9 avril 2024
Cour d'appel de Poitiers
RG n° 22/01652

1ère Chambre

Texte de la décision

ARRET N°149



N° RG 22/01652 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GSOV













S.A.S. THELEM ASSURANCES



C/



[E]

[O]

Association [16]

S.A. MACIF ASSURANCES

Organisme CPAM 17



























Loi n° 77-1468 du30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire



Le à



Le à



Le à



Copie gratuite délivrée



Le à



Le à





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 09 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/01652 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GSOV



Décision déférée à la Cour : jugement du 31 mai 2022 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LA ROCHELLE.





APPELANTE :



S.A.S. THELEM ASSURANCES

[Adresse 17]

[Localité 9]



ayant pour avocat postulant Me Marion LE LAIN de la SCP DROUINEAU 1927, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Jean-Louis VALLAIS, avocat au barreau de NANTES





INTIMES :



Monsieur [K] [E]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 2]

[Adresse 8]

[Localité 5]



ayant pour avocat Me François-frédéric ANDOUARD de la SELARL ANDOUARD-AVOCAT & ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT





Monsieur [X] [O]

né le [Date naissance 7] 1977 à [Localité 18]

[Adresse 12]

[Localité 3]



ayant pour avocat Me Marine KERVINGANT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT





Association [16]

[Adresse 11]

[Localité 4]



S.A. MACIF ASSURANCES

[Adresse 6]

[Localité 13]



ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LX POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat postulant Me Fabienne MICHELET, avocat au barreau de RENNES



CPAM 17

[Adresse 10]

[Localité 2]



ayant pour avocat Me Cécile HIDREAU de la SCP BODIN-BOUTILLIER-DEMAISON-GIRET-HIDREAU-SHORTHOUSE, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT







COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 25 Janvier 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :



M. Thierry MONGE, Président de Chambre qui a présenté son rapport

M. Dominique ORSINI, Conseiller

Mme Anne VERRIER, Conseiller



qui en ont délibéré



GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,





ARRÊT :



- Contradictoire



- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,



- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.








EXPOSÉ :



[K] [E], né le [Date naissance 14] 1963, a été grièvement blessé le dimanche 3 mars 2019 dans un accident survenu sur une route départementale entre [Localité 21] et [Localité 15], en Charente-Maritime, en chutant au sol depuis le vélo sur lequel il faisait une randonnée cycliste organisée par l'association [16], dont il était membre.

Il a été rapidement transporté en hélicoptère à l'hôpital de [Localité 20], puis transféré au CHU de [Localité 19], où ont été diagnostiqués un traumatisme rachidien nécessitant une intervention chirurgicale pratiquée en urgence le jour-même, un traumatisme crânien et de nombreuses factures costales.

Sorti de l'hôpital, M. [E] a été héliporté en urgence quelques jours plus tard au CHU de [Localité 19], où il a subi dans la nuit du 24 mars 2019 une opération pour évacuer un hématome compressif dans le rachis cervical.

Il a par la suite été transféré dans un centre de rééducation en raison d'une tétraplégie incomplète post-traumatique, avant de pouvoir réintégrer son domicile.



Soutenant avoir chuté de son vélo parce qu'un autre cycliste, [X] [O], qu'il suivait, l'avait entraîné dans sa propre chute après avoir été déséquilibré par une bourrasque et avoir bloqué sa roue avec la tige de sa selle, [K] [E] a fait assigner par actes du 11 octobre 2019 devant le juge des référés du tribunal de grande instance de La Rochelle [X] [O], l'assureur de celui-ci Thélem Assurances, le [16] et l'assureur de celui-ci la MACIF, pour voir ordonner une expertise médicale de sa personne et obtenir d'eux une provision à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices.



Par ordonnance du 21 janvier 2020, le juge des référés a ordonné une expertise médicale de M. [E] en désignant pour y procéder le docteur [S], qui sera ultérieurement remplacé par le docteur [C], et a condamné in solidum M. [O], Thélem Assurances et la MACIF au paiement d'une provision de 50.000 euros.



L'expert judiciaire a déposé en date du 27 août 2020 un rapport concluant à l'absence de consolidation du blessé et à la certitude de répercussions des séquelles prévisibles de l'accident sur le plan professionnel, sur les activités d'agrément et sur la vie sexuelle, en indiquant, notamment, que le déficit fonctionnel permanent ne serait pas inférieur à 50%.



[K] [E] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de La Rochelle par actes des 23 février et 12 mars 2021 [X] [O], l'association [16] et la MACIF pour les entendre juger tenus de réparer les conséquences de l'accident et condamner à lui verser une provision complémentaire de 590.000 euros à valoir sur l'indemnisation définitive de ses préjudices.

[X] [O] a fait assigner la compagnie Thélem Assurances en intervention forcée aux fins de garantie par acte du 29 mars 2021, les deux instances étant ultérieurement jointes.

La caisse primaire d'assurance maladie de la Charente-Maritime (la CPAM 17) est volontairement intervenue à l'instance le 1er avril 2021.



M. [O] a, in limine litis, argué de nullité le rapport du docteur [C] et sollicité une nouvelle expertise médicale. Il a conclu à titre principal au rejet des demandes dirigées à son encontre . Il a subsidiairement sollicité le prononcé d'un partage de responsabilité laissant à sa charge une part n'excédant pas 10%, conclu à la limitation de la provision qui pourrait être allouée au blessé, sollicité la garantie par Thélem Assurances de toute condamnation mise à sa charge au titre des frais et dépens, et demandé à être garanti de toute condamnation au paiement d'une provision par, solidairement, l'association [16], Thélem Assurances et la MACIF, en contestant l'opposabilité à son égard et subsidiairement la validité de la clause d'exclusion que lui opposait la compagnie Thélem.



L'association [16] et la MACIF ont principalement conclu au rejet des demandes formées à leur encontre au motif que le demandeur n'établissait pas la faute qu'aurait commise M. [O] de sorte que la responsabilité de l'association n'était pas susceptible d'être engagée ; ils ont subsidiairement soutenu un partage de responsabilité entre les deux cyclistes laissant à la charge de M. [O] une part de responsabilité n'excédant pas 25% ; conclu au rejet de la demande de provision complémentaire formulée par M. [E] ; et sollicité en toute hypothèse l'entière garantie de Thélem Assurances, en soutenant que la clause d'exclusion invoquée par celle-ci n'était ni opposable, ni valable.



