18 November 2020
Cour d'appel de Montpellier
RG n° 16/00237

2e chambre sociale

Texte de la décision

MB/CC



































Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 18 NOVEMBRE 2020



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/00237 - N° Portalis DBVK-V-B7A-M3QK



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 SEPTEMBRE 2016

du conseil de Prud'hommes de Montpellier - n° RG F14/01785







APPELANTE :



SAS THEOLIA FRANCE

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Sarah MASOTTA de la SELARL ALTEO, avocat au barreau de MONTPELLIER (postulant)

Représentée par Me Jean philippe PASSANANTE de la SELARL Selarl Inter-Barreaux NUMA AVOCATS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, substitué par Me Delphine GUENIER, avocate au barreau de Marseille (plaidant)







INTIMEE :



Madame [K] [L] épouse [C]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Laëtitia GOARANT, avocat au barreau de MONTPELLIER







Ordonnance de clôture du 23 décembre 2019

COMPOSITION DE LA COUR :



En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 SEPTEMBRE 2020, en audience publique, Monsieur Jean-Pierre MASIA, premier président de chambre, ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :



M. Jean-Pierre MASIA, Président

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

qui en ont délibéré.



Greffier, lors des débats : Mme Marie BRUNEL





ARRET :

- contradictoire



- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;



- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.






*

**




EXPOSE DU LITIGE :




[K] [C] a été engagée le 1er avril 2001 par la société Ventura en qualité de secrétaire comptable dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel régi par la convention collective bureaux d'étude, cabinets d'ingénieurs, société de conseil (Syntec).



Par avenant du 17 janvier 2005, le contrat de travail est passé à temps complet.



La Sas Theolia France, qui fait partie du groupe Futuren (ex Theolia), a absorbé la société Ventura.



Cette entreprise est donc devenue l'employeur de [K] [C] qui a été promue responsable des ressources humaines et qui percevait en dernier lieu une rémunération mensuelle brute moyenne de 3.362 €.



L'entreprise employait habituellement au moins onze salariés.



Reprochant à sa salariée de l'avoir dénigré et d'avoir tenu des propos injurieux et moqueurs à l'encontre de son directeur général et du directeur général de sa maison mère, la Sas Theolia France a convoqué [K] [C] le 25 juin 2014 à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 4 juillet 2014 avec mise à pied conservatoire.



Elle a été licenciée pour faute grave par une lettre du 16 juillet 2014.

[K] [C] a saisi le conseil des prud'hommes de Montpellier le 1er octobre 2014 pour contester cette décision et obtenir la réparation de ses préjudices ainsi que l'application de ses droits.



Par jugement du 26 septembre 2016, ce conseil a :

- dit que la faute grave n'est pas démontrée ;

- dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la Sas Theolia France à payer à [K] [C] les sommes de :

> 44.200 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

> 15.037,23 € au titre de l'indemnité de licenciement,

> 10.213,98 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

> 1.021,39 € au titre des congés payés sur préavis,

> 2.812,54 € à titre de rappel de salaires sur la période de mise à pied,

> 281,25 € au titre des congés payés sur rappel de salaires,

> 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Sas Theolia France à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à [K] [C] dans la limite d'un mois ;

- débouté [K] [C] du surplus de ses demandes ;

- débouté la Sas Théolia France de ses demandes reconventionnelles ;

- dit y avoir lieu à exécution provisoire sur les salaires ;

- condamné la Sas Théolia France aux dépens.



La Sas Theolia France a relevé appel total de ce jugement le 17 octobre 2016.



Vu les conclusions de la Sas Theolia France remises au greffe le 16 mai 2017 ;



Vu les conclusions de [K] [C] remises au greffe le 8 novembre 2019 ;



Vu l'ordonnance de clôture en date du 23 décembre 2019 ;






MOTIFS :



Sur l'exécution du contrat de travail :



1) Sur la non discrimination salariale :



[K] [C] conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de rappel de salaire fondée sur une discrimination salariale. Elle soutient en effet avoir perçu un salaire inférieur de 506 € par mois par rapport à celui de son homologue [G] [D] sans aucune justification et demande à la cour de condamner la Sas Theolia à lui verser la somme de 30.360 €.



