4 avril 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-23.040

Première chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2024:C100167

Titres et sommaires

SUBROGATION

Il résulte des articles 1251, 3°, et 1252 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que la subrogation transmet à son bénéficiaire, dans la limite de ce qu'il a payé, la créance et ses accessoires, à l'exception des droits exclusivement attachés à la personne du créancier lesquels incluent la faculté pour le prêteur d'exiger le remboursement anticipé de toutes les sommes restant dues au titre du prêt en cas de non paiement à son échéance, par l'emprunteur, d'une somme devenue exigible au titre du contrat de prêt

Texte de la décision

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 4 avril 2024




Cassation partielle


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 167 FS-B

Pourvoi n° Y 22-23.040




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 4 AVRIL 2024

1°/ M. [V] [P] [I], domicilié [Adresse 1],

2°/ la société Cabinet [V] [P] [I], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° Y 22-23.040 contre l'arrêt rendu le 20 octobre 2022 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dans le litige les opposant à la société Interfimo, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. [I], de la société Cabinet [V] [P] [I], de la SCP Richard, avocat de la société Interfimo, et l'avis de Mme Cazaux-Charles, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 février 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, MM. Hascher, Bruyère, Ancel, Mmes Peyregne-Wable, Tréard, conseillers, Mmes Kloda, Robin-Raschel, conseillers référendaires, Mme Cazaux-Charles, avocat général, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 20 octobre 2022), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 16 février 2022, pourvoi n° 20-22.434), le 11 septembre 2013, la société Crédit lyonnais (la banque) a consenti à la société Cabinet [V] [P] [I] (l'emprunteur) un prêt professionnel, garanti par l'engagement de caution de la société Interfimo (la caution). Le 27 juillet 2013, M. [I] (la sous-caution) s'était porté caution solidaire envers la caution.

2. A la suite de la défaillance de l'emprunteur, la caution a payé à la banque diverses échéances impayées puis, après vaines mises en demeure de remboursement adressées à l'emprunteur et à la sous-caution, le solde des sommes restant dues au titre du prêt.

3. La caution a assigné l'emprunteur et la sous-caution en paiement au titre de sa quittance subrogatoire.

4. L'emprunteur et la sous-caution ont assigné la caution en responsabilité et indemnisation en faisant valoir que la déchéance du terme avait été irrégulièrement prononcée. Les instances ont été jointes.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. L'emprunteur et la sous-caution font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors « que ne peut être transmise au bénéficiaire de la subrogation légale la clause du contrat permettant au prêteur de prononcer la déchéance du terme en cas de non-paiement d'une échéance du prêt, s'agissant d'un droit exclusivement attaché à la personne du créancier et non d'un accessoire de la créance, lequel s'entend exclusivement d'un droit destiné à prémunir le créancier contre la défaillance de son débiteur ; qu'en décidant au contraire, pour juger que la société Interfimo avait pu, sans faute, prononcer la déchéance du terme du prêt contracté par l'emprunteur, qu'ayant payé à l'établissement de crédit les 9 échéances mensuelles que l'emprunteur avait laissé impayées, la société Interfimo pouvait légitimement prétendre à la subrogation légale dans tous les droits principaux et accessoires que le prêteur tenait du contrat dont celui d'exercer la faculté de prononcer la déchéance du terme, quand cette faculté, accordée au profit exclusif du prêteur de deniers, ne constituait pas un accessoire de la créance payée par la société Interfimo, la cour d'appel a violé l'article 1251 du code civil, dans sa version applicable au litige, ensemble l'article 1346-4 nouveau du même code. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1251, 3°, et 1252 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

6. Aux termes du premier de ces textes, la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter.

7. Selon le second, la subrogation ne peut nuire au créancier lorsqu'il n'a été payé qu'en partie ; en ce cas, il peut exercer ses droits, pour ce qui lui reste dû, par préférence à celui dont il n'a reçu qu'un paiement partiel.

8. Il résulte de ces textes que la subrogation transmet à son bénéficiaire, dans la limite de ce qu'il a payé, la créance et ses accessoires, à l'exception des droits exclusivement attachés à la personne du créancier lesquels incluent la faculté pour le prêteur d'exiger le remboursement anticipé de toutes les sommes restant dues au titre du prêt en cas de non paiement à son échéance par l'emprunteur d'une somme devenue exigible au titre du contrat de prêt.

9. Pour rejeter les demandes indemnitaires de l'emprunteur et de la sous-caution, l'arrêt retient que la caution, qui avait réglé diverses échéances impayées par l'emprunteur, pouvait prétendre à la subrogation légale dans tous les droits principaux et accessoires que la banque tenait du contrat dont celui d'exercer la faculté de prononcer la déchéance du terme.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de dommages-intérêts de la société Cabinet [V] [P] [I] et de M. [I], et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 20 octobre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la société Interfimo aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Interfimo et la condamne à payer à la société Cabinet [V] [P] [I] et à M. [I] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.

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