Thélem Assurances a conclu au rejet des demandes formées contre elle en arguant d'une clause d'exclusion de sa garantie en cas d'accident survenu dans le cadre de la pratique d'activités sportives à titre amateur dans le cadre d'associations, selon elle opposable et valable.



La CPAM 17 a réclamé à tout succombant une provision de 87.949,65 euros au titre des débours déjà exposés du fait de l'accident, ainsi que l'indemnité forfaitaire légale de gestion.





Par jugement du 31 mai 2022, le tribunal judiciaire de La Rochelle a :

* déclaré [X] [O] responsable de l'accident dont a été victime [K] [E] le 3 mars 2019

* rejeté la demande de nullité de l'expertise présentée par M. [O]

* rejeté sa demande de contre-expertise judiciaire

* condamné in solidum [X] [O] et la MACIF à payer à [K] [E] une provision de 152.393,92 euros à valoir sur son préjudice

* rejeté le surplus de la demande de provision complémentaire

* condamné in solidum [X] [O] et la MACIF à payer à la CPAM 17

.une provision de 74.937,09 à valoir sur ses débours

.une provision de 1.114 euros à valoir sur l'indemnité forfaitaire de gestion

* rejeté le surplus de la demande de provision formulée par la CPAM 17

* condamné Thélem Assurances à garantir [X] [O] des condamnations prononcées à son encontre

* rejeté l'ensemble des demandes formées contre l'association [16]

* condamné in solidum [X] [O] et la MACIF à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile

.4.000 euros à [K] [E]

.1.000 euros à la CPAM 17

* condamné in solidum [X] [O] et la MACIF aux dépens, incluant les frais d'expertise judiciaire

* rappelé que l'exécution provisoire était de droit.



Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu, en substance :

* que M. [O] avait été représenté aux opérations d'expertise; qu'il avait pu débattre contradictoirement du contenu du rapport; et qu'il ne justifiait d'aucun grief à l'appui de sa demande de nullité du rapport et de contre-expertise

* qu'il était responsable de l'accident du seul fait de sa qualité de gardien du vélo instrument du dommage, puisqu'indépendamment même de preuve certaine d'un contact entre eux, la position de son vélo sur le sol après sa propre chute était anormale et avait fait chuter M. [E]

* qu'il n'était pas démontré que M. [E] avait lui-même commis une faute, notamment en s'abstenant de respecter les distances de sécurité

* que la bourrasque dont il faisait état pour expliquer sa chute n'était ni imprévisible ni irrésistible et ne remplissait donc pas les critères de la force majeure exonératoire

* que l'obligation de [X] [O] de réparer les conséquences dommageables de l'accident de M. [E] était donc entière

* qu'en l'absence de preuve que la chute de M. [O] ayant entraîné celle de M. [E] soit résultée d'un manquement du premier au règlement de l'association ou à une règle du sport, la responsabilité du [16] n'était pas engagée

* que la MACIF, contre laquelle le tiers lésé disposait d'une action directe, devait garantir

l'intégralité du dommage en vertu de la police souscrite auprès d'elle par le Club garantissant la responsabilité civile de ses adhérents

* qu'au vu des conclusions de l'expert judiciaire, la part non sérieusement contestable de la créance indemnitaire de la victime pouvait être fixée à 202.393,92 euros, ce qui justifiait compte-tenu de la provision de 50.000 euros déjà allouée en référé d'allouer à M. [E] une provision complémentaire de 152.393,92 euros

* que la CPAM 17 justifiait d'une créance non sérieusement contestable au titre de ses débours avérés permettant de lui allouer une provision

*que la demande de M. [O] d'être garanti par la compagnie Thélem était fondée, celle-ci couvrant sa responsabilité civile en vertu du contrat multirisques habitation souscrit pour la famille par l'épouse à effet du 29 décembre 2016, et ne justifiant pas de la clause d'exclusion qu'elle invoquait, se bornant à produire la page 30 du contrat d'assurance.



La compagnie Thélem Assurances a relevé appel le 30 juin 2022.

L'association [16] et la Macif ont relevé appel le 6 juillet 2022.

Ces deux instances ont été jointes par le conseiller de la mise en état le 12 juillet 2022.



Les dernières écritures prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile ont été transmises par la voie électronique :

* le 15 décembre 2023 par la société Thélem Assurances

* le 16 décembre 2023 par M. [X] [O]

* le 15 décembre 2023 par l'association [16] et la Macif

* le 18 septembre 2023 par la CPAM 17

* le 21 novembre 2023 par M. [K] [E].



La société Thélem Assurances demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à garantir [X] [O] des condamnations prononcées contre lui ainsi qu'aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure, et statuant à nouveau,

-de déclarer applicable et mobilisable la clause d'exclusion stipulée aux conditions générales du contrat selon laquelle sont exclus de toute garantie les dommages causés au cours d'activités sportives amateur dans le cadre d'une association, d'une société ou d'une fédération sportive visée à l'article L.321-1 du code des sports

-de dire qu'elle n'est pas tenue de garantir M. [O] de ses condamnations

-de rejeter toutes demandes d'indemnités formulées à son encontre, y compris au titre de l'application de l'article 700 du code de procédure civile

-de condamner la MACIF à lui rembourser les 116.722,50 euros qu'elle a été contrainte de lui régler en vertu de l'exécution provisoire

- de confirmer le surplus du jugement

-de déclarer irrecevable la demande de M. [E] de liquider de manière définitive ses préjudices devant la cour.