Cependant, ainsi que le rappelle justement la Sas Theolia, le principe « à travail égal, salaire égal » ne s'applique que si les salariés, objets de la comparaison, sont dans une situation identique, ce qui n'est pas le cas lorsqu'ils appartiennent à des entreprises différentes, peu important que ces entreprises appartiennent au même groupe.



Or, en l'espèce, [G] [D] est responsable des ressources humaines dans la société holding Futuren (ex Theolia) alors que [K] [C] exerçait ses fonctions au sein de la société filiale Theolia France.



Par conséquent, le principe de non discrimination salariale n'avait pas vocation à s'appliquer entre ces deux personnes, employées dans des entreprises distinctes et le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande de [K] [C].



2) Sur le rappel d'heures supplémentaires :



[K] [C] conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de rappel d'heures supplémentaires. Elle expose qu'elle travaillait 39 heures au lieu de 35 heures par semaine et que les 4 heures supplémentaires hebdomadaires lui étaient payées chaque mois. Elle précise avoir ainsi effectué 207,96 heures supplémentaires au cours de la dernière année de travail soit 78 heures de plus que le contingent maximal de 130 heures par an fixé par l'article 2, chapitre 4 de l'accord de branche du 22 juin 1999 et l'article 33 de la convention collective. Elle se dit bien fondée à solliciter la contrepartie obligatoire en repos équivalent à 100 % applicable aux entreprises de plus de 20 salariés pour ces 78 heures et sollicite la condamnation de la Sas Theolia à lui payer la somme de 7.566 € bruts outre 756,60 € au titre des congés payés afférents.



La Sas Theolia conteste devoir ces sommes en indiquant que la salariée ne rapporte pas la preuve de sa créance puisqu'elle n'a pas déduit de ses calculs les jours de congés annuels et d'arrêt maladie.



Il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.



Lors des réunions du comité d'entreprise du 24 octobre 2014 (pièce 27 de [K] [C]) et du 26 novembre 2014 (pièce 69), la Sas Theolia a admis le principe d'une compensation financière ou en jours de repos pour tout dépassement du contingent d'heures supplémentaires, ainsi que le soutient justement [K] [C].



Cependant, ainsi que le faisait valoir à raison l'employeur lors de ces échanges, ces compensations ne sont dues qu'au titre des heures supplémentaires effectivement réalisées c'est à dire déduction faite des congés, congés sans solde, arrêt maladie ou jours fériés.



Lors de ces réunions, l'employeur a déploré le caractère chronophage de ces calculs par rapport au faible enjeu financier et a décidé d'imposer aux salariés à compter de décembre 2014 de procéder eux-mêmes au décompte de leurs heures effectivement réalisées, ce qui est la position de la Sas Theolia devant la cour d'appel.



Mais, dès lors que l'employeur a reconnu, en son principe, l'existence d'une créance d'heures supplémentaires au regard du contingent maximal fixé par l'accord de branche et la convention collective, il lui appartient d'en déterminer lui-même le quantum exact sans pouvoir faire peser cette charge sur le salarié.



Par conséquent, faute pour la Sas Theolia de démontrer que le dépassement du contingent d'heures supplémentaires allégué ne correspond pas aux heures effectivement réalisées, la demande de [K] [C] sera accueillie dans son intégralité.



La Sas Theolia sera condamnée à payer à [K] [C] la somme de 7.566 € bruts correspondant à ses 78 heures supplémentaires outre 756,60 € au titre des congés payés afférents.



Le jugement sera infirmé sur ce point.



Sur le bien fondé du licenciement :



La Sas Theolia France conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et demande à la cour de dire valable le licenciement prononcé pour faute grave contre [K] [C]. Elle soutient que les propos injurieux et moqueurs tenus par la salariée à l'occasion de son activité professionnelle contre son entreprise et ses organes de direction sur la messagerie mise à disposition par son employeur justifient le licenciement disciplinaire intervenu puisqu'ils rendaient impossible la poursuite de la relation contractuelle.

