30 avril 2024
Cour d'appel de Montpellier
RG n° 22/02978

Chambre commerciale

Texte de la décision

ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



Chambre commerciale



ARRET DU 30 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/02978 - N° Portalis DBVK-V-B7G-POCA





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 11 AVRIL 2022

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEZIERS

N° RG 20/02209





APPELANT :



Monsieur [L] [T]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Solène MANGIN de la SELARL BAM AVOCATS, avocat au barreau de BEZIERS







INTIMEE :



Association PROTECTION CIVILE DE L'HERAULT agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Elisabeth MORET-LEFEBVRE de la SELARL MGS JURISCONSULTE, avocat au barreau de BEZIERS







Ordonnance de clôture du 20 Février 2024





COMPOSITION DE LA COUR :



En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 MARS 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :



Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère

M. Thibault GRAFFIN, conseiller

qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Mme Audrey VALERO

ARRET :



- Contradictoire



- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;



- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Audrey VALERO, greffière.






EXPOSÉ DU LITIGE



M. [L] [T], membre bénévole de l'association Protection Civile de L'Hérault depuis janvier 2010, s'est vu notifier le 13 août 2019 une mise à pied à titre conservatoire dans l'attente du déroulement d'une procédure disciplinaire.



Le 14 août 2019, il a été convoqué à un conseil de discipline, qui, après avoir entendu M. [T] le 23 août 2019, a décidé à l'unanimité son exclusion de l'association, décision notifiée le 27 août 2019.



Après une vaine tentative de règlement amiable, par exploit du 22 octobre 2020, M. [T] a fait assigner l'association Protection Civile de L'Hérault pour contester cette décision et obtenir le versement de dommages et intérêts.



Par jugement en date du 11 avril 2022, le tribunal judiciaire de Béziers a débouté M. [T] de l'intégralité de ses demandes, et l'a condamné à payer à l'association Protection Civile de L'Hérault la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.



Le tribunal retient en les motifs suivants :



"Il résulte des pièces versées aux débats et notamment des statuts et du règlement intérieur de l'association Protection Civile de l'Hérault validés et approuvés par une assemblée générale extraordinaire du 16 mars 2019 que 'La qualité de membre bienfaiteur ou d'adhérent se perd par : le décès, la démission et la radiation pour le non-paiement de la cotisation ou tout autre motif grave'.



Le règlement intérieur applicable à l'ensemble des adhérents vient préciser, dans ses articles 9.1 à 9.11 les modalités de composition et de fonctionnement du conseil de discipline et prévoit, dans son article 9.12, la teneur de la lettre de convocation devant le conseil de discipline.



Ce modèle de lettre de convocation ne prévoit pas de rappeler les modalités d'assistance prévues dans le règlement intérieur de l'association et aucun article statutaire n'impose de rappeler ces modalités d'assistance dans la lettre de convocation.



A la lecture de la lettre de convocation devant le conseil de discipline adressée à M. [T], le tribunal relève le respect du modèle de lettre de convocation prévue à l'article 9.12. Aucun texte réglementaire ou législatif ne prévoit l'obligation de porter à la connaissance du membre adhérent d'une association les modalités d'assistance et/ou de représentation prévues statutairement devant un conseil de discipline.



Dès lors, M. [T] ne sera pas suivi dans son argumentation tendant à soutenir l'irrégularité de la procédure disciplinaire pour absence de mention de la possibilité de se faire assister dans la lettre de convocation.



En ce qui concerne les faits qui lui sont reprochés et qui doivent nécessairement être portés à la connaissance du membre d'une association convoqué à un conseil de discipline, force est de constater que ces faits lui ont bel et bien été précisés malgré ses dénégations. La lettre de convocation est rédigée comme suit : «Nous constatons malheureusement que votre comportement est incompatible avec la vie associative et met en danger le fonctionnement de notre association.

Vous pourrez présenter vos observations sur les faits constatés sur le terrain, cités infra, qui vous sont reprochés et donner toute explication sur les raisons de votre comportement ».



C'est ainsi qu'il est reproché à M. [T] de ne pas avoir rendu compte, en sa qualité de trésorier, par voie hiérarchique de la comptabilité mensuelle et de tout mouvement bancaire nécessitant une autorisation, et notamment d'avoir engagé une dépense non autorisée par le conseil d'administration à savoir la réparation de la climatisation du Vps 343 ce qu'il reconnaît d'ailleurs dans un courriel du 10 août 2019, d'avoir manqué, en sa qualité d'administrateur et de cadre opérationnel départemental, à ses obligations notamment en ayant un comportement inadapté vis-à-vis des secouristes lesquels ont fait remonter leurs difficultés à la hiérarchie et, de fait, son entrave au bon fonctionnement de l'association ce qui ressort de ce même courriel du 10 août 2019 dans lequel M. [T] déclare : 'je laissais donc ma place pour que les secouristes reviennent' et 'me remettre en cause n'a jamais été une difficulté encore eût-il fallu que les secouristes aient eu la décence de me dire les choses en face' et des actes d'usurpation d'identité, de fonction et de signature du Président sans délégation de pouvoir.



Par cette rédaction détaillée, M. [T] avait une connaissance suffisante des actes qui lui étaient reprochés et il a été mis en mesure de préparer utilement sa défense.