Elle s'étonne des motifs de sa condamnation par le tribunal en indiquant qu'elle avait bien produit aux parties et aux débats les conditions générales de son contrat, contenant la clause d'exclusion qu'elle invoque, selon laquelle ne sont pas garantis les dommages résultant de la pratique d'activités sportives à titre amateur dans le cadre d'une association, d'une société ou d'une fédération sportive, visée par l'article L.321-1 du code du sport. Elle soutient que la randonnée cycliste organisée par le Club lors de laquelle l'accident est survenu constituait bien une activité sportive, faisant valoir que l'assurance souscrite par le Club garantit une 'association sportive' dont l'objet porte sur la pratique du cyclotourisme et du cyclisme. Elle observe que la MACIF, assureur du Club, indique que sa garantie est parfaitement applicable en l'espèce.

Elle fait valoir que cette clause est bien opposable à l'assuré, Mme [O], souscriptrice, ayant signé en date du 29 novembre 2016 les conditions particulières qui énoncent qu'elle reconnaît avoir reçu préalablement les conditions générales contenant la clause.

Elle soutient que cette clause est mentionnée en caractères très apparents, à savoir en caractères gras dans un cadre spécifique et coloré.

Elle récuse l'objection selon laquelle la notion d'activité sportive à titre amateur n'étant pas définie, la clause nécessiterait interprétation et ne serait donc pas formelle et donc pas valable, en répondant que la notion s'oppose tout simplement à celle d'activité sportive pratiquée à titre professionnel.



M. [X] [O] demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité dans l'accident et en ce qu'il a prononcé condamnations à son égard, et :

¿ à titre principal :

-de juger qu'il n'est pas responsable de l'accident dont M. [E] a été victime

-de débouter de toutes leurs demandes M. [E] comme la CPAM 17

-de les condamner aux dépens et à lui verser 5.000 euros d'indemnité de procédure

¿ à titre subsidiaire :

-de réformer le jugement en ce qu'il n'a pas retenu le partage de responsabilités demandé et quant aux condamnations qu'il prononce, et

-de prononcer un partage de responsabilité dont la plus large part sera laissée à M. [E]

-de juger que sa propre part de responsabilité ne pourra pas excéder 10%

-de débouter M. [E] de sa demande de provision complémentaire

-de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'obligation à garantie des compagnies Thélem Assurances et MACIF et de les condamner à le relever indemne de toute condamnation

¿ en tout état de cause :

-de déclarer [K] [E] irrecevable en sa demande de liquidation de son préjudice devant la cour

-de le débouter de ses demandes indemnitaires consécutives

¿ à titre infiniment subsidiaire :

-de débouter M. [E] de ses demandes indemnitaires

-ou d'en limiter le montant à de plus justes proportions

¿ de condamner M. [E] à lui verser 6.000 euros d'indemnité pour frais irrépétibles et de le débouter de sa propre demande tendant à obtenir sa condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile

¿ de condamner tout succombant aux entiers dépens.



[X] [O] conteste le principe même de l'engagement de sa responsabilité, en faisant valoir que personne ne prétend qu'il aurait commis une faute ; que rien ne démontre le moindre contact entre son vélo et celui de [K] [E] ; que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, rien n'établit non plus que la chute de M. [E] ait été provoquée par une manoeuvre d'évitement de son vélo ; qu'il a dit dans son audition avoir vu que quelque chose sur sa gauche arrivait très vite, alors que M. [O] était à sa droite ; qu'un autre cycliste, M. [U], indique que M. [E] se serait légèrement décalé sur sa droite ; que personne ne parle d'un vélo au sol ; que les circonstances de l'accident restent indéterminées.

Il fait subsidiairement valoir qu'à supposer que ce soit sa propre chute de vélo qui ait déséquilibré M. [E], la force majeure l'exonérerait de toute responsabilité, car même si le vent soufflait certes sur le parcours, la brusque survenance d'une bourrasque violente constitue un événement imprévisible et irrésistible.

Il soutient qu'à supposer que lui-même soit impliqué dans l'accident, la faute commise par M. [E] l'exonère, principalement en totalité, subsidiairement pour une part prépondérante, car celui-ci roulait trop près de lui, n'a pas respecté la distance de sécurité et n'a pas été maître de sa vitesse.

Il approuve le tribunal d'avoir retenu que la MACIF devait sa garantie, et répond aux contestations de cette compagnie que cette garantie n'est nullement subordonnée à la démonstration d'une faute du Club son assuré, la police couvrant la responsabilité civile des adhérents, qui ont la qualité de tiers au contrat au sens de la police.

Il approuve la condamnation de Thélem Assurances à garantir les conséquences de l'accident, en soutenant que celle-ci échoue à prouver qu'elle aurait communiqué au souscripteur les conditions générales avant la signature, de sorte que la clause d'exclusion lui est inopposable.

Il soutient que cette clause n'est au surplus pas valable car elle n'est pas formelle au regard du caractère imprécis de la notion d''activités sportives à titre amateur'.

Il affirme qu'en tout état de cause, l'exclusion ne joue pas car l'activité exercée était du cyclotourisme, c'est-à-dire une activité de loisir et non pas une activité sportive.

Il discute très subsidiairement le montant de la provision à laquelle le blessé peut prétendre au vu du rapport d'expertise déposé le 27 août 2020.

Il estime irrecevables comme nouvelles en cause d'appel, et n'entrant pas dans les cas légaux d'évocation, les demandes de liquidation définitive du préjudice formulées par M. [E] au vu du rapport définitif déposé en septembre 2023, et insiste sur son droit au double degré de juridiction.

Il discute très subsidiairement ces demandes.