[K] [C] conclut à la confirmation du jugement en soutenant que le motif réel du licenciement était économique et non personnel, que la preuve de la faute, obtenue par l'extraction hors sa présence de courriels privés depuis une messagerie dont l'employeur ne démontre pas qu'elle était professionnelle, est illicite, que l'employeur ne démontre pas que les messages extraits de cette messagerie lui sont imputables, son bureau en open space étant accessibles à tous, et enfin que le dénigrement allégué n'est pas caractérisé.



L'employeur qui prend l'initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige. Les motifs avancés doivent être précis et matériellement vérifiables, des motifs imprécis équivalant à une absence de motif. Le licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c'est-à-dire être fondé sur des faits exacts, précis, objectifs et revêtant une certaine gravité.



En cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.



La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Elle peut justifier une mise à pied conservatoire.



Alors que la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'incombe pas particulièrement à l'une ou l'autre des parties, il revient en revanche à l'employeur d'apporter la preuve de la faute grave qu'il reproche au salarié.



S'il subsiste un doute concernant l'un des griefs invoqués par l'employeur ayant licencié un salarié pour faute grave, il profite au salarié. Lorsque les faits sont établis mais qu'aucune faute grave n'est caractérisée, le juge du fond doit vérifier si les faits initialement qualifiés de faute grave par l'employeur constituent ou non une cause réelle et sérieuse de licenciement.



En l'espèce, la Sas Theolia France a licencié [K] [C] pour faute grave en indiquant :

«  Nous faisons suite à l'entretien préalable qui s'est tenu le vendredi 4 juillet 2014 et vous informons que nous contraints de vous licencier pour faute grave, en raison des griefs que nous vous avons longuement exposés à cette occasion et à propos desquels vous n'avez pu nous fournir aucune explication satisfaisante.

Ces griefs sont les suivants :

A la suite d'un audit des postes et serveurs informatiques réalisé au sein de la société par un prestataire informatique les 23 et 24 mai 2014, nous avons découvert avec stupéfaction la teneur des conversations que vous avez échangées via le logiciel professionnel de discussion instantanée/partage des données mis en place par la société (Exodus).

En effet, il s'est avéré que vous avez tenu des propos dénigrants et injurieux à l'encontre de la société et des membres de la direction (1) et vous avez gravement manqué à vos fonctions en vous réjouissant du refus des salariés de signer la charte éthique (2). (...)»



1) Dénigrement de la société et des membres de la direction :



A titre d'exemple, nous vous reprochons les propos suivants :

- le 17 avril 2014 à 10h16, vous avez utilisé des termes moqueurs et injurieux à l'encontre de Monsieur [P] [R] ([H]), le directeur général de la société Theolia en écrivant notamment :

«c'est mon [P] chéri qui va kiffer »

«parano de [H] »

- le 19 novembre 2012 à 12h04 vous vous êtes moquée de Monsieur [A] [N] ([I]), le directeur général de la société en ces termes :

«dis mois, juste en bref, ça a été positif avec [I] vendredi ' Ou c'était du roulage dans la farine ' »

«Bon, ok, on va donc affuter nos armes pour demain. Ah oui, il transpire facilement !! »

«On se disait que peut-être son éventuelle prime d'objectif s'était envolée à cause de notre grève et que ça, c'était génial !! si c'est exact »

- le 22 mai 2014 à 15h18, à propos de Monsieur [A] [N] et de Monsieur [U] [O], directeur d'agence, vous avez écrit :

«je déteste de + en + [I] »

«ce sont des gros nuls »

- le 19 novembre 2012 à 12h04 à propos de la direction de la société, vous avez écrit :

«et puis, ils nous font vraiment trop chier...c'est du foutage de gueule »

«pipeau et cie »

- le 13 mars 2014 à 15h18, toujours à propos de Monsieur [A] [N], vous avez écrit :

«pourquoi il est si infect ' »

«Dis-lui de péter un coup, ça ira mieux »

- le 22 janvier 2013 à 14h13, toujours à propos de Monsieur [A] [N], vous avez écrit :

«vous voulez voir [I] ' Ou vous voulez que j'aille lui mettre en coup de boule ' »

