13 May 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-40.003

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:CO00353

Texte de la décision

COMM.

COUR DE CASSATION



LM


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 13 mai 2020




NON-LIEU À RENVOI


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 353 F-D

Affaire n° V 20-40.003


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 MAI 2020

Le tribunal de première instance de Nouméa a transmis à la Cour de cassation, à la suite du jugement rendu le 17 février 2020, la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 26 février 2020, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

La société Antoni, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

D'autre part,

Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, domicilié [...] .

En présence de :

Le procureur de la République près le tribunal de première instance de Nouméa, domicilié en son parquet, [...].

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lion, conseiller référendaire, les observations de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 mai 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme Lion, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

1. Par un jugement du 17 février 2020, le tribunal de première instance de Nouméa a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les dispositions du dernier alinéa de l'article Lp. 279 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie portent-elles atteinte aux droits et libertés garantis par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ? »

2. Toutefois, la question posée par la société Antoni dans son mémoire spécial du 16 novembre 2018 précisait qu'elle portait « sur les dispositions du dernier alinéa de l'article Lp. 279 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie pour violation des principes de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des peines qui découlent de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ».

3. Si le juge peut décider de ne transmettre qu'une partie de la question posée, il lui appartient de le préciser. S'il peut la reformuler à l'effet de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, il ne lui revient pas de la modifier. A défaut, il y a lieu de considérer que la Cour de cassation est régulièrement saisie de la question prioritaire de constitutionnalité telle qu'elle a été soulevée dans les mémoires produits devant la juridiction qui la lui a transmise. Le tribunal n'ayant transmis qu'une partie de la question, il y a lieu de se prononcer sur la question telle que posée dans le mémoire spécial.

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

1. Le dernier alinéa de l'article Lp. 279 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie énonce :

« Pour bénéficier des dispositions des a) et b) du II, et sous réserve de l'achèvement des constructions dans le délai fixé à l'article Lp. 278, les lotisseurs, promoteurs ou marchands de biens doivent fournir, au plus tard dans les trois mois suivant la mise en demeure adressée par la direction des services fiscaux, service de contrôle et d'expertise, un état faisant apparaître pour chaque opération, selon le cas, le nombre et la superficie des lots non vendus ou le nombre de millièmes de copropriété invendus. A défaut, les droits complémentaire et supplémentaire s'appliqueront sur la totalité du prix de l'acquisition ayant bénéficié des droits réduits ou de sa valeur vénale. »

2. Les dispositions contestées sont applicables au litige, lequel porte sur la contestation, par la société Antoni, du rappel des droits d'enregistrement mis à sa charge par l'administration fiscale pour n'avoir pas respecté son engagement de revendre dans le délai de quatre ans les biens qu'elle avait acquis sous le régime de faveur des marchands de biens et avoir omis de lui transmettre l'état des lots invendus dans le délai de trois mois suivant le délai imparti pour revendre.

3. Les dispositions contestées n'ont pas été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

4. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

5. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux en ce que les dispositions critiquées, qui prévoient que l'acquéreur qui n'a pas revendu, dans le délai de quatre ans, la totalité des biens acquis sous le régime de faveur des marchands de biens et qui a omis de transmettre un état faisant apparaître le nombre et la superficie des lots invendus, est tenu d'acquitter les droits de mutation dont la perception a été différée, calculés sur la totalité du prix de l'acquisition ayant bénéficié des droits réduits, ne tendent qu'à instaurer une déchéance totale de ce régime de faveur dans l'hypothèse où ne sont pas remplies les conditions d'une déchéance partielle, limitée au prix des seuls lots invendus, et ne peuvent être qualifiées de sanctions ayant un caractère punitif qui, seules, doivent répondre aux exigences des principes de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des peines découlant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

6. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille vingt.

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