2 mai 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n° 24/50472

Service des référés

Texte de la décision

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS







N° RG 24/50472

N° : 2CV/LB

Assignations du :
18 janvier 2024

[1]

[1] 3 copies exécutoires
délivrées le :


+1 copie ADM.JUD.


JUGEMENT SELON LA

PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE AU FOND
rendu le 2 mai 2024



par Cécile Viton, Première vice-présidente adjointe au tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du tribunal,

Assistée de Laurence Bouvier, Greffier
DEMANDEUR

Maître [D] [X] ès qualités de mandataire successoral de la succession de [L] [J] [V]
[Adresse 2]
[Localité 6]

représenté par Maître Stéphane Dumaine-Martin, avocat au barreau de Paris - #D0062


DÉFENDEURS

Madame [F] [J] épouse [Z]
[Adresse 10]
[Adresse 1] (Suisse)

représentée par Maître Aude Lacroix de l’Association Legitia, avocat postulant au barreau de Paris - #E1971, et par Maître Fanny Charpentier, avocat plaidant au barreau de Versailles

Monsieur [S] [J] [V]
[Adresse 9]
[Adresse 3] (Suisse)

représenté par Maître Lynn Hawari, avocat au barreau de Paris - #D1977

Madame [N] [V] divorcée [H]
[Adresse 4]
[Localité 7]

non représentée

DÉBATS

A l’audience du 4 avril 2024, tenue publiquement, présidée par Cécile Viton, Première vice-présidente adjointe, assistée de Clémence Breuil, Greffier,


Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

[L] [O] [V] est décédée le [Date décès 5] 2009 laissant à sa succession ses trois enfants Madame [N] [V] divorcée [H], Madame [F] [J] épouse [Z] et Monsieur [S] [J] [V].

Par arrêt en date du 25 octobre 2012, la cour d’appel de Paris a désigné Maître [D] [X], administrateur judiciaire, en qualité de mandataire successoral à l’effet d’administrer la succession de [L] [O] [V] pour une durée de 12 mois.

Par ordonnance rendue en la forme des référés le 22 janvier 2015, la mission confiée à Maître [D] [X] par l’arrêt rendu le 25 octobre 2012 par la cour d’appel de Paris et dans les termes de cet arrêt ainsi que de l’ordonnance sur requête rendue le 17 mars 2014, a été renouvelée pour une durée de douze mois à compter de cette décision.

Par jugement selon la procédure accélérée au fond rendu le 13 avril 2023, la mission de Maître [D] [X] ès qualités a été prorogée pour une durée de douze mois à compter du 22 janvier 2023.

Par actes de commissaire de justice délivrés les 18 janvier et 15 février 2024, Maître [D] [X] ès qualités a fait assigner selon la procédure accélérée au fond Madame [N] [V], Madame [F] [J] épouse [Z] ainsi que Monsieur [S] [J] [V] devant le président du tribunal judiciaire de Paris aux fins de prorogation de sa mission.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience, Maître [D] [X] ès qualités demande de :
- proroger sa mission pour une durée de dix-huit mois à compter du 22 janvier 2024, telle que définie par l’arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 25 octobre 2012 et les décisions subséquentes ;
- rappeler que l’exécution provisoire de la décision à intervenir est de droit par application de l’article 514-1 du code de procédure civile ;
- dire et juger que les dépens constitueront des frais privilégiés de partage, qui seront supportés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans la succession.

À l’appui de ses prétentions, Maître [D] [X] ès qualités fait valoir que :
- un mandataire successoral qui est toujours en fonction au jour de la délivrance de l’assignation, a qualité pour solliciter, au contradictoire des héritiers, la prorogation de sa mission ;
- le différend entre les héritiers, ayant motivé la désignation d’un administrateur judiciaire, n’a pas été réglé puisque les opérations de partage ne sont pas effectives et que la procédure en comptes, liquidation et partage n’est pas terminée ;
- les critiques de Monsieur [S] [J] [V] sur la gestion du mandataire successoral ne sont pas justifiées aux motifs que la vente de l’immeuble à [Localité 11] a été autorisée par une ordonnance rendue le 17 mars 2014, que le projet de protocole a été rédigé à la demande de Monsieur [S] [J] [V] et tendait à envisager l’extension de la mission du mandataire successoral mais n’a pas été suivi d’effet et que la gestion de la succession ressort des rapports de mission relatant ses diligences.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience, Madame [F] [J] épouse [Z] demande de :
- lui donner acte de ce qu’elle s’associe à la demande de reconduction de Maître [D] [X] ès qualités pour une durée de dix-huit mois à compter du 22 janvier 2024, dans les termes tels que définis par l’arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 25 octobre 2012 ;
- à titre infiniment subsidiaire, nommer un mandataire successoral aux lieu et place de Maître [D] [X], lequel recevra pour mission d’administrer provisoirement la succession de [L] [V], et ce pour une durée de dix-huit mois.

A l’appui de ses prétentions, Madame [F] [J] épouse [Z] fait valoir que les opérations de partage ne sont toujours pas finalisées après près de quinze années de procédure, que des biens immobiliers sont toujours à administrer, que la vente des biens immobiliers situés à [Localité 11] est intervenue le 20 janvier 2017 sur décision judiciaire et avec l’accord de l’ensemble des héritiers, que le projet de protocole a été établi sous l’égide de Maître [D] [X] ès qualités au printemps 2023 à la demande de Monsieur [S] [J] [V], que Maître [D] [X] ès qualités n’a pas qualité pour imposer aux indivisaires un calendrier d’occupation de la maison située à La [Localité 8].