- le 21 mai 2014 à 11h17 au sujet du départ d'un salarié de la société, vous avez écrit :

«en tout cas, il a raison de partir, c'est une sale boîte ! » « je les déteste de + en + »

- le 1er avril 2014, vous vous êtes réjouie du fait qu'un salarié ne se soit pas présenté à son entretien annuel avec Monsieur [A] [N]. Sur ce point, vous avez écrit :

[E]: « il est au bord de la crise de nerfs, il est venu à [Localité 4] pour l'entretien de [J] et [J] vient de partir sur le terrain' »

[T] : « D »

[T] : « D »

[E] : « et [F] a dit, euh non je ne décale pas mon entretien à ce jour je ne suis pas prêt »

[T] : « GENIAL !!! »



Votre attitude et vos propos dénigrants, moqueurs et injurieux sont profondément inacceptables.

Ils le sont d'autant plus au regard des fonctions que vous exercez, lesquelles impliquent une obligation de réserve et de discrétion renforcée envers les salariés de la société.

2) Sur votre attitude quand au refus des salariés de signer la charte éthique :



En tant que responsable des ressources humaines, vous avez entre autres pour mission de faire respecter la politique sociale de l'entreprise, notamment en veillant à ce que les différents règlements et chartes soient appliqués.

L'audit informatique a pourtant révélé que vous vous réjouissiez des refus de signature de la charte éthique par certains salariés ce qui est inacceptable.

Par exemple :

- le 1er avril 2014 à 17h17, lors d'une conversation avec madame [S] [Y], vous avez écrit :

« personne ne semble vouloir signer ici ! »

« c'est bien que ce soit un refus quasi collectif »

- le 27 mars 2014 à 9h09, à propos du refus de signature de la charte éthique, vous avez écrit :

« C'est bien du coup, car ça va être général ! »



Les propos que vous avez tenus sur Exodus sont profondément inadmissibles.



Compte tenu de la nature de vos fonctions et des responsabilités qui vous sont confiées, votre comportement porte gravement atteinte aux intérêts de la société.



Dans ces conditions la poursuite de votre collaboration au sein de la société est devenue impossible. (...) »



Contrairement à ce que soutient à tort [K] [C], les courriels servant de fondement à la faute grave n'ont pas été obtenus par la mise en 'uvre, sans information ni consultation préalables du comité d'entreprise, de moyens ou techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés.



En effet, l'audit informatique ayant permis la découverte des courriels litigieux a été mis en 'uvre après la divulgation par un ancien salarié à compter du 20 mai 2014, sur le forum de discussion du site internet www.boursorama.fr, d'informations privilégiées à caractère non public concernant l'entreprise Theolia France susceptibles d'avoir été fournies par des personnes internes à l'entreprise (pièce 4 de l'appelante).



S'agissant d'un audit informatique ponctuel justifié par la nécessité de mettre un terme, en interne, à d'éventuels agissements malveillants à l'origine possible de la divulgations d'informations protégées sur internet par un ancien salarié (pour lequel la Sas Theolia a obtenu le 1er juillet 2014 une ordonnance sur requête du président du tribunal de grande instance d'Evreux l'ayant autorisée à rechercher au domicile de l'intéressé, par l'intermédiaire de plusieurs huissiers de justice, tout élément de preuve concernant cette affaire), l'information et la consultation préalables du comité d'entreprise n'avaient pas lieu d'être.



[K] [C] soutient que la preuve que ces courriels litigieux lui sont imputables n'est pas rapportée et elle fait valoir qu'ils ont pu être écrit par n'importe qui depuis son ordinateur puisque son bureau était situé dans un « open space ».



Toutefois, tous les courriels litigieux proviennent d'une adresse électronique intitulée [T] qui correspond aux deux premières lettres du prénom et à la première initiale du patronyme de [K] [C] et cette dernière reconnaît que son ordinateur était protégé par un mot de passe (page 7 de ses écritures dernier paragraphe) de sorte que l'hypothèse d'un piratage par un tiers n'est pas plausible et ce d'autant que ces conversations avec d'autres salariés de l'entreprise, notamment avec [S] [Y], secrétaire, (dont l'adresse électronique est [E] et qui a été licenciée pour faute grave le 22 juillet 2014 cf pièce 17 de l'appelant), qui appelle son interlocutrice « [K] » dans le courriel du 15 avril 2014 à 11h27, ont eu lieu durant plusieurs années et à tout moment de la journée de travail ainsi que cela ressort des conversations retranscrites ci-dessus et portent sur son activité professionnelle de responsable de ressources humaines.



