5 November 2020
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 19/08442

Chambre 4-4

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRET SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 05 NOVEMBRE 2020



N° 2020/

GB/











Rôle N° RG 19/08442 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEKLJ





[V] [H]





C/



SAS FIDUCIAL PRIVATE SECURITY

































Copie exécutoire délivrée

le :

05 NOVEMBRE 2020

à :



Me Vincent SCHNEEGANS, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Alain USANNAZ-JORIS, avocat au barreau de MARSEILLE





Arrêt en date du 5 novembre 2020 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 13 février 2019, qui a cassé l'arrêt rendu le 9 septembre 2016 par la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE







APPELANT



Monsieur [V] [H]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/009236 du 29/08/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

Situation : , demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Vincent SCHNEEGANS, avocat au barreau de MARSEILLE





INTIMEE



SAS FIDUCIAL PRIVATE SECURITY, demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Alain USANNAZ-JORIS, avocat au barreau de MARSEILLE











*-*-*-*-*







COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 09 Septembre 2020 en audience publique devant la Cour composée de :





Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseillère





qui en ont délibéré



Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.



Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Novembre 2020.







ARRÊT



contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Novembre 2020.





Signé par Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.










































PROCÉDURE





M. [H] est appelant du jugement rendu le 2 juillet 2014 par le conseil de prud'hommes de Marseille le déboutant de toutes ses prétentions formulées à l'encontre la SAS Fiducial Private Security (Fiducial).



Par arrêt du 9 septembre 2016, cette cour a infirmé ce jugement disant le licenciement de M. [H] nul et de nul effet et condamnant la société Fiducial à lui verser les sommes suivantes :



70 909,90 euros, ainsi que 7 090,99 euros au titre des congés payés afférents, à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur,

20 153,34 euros à titre d'indemnité pour perte du droit à la pension,

473,15 euros en complément de son indemnité de licenciement.



Par arrêt n° 253 du 13 février 2019, la Cour de cassation, statuant le Pôle emploi appelé, a partiellement cassé cet arrêt reprochant aux juges d'appel d'avoir condamné la société Fiducial à verser au salarié au titre de la violation de son statut protecteur une somme représentant les salaires et les congés payés y afférents du 5 juillet 2013, jour de son éviction de l'entreprise, au 9 septembre 2016, date du prononcé de l'arrêt, bien qu'ayant constaté que ce salarié protégé, licencié sans autorisation administrative préalable, avait fait valoir ses droits à la retraite le 1er décembre 2014, avant sa demande de réintégration, cette circonstance rendant impossible cette réintégration.



M. [H], au principal, maintient sa demande de réintégration devant la présente cour de renvoi, autrement composée, et poursuit la condamnation de la société Fiducial à lui verser les sommes suivantes :



147 418 euros brut représentant 79 mois de salaire du jour de son éviction au jour de sa demande de réintégration, ainsi que 14 742 euros au titre des congés payés afférents,

20 153,34 euros au titre de l'indemnisation du préjudice résultant de sa privation de pension de retraite au taux plein.



Dans l'hypothèse où sa réintégration serait jugée impossible, M. [H] réclame le paiement des sommes ci-après :



120 000 euros en réparation de la rupture de son contrat de travail,

20 153,34 euros au titre de l'indemnisation du préjudice résultant de sa perte de pension de retraite, le tout avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,

55 982 euros pour violation du statut protecteur, subsidiairement 31 723 euros,

5 000 euros pour ses frais irrépétibles.



La société Fiducial conclut à la confirmation du jugement déféré à la censure de la cour, sans préjudice de l'allocation d'une indemnité de 2 000 euros pour ses frais non répétibles.



Le Pôle emploi comparaît pour demander sa mise hors de cause, laquelle sera admise puisque l'employeur ne fait pas l'objet d'une procédure collective.



La cour renvoie pour plus ample exposé au jugement déféré et aux écritures soutenues verbalement par les conseils des parties à l'audience du 9 septembre 2020.