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience, Monsieur [S] [J] [V] demande de déclarer la demande de « Maître [D] [X] » irrecevable et mal fondée, de le débouter de ses fins et conclusions, de le condamner au paiement d’une indemnité de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens, et de déclarer le jugement à intervenir exécutoire par provision.

A l’appui de ses prétentions, Monsieur [S] [J] [V] fait valoir que « Maître [D] [X] » :
- n’a aucune qualité pour engager la présente action qui est réservée aux ayants droit de la défunte et n’a pas intérêt à l’action, la seule perception d’honoraires pour sa mission ne pouvant ressortir de l’intérêt compris au sens de la loi ;
- excède les actes qu’il est habilité à accomplir aux motifs qu’il a établi un projet de protocole visant le maintien de son intervention et son extension à l’indivision et qu’il a vendu un immeuble à [Localité 11] malgré l’opposition de Monsieur [S] [J] [V] au regard de la solvabilité très contestable du candidat acquéreur ;
- exécute sa mission de façon partiale aux motifs qu’il lui a refusé les clés des différents biens immobiliers et qu’il a opposé des fins de non-recevoir à ses demandes légitimes.

Madame [N] [V], assignée à sa personne, n’est pas représentée à l’audience. Il sera statué par jugement réputé contradictoire à l’égard de toutes les parties.


MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de prorogation de mission du mandataire successoral

Aux termes de l’article 813-1 du code civil : « Le juge peut désigner toute personne qualifiée, physique ou morale, en qualité de mandataire successoral, à l’effet d’administrer provisoirement la succession en raison de l’inertie, de la carence ou de la faute d’un ou de plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d’une opposition d’intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale. / La demande est formée par un héritier, un créancier, toute personne qui assurait, pour le compte de la personne décédée, l’administration de tout ou partie de son patrimoine de son vivant, toute autre personne intéressée ou par le ministère public. ». Aux termes de l’article 813-9 du même code : « Le jugement désignant le mandataire successoral fixe la durée de sa mission ainsi que sa rémunération. A la demande de l’une des personnes mentionnées au deuxième alinéa de l’article 813-1 ou à l’article 814-1, il peut la proroger pour une durée qu’il détermine. / La mission cesse de plein droit par l’effet d’une convention d’indivision entre les héritiers ou par la signature de l’acte de partage. Elle cesse également lorsque le juge constate l’exécution complète de la mission confiée au mandataire successoral. »

En premier lieu, le mandataire successoral, désigné en application des dispositions de l’article 813-1 du code civil, a qualité et intérêt à agir en prorogation d’une mission dont il doit veiller au bon déroulement. Par suite, il convient de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [S] [J] [V].

En second lieu, la mésentente entre les héritiers se traduit par leur opposition dans la présente procédure de même que dans le cadre des opérations de comptes liquidation et partage qui ont débuté en octobre 2022 parallèlement au pourvoi en cassation formé par Monsieur [S] [J] [V] à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 25 mai 2022, alors que la succession comporte notamment des biens immobiliers. Il s’ensuit que les conditions du maintien de la mission du mandataire successoral sont remplies. La circonstance que, selon Monsieur [S] [J] [V], le mandataire successoral ait dépassé les termes de sa mission et l’ait exécutée de façon partiale, est sans incidence sur le fait que les conditions du maintien de la mission du mandataire successoral sont remplies, la question du renouvellement de la mission du mandataire successoral étant distincte de celle du dessaisissement de la personne désignée en qualité de mandataire successoral et Monsieur [S] [J] [V] ne sollicitant pas ce dessaisissement au regard de l’existence de manquements caractérisés dans l’exercice de cette mission sur le fondement de dispositions de l’article 813-7 du code civil. Au vu de la situation successorale et du délai déjà expiré depuis le 22 janvier 2024, la durée de dix-huit mois sollicitée par le mandataire successoral apparaît insuffisante et il convient de proroger sa mission pour une durée de vingt-quatre mois à compter du 22 janvier 2024. Il appartiendra au mandataire successoral de rendre compte de sa mission annuellement conformément aux dispositions de l’article 813-8 du code civil.



Sur les autres demandes

Le présent jugement est exécutoire de droit à titre provisoire en application des dispositions du 6° de l’article 481-1 du code de procédure civile, sans qu’il soit nécessaire de les rappeler.

Les dépens seront mis à la charge de la succession administrée.

Monsieur [S] [J] [V], qui succombe en ses demandes, sera débouté de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.


PAR CES MOTIFS

Statuant selon la procédure accélérée au fond, par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

Rejetons la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [S] [J] [V].

Prorogeons pour une durée de vingt-quatre mois à compter du 22 janvier 2024, la mission de Maître [D] [X] en qualité de mandataire successoral de la succession de [L] [O] [V], avec la mission telle que définie par arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 25 octobre 2012 et les décisions subséquentes.

Disons que les dépens seront mis à la charge de la succession administrée.

Déboutons Monsieur [S] [J] [V] de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.


Fait à Paris le 2 mai 2024


Le GreffierLe Président

Laurence BouvierCécile Viton

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.