L'association [16] et la MACIF demandent à la cour :

¿ à titre principal : d'infirmer partiellement le jugement, en ce qu'il a retenu la responsabilité de M. [O] et la garantie de la MACIF, de le confirmer en ce qu'il a écarté la responsabilité du Club, de juger que M. [O] et le Club ne sont pas responsables de l'accident et en conséquence de débouter M. [E] de toutes ses demandes, y compris fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, tant au titre de la responsabilité civile que de la garantie corporelle et de le condamner aux dépens

¿ à titre subsidiaire, si la cour retenait toutefois la responsabilité de M [O]: d'infirmer le jugement en ce qu'il a retenu la garantie de la MACIF au titre de la responsabilité civile de M. [O], et

-de juger que la MACIF ne garantit le [16] que lorsque sa responsabilité est mise en oeuvre en raison des fautes caractérisées commises par ses adhérents

-de juger que la MACIF ne garantit M. [E] qu'au titre de la garantie corporelle

En conséquence :

-de débouter M. [E] de toutes ses demandes contre la MACIF et contre le Club

-de constater que la CPAM 17 se désiste de ses demandes et de la débouter de ses prétentions à l'encontre du Club et de la MACIF

¿ à titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour retenait la responsabilité de M. [O] et la garantie de la MACIF au titre de la responsabilité civile :

-de réformer le jugement en ce qu'il n'a pas retenu de partage de responsabilité en raison des fautes commises par M. [E]

-de l'infirmer en ce qu'il a accordé une provision de 152.393,92 euros à M. [E] et une de 74.937,09 euros à la CPAM outre à celle-ci 1.114 euros d'indemnité forfaitaire

-de le confirmer en ce qu'il a retenu la garantie de Thélem Assurances

-de le réformer en ce qu'il n'a pas condamné Thélem in solidum avec le Club et la Macif à payer à M. [E] une indemnité de procédure

En conséquence :

-prononcer un partage de responsabilité dont la plus large part devra être laissée à M. [E]

-juger que la part de responsabilité de M. [O] dans la survenance de l'accident ne saurait être supérieure à 25%

-réduire à de plus justes proportions la provision allouée à M. [E]

-débouter la CPAM de toutes ses demandes

-déclarer la clause d'exclusion dont se prévaut Thélem nulle et inopposable à l'égard de M. [O]

-condamner Thélem à garantir M. [O] au titre de sa responsabilité civile

-débouter Thélem de toutes ses demandes

En cas de condamnation au règlement d'une provision :

-de condamner M. [O], la MACIF et Thélem à indemniser M. [E] et à lui verser 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

¿ dans tous les cas :

-de déclarer irrecevable la demande de liquidation définitive formulée par M. [E]

-de le débouter de cette prétention à voir liquider définitivement son préjudice

-de réduire à de plus justes proportions les sommes réclamées au titre de la tierce personne temporaire et permanente, des souffrances endurées, du préjudice esthétique temporaire, du déficit fonctionnel temporaire, du déficit fonctionnel permanent et du préjudice d'agrément

-de débouter M. [E] de ses demandes au titre des dépenses de santé actuelles et des frais divers

-d'ordonner la mise en oeuvre d'une expertise comptable judiciaire sur les pertes de gains professionnels actuelles et futures subies par M. [E] et de surseoir à statuer sur ces demandes dans l'attente du dépôt du rapport

-de déclarer irrecevable la demande au titre du préjudice économique subi par la SAS Mécanhydropro.



L'association [16] et la Macif contestent le principe même d'une responsabilité de M. [O] dans l'accident en soutenant qu'il n'est pas démontré que son vélo ait été l'instrument du dommage, aucun témoin ne l'ayant relaté, aucune expertise ne l'ayant établi et rien ne le prouvant, les dommages subis par le vélo de M. [E] pouvant tout à fait résulter de sa chute dans le fossé. Elles ajoutent que M. [B] n'ayant pas été témoin de l'accident, n'a fait que relater dans sa déclaration les dires de M. [E].

Elles soutiennent que rien n'établit que M. [E] serait tombé en tentant d'éviter le vélo de M. [O]; qu'il n'y a nulle preuve d'un contact avec ce vélo ; que M. [E] a déclaré que le vélo de M. [O] n'était pas devant lui, et a dit qu'il ne s'était pas décalé pour l'éviter ; que les dires de M. [U] n'expriment qu'une supposition ; et que les circonstances de l'accident restent indéterminées, la bourrasque ayant aussi bien pu déséquilibrer M. [E] et expliquer seule sa chute.

Elles approuvent le tribunal de n'avoir retenu aucune faute à la charge de M. [O], en indiquant que rien n'établit qu'il en aurait commis, et en faisant valoir que le seul fait d'être tombé n'est pas constitutif d'une faute.

Elles sollicitent de même la confirmation de la mise hors de cause du Club, puisqu'il n'est pas établi de faute de ses adhérents caractérisée par une violation des règles du jeu.

Elles concluent ainsi au rejet pur et simple des demandes de M. [E].

Pour le cas où la cour jugerait que le vélo de M. [O] a été l'instrument du dommage de M. [E], elles soutiennent que la responsabilité de M. [O] n'est pas engagée pour autant, en raison d'une part, de la faute commise par la victime en ce que M. [E], qui a déclaré rouler à 30 centimètres derrière, n'a pas maintenu la distance de sécurité requise ; et d'autre part en raison de la force majeure exonératoire tenant à la bourrasque de vent qui a déséquilibré M. [O].

La MACIF soutient que sa garantie responsabilité civile n'est mobilisable que si la responsabilité civile du Club est retenue, ce qui n'est pas le cas en l'absence de violation manifeste d'une règle du jeu, et qu'à supposer que cette garantie couvre aussi le préjudice d'un adhérent indépendamment de toute responsabilité du club, elle ne serait pas plus mobilisable puisque rien ne prouve que le vélo de M. [O] a été l'instrument du dommage.

Elle indique n'avoir jamais contesté que M. [E] bénéficie en revanche de la garantie corporelle souscrite auprès d'elle par le Club au bénéfice de ses adhérents, et fait valoir que cette garantie couvre seulement le déficit fonctionnel permanent et les dépenses de santé, et elle indique que la provision de 50.000 euros déjà versée excède l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent estimé.

À titre subsidiaire, les deux intimées contestent la demande de provision formulée par M. [E] et sollicitent l'institution d'une mesure d'expertise comptable pour chiffrer son préjudice économique.

Elles approuvent le tribunal d'avoir jugé que Thélem devait sa garantie à son assuré, en faisant valoir d'une part, qu'il n'est pas établi que M. [E] a eu connaissance de la clause d'exclusion, stipulée dans des conditions générales de 2015 alors que le contrat date de 2016 ; d'autre part, que l'activité de cyclotourisme pratiquée par les participants à cette sortie ne constitue pas une activité sportive au sens de la clause invoquée ; et enfin que cette clause d'exclusion est nulle car elle n'est ni formelle ni limitée et a pour effet de vider de toute substance la garantie offerte, dès lors qu'elle exclut la pratique d'activités sportives dans de nombreux cadres.

