25 avril 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-11.580

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2024:C200346

Titres et sommaires

SECURITE SOCIALE

Texte de la décision

CIV. 2

AF1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 avril 2024




Rejet


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 346 F-B

Pourvoi n° S 22-11.580




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 AVRIL 2024

La caisse d'allocations familiales du Nord, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 22-11.580 contre le jugement rendu le 8 décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Lille (pôle social), dans le litige l'opposant à M. [D] [R], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la caisse d'allocations familiales du Nord, et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 5 mars 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Lille, 8 décembre 2021), rendu en dernier ressort, par décision du 1er février 2021, le directeur de la caisse d'allocations familiales du Nord (la caisse) a notifié à M. [R] (l'allocataire), bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés, une pénalité financière, au motif que celui-ci avait commis une fraude en ne déclarant pas son changement de situation familiale.

2. Le 3 mars 2021, l'allocataire a formé un recours gracieux auprès du directeur de la caisse, puis, par requête du 6 août 2021, a saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale, aux fins d'annulation de la pénalité et de restitution des sommes retenues sur prestations.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le moyen, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

4. La caisse fait grief à l'arrêt d'annuler la pénalité financière, alors :

« 1°/ que les articles L. 114-17 et R. 114-11 du code de la sécurité sociale n'imposent au directeur d'une caisse d'allocations familiales ayant notifié à l'allocataire une pénalité administrative aucun délai pour saisir la commission des pénalités à la réception d'un recours gracieux ; qu'en l'espèce, le tribunal a retenu qu'en l'absence de saisine de la commission prévue par l'article L.114-17, la procédure exigeant le respect du contradictoire par la communication de l'avis motivé de la commission portant notamment sur la matérialité des faits reprochés, sur la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité susceptible d'être appliquée n'avait pas été respectée, que cette irrégularité substantielle invalidait la procédure, qu'il convenait d'annuler la notification du 1er février 2021 et d'ordonner la restitution de la pénalité versée par M. [R] ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'aucun délai n'étant imparti au Directeur pour saisir la Commission des pénalités à réception du recours gracieux, l'absence de saisine de la commission n'invalidait pas la procédure et ne justifiait l'annulation de la pénalité, le tribunal a violé les articles L.114-17 et R.114-11 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que si l'absence de communication à l'allocataire de l'avis motivé de la commission des pénalités portant notamment sur la matérialité des faits reprochés, sur la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité susceptible d'être appliquée caractérise une méconnaissance du principe de la contradiction, aucune méconnaissance de ce principe ne résulte de l'absence de saisine de la commission ; qu'en décidant que l'absence de saisine de la commission méconnaissance le principe de la contradiction, le tribunal a violé les articles L. 114-17 et R. 114-11 du code de la sécurité sociale ;

Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 114-17, I, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020, applicable au litige, peuvent, notamment, faire l'objet d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme chargé de la gestion des prestations familiales, au titre de toute prestation servie par ce dernier, l'absence de déclaration d'un changement dans la situation justifiant le service des prestations. Lorsqu'il est saisi d'un recours gracieux par la personne à laquelle il a notifié sa décision fixant le montant de la pénalité, le directeur de l'organisme statue après avis d'une commission composée et constituée au sein du conseil d'administration de cet organisme.

6. Selon l'article R. 114-11, alinéas 4 et 5, du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-240 du 24 février 2017, applicable au litige, dans le délai d'un mois suivant sa saisine par le directeur de l'organisme concerné, la commission, après que celui-ci a présenté ses observations, et après avoir entendu la personne en cause, si celle-ci le souhaite, rend un avis motivé, portant sur la matérialité des faits reprochés, sur la responsabilité de la personne et sur le montant de la pénalité susceptible d'être appliquée. Si la commission ne s'est pas prononcée au terme du délai qui lui est imparti, l'avis est réputé rendu. Le directeur dispose, alors, d'un délai d'un mois à compter de la réception de l'avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu pour fixer le montant définitif de la pénalité et le notifier à la personne en cause ou pour l'aviser que la procédure est abandonnée. A défaut, la procédure est réputée abandonnée.

7. Il résulte de ces dispositions qu'en cas de recours gracieux exercé par la personne concernée, la saisine de la commission constitue une formalité substantielle, qui s'impose au directeur de la caisse. A peine de nullité de la pénalité, ce dernier ne pourra procéder ni à la notification de son montant définitif ni à son recouvrement avant réception de l'avis de la commission, soit que cet avis ait été rendu soit qu'il soit réputé rendu.

8. Ayant constaté que le directeur de la caisse n'avait pas saisi la commission prévue à l'article L. 114-17, alors que l'allocataire avait exercé un recours gracieux auprès de lui, le tribunal en a exactement déduit que la procédure de pénalité était entachée d'une irrégularité, de sorte qu'il y avait lieu d'annuler la pénalité et d'ordonner la restitution des sommes retenues au titre de celle-ci.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse d'allocations familiales du Nord aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille vingt-quatre.

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