement ne dépassent pas 850° C. (Temperature range : RT to 850° C), ce qui n'établit donc pas la réussite du projet initial prévoyant des températures pouvant aller jusqu'à 900° C selon le cahier des charges VI susvisé, même plusieurs années après, ni le fonctionnement correct attendu, en termes d'homogénéité des échanges thermiques et de respect du gradient de température. Il est pour le moins regrettable que n'aient pas été produits, notamment, par la société Annealsys les éléments des comptes rendus, nécessairement établis par elle pour justifier de l'utilisation des fonds obtenus auprès de la banque publique OSEO et de la Région Languedoc Roussillon, qui ont participé au financement de ce projet, et qui auraient pu être de nature à éclairer la question du suivi technique de l'échec dans la mise au point du porte substrat par la société Thermocoax et de sa résolution ultérieure, en tout ou partie. En cet état, la preuve d'un manquement de la SAS Thermocoax au respect de son obligation de moyen pour réaliser le prototype de porte substrat répondant aux spécifications techniques convenues entre les parties n'est pas rapportée, l'échec constaté résultant, selon les pièces produites, de l'aléa technologique afférent à ce projet innovant, qu'aucune des deux sociétés n'a été en mesure de surmonter durant la période de leur relation contractuelle. Il convient donc, infirmant le jugement déféré, de débouter la SAS Annealsys de sa demande de dommages et intérêts pour inexécution par la SAS Thermocoax de ses engagements contractuels » (arrêt p. 13-16),

1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la société Annealsys produisait à l'appui de son action en responsabilité une lettre de la société Thermocoax du 22 septembre 2008 dans laquelle celle-ci écrivait, à propos du premier porte substrat livré le 29 octobre 2007, que ce produit « a fait l'objet de plusieurs difficultés aussi bien d'un point de vue logistique (retard de livraison) que technique (défaut mécanique, thermique
). (
) il s'avère que le produit ne remplit pas les fonctions requises. Thermocoax assume l'entière responsabilité des difficultés rencontrées ainsi que la non-conformité du produit final » ; qu'en écartant la responsabilité de la société Thermocoax en retenant qu'elle n'était pas tenue à une obligation de résultat et qu'il n'était pas établi qu'elle avait manqué à son obligation de moyens, sans s'expliquer sur cette lettre par laquelle la société Thermocoax reconnaissait expressément sa responsabilité pour les défauts mécaniques et thermiques du porte substrat ainsi que pour le retard de livraison, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

2°) ALORS QUE l'existence de malfaçons de fabrication entraînant la panne définitive du produit caractérise la faute de l'entrepreneur ; qu'en l'espèce la cour d'appel a elle-même constaté que les deux portes substrat livré par la société Thermocoax le 29 octobre 2007 et le 6 mars 2009 étaient tous deux affectés de « malfaçons de fabrication imputables à la société Thermocoax », et qu'une panne non réparable de l'élément chauffant du second substrat s'était produite le 23 décembre 2009 ; qu'en énonçant que l'échec du projet apparaissait avoir été uniquement imputable à l'incapacité technologique pour la société Thermocoax de fournir un porte-substrat permettant une répartition homogène de l'énergie thermique au-delà de la température minimum de 850°C et qu'il ne ressortait pas des éléments de la cause un manquement de la société Thermocoax à son obligation de moyens ayant conduit à l'inexécution de la convention mais seulement un retard d'exécution, quand il résultait de ses propres constatations que, comme le soutenait la société Annealsys, les portes substrat étaient affectés de malfaçons mécaniques sans lien avec leurs performances thermiques, imputables à la société Thermocoax, ayant entraîné la panne définitive du second porte substrat, ce qui caractérisait une inexécution de la convention et non un simple retard et engageait la responsabilité de la société Thermocoax pour faute, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil en sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 applicable en l'espèce.

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, la renonciation à un droit suppose la volonté claire et non équivoque de renoncer ; qu'en retenant, pour débouter la société Annealsys de son action en responsabilité contre la société Thermocoax, que les malfaçons de fabrication avaient été reprises au fil du temps avec l'accord de la société Annealsys, qui avait accepté le retard d'exécution au fur et à mesure des propositions d'intervention du vendeur, la cour d'appel, qui n'a caractérisé aucune manifestation claire et non équivoque de la part de cette dernière de renoncer à rechercher la responsabilité de la société Thermocoax pour ce retard d'exécution, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil en sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 applicable en l'espèce.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.