Constatant que la CPAM 17 se désiste de toutes ses demandes, elles en infèrent la nécessaire infirmation des condamnations prononcées à son profit en première instance.

Elles arguent d'irrecevabilité la demande d'évocation de M. [E] en objectant que les conditions légales d'une évocation telles que définies à l'article 568 du code de procédure civile ne sont pas vérifiées en l'espèce, ajoutant que la demande est aussi irrecevable parce que nouvelle.



La CPAM 17 demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il lui a alloué une provision de 74.937,09 euros à valoir sur ses frais, et :

* de fixer sa créance provisionnelle actualisée au 1er septembre 2022 à 114.084,41 euros.

* de constater qu'eu égard à ce que ses rapports avec l'assureur sont régis par le protocole du 24 mai 1983 afférent aux accidents entre cyclistes, elle se désiste de sa demande visant à obtenir le remboursement des prestations versées et la prise en charge de l'indemnité forfaitaire

* de condamner néanmoins toute partie succombante à lui verser 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



La caisse indique revenir sur ses prétentions eu égard à l'application en l'espèce du Protocole d'accord assureurs-organismes sociaux conclu le 24 mai 1983 relativement au recouvrement des créances des organismes de protection sociale auprès des entreprises d'assurances à la suite d'accidents causés par des véhicules terrestres à moteur et des bicyclettes.

Elle indique se désister de ses prétentions visant à obtenir, notamment, le remboursement des prestations versées.

Elle maintient toutefois sa demande en fixation du montant de sa créance provisionnelle qu'elle demande à la cour de fixer, par voie de réformation, à la somme actualisée au 1er septembre 2022 de 114.084,41 euros.

Indiquant avoir été tenue de constituer avocat, elle réclame à toute partie succombante 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



M. [K] [E] demande à la cour :



* de constater qu'il se désiste de son incident de procédure



¿ À titre principal :

Vu le rapport définitif déposé par le docteur [C] :

* de liquider ses préjudices et de fixer ainsi son droit à indemnisation :

¿ Préjudices patrimoniaux :

° temporaires :

.dépenses de santé actuelles : 295 euros

.frais divers restés à charge de la victime : 22.626 euros

.assistance temporaire tierce personne : 17.650 euros

.perte de gains professionnels actuels : 139.538,47 euros

° permanents :

.dépenses de santé futures : mémoire

.assistance permanente par tierce personne : 61.100 euros

.perte de gains professionnels futurs : 438.452 euros et mémoire pour partie

.¿ Préjudices extra patrimoniaux :

° temporaires :

.déficit fonctionnel temporaire (DFT) : 13.695 euros

.souffrances endurées : 35.000 euros

.préjudice esthétique temporaire : 8.000 euros

° permanents :

.déficit fonctionnel permanent (DFP) : 144.000 euros

.souffrances endurées permanentes : mémoire

.préjudice esthétique permanent : 4.000 euros

.incidence professionnelle extra patrimoniale : mémoire

.préjudice d'agrément : 15.000 euros

soit la somme de 899.356 euros à parfaire

* de condamner in solidum M. [O], l'association [16], la compagnie MACIF et la compagnie Thélem à lui payer la somme de 699.447,98 euros, tous chefs de préjudices confondus, déduction faite des provisions d'ores-et-déjà allouées



¿ À titre subsidiaire : de confirmer le jugement entrepris



¿ En tout état de cause, de

-débouter [X] [O], l'association [16], la compagnie MACIF et la compagnie Thélem de l'ensemble de leurs fins et moyens de procédure et de fond contraires aux présentes

-condamner in solidum M. [O], l'association [16], la compagnie MACIF et la compagnie Thélem aux entiers dépens et à lui payer 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



M. [E] avait saisi le conseiller de la mise en état par conclusions du 28 septembre 2023 d'un incident qui n'a pas été fixé au motif qu'il ne pourrait y être fait droit qu'en infirmant la décision déférée, ce qui n'entre pas dans la compétence ni dans les pouvoirs du conseiller de la mise en état. C'est de cet incident que M. [E] déclare se désister dans les dernières conclusions qu'il a adressées à la cour.

Sur le fond, il affirme que [X] [O] a chuté juste avant lui, et que la tige du vélo de M. [O] est venue se prendre dans la roue avant du sien, brisant les rayons pourtant en carbone et le catapultant la tête la première dans le fossé, ce qui lui a causé ses blessures. Il fait valoir que c'est ce qu'ont déclaré M. [O], le témoin [U] comme le président du Club, et que c'est ce qu'a retenu le juge des référés, dont la décision constitue un fait juridique.

Il soutient que la responsabilité de M. [O] est engagée comme gardien du vélo qui a été l'instrument du dommage ; qu'aucune circonstance de force majeure ne l'exonère de cette responsabilité ; et que lui-même n'a pas commis de faute et a ainsi droit à réparation intégrale de son dommage, sa chute ayant pour cause exclusive la présence anormale du vélo, laquelle a, pour lui, le caractère d'une circonstance imprévisible et donc de la force majeure.

Il récuse le moyen tiré par la Macif de l'article R.412-12 du code des assurances, en objectant que sa chute n'a pas été causée par sa vitesse ou par la distance trop courte entre eux mais uniquement en raison de la position anormale du vélo dont l'autre cycliste avait la garde.

Faisant valoir que [X] [O] comme lui-même étaient tous deux licenciés au [16], M. [E] soutient que l'assurance souscrite par le club auprès de la Macif couvre donc leur responsabilité civile à tous deux.

Il déclare s'en remettre à prudence de justice sur le rejet de sa prétention tendant à voir dire que le Club a engagé sa responsabilité.

Il sollicite la liquidation de son préjudice par la cour, par voie d'évocation, au vu du rapport entre-temps déposé qui le déclare consolidé. Il détaille ses postes de préjudice.



L'ordonnance de clôture est en date du 18 décembre 2023.