MOTIFS DE LA DÉCISION





Il résulte des éléments du dossier que M. [H] a été engagé par la société Brink's le 14 décembre 2005, en qualité d'agent de sécurité, et que son contrat a été transféré en dernier lieu à la société Fiducial le 15 mars 2015 ; qu'il a été désigné en qualité de délégué syndical le 28 juin 2010 jusqu'au 15 mars 2012, la période de protection s'achevant le 15 mars 2013 ; que le 15 mars 2013, son employeur lui a notifié par lettre une convocation à un entretien préalable au licenciement prévu le 5 avril 2013, son licenciement intervenant le 3 mai 2013 sans autorisation administrative préalable ; que le salarié a saisi le 2 juillet 2013 la juridiction prud'homale pour une discrimination syndicale et un licenciement nul et a demandé que sa réintégration soit ordonnée ; qu'il a fait valoir ses droits à la retraite le 1er décembre 2014 au cours de la première instance.



La Cour de cassation a confirmé l'arrêt de cette cour du 9 septembre 2016 en ce qu'il prononce la nullité du licenciement du salarié protégé prononcé sans autorisation administrative préalable (premier moyen), condamne l'employeur au paiement de la somme de 473,15 euros au titre d'un complément d'indemnité de licenciement (troisième moyen) et dit impossible sa réintégration (deuxième moyen en sa première branche).



La société Fiducial fait valoir utilement que la demande tenant à sa réintégration est définitivement rejetée et que la cour de renvoi doit seulement se prononcer sur les conséquences financières du licenciement de M. [H], lequel réclame le paiement des sommes suivantes :



55 982 euros pour violation du statut protecteur, subsidiairement 31 723 euros,

120 000 euros à titre de dommage-intérêts,

20 153,34 euros au titre de l'incidence du non-emploi sur son niveau de pension,



Il doit être observé que la demande indemnitaire de 120 000 euros formulée au titre de la réparation du préjudice financier résultant de sa perte d'emploi est une demande nouvelle pour n'être pas mentionnée dans l'arrêt du 9 septembre 2016, de telle sorte que la cour examinera cette prétention reçue du fait de l'oralité de la présente procédure prud'homale permettant à une partie de formuler une demande nouvelle jusqu'au jour de l'audience.



Il doit être noté que le conseil de la société Fiducial n'a pas élevé de protestation sur cette demande nouvelle au cours de l'audience tenue le 9 septembre 2020, d'où il suit que le principe contradictoire est réputé avoir été respecté.



M. [H] était âgé de 62 ans au jour de son licenciement prononcé en l'état d'une ancienneté de 7 ans et 5 mois ; ce salarié a perdu un salaire brut mensuel de 1 763 euros à l'examen de ses bulletins de salaire.



L'intéressé a fait valoir ses droits à la retraite cumulant 141 trimestres de travail, sa pension étant de ce fait calculée à hauteur de 50 %, égale en 2014 à 565,11 euros net mensuel ; son revenu annuel pour l'année 2015 était de 6.782 euros (sa pièce 20) ; au 11 novembre 2016, son revenu était de 535,17 euros net mensuel.



La cour admettra de prendre en compte au titre de l'indemnisation de sa perte d'emploi à 62 ans le fait que ce non-emploi a eu une incidence sur le calcul du montant de sa demi-pension.



La cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour arrêter à la somme de 30 000 euros, cette réparation prenant en compte l'incidence de la diminution de sa pension de retraite.



Le salarié protégé licencié qui a fait valoir ses droits à la retraite rendant ainsi impossible sa réintégration a droit au titre de la violation du statut protecteur à la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu'à la date de son départ à la retraite.



En l'espèce, cette indemnité correspond à 20 mois de salaire représentant la somme de 35 260 euros.



Cette indemnité se cumule avec la demande indemnitaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui répare un préjudice distinct.



Ces créances porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt constitutif du droit de créance.



L'intimée supportera les entiers dépens.



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile :





Infirme le jugement.



Met hors de cause le Pôle emploi.



Condamne la société Fiducial Private Security à payer à M. [H] la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des conséquences financières de son licenciement et la somme de 35 260 euros au titre de la violation de son statut protecteur, le tout avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.



Rejette les demandes plus amples ou contraires.



Condamne la société Fiducial Private Security aux entiers dépens à l'exception de la procédure suivie devant la Cour de cassation qui resteront à sa charge.



Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'intimée à verser à l'appelant, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, une indemnité de 1 500 euros.





LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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