1 October 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-14.551

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:C201139

Texte de la décision

CIV. 2

COUR DE CASSATION



LM


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 1er octobre 2020




NON-LIEU À RENVOI


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1139 F-D

Pourvoi n° E 20-14.551

Demande d'aide juridictionnelle n° 2020C01163
de Mme X... en cours d'examen
par le bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER OCTOBRE 2020

Par mémoire spécial présenté le 2 juillet 2020, Mme G... X..., domiciliée [...] , a formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° E 20-14.551 qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 30 janvier 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-6), dans une instance l'opposant :

1°/ à la société Areas dommages, société d'assurances mutuelles, dont le siège est [...] ,

2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Var, dont le siège est [...] .

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Besson, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme X..., de Me Le Prado, avocat de la société Areas dommages, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Besson, conseiller rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, Mme Nicolétis, avocat général, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Mme X..., qui est infirme moteur cérébral et souffre d'une hémiplégie droite, effectue ses déplacements à l'extérieur en fauteuil roulant électrique.

2. Elle a été victime le 11 février 2015, alors qu'elle se déplaçait en fauteuil roulant, d'un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré par la société Areas dommages.

3. Elle a assigné cet assureur, qui refusait de l'indemniser de ses blessures subies à l'occasion de cet accident, au motif qu'elle aurait commis une faute exclusive de son droit à indemnisation, en réparation de ses préjudices.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

4. A l'occasion du pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 30 janvier 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, Mme X... a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les dispositions des articles 3 et 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, selon lesquelles les victimes conductrices de véhicules terrestres à moteur peuvent voir leur droit à indemnisation des dommages qu'elles ont subis limité ou exclu lorsqu'elles ont commis une faute, portent-elles atteinte, en ce qu'elles n'excluent pas de la catégorie des victimes conductrices d'un véhicule terrestre à moteur les personnes handicapées circulant sur un fauteuil roulant électrique, au principe résultant de l'article 34 de la Constitution selon lequel l'incompétence négative du législateur ne doit pas affecter un droit ou une liberté que la Constitution garantit, en l'occurrence, le principe d'égalité devant la loi consacré par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine tel qu'il résulte de l'article 1er du préambule de la Constitution de 1946, la liberté d'aller et de venir protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et les exigences constitutionnelles résultant des alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution de 1946 qui impliquent la mise en oeuvre d'une politique de solidarité nationale en faveur des personnes handicapées ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

5. L'article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 prévoit que les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées, sauf lorsqu'elles ont volontairement recherché le dommage qu'elles ont subi, des dommages résultant des atteintes à leur personne, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l'exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l'accident.

6. L'article 4 de la même loi dispose que la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis.

7. Ces dispositions contestées, de nature législative, sont applicables au litige, en ce sens que, sur leur fondement, la cour d'appel a décidé que Mme X... avait la qualité de conducteur d'un véhicule terrestre à moteur et qu'elle avait commis une faute qui était de nature à réduire son droit à indemnisation de moitié.

8. En outre, elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

9. Mais, d'une part, la question ne portant pas sur l'interprétation de principes à valeur constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

10. D'autre part, la question ne présente pas un caractère sérieux, dès lors que l'incompétence négative du législateur invoquée n'affecte aucun des droits ou libertés garantis par la Constitution, visés par la question, en l'absence d'interprétation jurisprudentielle constante des dispositions législatives contestées, dont il résulterait qu'un fauteuil roulant électrique est un véhicule terrestre à moteur au sens et pour l'application des articles 1er, 3 et 4 de la loi du 5 juillet 1985.

11. En conséquence, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

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