MOTIFS DE LA DÉCISION :



Il est pris acte de ce que M. [E] déclare se désister de l'incident dont il avait saisi le conseiller de la mise en état.



Les chefs de décision du jugement qui ont rejeté la demande de nullité de l'expertise présentée par M. [O] et rejeté sa demande de contre-expertise judiciaire ne sont pas remis en cause devant la cour.



* sur la responsabilité de [X] [O]



La réalité de l'accident n'est pas discutée, et elle est établie par les procès-verbaux d'enquête, les témoignages et le certificat médical initial.



Même si les protagonistes n'ont pu en faire un récit détaillé, ce qui est cohérent avec l'état de concentration qui était le leur durant cette randonnée, en groupe, sur une route ouverte à la circulation des véhicules, par fort vent, les circonstances de l'accident ne sont pas indéterminées.



Le procès-verbal de synthèse de la gendarmerie conclut que '[K] [E] se trouvait en queue du peloton avec [N] [U] à ses côtés. [X] [O], qui les précédait, a chuté. Il aurait été emporté par une bourrasque de vent. [N] [U] a exécuté une manoeuvre d'évitement, mais [K] [E] a perdu le contrôle de son vélo et a été éjecté vers l'avant'(cf pièce n°4 de M. [E]).



[X] [O] a déclaré aux gendarmes : '... je me trouvais en queue de peloton. Deux-trois personnes se trouvaient derrière moi. Ce jour-là, il y avait beaucoup de vent d'après mes souvenirs. Une rafale de vent m'a déporté vers la droit, et j'ai essayé d'éviter de chuter, mais je n'ai pas réussi. Je suis tombé en premier. Lorsque je me suis relevé, j'ai pu apercevoir qu'un coureur qui était derrière moi, était dans le fossé.....Pour ma part, je ne me souviens pas si [K] m'a touché, mais je pense que dans ma chute j'ai pu l'emporter. En discutant avec [K], lui-même ne sait pas trop ce qu'il s'est passé... Il est vrai que nous circulions roues dans roues avec le peloton afin justement d'éviter les coups de vent..'(cf pièce n°5 de M. [E])



[N] [U] a déclaré aux enquêteurs : '...j'étais dans le groupe de [K] [E]. Lors de la sortie, arrivé sur la commune de [Localité 15], je circulais sur mon vélo et [K] se trouvait sur ma droite à peu près à la même hauteur. Un cycliste nous précédant est tombé au sol. J'ai juste eu le temps de l'éviter en partant sur la gauche. [K] quant à lui d'après mes souvenirs s'est décalé légèrement sur sa droite. J'ai pu voir que [K] a fait un soleil avec son vélo. Je ne sais pas s'il a touché le cycliste au sol ou si c'est parce qu'il a roulé dans la berne qu'il a fait le soleil.' (cf pièce n°6 de M. [E]).



[K] [E] a déclaré aux enquêteurs lorsqu'il a été en état d'être entendu : '...Moi, j'étais un des derniers, et j'étais placé à droite de la route...Les autres cyclistes étaient devant moi. Quand vous êtes dans un groupe, vous regardez devant vous. Je suivais le cycliste qui était devant moi, en gardant une marge de sécurité....le seul truc que je me souviens, c'est que j'ai senti un phénomène de catapultage. J'ai été projeté en avant. Je me souviens avoir eu la sensation d'avoir la tête dans la terre, sans respiration....'.

À la question de savoir si, comme il ressortait des déclarations de [N] [U], il se souvenait s'être décalé sur sa droite, il a répondu : '..Non, J'ai vu quelque chose sur ma gauche arrivait très vite sans que je puisse l'identifier. Après, il y a un trou...'(cf pièce n°7 de M. [E]).





La déclaration de sinistre faite le 7 mars 2019 à la Macif, assureur du [16], par le bureau de l'association, mentionnant en son en-tête qu'elle émane du président, du trésorier et du secrétaire, est ainsi rédigée :

'(...)

À ce moment-là, les participants à cette randonnée étaient répartis en cinq groupes selon le niveau de chacun, totalement indépendants et distants les uns des autres.

Le groupe dans lequel s'est produit l'accident comprenait 9 cyclistes.

À l'arrière de ce groupe, l'un des cyclistes, à la suite d'un écart personnel, a chuté entraînant dans sa chute le cycliste situé à sa droite et en arrière.

Ils sont tous les deux tombés sur l'accotement, le premier cycliste n'ayant pas de dommages corporels significatifs, le second ayant subi un traumatisme plus grave ayant nécessité son transport à l'hôpital de [Localité 20], puis, le lendemain à l'hôpital de [Localité 19].

Un seul cycliste du groupe, en dehors des deux accidentés, a pu être témoin de la chute. Il était, lui aussi, à l'arrière.

(...)' (cf pièce n°2 de M. [E]).



Ces éléments concordent sur ce point que [K] [E] a perdu le contrôle de son vélo et a culbuté, tête la première, dans le bas-côté de la route, immédiatement après la chute au sol de [X] [O], qui se trouvait juste devant lui.



Les indications de M.[U] et des membres du bureau de l'association sur la position de M. [E] derrière M. [O] et la circonstance que M. [U] a réussi à l'éviter en passant par la gauche, confirment que le vélo de M. [O] a nécessairement constitué, quand il a chu, un obstacle pour le cycliste qui était derrière lui sur sa droite.



Alors qu'il n'existe ni preuve, ni indice que la chute de M. [E] pourrait avoir été causée par une bourrasque, cette présence anormale du vélo au sol, devant M. [E], est la cause de son mouvement de culbute et donc de sa chute et de ses blessures.

Elle engage la responsabilité de M. [O] en sa qualité de gardien de ce vélo.



L'existence d'un fort vent, dont tous les témoins ont confirmé qu'il soufflait déjà avant l'accident, ne revêt pas les caractères d'un événement de force majeure exonératoire de cette responsabilité, tant faute d'imprévisibilité que d'irrésistibilité, ainsi que l'a pertinemment énoncé le premier juge, comme faute aussi de preuve de son rôle causal dans l'accident, qui ne procède que d'une affirmation.



