5 juin 2024
Cour d'appel de Lyon
RG n° 24/04597

RETENTIONS

Texte de la décision

N° RG 24/04597 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PWOM



Nom du ressortissant :

[E] [M]



[M]

C/

PREFETE DU RHÔNE

COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 05 JUIN 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers





Nous, Marianne LA MESTA, conseillère à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,



Assistée de Charlotte COMBAL, greffière,



En l'absence du ministère public,



En audience publique du 05 Juin 2024 dans la procédure suivie entre :



APPELANT :



M. [E] [M]

né le 19 Juillet 1992 à [Localité 3]

de nationalité Algérienne



Actuellement retenu au centre de rétention administrative de [4]



Non comparant, représenté par Maître Nathalie LOUVIER, avocat au barreau de LYON, commis d'office



ET



INTIMEE :



Mme PREFETE DU RHÔNE



[Adresse 1]

[Localité 2]



non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Léa DAUBIGNEY, avocat au barreau de l'Ain substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON



Avons mis l'affaire en délibéré au 05 Juin 2024 à 14 heures 00 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit :




FAITS ET PROCÉDURE



Par décision du 20 mars 2024, prise le jour de la levée d'écrou de [E] [M] alias [C] [R], ci-après uniquement dénommé [E] [M], à l'issue de l'exécution d'une peine de 5 mois d'emprisonnement prononcée le 30 décembre 2023 par le tribunal correctionnel de Lyon pour des faits de vol en réunion en récidive, la préfète du Rhône a ordonné son placement de en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire afin de permettre l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d'une interdiction de retour pendant une durée de 24 mois prise et notifiée le 28 décembre 2023 à l'intéressé par l'autorité administrative.



Par ordonnances des 22 mars 2024, 19 avril 2024 et 19 mai 2024, dont la première et la dernière ont été confirmées en appel les 24 mars 2024 et 21 mai 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a prolongé la rétention administrative de [E] [M] pour des durées successives de vingt-huit, trente jours et quinze jours.



Suivant requête du 31 mai 2024, enregistrée le 2 juin 2024 à 14 heures 50 par le greffe, la préfète du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner une dernière prolongation exceptionnelle de la rétention de [E] [M] pour une durée de quinze jours.



Dans son ordonnance du 3 juin 2024 à 10 heures 43, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a fait droit à la requête de la préfète du Rhône.



[E] [M] a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe le 4 juin 2024 à 9 heures 33, en faisant valoir que le maintien de sa rétention ne peut être justifié par la seule menace à l'ordre public en l'absence de preuve de l'existence de perspectives d'éloignement et qu'en tout état de cause, les faits reprochés sont insuffisants pour caractériser un danger réel et actuel pour l'ordre public.



Il demande en conséquence l'infirmation de l'ordonnance déférée et sa remise en liberté.



Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 5 juin 2024 à 10 heures 00.



[E] [M] n'a pas comparu. Il a fait savoir aux services chargés de l'escorter qu'il ne pouvait se présenter à l'audience en raison de douleurs dentaires, le médecin du centre de rétention ayant toutefois estimé, après examen, que son état de santé n'était pas incompatible avec un déplacement à la cour d'appel, ainsi qu'il ressort du procès-verbal transmis le 5 juin 2024 à 9 heures 22 par les forces de l'ordre et du certificat médical joint à celui-ci, régulièrement transmis aux parties.



Le conseil de [E] [M], entendu en sa plaidoirie, a soutenu les termes de la requête d'appel.



La préfète du Rhône, représentée par son conseil, a demandé la confirmation de l'ordonnance déférée.




MOTIVATION



Sur la recevabilité de l'appel



L'appel de [E] [M], relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), est déclaré recevable.



Sur le bien-fondé de la requête en prolongation



L'article L. 741-3 du CESEDA énonce qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ et que l'administration doit exercer toute diligence à cet effet.



Ce texte, autonome et de portée générale, s'applique à tous les stades de la rétention administrative.



L'article L. 742-5 du même code dispose que «A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.

L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.

Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours.» 



En l'espèce, [E] [M] estime dans sa requête écrite d'appel que la menace pour l'ordre public ne peut à elle-seule suffire à justifier le maintien en rétention en l'absence de preuve de l'existence de perspectives raisonnables d'éloignement et qu'au demeurant, sa présence en France n'est pas constitutive d'une menace pour l'ordre public, dans la mesure où le quantum de la peine qu'il vient de purger relativise la gravité des faits de vol commis, tandis que les condamnations antérieures prononcées à son encontre pour le même type d'infraction sont anciennes pour dater de 2018 et 2019.



Il y a d'abord lieu d'observer qu'en l'état des diligences engagées par l'autorité administrative auprès des autorités consulaires algériennes et qui sont justifiées par les pièces de la procédure, il doit être considéré qu'il demeure une perspective raisonnable d'éloignement de [E] [M], étant souligné que celui-ci a été identifié comme étant de nationalité algérienne le 29 février 2024 par les services de police de ce pays sur la base de ses empreintes et photographies dans le cadre d'une demande de coopération policière internationale, comme le révèle le procès-verbal établi à cette date par les services de la police aux frontières.



Sur ce second moyen soulevé, il convient de rappeler que dans l'ordonnance rendue le 21 mai 2024 suite à l'appel interjeté par [E] [M] à l'encontre de la décision ayant autorisé la troisième prolongation de la rétention, le délégué du premier président a d'ores et déjà retenu, en se référant aux trois condamnations dont celui-ci a fait l'objet en 2018, 2019 et 2023 sous l'identité erronée de [C] [R], que son comportement délictueux s'inscrit dans le temps et relève d'une menace pour l'ordre public.



Aucun élément nouveau n'étant invoqué par [E] [M] depuis le prononcé de cette ordonnance, dont la survenance serait de nature à remettre en cause l'appréciation faite il y a tout juste 15 jours relativement au critère de la menace pour l'ordre public, il y a dès lors lieu de considérer que cette menace est toujours d'actualité.



Les conditions d'une dernière prolongation exceptionnelle au sens des dispositions de l'article L. 742-5 du CESEDA étant réunies, puisqu'il suffit que le retenu réponde à l'un des critères posés par le texte précité pour autoriser la poursuite de la rétention administrative, l'ordonnance déférée sera en conséquence confirmée.



PAR CES MOTIFS



Déclarons recevable l'appel formé par [E] [M],



Confirmons l'ordonnance déférée.







Le greffier, Le conseiller délégué,

Charlotte COMBAL Marianne LA MESTA

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