4 avril 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-18.822

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2024:C100171

Titres et sommaires

CAUTIONNEMENT - Caution - Recours contre le débiteur principal - Recours personnel - Exercice - Procédure de surendettement - Mesures de rééchelonnement des dettes du débiteur - Opposabilité à la caution (non)

Les mesures de rééchelonnement des dettes du débiteur par un plan de surendettement ne sont pas opposables à la caution qui, ayant payé le créancier après l'adoption du plan, exerce son recours personnel.

Texte de la décision

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 4 avril 2024




Cassation partielle


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 171 F-B

Pourvoi n° P 22-18.822




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 4 AVRIL 2024

La société Compagnie européenne de garanties et cautions (CEGC), société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° P 22-18.822 contre l'arrêt rendu le 11 mai 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 6), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [Y] [G] [P], épouse [B] [S],

2°/ à M. [O] [B] [S],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de la SAS Hannotin Avocats, avocat de la société Compagnie européenne de garanties et cautions, après débats en l'audience publique du 13 février 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 mai 2022), suivant offre acceptée le 18 juin 2006, la société Caisse d'épargne Ile-de-France [Localité 2] (la banque) a consenti à M. et Mme [B] [S] un prêt immobilier d'un montant de 208 000 euros remboursable en 300 mensualités, garanti par le cautionnement de la société Compagnie européenne de garanties et cautions (la caution).

2. Une commission de surendettement des particuliers a adopté un plan de règlement échelonné des dettes de Mme [B] [S] à compter du 31 juillet 2015 incluant la créance de la banque.

3. Les 22 mars, 12 avril et 12 mai 2016, la banque a mis en demeure M. [B] [S] de s'acquitter des échéances impayées, puis a informé les deux époux qu'à défaut de régularisation elle avait prononcé la déchéance du terme.

4. Après avoir payé à la banque les sommes réclamées, la caution a assigné les emprunteurs en remboursement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La caution fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de paiement contre Mme [B] [S], alors « que lorsque la caution exerce son recours personnel après paiement, le débiteur ne peut pas lui opposer les exceptions et moyens de défense dont il aurait disposé à l'égard du créancier ; qu'au cas présent, la CEGC (caution) ayant payé la dette des époux [B] [S], elle ne pouvait se voir opposer, dans l'exercice de son recours personnel contre les débiteurs, l'exception tirée de l'existence d'un plan de surendettement bénéficiant à Mme [B] [S] (codébitrice) ; qu'en jugeant néanmoins que la demande de la CEGC à l'encontre de Mme [B] [S] aurait été irrecevable au motif qu'un plan de surendettement lui bénéficiait, ce qui interdirait à la banque de prononcer la déchéance du terme à son encontre, la cour d'appel, qui a donné force à une exception née de la relation entre la codébitrice en cause et le créancier, a violé l'ancien article 2305 du code civil, devenu l'article 2308 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 2305 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 :

6. Il résulte de ce texte que lorsque la caution exerce son recours personnel après paiement, le débiteur ne peut pas lui opposer les exceptions et moyens de défense dont il aurait disposé à l'égard du créancier.

7. Pour rejeter la demande de la caution dirigée contre Mme [B] [S], l'arrêt retient que celle-ci bénéficiait d'un plan de surendettement homologué en application duquel la créance de la banque faisait l'objet d'un échéancier qui était respecté.

8. Il en déduit que la déchéance du terme ne pouvait être prononcée à l'égard de Mme [B] [S] et que les demandes de la caution ne peuvent être accueillies à son encontre.

9. En statuant ainsi, alors que les mesures de rééchelonnement des dettes de la débitrice par un plan de surendettement ne sont pas opposables à la caution qui, ayant payé le créancier après l'adoption du plan, exerce son recours personnel, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société Compagnie européenne de garanties et cautions contre Mme [B] [S], condamne la société Compagnie européenne de garanties et cautions à payer à Mme [B] [S] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il statue sur les dépens, l'arrêt rendu le 11 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne Mme [B] [S] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.

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