Il n'est, par ailleurs, nullement établi que [K] [E] aurait lui-même commis une faute qui viendrait supprimer, ou seulement même réduire, son droit à obtenir du responsable la réparation de son préjudice.



Ni la distance qui le séparait de [X] [O] dans le groupe de cyclistes qu'ils formaient, ni sa position, ni sa vitesse, ne revêtent le moindre caractère fautif avéré, et aucun défaut de maîtrise ne peut non plus lui être imputé, au vu des circonstances de la chute.



Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a dit [X] [O] responsable des dommages subis par [K] [E].





* sur la responsabilité de l'association [16]



L'accident du 3 mars 2019 est survenu au cours d'une randonnée cycliste organisée par l'association [16].



Par application de l'article 1242 du code civil, les associations sportives ayant pour mission d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres sont responsables des dommages qu'elles causent à cette occasion, dès lors qu'une faute caractérisée par une violation des règles du jeu est imputable à un ou plusieurs de leurs membres, même non identifiés.



En vertu de l'article L.321-1 du code des sports, les associations, les sociétés et fédérations sportives souscrivent pour l'exercice de leur activité, des garanties d'assurance couvrant leur responsabilité civile, notamment celle des pratiquants du sport. Les licenciés et les pratiquants sont considérés comme des tiers entre eux.



Pas plus qu'en première instance, il n'est démontré en cause d'appel -où M. [E], qui l'invoquait seul, déclare s'en rapporter à justice sur la question de la responsabilité du club- que la chute de [X] [O], ayant entraîné celle de [K] [E], résulterait d'un manquement au règlement intérieur de l'association non plus qu'à une règle du sport cycliste qu'ils pratiquaient.



Le jugement sera donc aussi confirmé en ce qu'il a dit que la responsabilité de l'association [16] n'était pas engagée dans l'accident.



* sur la garantie due par la compagnie Macif



M. [E] établit (sa pièce n°28) en en produisant les conditions particulières, que l'association [16] avait souscrit auprès de la Macif, qui le reconnaît, un contrat d'assurance 'multigarantie activités sociales'.



Il n'est pas discuté que cette police correspondait à l'assurance de responsabilité civile que les associations sportives sont légalement tenues de souscrire en vertu de l'article L.321-1 du code des sports.



Elle vise la 'responsabilité civile générale' parmi les responsabilités assurées.



Ainsi que l'a pertinemment retenu le premier juge, monsieur [E] et monsieur [O] étant l'un et l'autre adhérents de l'association au jour de l'accident, et donc légalement considérés comme des tiers entre eux en application du susdit article L.321-1, cette police couvre la responsabilité civile des adhérents et donc le dommage causé à M. [E] par le vélo dont M. [O] avait la garde.



La Macif, qui ne produit ni les conditions générales ni l'intégralité des conditions particulières du contrat, ne justifie pas de son affirmation selon laquelle l'association, en contravention avec son obligation légale, aurait souscrit un contrat subordonnant la garantie de la responsabilité civile des adhérents à la caractérisation d'une faute imputable au souscripteur.



Quant à son affirmation fondant son refus de garantie selon laquelle le contrat ne couvrirait la responsabilité civile de l'association des Gentlemen d'Aunis que pour les dommages causés aux tiers, elle n'est pas vérifiée, et inopérante puisqu'en vertu de l'article L.321-1 du code des sports, les adhérents d'une association sont légalement considérés comme des tiers entre eux.



La compagnie Macif n'est ainsi pas non plus fondée à prétendre ne mobiliser qu'une garantie 'dommages corporels dus à un accident' bénéficiant à tout adhérent, mais ne couvrant que certains postes de préjudices corporels.



Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a dit que la Macif était tenue de réparer l'intégralité des dommages subis par M. [E],



* sur la garantie recherchée par M. [O] de Thélem assurances



[X] [O] a la qualité d'assuré du contrat 'multirisque habitation F2' que son épouse a souscrit le 29 novembre 2016 auprès de la compagnie Thélem assurances.



Celle-ci a reconnu aux termes d'une mention figurant en caractères apparents et lisibles juste au-dessus de l'emplacement où elle a apposé sa signature, avoir reçu un exemplaire des dispositions générales et leurs documents annexés.



Aucun élément ni indice ne permet de retenir qu'il ne s'agirait pas des dispositions générales que la compagnie Thélem Assurances verse en pièce n°2, portant en dernière page l'indication de date d'impression '03/2015', soit l'année précédente, de telles dispositions générales n'étant pas nécessairement ré-imprimées, modifiées ou actualisées chaque année.



Ces dispositions générales énoncent en leur page 33 dans un cartouche mis en exergue par des caractères gras inscrits dans un fond vert qui tranche sur le blanc du reste de la page :

'En plus des exclusions générales prévues au § 5, nous ne garantissons pas au titre des garanties des § A1, A2 et A3 :

(.....)

* les dommages résultant :

(....)

° de la pratique de sports aériens et de sports comportant l'utilisation de véhicules à moteur,

° de la pratique d'activités sportives à titre amateur dans le cadre d'une association, d'une société ou d'une fédération sportive visée par l'article L.321-1 du Code du Sport,

(.....)..'.



Cette clause, bien apparente, exclut donc la garantie des dommages résultant de la pratique d'activités sportives à titre amateur dans le cadre d'une association, ce qui est exactement le cas des dommages causés à [K] [E] par le vélo dont [X] [O] avait la garde durant la randonnée cycliste à laquelle ils participaient tous deux, sans qu'il puisse être utilement soutenu

-ni que cette randonnée d'environ quatre-vingt kilomètres, par groupe de niveau, ne relèverait pas d'une activité sportive mais d'une activité de loisir ou de tourisme

-ni que la notion d'activités sportives à titre amateur nécessiterait une interprétation incompatible avec le caractère formel et limité requis d'une clause d'exclusion, alors qu'elle désigne clairement et communément l'activité sportive exercée dans un cadre non professionnel, comme ici celles de MM. [E] et [O]

-ni que la clause d'exclusion invoquée par Thélem assurances viderait de toute substance la garantie, alors que la clause laisse dans le champ de la garantie tous les dommages engageant la responsabilité civile de l'assuré autres que relevant du champ, spécifique, de l'exercice d'une activité sportive en amateur, laquelle relève communément de polices spécifiques, tant ouvertes aux sportifs amateurs que relevant de l'obligation de souscription pesant légalement sur les associations et fédérations sportives.