[K] [C] conteste ensuite le caractère professionnel et interne de la messagerie.



Il résulte cependant du témoignage d'un ancien salarié de l'entreprise, [X] [B], que [K] [C] produit elle-même aux débats (pièce 36 de l'intimée) que la messagerie Exodus, sur laquelle ont été échangés les courriels litigieux, « est un système interne qui ne s'étend pas en dehors du réseau de l'entreprise et que ce système a été mis en place dès 2003, sur une initiative de ma part, pour les salariés. Il est utilisé par les salariés pour des échanges professionnels ou privés indistinctement et sans qu'aucune consigne ne soit donnée à aucun moment par la direction sur son utilisation. Les conversations ont lieu entre deux utilisateurs et ne sont pas diffusées vers plusieurs personnes. »



Il est donc vain de la part de [K] [C] d'affirmer que les données extraites d'Exodus « étaient forcément identifiables comme personnelles, provenant de conversations privées » (page 9 des conclusions de l'intimée) puisque le caractère interne et à usage professionnel de cet outil informatique mis à disposition des salariés par la Sas Theolia France résulte clairement du témoignage précité.



S'agissant d'une messagerie interne mise à disposition de [K] [C] par la Sas Theolia France pour les besoin de son travail, les courriels litigieux sont présumés avoir un caractère professionnel de sorte que la Sas Theolia France était en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressée sauf si [K] [C] les avaient identifiés comme personnels.



Or, il ne résulte d'aucune des mentions portées sur les courriels litigieux que ceux-ci avaient été identifiés comme personnels par [K] [C] qui les a écrits durant ses horaires de travail et

en rapport avec son activité professionnelle ce dont il s'évince



qu'ils ne revêtent pas un caractère privé et qu'ils peuvent être retenus au soutien d'une procédure disciplinaire.



Les propos tenus par [K] [C] en sa qualité de responsable des ressources humaines auprès d'une autre salariée de l'entreprise ont un caractère injurieux et dénigrant puisqu'elle traite le directeur général de la maison mère de « parano », le directeur général de la société et le directeur d'agence de « gros nuls », qui « font vraiment trop chier » au sein d'une « sale boîte » et avec une équipe de direction qu'elle « déteste de + en + » et un directeur général auquel elle propose d'aller « mettre un coup de boule ».



De tels propos, outranciers, violents et réitérés, sont constitutifs d'une faute grave rendant impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise et ce, même s'ils n'ont pas été diffusés auprès d'autres personnes que leur destinataire et s'il n'en est résulté aucun préjudice pour l'employeur.



Les éléments constitutifs de la faute grave étant réunis, le moyen invoqué par l'intimée et tiré du caractère prétendument économique du licenciement doit être rejeté.



Par suite, le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions.



Sur les autres demandes :



Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la Sas Theolia les frais non compris dans les dépens qu'elle a engagé et elle sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS :



La cour, statuant publiquement et contradictoirement :



Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté la demande de [K] [C] au titre d'une prétendue discrimination salariale ;



Statuant à nouveau sur tous les autres chefs infirmés et y ajoutant ;



Condamne la Sas Theolia à payer à [K] [C] la somme de 7.566 € bruts correspondant à ses 78 heures supplémentaires outre 756,60 € bruts au titre des congés payés afférents ;



Dit que les preuves produites par l'employeur au soutien de la faute grave sont licites et loyales ;



Dit justifié le licenciement pour faute grave prononcé contre [K] [C] le 16 juillet 2014 ;





Déboute par conséquent [K] [C] de toutes ses prétentions pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;



Condamne [K] [C] aux entiers dépens de première instance et d'appel ;



Déboute la Sas Theolia de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.





LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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