Quant à la réalité des faits reprochés et contestés dans le cadre du présent litige, force est de constater qu'il a reconnu, dans un courriel du 10 août 2019, une partie des manquements reprochés et ne saurait être suivi dans son argumentation tendant à soutenir que son exclusion ne serait motivée par aucun manquement.

Par voie de conséquence, la procédure disciplinaire applicable au sein de l'association Protection Civile de l'Hérault à l'encontre de M. [T] est parfaitement régulière.



La demande en dommages-intérêts de M. [T] entrera en voie de rejet."



Le 2 juin 2022, M. [L] [T] a relevé appel de ce jugement.



Par conclusions du 30 août 2022, il demande à la cour :

- d'infirmer en totalité le jugement attaqué ;

- et par conséquent, de déclarer sa demande recevable et bien fondée ;

- de juger que la radiation qu'a souffert M. [T] est irrégulière et non motivée, tant par le fond que par la forme ;

- et de condamner l'association de Protection Civile de L'Hérault à lui verser la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts et celle de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.



Par conclusions du 21 octobre 2022, l'association Protection Civile de L'Hérault demande à la cour :

- de juger l'appel de M. [T] recevable, mais infondé ;

- de confirmer le jugement attaqué dans son intégralité ;

- subsidiairement, de juger que l'association Protection Civile de L'Hérault a correctement rempli ses obligations en matière disciplinaire, que ce soit sur la forme ou sur le fond ;

- de dire que M. [T] ne justifie d'aucun préjudice ;

- de confirmer de plus fort le jugement entrepris ;

- et de le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.



Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.



L'ordonnance de clôture est datée du 20 février 2024.




MOTIFS



Attendu que l'appelant fait valoir en premier lieu au soutien de son appel que la lettre de convocation du 14 août 2019 ne mentionne pas la possibilité pour le secouriste de se faire assister par un membre cotisant ; qu'elle n'indique pas les faits reprochés, en contradiction avec les dispositions relatives au règlement intérieur, contrairement a été jugé ; et qu'il est dès lors sollicité l'irrégularité de son exclusion ;



Attendu que l'association répond sur ce point que M. [T] a participé à la relecture et à la modification des statuts et du règlement intérieur dans le cadre de ses fonctions ;



Mais attendu que M. [T] rétorque que seul l'article 8 a été rédigé par ses soins ;



Attendu qu'à la convocation, il était annexé des extraits surlignés du règlement intérieur suivants :

«' Article 8.4 : le trésorier rend compte par voie hiérarchique de la comptabilité mensuelle et de tous mouvements bancaires nécessitant une autorisation (dépenses non autorisées par le conseil d'administration : réparation de la clim du VPS 343).

' Article 8.5 : L'administrateur doit mettre en valeur en évidence les actions humanitaires des secouristes (') il veille à son comportement.

' Article 8. 13 : Le cadre opérationnel départemental doit avant tout respecter la voie hiérarchique de l'association ('). Il n'a pas autorité pour gouverner et diriger l'association à lui seul.

' Article 9.3 Fautes graves : tout comportement pouvant porter atteinte à l'image de marque protection civile de l'Hérault. Les agressions caractérisées physiques ou verbales.

' Article 9.5 : Entrave au bon fonctionnement de l'association.

' Article 9.9 Actes divers : Tout acte répréhensible par la législation en vigueur peut être sanctionné.

Plainte au pénal pour usurpation d'identité de fonction.

Utilisation non autorisée d'une fréquence radio fédérale à titre personnel.

Utilisation non autorisée de la signature du président M. [F] [D] sans délégation à de nombreuses reprises.

Usurpation d'identité de fonction du président pour demande VAE le 26 avril 2019 dans un mail adressé à la FNPC ».



Attendu que ces annexes à la lettre de convocation ne font pas état du contenu de l'article 9.2 du règlement intérieur prévoyant que "Le secouriste répréhensible peut se faire assister par un membre cotisant de l'association"; qu'il n'est pas établi la connaissance qu'aurait eu par ailleurs de M. [T] de cette faculté ;



Attendu que le défaut de cette mention a causé un grief à M. [T], le privant du bénéfice prévu par le règlement d'une assistance par un membre cotisant de son choix lors d'une audience disciplinaire ; que la procédure suivie contre M. [T] aurait pu trouver une issue plus favorable pour l'intéressé s'il n'avait pas comparu seul pour se défendre, de sorte que ce défaut d'information lui a causé grief, étant relevé que la circonstance que le règlement intérieur ne prévoie pas une telle information sur ses droits est inopérante à cet égard ;



Attendu qu'il s'ensuit irrégularité de la procédure disciplinaire suivie contre M. [T] ;



Attendu que la cour estime que le préjudice moral qui en est issu sera entièrement réparé par l'octroi à M. [T] de la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts ;



Attendu que l'association devra supporter la charge des dépens de première instance et d'appel, et verser en équité la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ne pouvant elle-même prétendre au bénéfice de ce texte ;



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,



Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,



Statuant à nouveau et ajoutant,



Condamne l'association Protection civile de l'Hérault à payer à M. [L] [T] la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts,



Condamne l'association Protection civile de l'Hérault à payer à M. [L] [T] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du procédure civile, ainsi qu'aux dépens, et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



le greffier, le président,

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