Cette clause d'exclusion, apparente, formelle et limitée, est valable, et la compagnie Thélem est fondée à l'invoquer pour dénier sa garantie.



Le jugement sera ainsi infirmé en ce qu'il l'a condamnée à garantir [X] [O] des condamnations prononcées à son encontre.





* sur les demandes de la CPAM de Charente-Maritime



Il est pris acte de ce que la CPAM 17 déclare au visa du protocole du 24 mai 1983 afférent aux accidents entre cyclistes,se désister de sa demande visant à obtenir le remboursement des prestations versées et la prise en charge de l'indemnité forfaitaire de gestion, et de ce qu'elle demande à la cour d'infirmer le chef de décision du jugement qui lui a alloué une provision de 74.937,09 à valoir sur ses débours, ce à quoi nulle partie succombante ne s'oppose -M [O] sollicitant même au contraire l'infirmation des condamnations prononcées contre lui au profit de la caisse- et à quoi il sera donc fait droit, pour cette somme ainsi que pour celle de 1.114 euros puisque la demande dont elle déclare se désister porte aussi sur la prise en charge de l'indemnité forfaitaire de gestion.



Il n'y a pas lieu, dans ces conditions, de lui allouer l'indemnité qu'elle sollicite devant la cour à hauteur de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



Au vu de l'état provisoire de débours actualisé au 1er septembre 2022 qu'elle produit, d'un montant total de 114.084,41 euros, et en l'absence d'opposition d'aucune partie à cette prétention, il sera fait droit à sa demande tendant à voir, en dehors de toute condamnation, fixer à cette somme sa créance provisionnelle actualisée au 1er septembre 2022.



* sur la demande d'évocation formulée par [K] [E]



Aux termes de l'article 568 du code de procédure civile, lorsque la cour d'appel infirme ou annule un jugement qui a ordonné une mesure d'instruction ou qui, statuant sur une exception de procédure, a mis fin à l'instance, elle peut évoquer les points non jugés si elle estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive, après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction.



La faculté d'évocation est ainsi légalement encadrée, et limitée aux cas, étrangers à la présente cause, d'un appel portant sur un jugement qui a ordonné une mesure d'instruction ou statué sur une exception de procédure.



La demande d'évocation formulée par M. [E], qui n'est pas irrecevable en application des articles 565 et 566 du code de procédure civile, sera rejetée.

* sur les demandes de provisions



Les provisions allouées par le tribunal à la victime sont pertinentes et adaptées au vu de la part non sérieusement contestable de l'indemnisation qu'appellent les lésions dont fait état le rapport déposé le 27 août 2020 par l'expert judiciaire [C], seul à considérer en l'absence d'évocation, et le jugement sera également confirmé de ce chef.



* sur la demande subsidiaire d'expertise comptable



La cour n'évoquant pas, l'appréciation du préjudice économique de la victime relève du premier juge, et la demande d'expertise comptable est sans objet devant la cour.



* sur la demande de restitution des sommes versées en exécution des chefs infirmés du jugement



Le présent arrêt, infirmatif des condamnations au paiement d'une provision, aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure, prononcée à son encontre, constitue, pour la société Thélem assurances, un titre exécutoire suffisant pour recouvrer les sommes qu'elle a versées en vertu de l'exécution provisoire attachée à cette décision, et il n'y a pas lieu, comme elle demande, de prononcer condamnation à lui restituer ces sommes.



* sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile



Les chefs de décision du jugement afférents aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile sont pertinents et adaptés, sauf en ce qu'ils prononcent condamnations à ce titre à l'encontre de la société Thélem assurances.



Le jugement sera ainsi réformé en ce qu'il a condamné ladite compagnie aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure, sans que l'équité justifie de lui allouer une indemnité au titre de ses frais irrépétibles de première instance ni d'appel.



Au vu du sens du présent arrêt, M. [O], qui sollicitait la condamnation de Thélem assurances à le garantir, succombe sur l'appel de cette compagnie.

Il supportera donc les dépens de première instance afférents à la mise en cause de Thélem assurances et les dépens d'appel.

L'équité justifie de ne pas mettre d'indemnité de procédure à sa charge en cause d'appel.





PAR CES MOTIFS

la cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

dans les limites de l'appel :



CONSTATE que M. [E] déclare se désister de l'incident dont il avait saisi le conseiller de la mise en état



DONNE ACTE à la CPAM 17 de ce qu'elle déclare se désister de sa demande visant à obtenir le remboursement des prestations versées et la prise en charge de l'indemnité forfaitaire de gestion



DÉCLARE recevable la demande d'évocation formulée par M. [K] [E]



CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il condamne la société Thélem assurances à garantir M. [X] [O] des condamnations prononcées à son encontre, aux dépens et à payer une indemnité de procédure à la CPAM 17, et sauf en ce qu'il alloue une provision et une indemnité forfaitaire de gestion à la CPAM 17



statuant à nouveau de ces chefs :



DIT la société Thélem assurances fondée à opposer à son assuré [X] [O] la clause d'exclusion de garantie stipulée au contrat d'assurance



REJETTE toutes demandes dirigées contre la société Thélem assurances



ajoutant :



FIXE à 114.084,41 euros le montant provisionnel actualisé au 1er septembre 2022. de la créance de la CPAM 17 au titre de ses débours relatifs

à l'accident dont [K] [E] a été victime le 3 mars 2019



DIT n'y avoir lieu à évocation





REJETTE la prétention de la société Thélem assurances à voir prononcer condamnation à lui restituer les sommes qu'elle a versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement entrepris



REJETTE toute demande autre ou contraire



CONDAMNE M. [X] [O] à supporter les dépens de première instance afférents à la mise en cause de Thélem assurances



LE CONDAMNE aux dépens d'appel



REJETTE toutes les demandes fondées sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile.









LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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